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Des voix parmi les ombres évoque le dernier conflit du XIXe siècle et le premier du XXe : la guerre des Boers, qui opposa du 11 octobre 1899 au 31 mai 1902 les rebelles descendants de colons aux britanniques. Une part importante de l'histoire de l'Afrique du Sud qui constitue aussi comme les prémices de la politique de l'Apartheid. le roman de Karel Schoeman commence à l'époque moderne par la recherche d'un explorateur et d'un photographe des traces d'une petite ville où un métis fut battu sauvagement puis fusillé. La quête est d'abord vaine avant que, surgies de nulle part, trois voix du passé ne viennent éclairer cet "incident" dramatique. On aimerait dire du bien du livre car Schoeman est manifestement un écrivain important, de la trempe des plus grands auteurs sud-africains. Mais il est terriblement ennuyeux tant il cultive le mystère et l'atermoiement avec ses personnages qui prétendent tous n'avoir rien vu et rien entendu tout en donnant des détails de plus en plus précis. Responsables mais pas coupables, les membres des deux communautés de Fouriesfontein. Et bien lâches finalement sous-entend le romancier. Très descriptif et redondant, le livre de Schoeman semble tourner autour de son sujet sans jamais l'aborder de front si ce n'est dans les dernières pages. Une drôle d'atmosphère y règne sans que l'on ne soit sûr de rien, à part le fait qu'un innocent est mort pour des raisons assez obscures. le sujet était passionnant, son traitement, incertain et vague, est terriblement frustrant.
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Cet écrivain est absolument majeur pour moi. Rarement un pays aura été analysé dans son histoire, ses soubresauts et ses rapports sociaux avec autant de coeur et de délicatesse. Des voix parmi les ombres est le cinquième roman de Karel Schoeman paru en France et je les ai tous lus, et tous chroniqués. L'Afrique du Sud est toute entière dans l'oeuvre de Schoeman, qui n'en finit pas de revisiter les vieux démons du siècle dernier. Schoemen fait partie de ces très grands, Paton, Gordimer,puis Brink, Coetzee qui ont contribué à changer le pays même si je crois que l'influence des intellectuels est à relativiser.

Un brin d'histoire peut s'avérer intéressant quand on lit Karel Schoeman. Assez touffue l'histoire en Afrique du Sud, Transvaal, Etat libre d'Orange, Colonie du Cap, deux guerres dites des Boers dont la seconde en 1901, entre les descendants des Hollandais et les colons britanniques. Cest sur ce dernier conflit que revient Karel Schoeman quand un commando de Boers investit la petite ville de Fouriesfontein, près de cape Town. L'auteur a bâti un roman exigeant tout autant que passionnant, en se plaçant sur deux axes de lecture à un siècle d'intervalle.

Dans la première partie un explorateur et son photographe mènent une enquête sur ces évènements de cent ans d'âge dont les traces curieusement sont assez peu visibles. Tout l'art de Schoeman est dans le quotidien de cette communauté, qui va vivre des évènements tragiques, que les deux enquêteurs peinent à reconstituer, allant presque jusqu'à se perdre, les plus belles pages peut-être de ce roman, quand ils ne sont plus sûrs du tout, au point de sentir leur raison vaciller. Pourtant ils sont bien sur les lieux de ces affrontements mais tout se passe comme si le pays était comme frappé d'amnésie. Des silhouettes, des ombres...

