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Michel Luxembourg (Traducteur)
EAN : 9782913372023
94 pages
La Fabrique éditions (08/04/1999)
4.11/5   58 notes
Résumé :

Ce livre raconte l'itinéraire d'un homme et l'histoire d'une maison d'édition.
La maison, c'est Panthéon Books, fondée en 1941 à New York par des émigrés (dont Jacques Schiffrin, le fondateur de La Pléiade).
L'homme, c'est André Schiffrin, qui va faire de Panthéon l'une des plus prestigieuses maisons d'édition américaines, publiant entre autres Foucault, Sartre, Chomsky, Medvedev...
Comment il résiste quand Panthéon est racheté par Rando... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (10) Voir plus Ajouter une critique
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Premier livre de chevet de l'éditeur en herbe, L'Édition sans éditeurs amorce les questions d'indépendance dans des métiers de plus en plus pervertis par les phénomènes de concentration.

Dans ce petit ouvrage dont le titre est emprunté à Jérôme Lindon, André Schiffrin témoigne, grâce à son expérience, des conséquences néfastes de la concentration aux États-Unis pour les métiers à vocation artistique et intellectuelle.

Outre l'histoire particulière de son père, Jacques Schiffrin, fondateur de la Pléiade avant que la maison ne soit rachetée par Gallimard, André Schiffrin a été éditeur chez Pantheon Books aux États-Unis, une maison au catalogue prestigieux et exigeant, puisque les écrivains et intellectuels reconnus en France – Michel Foucault, Jean-Paul Sartre, Marguerite Duras, Simone de Beauvoir – y étaient publiés outre-Atlantique.

Mais si André Schiffrin témoigne, c'est parce que Pantheon Books a été rachetée par Random House, laquelle a été phagocytée par RCA, un géant de l'électronique et de l'industrie du divertissement, lequel n'a pas tardé à revendre Random House à S. I. Newhouse…

Partant de l'exemple vécu à la multitude de cas similaires dans les années 1980, André Schiffrin montre les conséquences désastreuses de la concentration dans un milieu encore artisanal à bien des égards. Les groupes industriels exigent des maisons la même rentabilité que pour les autres branches commerciales et industrielles du conglomérat, alors que leur fonctionnement diffère beaucoup. Une maison d'édition ne pourrait jamais engendrer autant de profits qu'une entreprise de bâtiment, par exemple.

Les maisons, qu'elles soient destinées à un public confidentiel comme Pantheon Books, ou à un plus large public, se voient contraintes d'augmenter leur rentabilité, laquelle est intrinsèquement faible dans les métiers de l'édition. Pour s'aligner à la logique du marché, les dirigeants des maisons modifient la politique éditoriale de l'entreprise afin d'abaisser le niveau intellectuel et pour plaire au plus grand nombre.

Ils se font consensuels, s'autocensurent, diminuent les exigences littéraires, minimisent les risques éditoriaux en copiant des formules gagnantes d'autres éditeurs – les mille et un Twilight… – dans le but de remplir le tiroir-caisse et de satisfaire le contrôleur de gestion, devenu le premier éditeur en lieu et place du directeur littéraire…

André Schiffrin cible le danger de publier ce que le public est présumé vouloir. La censure ravage le patrimoine culturel et intellectuel, sous prétexte que les lecteurs ne voudraient pas lire tel type ou tel autre type de texte. Si la pensée politique dominante est le capitalisme, les éditeurs ne publieront-ils que des textes dans ce sens ?

Quel est donc le rôle de l'éditeur, s'il n'est pas celui de provoquer l'attention du lecteur sur un texte oublié, méconnu ou à contre-courant ?

Alors l'indépendance est essentielle : si elle n'est pas financière, elle doit être intellectuelle, car c'est l'engagement des maisons qui nourrit le débat public et la confrontation des opinions nécessaires à la démocratie.

