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EAN : 9782849411841
354 pages
François Bourin (17/05/2010)
2/5   3 notes
Résumé :
Fin des années 1970: les nouveaux philosophes " envahissent les médias. Ils s'appellent André Glucksmann, Maurice Clavel, Jean-Marie Benoist, et surtout Bernard-Henri Lévy.

Ils seront bientôt suivis d'amis proches sur le plan idéologique dont, au premier rang, Alain Finkielkraut et Pascal Bruckner.

Trente ans plus tard, que reste-t-il de leur réflexion ?

Si les membres de ce courant ont incontestablement marqué la scèn... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
A l'heure où Luc Ferry propose sans sourciller que l'on tire sur les gilets jaunes manifestant leur colère et qu'on leur envoie l'armée pour les mater, il est peut-être opportun de revenir sur cette figure de l'intellectuel médiatique qu'il incarne avec d'autres personnalités comme Bernard-Henri Lévy ou Alain Finkielkraut. C'est à l'analyse de cette figure omniprésente dans le paysage médiatique d'aujourd'hui que s'attache le livre de Daniel Salvatore Schiffer, Critique de la déraison pure, la faillite intellectuelle des 'nouveaux philosophes' et de leurs épigones.


Daniel Salvatore Schiffer ne prétend pas faire de révélations. Aude Lancelin, journaliste et agrégée de philosophie, a déjà démasqué à plusieurs reprises l'imposture BHL, notamment lorsque celui-ci se compromettait dans l'affaire Botul.

Affaire qui ne manque pas de piquant puisqu'il s'avère que l'auteur de de la guerre en philosophie (2010) prend appui sur la critique de Kant que faisait un certain Jean-Baptiste Botul. Seul problème, de taille, celui-ci n'a jamais existé, puisqu'il s'agit d'un canular monté de toute pièce par Frédéric Pagès, et révélé de longue date ! La moindre recherche sérieuse aurait permis à Bernard-Henri Lévy de s'en rendre compte. On réalise donc rapidement que le personnage ne se soucie guère de vérifier ses sources et de nombreuses autres erreurs d'écoliers semblables parsèmeront ses oeuvres comme nous le montrera cet essai.

Autre pépite sur laquelle démarre cet ouvrage, cette citation d'American Vertigo (2006), ouvrage de Bernard-Henri Lévy qui prétend y décrire « la réalité ontologiquement diverse » de l'Amérique profonde, « sur les pas d'Alexis de Tocqueville ». On peut y lire sa visite à Sharon Stone : « Elle déplie ses jambes, les replie, tire le bas de sa jupe d'un geste de coquette qui aurait pris le parti de la vertu, pousse un profond soupir, prend son temps et me lance un regard courroucé ». D'une profondeur ontologique incroyable, en effet !

Trêve de plaisanterie, l'auteur ne veut pas se limiter à ces piques trop faciles. Il entend centrer sa critique sur les idées philosophiques. Ce qui relève d'une certaine forme de courage car cela signifie évidemment se fader toute la bibliographie de ce triste sire (et la bête est prolixe !) et de quelques autres gravitant dans son orbite (André Glucksmann, Jean-Marie Benoist, Alain Finkielkraut, Maurice Clavel) ! Tristes sires regroupés sous un vocable auto-décerné au moment de leur premier essor dans les années 70 : les « nouveaux philosophes ».


Les nouveaux philosophes
Les nouveaux philosophes se posent donc comme une nouvelle mouture de l'intellectuel engagé. Ils déclarent vouloir s'émanciper du poids de la philosophie marxiste, partout prégnante dans les universités durant les années 70, philosophie à laquelle ils avaient pour la plupart adhéré. On rappellera à bon escient que Lévy fut trotskiste dans sa prime jeunesse, tandis que Glucksmann et Finkielkraut furent tous deux maoïstes.

Ces nouveaux philosophes s'insurgent donc contre les grandes idées abstraites qui ont pu produire le totalitarisme (communisme et nazisme). Ils revendiquent « un statut de résistant plus que de missionnaire » et entendent incarner la conscience critique de leur temps. Plus question de s'enthousiasmer pour de grands idéaux, Bernard-Henri Lévy prône un programme essentiellement défensif, « une sorte de morale provisoire post-cartésienne », comme le dit Daniel Salvatore Schiffer, faisant là un étrange rapprochement avec les propos de Camus tenus en 1957 : « Chaque génération, sans doute, se croit vouée à refaire le monde. La mienne sait pourtant qu'elle ne le fera pas. Mais sa tâche est peut-être plus grande. Elle consiste à empêcher que le monde se défasse. »

Beau programme s'il en est, si ce n'était que le masque tombe assez rapidement comme nous le donne à voir Daniel Salvatore Schiffer.