Trois voix, Des voix parmi les ombres en l'occurrence, s'élèvent alors dans la seconde partie,Alice, fille du magistrat anglais local, Kallie, jeune clerc de ce même homme de loi, et qui ambitionne d'écrire, et Miss Goby, vieille fille soeur du médecin britannique lui aussi. Ces trois témoins ne sont pas des grandiloquents, chacun est comme à sa petite fenêtre, entre les microévènements du journalier et les rares et relatives intensités, un bal, une chorale,un pique-nique. Pas de scènes de guerre, une occupation étrangère parmi les étrangers, un pays non miscible entre les Africains, les Métis, les Afrikaners, les Anglais. Présence de l'église ou plutôt des églises, pas très miscibles non plus, avec en commun un sérieux réformé qui fait que la future nation arc-en-ciel ne semble pas dotée d'un humourexceptionnel en ces années 1900. C'est donc par des scènes ordinaires, un repas, un achat, un jardin, que Karel Schoeman parvient à nous plonger au coeur battant de cet étonnant pays, tout de douleur et de rancoeur. Cet écrivain, parfois un tout petit peu ardu, dont je crois qu'on chuchote le nom du côté de Stockholm, est à découvrir d'urgence. J'ai chroniqué les quatre autres romans parus en France. Mon préféré est En étrange pays. A noter que ses livres sont écrits en afrikaans, contarirement à Gordimer et Coetzee.


Hasard de mes lectures, trois parmi les cinq ou six derniers livres ont une grande part d'ombre, Et toujours ces ombres sur le fleuve..., Des voix parmi les ombres, Une terre d'ombre (chroniqué prochainement). Un signe quelconque?
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En 1901, un commando de Boers investit la petite ville de Fouriesfontein. Entre Hollandais, Anglais et métis, la tension devient de plus en plus palpable. Alice, la fille d'un magistrat anglais ; Kallie, le jeune clerc et mademoiselle Godby, la soeur du médecin, racontent ce qu'a été la guerre pour eux. Parallèlement, un écrivain retourne de nos jours à Fouriesfontein, pour mener l'enquête sur Adam Balie, un métis abattu par les Boers. Il se promène dans la ville, invisible de ses habitants et tente de reconstituer le passé...

Lorsque j'ai lu le résumé de Des voix parmi les ombres sur Babelio, dans le cadre de l'opération Masse Critique, j'ai tout de suite été séduite. Je n'avais jamais lu d'auteur sud-africain et je connais assez mal l'histoire de ce pays. Comme tout le monde, j'ai entendu parler de l'apartheid, ou des combats de Mandela. Mais l'origine de ces haines raciales m'échappait totalement. C'est pourquoi j'espérais corriger mon ignorance par cette découverte...

Malheureusement, comme souvent lorsque l'on a des attentes précises en lecture, on est souvent déçu. J'ai lutté pour maintenir mon attention durant les vingt premières pages. Puis j'ai été intriguée, durant une petite trentaine de pages, lorsque le personnage de l'écrivain découvre Fouriesfontein. Il y a dans ces passages une atmosphère étrange, aux confins du fantastique. En effet, l'homme se promène en frôlant des fantômes, observe la vie dans les maisons et les gens qui s'y trouvent...en 1901 ! Cette sorte de perméabilité entre réel et imaginaire, vision avérée ou fruit de son imagination est plutôt intéressante. Cette partie aurait certainement gagné à être développée... mais, au grand dam du lecteur, Karel Schoeman s'en détourne vite. Durant les deux cent pages suivantes, ce sont les voix de Kallie, Alice et Mademoiselle Godby qui interviennent. Mais ces dernières ne nous apprennent strictement rien. "J'avais pourtant dit que je ne savais rien de la guerre", voilà ce que souvent, ces trois voix ressassent, de manière différente et uniforme à la fois. Si elles n'ont rien à dire ces voix, pourquoi les faire sortir de l'ombre ? Pourquoi raconte-t-on des histoires ? Si ce n'est pas pour éclairer, pour apporter de la lumière, justement ?

