Citations sur Les Brumes du Sortchor, tome 1 : Origines Obscures (10)
Je l'observai attentivement. Elle ne souriait pas. Les rares fois où elle avait été si sérieuse et si morne, c'était lorsqu'elle faisait de violentes migraines, et encore. Je sentais bien que les derniers événements l'avaient irrémédiablement changée. Elle mettrait du temps à redevenir comme avant, pourtant, elle parvenait à masquer son malaise aux autres : elle souriait au plus grand nombre, semblait ravie lorsqu'une bonne nouvelle frappait ; les élèves du monastère étaient sûrs que ce mariage était heureux. Mais lorsqu'on l'avait connu comme moi, on se rendait compte que ses sourires étaient comme fanés.
Ce besoin de connaître son passé et celui de ses parents, lui aussi l'avait connu... Il comprenait bien ce que Sôtô ressentait, mais il n'avait jamais osé rien dire de son passé. Il avait toujours eu peur que ses enfants ne le jugent... Mais il valait mieux que son fils apprenne par lui ce qu'avait été sa vie... Il savait mieux que quiconque que les gens manquaient d'objectivité, et il refusait que Sôtô soit aussi déçu que lui l'avait été en apprenant le passé de ses parents.
Jeune homme, ce qui fait de nous ce que nous sommes, ce sont nos actes, pas nos intentions.
Le présent ayant pas grand-chose de joyeux, nous parlons surtout du passé, de l'époque où nous étions tous ensemble au monastère.
J'allais perdre la seule famille que je n'avais jamais eue. Je la considérais depuis très longtemps comme ma mère, sa présence me rassurait.
J'avais la désagréable sensation qu'on essayait de faire de moi un assassin, et ça, c'était hors de question, s'il y avait bien une chose que j'avais appris au cours de ces dernières années c'étais que la vie été trop précieuse pour être sacrifiée inconsidérément.
– Tu vois son verre ?
– Oui…
– Il contient un des poisons étudié cette année. Trouve lequel est crée l'antidote, sinon elle mourra
– Je ne savais pas que mes parents étaient des héros… Je croyais qu'ils étaient des esclaves…
– Est-ce que ça ira, Élizabeth ? demanda l'homme en noir.
– Oui. Merci Madara... »
Tchakkari se tourna vers elle en souriant. Ce n'était pas un sourire mauvais ni même sarcastique comme à l'accoutumée. C'était un doux sourire qui le rendait étrangement moins laid.
« De rien », lui répondit-il d'une voix relativement agréable.
Je me rendis soudain compte que c'était la première fois que j'entendais quelqu'un remercier cet homme froid et cruel, que ce soit pour ses cours, pour les soins qu'il pratiquait ou pour les informations qu'il livrait, personne ne s'était jamais dit que des remerciements pourraient lui faire plaisir... J'étais sûr qu'en fait, personne ne pensait qu'il pouvait ressentir des sentiments quel qu'ils soient...
Je me haïssais et je n'avais qu'une envie, qu'on me déteste. Ce sentiment s'était encore accentué depuis que j'étais ici. Je ne pensais presque plus aux miens, peu importait ce que je faisais, je ne ressentais aucun remords, et lorsque ce sentiment de honte refaisait surface, je me minais la tête en buvant jusqu'à en oublier de penser, jusqu'à ce que mes tourments disparaissent, emportés par le courant de mes excès. Ici, j'étais apprécié. Mis à part les matins, je n'étais plus jamais seul. Pourtant, j'étais bien plus solitaire que jamais