Car une fois accomplie l'oeuvre de démystification du politique (dont l'acte de naissance est La Barbarie à visage humain de BHL en 1977), il aura bien fallu reconstruire. Ce à quoi s'attache dès 1979 le Testament de Dieu.

Contre toute attente, les idées religieuses retrouvent leur place sur le trône philosophique. C'est l'affirmation de la Bible (judaïque) comme référence fondamentale. A tel point que le nouveau philosophe en arrive à évoquer « une guerre métaphysique entre Athènes et Jérusalem » ! Et on va très loin dans la substitution puisque Bernard-Henri Lévy affirme sans sourciller que la démocratie est une invention juive et non pas grecque.

Daniel Salvatore Schiffer peut alors ironiser : « oublier Athènes, pour ne retenir que Jérusalem, ce qui s'avérait de toute façon très difficile pour un philosophe occidental normalement constitué, sinon à renier sa propre culture et mépriser ses propres références. »

Critique de la barbarie à visage humain
La barbarie à visage humain est l'oeuvre qui aura propulsé Bernard-Henri Lévy sur le devant de la scène médiatique.

Pourtant, aux dires de Philippe Cohen, tous les pronostics de cet essai se sont révélés faux. Bernard-Henri Lévy y affirmait le retour d'un totalitarisme absolu en URSS dans les années 80 (!)... un retour hégémonique de la science marxiste dans les années 80 (!)... Et le fascisme triomphant en Amérique du Sud alors qu'en Argentine et au Chili, les régimes vont tomber (!)...

Alors que Bernard-Henri Lévy n'a aucune crédibilité auprès du corps enseignant, comment expliquer le succès éditorial de ce livre ?

Daniel Salvatore Schiffer reprend ici les propos de Régis Debray : « puisque le marché fait loi et que l'université n'a plus le monopole des légitimités intellectuelles, il n'est pas du tout déraisonnable de faire ouvertement l'impasse sur l'avis de deux mille professionnels en leur opposant un million de lecteurs de magazines et dix millions de téléspectateurs. »

L'intelligence du propos n'est plus de rigueur. Il faut désormais faire sensation. Puisque c'est ce que demande le marché. L'auteur constate avec regrets que le terme intellectuels « désigne en France le petit nombre de professionnels de l'indignation à vernis philosophique » tout en mettant en garde contre une « dérive, inhérente au discours comme aux pratiques de la nouvelle philosophie, mais qui fera, ensuite, le lit mortuaire d'une bonne partie de l'intelligentsia française. »


En 1981, Bernard-Henri Lévy publie L'idéologie française. Continuant à proférer avis cinglant et sans nuance, Bernard-Henri Lévy s'adonne à une critique totalement infondée de l'école d'Uriage. Laissant entendre par ses propos que toute la France était viralement antisémite, il crache ainsi sur la mémoire de tous ceux qui avaient pu sacrifier leur confort, et parfois leur vie, pour sauver celles de leurs amis juifs. On imagine que de tels propos, même prononcés presqu'un demi-siècle après les faits, aient provoqué un tollé, voir un scandale médiatique dont Bernard-Henri Lévy a largement bénéficié...

On réalise que l'on a à faire à « un auteur pour qui le mépris des faits est consubstantiel aux nécessités de sa démonstration » (Pierre Nora cité dans Les Francophobes, de David Martin-Castelnau)

Un échantillon du type de pensée proprement béhachélien où toute forme de nuance est exclue.



Daniel Salvatore Schiffer constate que tout se passe « comme si, ne pouvant décidément pas vivre, idéologiquement, sans en appeler à l'idéologie d'un pays, voire d'un bloc militaire, il était allègrement passé, après son fameux virage de cuti, mais sans s'être toutefois jamais départi de son manichéisme foncier, d'un empire politico-culturel à un autre... l'impérialisme capitaliste après l'impérialisme communiste... »

Et l'auteur de nous apprendre, textes à l'appui, que Bernard-Henri Lévy pris clairement et sans nuance, parti pour l'Amérique, Israël, et lors de la guerre en ex-Yougoslavie pour les Bosniaques, etc. C'est ainsi que Bernard-Henri Lévy et ses compères, en guise de nouvelle philosophie, ne font que ressasser de vieilles idéologies surannées.