Karel Schoeman est, parait-il, un grand auteur sud-africain, parmi les plus célèbres et les plus distingués. J'attendais qu'il me transporte, moi petite française ignare, dans cette Afrique du Sud inconnue. Mais j'ai refermé ce roman sans une once de connaissance supplémentaire. Sans compréhension non plus des évènements, qui me paraissent toujours aussi lointains et obscurs. J'ai déploré les nombreuses anecdotes sans intérêt qui s'enchaînent, s'entassent, jusqu'à l'écoeurement. "Ce sont des choses sans importance qui ne valent sûrement pas la peine d'être mentionnées" ; ce sont les personnages eux-mêmes qui le disent. On pourrait me rétorquer que l'auteur veut montrer à quel point la guerre, la haine raciale est insidieuse, banale, anecdotique. Qu'elle prend corps dans l'infime du quotidien, dans ce qui se voit à peine. Mais je répondrais alors que la force des grands livres est de contourner cette difficulté : faire de la banalité quelque chose d'exceptionnel. En l'absence de cette qualité première et en ce qui me concerne, cette lecture fut extrêmement longue et frustrante.

http://manoulivres.canalblog.com/archives/2014/10/28/30807563.html
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Qui n'a jamais imaginé revenir en témoin silencieux dans son propre passé ou celui de ses proches pour comprendre l'enchaînement des évènements à défaut des les changer ? C'est le procédé ingénieux qu'utilise l'auteur dans une longue introduction, parfois fastidieuse, pour comprendre les évènements qui se sont déroulés à Fouriesfontein, petite ville de l'ancienne colonie du Cap au moment de la guerre des Boers. Peu de temps avant Noël de l'année 1901, une bande de rebelles, soutenue par une partie de la communauté blanche d'origine hollandaise, envahit Fouriesfontein. Chassés deux semaines plus tard par les troupes anglaises, leur passage va laisser des cicatrices indélébiles dans le tissu local. Trois témoins livrent leurs souvenirs de cette période troublée. La première Alice, fille du magistrat en poste, représentant de la Couronne, a vécu comme dans un rêve les évènements. Ses souvenirs sont imprécis. le deuxième témoin, Kally, jeune clerc travaillant au bureau du magistrat, raconte les faits. Il garde une neutralité de circonstance, copiée sur l'attitude de son employeur. Mademoiselle Godby, soeur du médecin de secteur, alors décédé, membre actif de la communauté, est le témoin impuissant des oppositions latentes qui traversent la petite société composée de blancs d'origine anglaise et hollandaise et de métis. La guerre met à nue les divisions et fait éclater les rancoeurs et les haines qui marqueront pour longtemps l'Afrique du sud. Qui se souviendra d'Adam Balie, jeune métis, victime de ces violences ? Quelle signification donner à ces évènements tragiques dans un pays où l'injustice et la violence sont devenues banales ? Au lever du jour, notre témoin silencieux s'éloigne. Mission accomplie.
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La guerre des Boers comme événement historique, est peu connue .Elle est pourtant l'un des épisodes majeurs de l'histoire contemporaine de l'Afrique du Sud, renforçant l'identité Afrikaner et le souvenir de la répression exercée par les Britanniques à l'encontre des insurgés Boers.

Le roman de Karel Schoeman, sans entrer dans le détail du déroulement du conflit, sans décrire explicitement ses causes, nous invite à plonger notre regard dans la société sud-africaine coloniale de cette fin du XIXe siècle :le lieu principal est Fouriesfontein , une petite ville de la colonie du Cap, composé de colons d'origine britannique, néerlandaise , et des noirs , indiens et métis .Trois personnages vont exprimer , à tour de rôle , leurs sensations, leurs souvenirs , leurs places dans cette ville de Fouriesfontein , ville représentant une Afrique du Sud en miniature .Le premier récit, celui de Kallie, jeune clerc boiteux , est explicite d'entrée .Ce jeune homme, nommé J.J.K . Kleynhans, se remémore le jour où la guerre a, pour lui, commencé : « Cela, je m'en souviens, de cette belle journée ensoleillée, et de la poussière, des drapeaux, de la musique et de l'excitation qui régnait dans notre petite ville où tous les habitants fêtaient ensemble la libération de Mafeking. Presque tous. »