En moins de cent pages, il expose des faits alarmants et lance le débat : pourquoi faut-il préserver l'indépendance des maisons d'édition ? Pour les futurs éditeurs et les curieux du livre, cet ouvrage est le début d'une prise de conscience. Pour les autres, c'est déjà un incontournable !

Mais la démarche est propre à André Schiffrin : si ce qu'il énonce fait sérieusement froncer les sourcils – car en France nos conglomérats Hachette et Editis sont comparables aux monstres étatsuniens – il termine son texte en ouvrant quelques pistes. D'autres formes d'organisation existent qui permettent de préserver l'indépendance : la fondation, l'association, l'abonnement…
Lien : http://www.bibliolingus.fr/l..
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Ou l'édition sans personne pour faire des choix autres que ceux de la supposée rentabilité (très aléatoire. En théorie, personne ne travaille dans le monde du livre pour faire du fric. Eh non.)
Et André Schiffrin en sait quelque chose, lui le fils du fondateur de la Pléiade, contraint à l'exil en 1940. Il a vu son père fonder la maison Pantheon avec des exilés allemands, sélectionner ses textes avec soin, avec une haute idée des lecteurs : ce ne sont pas des idiots, ils ont droit au meilleur.
Mais tout cela change au cours des années 80-90 (et est en cours lorsqu'il écrit) : la rentabilité doit être partout, dans chaque titre, et non plus quelques bonnes ventes couvrant les frais des ouvrages à faible tirage et vente (comme cela se passe, avec la fameuse "loi" des 80-20) Voila comment on se retrouve à payer des avances colossales aux auteurs de "best-sellers", avances qui ne sont pas couvertes par les ventes et comment on ruine un fonds qui se vend certes lentement mais sûrement. Comment on démolit toute une économie et toute manifestation d'intellectualisation ; comment chaque tentative de rendre le public instruit est découragée, détruite. Les groupes de librairies ont encore amplifié le phénomène, coulant les indépendants, les seuls à oser encore prendre des risques avec des éditeurs indépendants et souvent à contre-courant de l'idéologie dominante (pour info : entre ça, l'absence de prix unique et le livre électronique, il reste 30 librairies à N-Y, groupes inclus)
La France reste, pour le moment, relativemement épargnée (l'étude ne pouvant prendre en compte l'impact d'Internet. Bah non, pas en 1999), les grands groupes n'étant pas (encore) aussi gourmands.
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Ce livre raconte non seulement l'histoire d'une maison d'édition, Pantheon Books mais aussi celle d'un homme, André Schiffrin qui est le fondateur de cette dernière, et qui s'est battu tout au long de sa vie afin de conserver son indépendance. Mais la loi du marché voulant, et ce, même si Schiffrin avait réussi à faire reconnaître sa maison d'édition comme possédant une certaine notoriété, celle-ci fut rachetée par Random House. le marché de l'édition est un monde cruel où la loi de l'argent régit (il n'y a qu'à voir l'exemple de la France où il ne reste que très peu d'éditeurs indépendants) et lorsque Random House est à son tour rachetée par le tycoon Newhouse, Eschiffrin et toute son équipe décident de résister en démissionnant tous, de comme un accord pour fonder une nouvelle maison à but non lucratif, The New Press. L'objectif de cette dernière n'est pas de publier un maximum de livre afin de gagner un maximum d'argent mais de publier des ouvrages qui ont de la valeur de par leur contenant. le livre n'est ici plus considéré comme un produit marchand mais comme une oeuvre culturelle à part entière.
Le même problème se pose d'ailleurs aujourd'hui avec les librairies qui se font piétiner par les grands groupes ou les grandes surfaces. le livre a perdu de sa valeur, à mon grand regret, et a été trop largement banalisé.
En tous cas, pour ce qui concerne le livre dont je suis en train de vous parler, c'est un livre qui nous parle de résistance contre le système de l'argent. Court ouvrage facile d'accès dont je garde un très bon souvenir et je vous invite donc à venir le découvrir.
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André Schiffrin , à travers sa biographie professionnelle, dresse un portrait de ce qu'est devenu l'édition à la fin du vingtième siècle.
Son père a été l'un des fondateurs de la pléiade , dans un souhait d'offrir une littérature de qualité au plus grand nombre. Suite aux persécutions vichystes et à son élégant licenciement par Gallimard, la famille émigre en 1941 aux États-Unis.
André Schiffrin reprend quelques années plus tard la canne de pélerin de son père, pour publier des oeuvres américaines dissidentes ou européennes, dans un message plutôt à gauche, sans recherche systématique du profit,mais dans l'idée d'entretenir et enrichir le discours intellectuel et la réflexion au sein de Pantheon Books. Mais la loi du marché s'installe peu à peu dans l'édition, il faut penser à être rentable, très rentable, il faut arrêter de semer des idées frondeuses dans l'opinion, de croire qu'offrir la culture aux minorités est une bonne chose… En même temps que toute son équipe, André Schiffrin part en claquant la porte et fonde, avec l'aide de quelques fondations privées, The New Press, maison d'édition dissidente et sans but lucratif.