A ce stade on regrette cependant que l'auteur préfère la multiplication de citation à l'argumentation rationnelle. On réalise qu'aux propos des nouveaux philosophes sont systématiquement opposés des citations de divers auteurs hostiles. On attendra, en vain, une argumentation conséquente, pied à pied, contre les arguments de ces beaux parleurs. Par exemple, lorsque Bernard-Henri Lévy affirme son amour des médias (ceux-ci rendent plus vrais, plus concrets, plus proches de nous les informations, l'histoire, etc.), Daniel Salvatore Schiffer se garde de répondre sur ce point. Il lui oppose simplement l'autorité d'un Debord (La Société du spectacle) ou d'un Bourdieu, sans même prendre la peine d'argumenter.
L'enquête donc se poursuit, sinon à coup d'arguments, du moins à base de citations. Elle souligne alors un lien étrange et perturbant entre Bernard-Henri Lévy et Michel Foucault. Ce lien semble s'établir certes sur une incompréhension des idées de Foucault de la part de Bernard-Henri Lévy, mais pas seulement.

Se rangeant à l'avis de l'historien américain Michael Christofferson3, Daniel Salvatore Schiffer estime que Michel Foucault encensa les nouveaux philosophes en raison de son anticommunisme. Les nouveaux philosophes développaient en effet un discours radicalement pessimiste où le Mal est inscrit anthropologiquement au coeur de l'homme, discours qui ne pouvait aboutir, selon l'auteur, qu'à une idéologie résolument de droite.

Pour autant les analyses rigoureuses du pouvoir par Foucault ne pouvaient guère s'accorder avec les idées d'un Glucksmann par exemple.

Ce rapprochement est somme toute incompréhensible si l'on ne suppose pas une aspiration à la renommée médiatique chez M. Foucault. Daniel Salvatore Schiffer constate que Les Mots et les Choses de Foucault fut un best-seller en 1966. Cette récente célébrité culturelle contribua à son élection au Collège de France. Or, en 1976, La Volonté de savoir est beaucoup moins bien accueillie. Et ce n'est autre qu'André Glucksmann qui en fera des éloges dithyrambiques.


L'intellectuel médiatique.
Allant plus loin, Daniel Salvatore Schiffer voit dans l'intellectuel spécifique de Foucault un illustre prédécesseur de l'intellectuel médiatique. Là aussi, il s'agit de lutter contre l'ambition totalisante des philosophes, contre l'intellectuel universel qui avait jusqu'alors prédominé dans les milieux philosophiques. Ce qui semble rapprocher Michel Foucault et les nouveaux philosophes. Pourtant, cette définition est à mille lieux de ce que Bernard-Henri Lévy défend, dans La fin des intellectuels ? par exemple, où il déclare grosso modo : pas d'intellectuel digne de ce nom sans pari sur l'universel.

Il reste encore une filiation qui interroge :

Aux yeux de Daniel Salvatore Schiffer, Foucault se compromit par son soutien inconditionné, aussi absurde qu'incompréhensible, à l'Ayatollah Khomeiny. En multipliant les articles sur la révolution iranienne, Foucault venait d'inventer le « journalisme intellectuel ». Il venait d'inventer, au même moment que l'essor des nouveaux philosophes, fin des années 70, le « reportage d'idées », expression qui fera fortune auprès des nouveaux philosophes justement.

N'y a-t-il pas là filiation de l'intellectuel journalistique à l'intellectuel médiatique ?

L'auteur se demande également si ce reportage d'idées ne préfigure pas ce que Bernard-Henri Lévy nommera 25 ans plus tard le romanquête. Nom qu'il donne à son oeuvre Qui a tué Daniel Pearl ?, Dans ce livre, il remet en scène la mort du journaliste décapité au Pakistan par des fanatiques, en prenant de larges libertés pour rendre le document plus attrayant, plus commercialisable.

Confusion de registres, amalgame entre la démarche du journaliste et la méthode du philosophe, tout y passe. La question qui est ici sous-entendue : est-ce que Foucault aurait renier cela ?



