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Critiques filtrées sur 1 étoiles  
Sous-titré « Témoignage et enquête d'investigation d'un rescapé », Nice : l'attentat, La contre-enquête, est le troisième ouvrage d'Alexandre Schoedler. Après le roman ésotérique (Codex Déus) à base de nazis et d'extraterrestres, après le thriller avec fausse préface de James Ellroy et véritable resucée de Usual Suspects (Dark Secrets), l'auteur niçois s'attaque à l'enquête journalistique, au pamphlet et au recueil de témoignages – tout cela à la fois – ce qui, comme l'indique la quatrième de couverture, l'entraîne dans une nouvelle carrière : « Par ce livre, il devient journaliste d'investigation. » Quand on connaît l'oeuvre de l'auteur, on frémit – d'excitation d'abord, de crainte, un peu, ensuite.
Le moins que l'on puisse dire, c'est que ce nouvel opus de l'oeuvre schoedlerienne est extrêmement riche. Dans la forme plus que dans le fond, certes, mais tout de même.
La forme donc, pour commencer. On n'y prête pas assez attention lorsqu'il s'agit d'enquêtes journalistiques, et pourtant, on devrait. Ici, c'est elle qui permet à Alexandre Schoedler d'affirmer sa patte grâce à son style reconnaissable entre tous et fondé pour l'essentiel, comme nous avons eu l'occasion de le démontrer dans de précédentes chroniques, sur l'utilisation des points de suspension et une façon très personnelle d'agencer les mots :
« Elle venait à mon encontre avec son portable Samsung noir, elle me faisait face et s'échangeait un regard radieux, je la trouvais très jolie avec sa tiare de perles dont elle avait ceint ses cheveux noirs, ce qui me rappelait ces filles polynésiennes ou d'Hawaii, assurément... elle était la plus jolie ce soir...
L'espace d'un instant je me suis demandé si je ne devais pas lui parler et l'inviter à prendre une glace avec nous après le feu et on irait ensuite voir les concerts live pour terminer très tard.
Je n'allais jamais la revoir avec le drame qui allait suivre. »
Emphase poétique et, disons-le, hommage au Dada sont toujours au coeur de l'oeuvre d'Alexandre Schoedler, tout comme sa capacité à se libérer du carcan de la conjugaison :
« […] je sais que quand j'arrive il se peut que la lumière s'éteint. »
Et bien sûr, cette recherche incessante du mot juste :
« À peine ai-je pu finir ma logique, en un éclair, un engin longiforme blanc - un camion énorme - déboulait sur la chaussé avec un appel de vent incroyable fauchant des dizaines puis des cinquantaines de personnes devant mes yeux horrifiés. »
Un engin longiforme qui devrait rester à jamais gravé dans les annales du nouveau journalisme gonzo contemporain et rejoindre un jour le « regard moustachu » au panthéon de la littérature niçoise d'expression française.
On s'en doute, le fonds ressemble terriblement à la forme. C'est dire à quel point l'ensemble est audacieux. Alexandre Schoedler et son éditeur le savent bien, ce livre va bousculer les certitudes, révéler de terribles vérités, déranger au plus haut niveau. Aussi prennent-ils garde à ne surtout pas prêter le flanc à d'éventuelles poursuites. C'est pourquoi ils ne désignent les protagonistes de cette enquête que par leurs initiales. Et aussi, si l'on en croit l'avertissement qui ouvre le livre, parce que ça donne vraiment l'impression que l'on a fait une enquête sérieuse :
« L'éditeur a fait le choix de nommer les protagonistes de cette enquête uniquement par leurs initiales et de renvoyer pour chacun à un lien vers un article de presse d'un grand quotidien pour appuyer la force d'investigation de cette enquête. »
Libre donc au lecteur de chercher, s'il dispose comme Alexandre Schoedler des sources secrètes nécessaires, qui est ce mystérieux président des États-Unis qui apparaît ici comme « B. O. », ou cet ancien maire de Nice appelé « C. E. ».
Quant aux sources, on reste pantois devant le réseau qu'a su développer Alexandre Schoedler. La quasi-totalité de cette contre-enquête s'appuie en effet, comme le montrent ces notes de bas de page qui donnent toute sa crédibilité à l'ouvrage, sur des sources inédites : wikipédia, les versions en ligne du Monde, du Figaro, des Échos ou du JDD, Francetv.fr, Atlantico, et même des replay radio dont la retranscription ne manque pas de sel avec l'apparition dans le texte d'un « député de Lyonne » (qui est certainement la femme de Lyon).
Alors oui, il est facile de ricaner face à cet agglomérat d'articles de presse plus ou moins bien fichus, plus ou moins crédibles – on a bien sûr droit à l'inévitable développement sur le captagon, « drogue des Jihadistes ». Mais si, en fait, tout cela n'était qu'un écran de fumée pour mieux dissimuler les véritables sources ultrasecrètes auxquelles Alexandre Schoedler a eu accès ? Et saluons au passage le courage de l'auteur qui, mu par la rigueur scientifique, se sent tout de même obligé de les citer en note :
« le président O. aurait d'ailleurs reçu en Avril 2009 en secret des représentants des frères musulmans eux-mêmes interdits de présence en Égypte142. » Et, en bas de page pour cette note n° 142 : « Livret des visites à la Maison Blanche. »
Autant dire que si Nice : l'attentat, La contre-enquête, a peu de chances de remporter le prix Pulitzer, il n'en mérite pas moins une lecture attentive. Surtout, après les deux précédents romans d'Alexandre Schoedler, il nous éclaire sur ce qui est très certainement l'essence de l'oeuvre schoedlerienne. On l'avait pressenti à la lecture de Codex Déus, on le voit ici clairement, Alexandre Schoedler a inventé la littérature apéritive. Alexandre Schoedler, et ce n'est pas le moindre de ses mérites, crée du lien social. Achetez les livres d'Alexandre Schoedler, invitez des amis à boire l'apéritif et lancez-vous dans la lecture des meilleurs extraits (autant dire TOUT), et vous verrez à quel point cela peut faire du bien.
Pour finir, parlons du rire, d'ailleurs. Certains esprits chagrins verront dans Nice : l'attentat, La contre-enquête, une manière salement opportuniste de surfer sur le drame de l'attentat de Nice. Il est vrai que certains passages – peut-être à cause du style assez emphatique de l'auteur – peuvent paraître un peu sordides, mais il faut à mon sens les voir d'une autre manière. Les attentats de novembre 2015 ont ainsi eu Jawad Bendaoud, personnage borderline dont l'apparente bêtise a beaucoup fait pour permettre aux gens de s'épancher en riant. Nice a Alexandre Schoedler. Bien sûr, il y a comme un déséquilibre : Bendaoud a eu droit à BFM TV et a donc pu dérider la France entière, Alexandre Schoedler a les éditions Au Pays Rêvé et donc la possibilité de permettre à une bonne douzaine de lecteurs de profiter de son aide à la résilience par le rire. Puisse cette chronique permettre à Nice : l'attentat, La contre-enquête de trouver enfin un public à sa démesure.

Lien : http://www.encoredunoir.com/..
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