À travers son parcours, André Schiffrin décrit ce qu'est devenu le livre, le monde de l'édition aux États-Unis mais aussi à un moindre degré en Europe et particulièrement en France, sous l'emprise des empires du divertissement et de la communication. Il montre comme il est difficile maintenant de continuer à considérer le livre comme un produit culturel et non plus commercial.

Le livre est écrit et publié en 1999, Amazon n' apparaît qu'une fois de façon très ponctuelle et seulement dans la conclusion. Il va donc falloir lire la suite : le contrôle de la parole
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C'est sûr que ça va pas faire bander les foules que de lire ce texte, c'est surtout de l'interne à la base. C'est juste qu'en tant qu"acteur culturel" à un moment donné tu te remets en question.

C'est bien joli de vendre de belles histoires à t'en faire péter le portefeuille et la bibliothèque, mais à un moment, savoir d'où viennent les bouquins que tu vends, essayer de comprendre l'avenir de l'édition c'est devenu une question assez importante en ce qui me concerne.

Et c'est là que ça devient intéressant.

Publié en 1999 par le fils du fondateur de la Pléiade, André Schriffin était un éditeur indépendant franco-américain. Ce texte permet de comprendre que si aujourd'hui on en vient à avoir des caisses de merdes romanesques dans n'importe quelle gare ou à coté d'un rayon fruits et légumes, sans aucun intérêt intellectuel ni culturel derrière c'est bien "à cause de nous".

Parce que oui, l'Homme veut se "divertir" et en faisant ce choix, il permet aux gros conglomérats d'avoir des raisons de vendre de la daube qui libère des neurones et qui permet de t'abrutir plutôt que de te faire réfléchir.

Je vais pas faire le révolutionnaire de demain, moi aussi je consomme et j'aime les gros trucs bien commerciaux. J'en vois même certains venir avec leur "non mais c'est maintenant que tu te réveilles ?".

Merde (déjà) et puis.

A force de préférer une consommation médiocre de divertissement, ce bouquin nous montre comment on en vient à détruire la diversité. A détruire le genre de livres qui permet de comprendre certains faits de la société, de comprendre l'Homme, de voir des rayons entier de poésie disparaître des librairies indépendantes parce que les éditeurs préfèrent mettre des tunes dans ce qui fait vendre (parce que faut savoir branler les actionnaires dans le bon sens sinon tu peux mettre la clé sous la porte) plutôt que de soutenir des éditeurs soucieux de nous apporter un minimum de connaissance.

Voilà comme je l'ai dit, ce serait de la grosse hypocrisie que de dire que ce livre m'a ouvert les yeux et que ça donne envie de changer le monde, on a pas tous forcément envie de se prendre la tête à lire une oeuvre avec un dictionnaire à côté (moi le premier) mais putain y'a des fois où t'as quand même la boule au ventre.

Merci Vanellis Bell pour la découverte (comme quoi des fois le réseau et les rencontres ça sert pas qu'à payer des cocas).