De la Guerre
Une bonne partie de l'exposé est consacré au thème de la Guerre. Bernard-Henri Lévy lui consacre un ouvrage en particulier : Reflexions sur la Guerre, le Mal et la Fin de l'histoire (2001).

Il y considère, comme d'ailleurs ces amis nouveaux philosophes, que le Mal est intrinsèque à l'homme. Sur ce point, ils apportent une réponse tout autant manichéenne que ceux qu'ils pensaient critiquer : à chaque conflit, ils prennent parti pour l'un ou l'autre camp de manière aussi inconditionnelle qu'absurde. Bernard-Henri Lévy soutient systématiquement l'Etat d'Israël, même lorsque celui-ci se rend coupable de massacre de civils. Lors du conflit en ex-Yougoslavie, ce va-t-en-guerre alla jusqu'à réclamer la levée de l'embargo sur les armes dans cette région ! Glucksmann n'est pas en reste, soutenant la guerre en Irak, puis les Tchétchènes.

C'est lors de la guerre dans les Balkans que les nouveaux philosophes s'illustrent dans les médias, font parler d'eux, invectiv à tout va, lancent des anathèmes sur anathèmes.


En 1994, Bernard-Henri Lévy monte avec ses amis une liste d'intellectuels pour les élections européennes : « L'Europe commence à Sarajevo ». Liste dont, ses amis et lui, se désisteront peu avant l'échéance. Elle ne rassemblera que 1,7% des suffrages. Un véritable fiasco.

L'affaire aurait mérité une réflexion sur le sens de l'engagement intellectuel, notamment après l'échec du communisme. Mais en lieu et place, on a, encore, le droit à diverses avis sur la question.

Et lorsqu'une réflexion sur l'engagement s'annonce : « C'est de la légitimité même, du bien-fondé de cette notion d'engagement […] essentiel dans l'histoire des intellectuels, qui nous intéresse vraiment dans cette Critique de la déraison pure », on doit se contenter d'un simple sermon sur les généralisations abusives dont auraient été coupables les nouveaux philosophes.

Alors que l'auteur, quelques chapitres plus haut, proscrivait aux nouveaux philosophes toute comparaison entre la Shoah et les exactions serbes, car cela revenait à banaliser la première et à verser dans un révisionnisme malsain, il fait alors, étrangement, un parallèle entre la culpabilisation des juifs et celle des serbes.

Quid donc d'une argumentation qui prend appui sur ce qui a été récusé quelques pages plus haut ? A force d'opinions provenant de différents horizons, il fallait s'attendre à quelque incohérence. Dommage que ce soit justement au moment clé de la démonstration.

Mais ce n'est pas tout.

L'auteur, dans un drôle de renversement des rôles, en vient à évoquer un antiserbisme, une serbophobie, qu'il compare à l'antisémitisme de l'époque de l'entre-deux guerres :

« Les Serbes d'alors semblaient remplir la même fonction, de par le monde, jouer le même rôle – celui de bouc émissaire ou de corps expiatoire – que celui, certes toutes proportions gardées et sans vouloir verser en un révisionnisme de mauvais aloi, des Juifs d'hier. D'où, tant le préjugé était immense, enraciné au plus profond des consciences, une certaine serbophobie... »

Pour avoir vécu ces années-là (les années 90), il ne me semble pas qu'il y avait une haine, même de loin comparable, à l'encontre des serbes autour de nous. Effroi et colère envers une guerre aux nationalismes exacerbés, peut-être une peur face au seul de nom d'un Milosevic, mais de haine antiserbe, peu.

Sans doute sa critique porte-t-elle sur les intellectuels comme Bernard-Henri Lévy, mais alors quid d'une réflexion sur l'engagement des intellectuels en partant d'illustres intellectuels de pacotille comme ces nouveaux philosophes ?