Kallie livre aussi son sentiment après le départ de l'un des magistrats de la commune , M. Macalister , et le retour des soldats anglais venus libérer ce territoire occupé par les insurgés Boers ; il témoigne du meurtre d'un jeune métis , Adam Balie , assassiné par un commando de jeunes Boers à l'occasion de représailles : « Je ne pouvais rien faire , de toute façon, il était mort, les Boers étaient partis(…) et M .Macalister était à Beaufort. »
Un autre personnage participant à cette confession, mademoiselle Godby, fille d'un médecin de la ville, avoue, elle aussi, l'état des sentiments provoqués par la guerre, peu après sa fin : « Mais les divisions entre nous étaient déjà perceptibles (…) la haine, la rancoeur et l'amertume affleuraient à la surface sous le cours apparemment paisible de nos vies. » Ce qui frappe dans le roman de Karel Schoeman, c'est cette capacité à éclairer les conflits entre communautés par les aspects les plus quotidiens de la vie de cette époque : les quartiers réservés aux métis, l'entre-soi social, familial , communautaire .Le rôle de l'église protestante , admirablement illustré par ce pasteur Boodryck , l'importance des notables , tels que cette famille Fourie , dont le dernier descendant mourra pendant cette guerre des Boers

.Nous retiendrons également le portrait de ce jeune entrepreneur métis , Adam Balie, désireux de s'élever, d'apprendre, pour accéder à une égalité refusée par le système colonial .Un beau portrait panoramique de cette Afrique du Sud , à l'orée du XXe siècle , tout en nuances et qui échappe au piège de la caricature et du réquisitoire a posteriori .



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Et si vous aviez accès à un monde parallèle, un monde faisant partie du passé, dans lequel vous passeriez inaperçu tout en cotoyant et en observant les vivants d'alors, dans leur quotidien ... C'est ce qui arrive au narrateur qui enquête sur une ville isolée d'Afrique du Sud, Fouriesfontein, où est enterré un jeune héros de la guerre qui y sévit début 1900, et dont la visite a pour but de photographier sa tombe. Se déplaçant dans un espace entre deux réalités, dans cette ville spectrale, il croise des gens qui ne le voient pas, une foule autour d'un cercueil, une jeune métisse en pleurs, il entend le galop de chevaux et les voix de cavaliers qu'il ne voit pas lui-même. Ce sont ces faits apparemment sans importance qui seront détaillés au travers de la voix de la fille du magistrat alors en fonction, du clerc assistant du magistrat et de la soeur du médecin. Tous trois ont vécu la guerre, l'arrivée des Boers, les haines raciales; ils en parlent de leur point de vue, évoquent les dissensions provoquées par la guerre, la violence, l'injustice et l'aliénation.
La vie continue, le quotidien est admirablement décrit par trois personnages pour qui la guerre causera une fracture inévitable dans leur vie. Adieu le bonheur et l'insouciance d'antan, la guerre ne change rien, au contraire, les divisions et l'amertume ne cesseront pas avec la paix.
Mais est-il nécessaire d'analyser et de comprendre les comportements et les événements du passé ? Doit-on juste se contenter d'un rôle d'observateur puisque tout ce qui s'est passé échappe à notre contrôle ?
Une très belle écriture fluide et cinématographique pour une description détaillée et puissante des lieux, des comportements, des sentiments de l'époque. de la grande littérature !
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En 1901, Fouriesfontain est une toute petite ville comme bien d'autres, avec son tribunal, sa mairie, son cimetière, ses boutiques et artisans, son école, une population parlant anglais ou hollandais (voire les deux), blanche ou métisse (le quartier métis est à l'écart). Un jour d'été (en décembre) des cavaliers Boers de l'Etat libre d'Orange s'emparent de la ville pendant quelques semaines, puis en sont chassés par les troupes anglaises. Parmi les morts, Giel Fourie, un tout jeune homme ayant rejoint les Boers.

