Mon amie R., grande lectrice, a pris l'habitude de lire, par curiosité, tous les romans que ses deux ados étaient amenés à lire pour l'école. Parfois dépitée et sceptique face aux choix des professeurs, elle est pourtant tombée sur cette pépite, qui l'a émue. Quand je lui ai dit que je devais lire un roman épistolaire pour un challenge, genre que je n'aime pas trop, elle m'a donc conseillé «
La plus grande lettre du monde » et je l'en remercie. Comme elle, j'ai été émue par ce court texte que j'ai lu d'une seule traite sans pouvoir m'arrêter.
Nicolas, onze ans, n'a pas de souvenirs de sa mère, disparue dans un accident de train et ne sait pas qui est son père. Sa famille, ce sont ses grands-parents, G.P. et Mam's. Mam's vient tout juste de mourir, après une longue maladie, et, en même temps, Nicolas a perdu sa voix. Impossible pour lui d'exprimer son chagrin, de dire ce qu'il ressent (d'ailleurs, il ne sait pas très bien ce qu'il ressent), de continuer à parler avec son grand-père… Il décide donc d'écrire une lettre pour sa future femme, qu'il ne connait pas encore et qu'il appelle « Chouc's ».
« Je ne mets pas de date quand je t'écris. N'oublions pas qu'il s'agit d'une lettre, «
la plus grande lettre du monde ». de toute façon, j'ai horreur des dates et des montres. On peut très bien vivre sans. Je t'écris quand j'ai envie. »
Véritable petit récit de vie condensé en 93 pages à peine, cette « lettre » est à la lisière entre le roman épistolaire et le journal intime. Au fil des pages, Nicolas raconte sa vie avec ses grands-parents avant et après la perte tragique qui l'a laissé aphone et complètement désemparé. Il imagine aussi ce que pourrait être sa vie avec celle à qui il adresse sa lettre. C'est très touchant car, avec beaucoup de pudeur et de délicatesse, entre espoir et désespoir,
Nicole Schneegans parvient à mettre des mots sur la douleur d'un enfant. Elle exprime le deuil, la colère, le chagrin, les sentiments qui se bousculent dans la tête et dans le coeur de Nicolas et évoque des thèmes qui ne sont pas toujours faciles à aborder parce que souvent, les mots nous manquent. Et, face au deuil, nous avons souvent besoin d'une oreille bienveillante qui nous écoute sans nous juger, qui compatit sans chercher à nous conseiller,. C'est ce qu'incarne Chouc's pour Nicolas.
«
La plus grande lettre du monde » est vraiment une belle lecture à recommander, que l'on soit adolescent ou adulte.