Critique de la Critique
Au final, cette Critique de la déraison pure s'avère quelque peu décevante. En dehors de reprocher à Bernard-Henri Lévy de s'appuyer sur les arguments d'un philosophe qui s'avère ne pas exister (affaire Botul) et de présenter une confusion entre Rimbau
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BHL, ce faux dandy

Il faut beaucoup d'imagination, alliée à une encore plus singulière dose d'ignorance en la matière, pour se piquer de transformer Bernard-Henri Lévy en un dandy, fût-il de « cendre » comme l'écrivait, à son endroit, François Mitterrand dans L'Abeille et l'Architecte. C'est pourtant là ce que fait Renaud Girard dans le très complaisant portrait qu'il dresse, par-delà la fausse note critique de son titre, dans le Figaro de ce 6 février 2010 : BHL, le dandy le plus détesté de France, ose-t-il titrer son papier, voué tout entier, comme bien d'autres, à tresser les lauriers de la désormais très brinquebalante couronne béachélienne.
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Certes BHL en a-t-il, par certains aspects extérieurs, l'apparence. Mais l'apparence seulement, clinquante et superficielle, arrogante et présomptueuse, dogmatique et manichéenne, plus proche du richissime flambeur - sa fortune personnelle le lui permet - que d'un être réellement flamboyant.
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Les grands et véritables dandys, les dandys historiques tels Brummell, Byron, Wilde ou Baudelaire, n'avaient d'ailleurs que faire, eux, de l'argent, qu'ils méprisaient et brûlaient aussi vite, à l'image de Serge Gainsbourg avec son billet de cinq cents francs face aux caméras de télévision, qu'ils l'avaient gagné. Et puis, surtout : ce qui caractérise le vrai dandy, c'est, paradoxalement, le côté tragique, sinon maudit, de son existence, fût-elle, comme le prônait Oscar Wilde en un de ses plus fulgurants aphorismes, une oeuvre d'art.
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Baudelaire, impeccable dandy, l'avait du reste expressément établi : le dandysme, « dernier éclat d'héroïsme dans les décadences », est inséparable de la solitude… ce qui, au vu de la multitude de ses courtisans, n'est certes pas le cas du « plus beau décolleté de Paris », pour reprendre le bon mot d'Angelo Rinaldi. Pis : cette misère dans laquelle les dandys meurent souvent en silence et toujours dans la dignité, BHL ne pourrait même pas se la figurer, lui qui, sur ce douloureux mais sublime sujet, ne connaît que l'indigence philosophique et la pauvreté littéraire.
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Ne pas confondre donc, malgré la ressemblance des termes, les postures dandys avec les impostures germanopratines : « Combien de Français échappent à la vindicte de ce Fouquier-Tinville de café littéraire ? », ironisait d'ailleurs, à son propos, Raymond Aron en ses Mémoires !
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De BHL, sigle que l'on rangera désormais entre BHV (pour son indescriptible bric-à-brac conceptuel) et DHL (pour la vitesse « express » de ses lectures philosophiques), Jean Bothorel en ses Chers Imposteurs, en a parfaitement brocardé, du reste, les faux-semblants, qui ne font même plus guère illusion tant son discrédit, après l'hilarante affaire Botul, est désormais total : « Tu n'es pas non plus un dandy, tu n'en as ni la distanciation ni le cynisme. Tu es un idéologue, un croisé des causes que tu défends. Tu n'es pas dans l'imposture, tu es dans la posture d'un Savonarole de la ‘pensée unique', d'un Godefroy de Bouillon des Droits de l'homme, avec ce qu'il faut de canaillerie pour manipuler les courtisans. », y observe-t-il très finement en son chapitre ayant pour très emblématique titre Bernard-Henri Lévy ou la posture souveraine. Tout un programme !
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A noter, soit dit en passant, que ce pamphlet de Bothorel fut publié, en 2008, chez Fayard, alors que Claude Durand en était encore l'incontestable et incontesté maître d'oeuvre. Je doute très fortement qu'il recevrait, aujourd'hui, un accueil aussi favorable en cette même maison, désormais gérée par Olivier Nora, à la fois ami proche et éditeur de BHL chez Grasset. Il suffit, pour s'en convaincre, de voir avec quel empressement, par-delà son invraisemblable cafouillage, cette nouvelle direction de Fayard vient d'annuler in extremis, alors même qu'elle figure encore sur son propre programme éditorial et qu'elle est toujours annoncée partout, ma propre Critique de la déraison pure - D'une certaine philosophie française et de ses errances idéologiques : essai philosophique dont la cible principale s'avère être précisément, par-delà la clique des pseudo « nouveaux philosophes », BHL !
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Mais, enfin, à Dieu ne plaise. Revenons à nos moutons, fussent-ils de Panurge : on pardonnera certes à Renaud Girard, qui est tout sauf un critique littéraire, encore moins un philosophe, de ne pas connaître, en faits et gestes de dandysme, ces choses-là, peut-être trop profondes. Reste à savoir, alors, pourquoi c'est à lui, à un reporter plutôt versé dans les dossiers de politique internationale, qu'un journal aussi sérieux et réputé que Le Figaro a confié la recension des deux derniers ouvrages - Pièces d'identité et de la guerre en philosophie - de BHL. Preuve de l'incompétence philosophique et littéraire de Girard ? Ce désormais célébrissime Jean-Baptiste Botul, auteur fictif d'une farce (par ailleurs remarquable) intitulée La Vie sexuelle d'Emmanuel Kant, le brave mais inculte « grand reporter » du Figaro ne le vit même pas passer, pour autant qu'il ait effectivement lu cette insipide Guerre en philosophie, sous ses yeux par trop aveuglés de lecteur pour le moins inattentif.
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Et le doute, dès lors, de s'installer : c'est ce même Renaud Girard qui, se rangeant systématiquement là sur les positions béachéliennes (l'angélisation des Musulmans et la démonisation des Serbes), couvrit, pour ce quotidien, toute la guerre en ex-Yougoslavie, de la Bosnie au Kosovo… preuve définitive, si besoin en était encore, de l'existence d'un indiscutable réseau politico-éditorial à la solde, servile comme jamais, de BHL !
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Mon "affaire" fait désormais grand bruit en Italie. Elle s'étale dans les pages "culture" du premier quotidien national, "La Repubblica".
Le meilleur de la presse européenne (une véritable armada) répercute objectivement désormais l'information : Le Soir (Belgique), la RTBF, le Jeudi (Luxembourg), La Repubblica (Italie) qui a traduit l'article, de l'italien, en français, anglais, allemand, espagnol et polonais ; cela est également souligné par "Le Monde des Livres" par Alain Beuve-Méry, petit fils d'Hubert Beuve-Méry, Siné Hebdo consacre une pleine page, avec une interview, en outre, de Frédéric Pagès. D'autres pays à venir.
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Et, surtout, les plus grands esprits en France me soutiennent : pour le bien de la philosophie française, de grande tradition (Sartre, Merleau-Ponty, Deleuze, Lyotard, Derrida, Ricoeur, Levinas, Jankélévitch, Bergson, Aron, Althusser, Foucault, Canguilhem, Badiou, Gauchet...), qui mérite mieux que l'horrible réputation que ce BHL est en train, malheureusement, de lui réserver, à la risée du monde entier. Il faut en finir avec cet imposteur et débattre enfin sur le fond : telle est la véritable "guerre en philosophie" !

