Lisant ce livre dans le bus, je pouvais constater autour de moi les regards inquiets qu'on me lançait. Sous-entendre que les Arabes puissent rire n'était-il pas une scandaleuse provocation ? Une horrible agression culturelle ? Un mépris du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes ?
L'auteur de cette anthologie prouve qu'il n'en est rien, et que l'humour a toujours été présent, et cultivé, dans les sociétés arabes, que ce soit durant les périodes anté-islamiques, pendant la propagation de l'islam (on apprend d'ailleurs que l'humour y était encouragé : « Allégez les coeurs instant après instant, car quand les coeurs sont las ils s'aveuglent » (bien vu Momo)) et dans les grands empires.
On sera surpris de constater que certaines histoires sont également présentes dans d'autres cultures, et qu'elles fonctionnent toujours aussi bien malgré les siècles qui ont passé. Preuve s'il en est que l'humour, et les défauts des Hommes, sont universels.
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L'auteur est allé puiser dans différentes périodes de la civilisation "arabe" pour réunir diverses citations humoristiques. Mais, il y a beaucoup de raccourcis dans l'état d'esprit général qui préside aux citations et, pour mon cas, je n'ai guère trouvé tout ceci amusant ou humoristique.
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Depuis que l'idéologie wahhabite s'est répandue dans le monde arabe avec les pétrodollars, la réputation d'une terre entièrement austère et qui ne connait point l'humour s'est malheureusement endurcie. Nous avons généralement l'image d'arabes qui ne jurent que par la religion, comparables aux chrétiens de France, au Moyen-âge, enfermés dans un dogmatisme persécuteur et une peur irrationnelle de l'Enfer.
Mais force est de constater que cette image est donc fausse et que le peuple arabe a plus d'un tour dans son sac et n'a pas la langue qui tient dans sa poche : les différentes anecdotes, maximes humoristiques et histoires racontées nous le prouvent. Touchant à tous les sujets, de la religion à l'intime, nous pouvons même dire qu'ils furent plus avancés que les occidentaux sur ces thèmes.
Et comment ne pas écrire un livre sur l'humour arabe, sans mentionner l'honorable maître Djoha, le Mollah Nasreddine chez nos amis chiites iraniens ? L'auteur a pris le soin d'y inclure quelques sages anecdotes à son sujet.
Un livre qui remplit son rôle même s'il aurait été intéressant qu'il soit plus fourni.
Il mérite donc quatre étoiles ! ;)
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Les Arabes, musulmans et chrétiens, que certains parmi nous imagineraient austères, puritains et rigides, fermés au rire et à la plaisanterie ont accumulé, en la matière, au cours du temps, un patrimoine qui n'a rien à envier aux autres civilisations et qui prouve que le rire est bien le propre de l'homme, comme l'avait dit Rabelais, et Aristophane, bien avant lui.
Un homme, sous le règne de Mu'tasim, s'était dit prophète. S'étant trouvé devant le calife, celui-ci dit : "Tu es prophète ? — Oui. — Vers qui as-tu été envoyé ? — Vers toi. — J'atteste que tu n'es qu'un insensé et un sot !" L'homme répondit : "Il n'est envoyé vers chaque peuple que des gens comme eux." Mu'tasim éclata de rire et le gracia.
Un homme avait trouvé sa mère en compagnie d'un autre homme. Il tua sa mère. « Pourquoi ne pas avoir tué l'homme ? » lui demanda-t-on. Il répondit : « Parce que, si je l'avais fait, j'aurais dû tuer un homme tous les jours ! »
Un homme avait vu, sur la route de La Mecque, une femme et l'avait suivie.
- Qu'est-ce que tu me veux ? lui dit-elle.
- Ton amour m'a ravi le cœur !
- Si tu voyais ma sœur que voici !
Il se retourna mais ne vit personne.
- Menteur ! conclut-elle. Si tu avais été sincère à mon égard, tu ne te serais pas retourné !
Tiré de "Les Fleurs du printemps", p.84
La femme de Yazîd était enceinte. Elle lui dit – et il était laid : « Malheur à toi si mon enfant te ressemble ! » Il répondit : « Et malheur à toi s'il ne me ressemble pas ! »