Nique les best-seller,
Lien : https://www.instagram.com/lo..
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
Au XXe siècle, il n’a pas toujours été admis que le grand public ne souhaite que du divertissement, même si 1984 d’Orwell et Le Meilleur des mondes de Huxley avaient déjà su prédire un monde où il en serait ainsi. Dans l’Europe et l’Amérique des années vingt et trente, des efforts ont été faits pour atteindre une large audience avec des ouvrages sérieux, efforts dont Penguin Books en Angleterre représente un cas exemplaire. Penguin était à ses débuts une maison politiquement engagée, animée par des idées de gauche, qui cherchait à apporter aux masses à la fois savoir et délassement. Pendant la guerre, dans les territoires non occupés, l’édition a tenu son rôle dans la mobilisation, soutenant l’effort général tout en apportant aux soldats et aux ouvriers épuisés une dose de divertissement. Après 1945, cet optimisme a persisté jusqu’au début de la guerre froide, quand l’édition s’est mise à suivre de plus en plus fidèlement la tendance des autres médias à décrire les champs de bataille d’un monde toujours plus divisé.
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Si l’on met à part les mémoires qui, comme le présent livre, sont toujours sujets à caution, l’histoire de l’édition n’a pas suscité beaucoup de travaux, en langue anglaise tout au moins. Pourtant l’édition représente toujours un microcosme de la société dont elle fait partie, reflétant ses grandes tendances et façonnant dans une certaine mesure ses idées, ce qui fait son intérêt. Elle s’est radicalement transformée dans les dernières années. Pays après pays, elle est passée d’un stade relativement artisanal de type XIXe siècle à une industrie dominée par les grands groupes, des conglomérats exerçant toutes sortes d’activités dans l’industrie du divertissement (entertainment) et de l’information.
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Pour faire face aux très graves problèmes du livre en cette fin de siècle, un groupe d’éditeurs à travers le monde, qui chercherait à cerner les vraies questions et à y apporter des réponses, pourrait jouer un rôle crucial. Si le terrain des idées est abandonné à ceux qui ne cherchent qu’à amuser ou à fournir des informations banalisées, le débat essentiel n’aura pas lieu. C’est ce silence-là qui s’est abattu sur la vie culturelle américaine. Espérons qu’en Europe la lutte contre la domination du marché et la recherche d’alternatives viables seront menées avec plus de détermination.
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La bataille se déroule également sur le terrain du livre, qui devient peu à peu un simple appendice de l’empire des médias, offrant du divertissement léger, de vieilles idées, et l’assurance que tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes. Pourquoi diable ceux qui possèdent des machines si profitables dans le cinéma et la télévision accepteraient-ils de faire réfléchir autrement, de faire surgir des difficultés ? Pourquoi même permettraient-ils à de tels livres d’exister ?
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En 8 années d'une stratégie obsédée par le profit, le rythme de croissance s'était donc nettement ralenti. Newhouse avait réussi ce tour de force de ruiner le capital intellectuel de la maison, de ternir sa réputation et de perdre de l'argent en même temps.
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Vidéo de André Schiffrin
Quel destin pour la littérature dans le monde numérique ? .Conférence du mardi 19 juin 2012Nous vivons dans un monde numérique, nous lisons de plus en plus sur écran. Si les effets de cette révolution sur la lecture sont souvent commentés, nous n'avons pas encore pris la mesure de ses conséquences sur l'écriture, sur notre écriture numérique. de quoi sera faite la littérature dans vingt ans, lorsqu'elle sera entre les mains des générations qui auront appris à lire, écrire et compter sur écran?Avec la participation de :Antoine Compagnon, Collège de France ;Nathalie Heinich, sociologue, directrice de recherche du CNRS ;André Schiffrin, éditeur franco-américain, auteur de L?argent et les mots et de L'Édition sans Éditeurs ;Denis Zwirn, président de Numilog.Débat animé par Catherine Escrive, journaliste.
+ Lire la suite
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