- http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/bhl-ce-faux-dandy-70200
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Voilà une présentation qui en dit long sur le contenu du livre et chose rare, je suis d’accord. Comme pour beaucoup d’entre nous, le titre m’a fait penser sans hésitation à la célèbre Critique de la raison pure d’Emmanuel Kant et j’ai voulu savoir pourquoi Daniel Salvatore Schiffer avait choisi ce titre. Aussi, quel ne fût mon enthousiasme lorsque Blog-O-Book a retenu ma demande pour ce partenariat proposé par les éditions François Bourin Editeur. A la lecture de Critique de la déraison pure, ce qui m’a séduit dans ce pamphlet car il s’agit bien à mon avis d’un pamphlet, ce sont bien les enjeux soulevés par l’auteur. En effet, si l’on se penche sur la question de savoir ce que sous-entend l’expression "nouveaux philosophes", on peut légitimement se demander quels intérêts ces derniers ont servi pendant ces trente dernières années pendant lesquelles, pour reprendre les termes de Daniel Salvatore Schiffer, le "carré d’as" composé des célèbres André Glucksmann, Alain Finkielkraut, Pascal Bruckner et Bernard-Henri Levy, a occupé le devant de la scène médiatique. La réponse de l’auteur est sans appel : aucun ou presque. Fondant son argumentaire sur des références nombreuses et justifiées, Daniel Salvatore Schiffer démontre de façon indiscutable, la superficialité de ces penseurs modernes. Pourtant, s’il apparait à certains que cet essai peut être le signe d’une vieille rancoeur, il faudra reconnaître qu’il n’y a pas de fumée sans feu. Et l’auteur explique d’ailleurs avec justesse que son livre n’a pas pour objectif le discrédit bête et méchant de cette catégorie d’intellectuels : il n’est pas question ici de faire de la rhétorique mais de réfléchir à l’impact des déclarations faites dans la presse ou aux médias. Car c’est bel et bien dans cette optique que Daniel Salvatore Schiffer met en lumière "la faillite intellectuelle des nouveaux philosophes et de leurs épigones". Car enfin, s’il suffit d’avoir des amis bien placés et de maîtriser l’art oratoire pour être considéré comme nouveau philosophe, alors la philosophie française a du souci à se faire... Or, et cela n’engage que moi, je crois que nous n’en sommes pas encore là...

Si l’auteur nuance parfois ses propos, il se montre souvent cinglant à l’égard de Bernard-Henri Levy qui lui provoque une évidente allergie. Enumérant scrupuleusement les bourdes et les scandales de celui-ci, Schiffer démantèle savamment l’édifice que le philosophe a bâti autour de sa personne. Il n’épargne aucun détail, à commencer par son ouvrage intitulé De la guerre en philosophie paru en février dernier et dans lequel BHL cite Botul, un philosophe imaginaire ! Cette entrée en matière ne peut qu’augurer la suite du livre et le lecteur est averti : pas de pitié pour BHL et Cie. Bref, de scandales en omissions volontaires, le BHL national n’en finit pas de décevoir, voire débecter Schiffer. C’est vrai que ces nouveaux philosophes sont agaçants à envahir les médias et la presse : guerre, religion, philosophie, politique, ils savent tout, parlent de tout, mais que disent-ils en réalité ? Telles sont au final les questions posées par Schiffer. Car le lecteur n’est pas dupe : il est libre de croire ou non les informations que lui servent à outrance les médiias. Non pas que ces nouveaux philosophes ne racontent que des inepties. Juste qu’il ne faut pas oublier qu’il est donné à tout un chacun, philosophe ou non, de réfléchir tout simplement. Vouloir donc "sauver" la philosophie française du naufrage me semble un peu ambitieux. Toujours est-il que cet essai, tout aussi intéressant que documenté, m’a permis de (re)découvrir des penseurs qui ont marqué la philosophie universelle...

Pour l’anecdote, rendez-vous sur cet article de la République des livres de Pierre Assouline pour savoir pourquoi la publication du livre, initialement prévue aux éditions Fayard a été annulée.
Lien : http://embuscades-alcapone.b..
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L'expression « la nouvelle philosophie »

est à l'origine le titre d'un dossier des Nouvelles littéraires paru en juin 1976, dont la rédaction fut confiée par Jean-Marie Borzeix au jeune agrégé de philosophie et éditeur Bernard-Henri Lévy.
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Ceux que l'on appelle depuis les « nouveaux philosophes » appartiennent au courant philosophique que Bernard-Henri Lévy a tenté d'incarner depuis le milieu des années 1970, après son éloignement des courants maoïstes. Ce sont notamment Jean-Paul Dollé, André Glucksmann, Jean-Marie Benoist ou Gilles Susong.
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Ce mouvement, qui a donc autoproclamé sa nouveauté et sa dignité philosophique, consiste essentiellement en une double dénonciation : celle des États totalitaires, comme phénomène dominant l'époque contemporaine, et celle de la responsabilité supposée des intellectuels dans l'émergence et la survie de ces États.
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L'équilibre entre ces deux intentions peut sembler cependant problématique, à tel point que, comme l'a écrit récemment un historien des idées, « l'opération s'apparente à une mise au pas du champ intellectuel. Car Lévy semble plus hargneux envers l'« idéologie du désir » deleuzo-guattarienne qu'à propos des camps soviétiques, et Glucksmann citant Hegel assène que « penser, c'est dominer », imputant nazisme et stalinisme aux grands philosophes allemands ».
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Cette mise en accusation de la philosophie critique dans son ensemble a été diversement reçue par ses représentants les plus influents, de l'indifférence à l'ironie la plus mordante.
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Gilles Deleuze, par exemple, dit à leur propos : « [...] Je crois que leur pensée est nulle. Je vois deux raisons possibles à cette nullité. D'abord ils procèdent par gros concepts, aussi gros que des dents creuses, LA loi, LE pouvoir, LE maître, LE monde, LA rébellion, LA foi, etc. Ils peuvent faire ainsi des mélanges grotesques, des dualismes sommaires, la loi et le rebelle, le pouvoir et l'ange. En même temps, plus le contenu de pensée est faible, plus le penseur prend d'importance, plus le sujet d'énonciation se donne de l'importance par rapport aux énoncés vides (« moi, en tant que lucide et courageux, je vous dis..., moi, en tant que soldat du Christ..., moi, de la génération perdue..., nous, en tant que nous avons fait mai 68..., en tant que nous ne nous laissons plus prendre aux semblants... »).
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Avec ces deux procédés, ils cassent le travail. Car ça fait déjà un certain temps que, dans toutes sortes de domaines, les gens travaillent pour éviter ces dangers-là. [...] »
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Mais tout autant qu'un nouveau discours, la Nouvelle Philosophie est un nouveau dispositif médiatique, dont le centre de gravité réside dans la force éditoriale qu'a réussi à acquérir Bernard-Henri Lévy au milieu des années 1970, avant même d'être trentenaire, grâce aux Éditions Grasset, qui lui offrent en particulier la direction de la collection « Figures ».
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Jean-François Lyotard ironisait sur ce dispositif dès 1977 : « Vos gens mangent beaucoup à la table des media. Encore une fois, prenez garde davantage aux postures et moins aux significations. C'est l'humour de la pragmatique narrative que vos récits de protestations contre les horreurs du pouvoir, elle les divulgue grâce à des réseaux de pouvoir. »

Certains des « nouveaux philosophes » de 1976, comme Christian Jambet et Guy Lardreau, ont critiqué le courant qu'ils avaient d'abord paru cautionner. Lardreau, Jambet, mais aussi Michel Guérin, ont en effet publié plusieurs de leurs premiers livres dans la collection de Bernard-Henri Lévy « Figures » chez Grasset en 1975-1978, peu de temps avant de polémiquer publiquement contre le mouvement initié dans les médias par leur ancien camarade normalien.
Lien : http://mazel-livres.blogspot..
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4 ième de couverture : "Fin des années 70, les "nouveaux philosophes" envahissent les médias. Ils s'appellent André Glucksmann, Maurice Clavel, Jean-Marie Benoist, et surtout Bernard - Henri Lévy. Ils seront suivis d'amis proches sur le plan idéologique dont; au premier rang, AlainGinkielkraut et Pascal Bruckner. Trente ans plus tard, que reste - t'il de leur reflexion? Si les membres de ce courant ont incontestablement marqué la scène publique française, leur héritage fait débat sur le plan philosophique. C'est sur ce terrain que l'auteur a choisi d'exercer son regard critique. Essai aux accents pamphlétaires, "critique de la déraison pure" référence directe au maître ouvrage d'Emmanuelle Kant, dresse un bilan cinglant de la pensée léguée par les "intellectuels médiatiques". Loin de se borner à la mise en cause de leurs postures, ce livre engage, pour la première fois, une réflexion de fond sur les dérives et les manipulations logées au coeur de leur philosophie.

Ce livre est un pamphlet sévère (mais souvent juste) a l'encontre de ses "nouveaux philosophes" qui a défaut d'être de véritables maîtres penseurs ont compris avant les autres l'intérêt d'occuper l'espace médiatique. Ce livre ,sous couvert de parler de ces philosophes, est avant tout une critique dirigée sur l'incontournable B.H.L. Et là on peut dire qu'il en prend pour son grade. Cela est fait de manière construite et intelligence même si comme beaucoup de pamphlet certaines critiques sont outrancières. Cela n'est pas un livre que j'ai pu lire d'une seule traite car cela reste un livre un peu ardu a appréhendé. Mais cela reste un livre instructif sur un philosophe qui a perdu toute la crédibilité qui lui restait avec l'affaire "Botul".
Lien : http://desgoutsetdeslivres.o..
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Vidéo de Daniel Salvatore Schiffer
Le 12 août 2022, Salman Rushdie est grièvement blessé lors d'un attentat à son encontre. de cette fatwa contre lui lancée en 1989, l'écrivain libre reste debout et représente la figure du combat contre "le fanatisme de la pensée", selon l'auteur Olivier Weber.
À la suite de cet événement, des intellectuels de renom rendent hommage et prolongent sa pensée dans un ouvrage "Penser Salman Rushdie", collectif coordonné par Daniel Salvatore Schiffer et publié aux éditions de l'Aube. Olivier Weber, qui a contribué à l'ouvrage, insiste sur la puissance de son acte romanesque, laissant libre cours à l'imaginaire, forme ultime de liberté que ses ennemis tentent par tous les moyens de compromettre.
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