Cent ans plus tard, accompagné d'un photographe, un homme intéressé par l'histoire de la région veut s'arrêter à Fouriesfontain, mais la ville semble impossible à trouver, ensuite une fois dans ses rues il entend et voit des bribes du passé, "plutôt comme un film qui attend attend d'être coupé et monté".
"Les deux mondes, toutefois, sont bien séparés, chacun suit son cours, et de cet autre monde il n'aperçoit que des éclairs, un peu lorsqu'on entend une conversation dans une langue étrangère et que l'on reconnaît ici ou là un mot, une expression que l'on a apprise par hasard, mais sans comprendre quel est le lien qui les unit ni saisir le sens du message."

Voilà comment le lecteur découvre Fouriesfontain, dans une curieuse ambiance floue, guidé vers des événements sans ordre chronologique et des personnages pas connus. Mais émergent des figures, et ce sont Alice, la fille du magistrat écossais, Kallie, le clerc du même magistrat, et Mademoiselle Godby, la soeur du médecin, qui racontent leurs souvenirs de la guerre, souvenirs flous, imprécis, répétés parfois, se complétant ou pas, jusqu'à obtenir une vision prenante de la petite ville en 1901 et de l'ambiance avant, pendant et après les événements.

"Les divisions qui existaient après la guerre n'étaient pas nouvelles, simplement nous ne les avions pas remarquées, elles étaient masquées, un peu comme ces fissures sur un mur que l'on bouche avec du plâtre et que l'on recouvre ensuite de papier peint; les fissures demeurent. Les blessures, les rancunes, les désaccords avaient toujours été là, tout comme la peur et la méfiance - je dirais même l'angoisse, et la haine - car il y avait aussi de l'angoisse et de la haine, et la guerre n'a rien fait d'autre, en définitive, qu'arracher le papier peint et mettre à nu les fissures."

Karel Schoemann est un auteur remarquable : une langue admirable emportant son lecteur, une façon superbe de rendre les atmosphères, les hésitations, le non-dit, les tragédies, l'idée vraiment intéressante de plongée dans l'espace-temps, la lisibilité de l'histoire même si on ne connaît pas l'histoire de l'Afrique du sud, l'intemporalité et l'universalité de l'histoire, finalement.

Le moment le plus fort me restant en mémoire est celui où Mademoiselle Godby se rend auprès du magistrat Boer et qu'elle réalise que "contre ce masque souriant mes mots ne pouvaient rien, or les mots étaient tout ce que j'avais à ma disposition : des notions comme la justesse, la bienséance, l'humanité ou la justice n'avaient plus aucune valeur, il n'y avait plus de vocabulaire commun, pas de système de valeurs que nous eussions pu partager pour servir de base à un dialogue. J'étais au bord d'un abîme."

J'en ferais bien encore un coup de coeur, en tout cas c'est dans ma catégorie 'très beau roman à lire absolument'. Troisième roman que je lis, troisième choc!
Lien : http://enlisantenvoyageant.b..
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D'abord, les ombres.
Celles qui hantent la petite ville étrangement déserte de Fouriesfontein, fantômes du passé qui répètent inlassablement les bribes des mêmes scènes, auxquelles assiste un narrateur -reporter, historien, essayiste ?- parti sur les traces d'un jeune rebelle ayant trouvé un siècle auparavant la mort lors de la guerre des Boers*, dont la physionomie, aperçue sur une photographie, est restée gravée dans son esprit... le sens de ce ballet surnaturel dont il admet pourtant la légitimité avec une patience respectueuse, lui est d'emblée insaisissable, symbole de la difficulté avec laquelle L Histoire, mouvante, subjective et multiforme, se laisse appréhender.

Ensuite, les voix.
Au nombre de trois, elles appartiennent à des narrateurs contemporains des événements, tous anglais. Chacun d'entre eux, plusieurs décennies après les faits, déroule un long monologue, visiblement en réponse à une question qui lui a été posée, mais qui est tue au lecteur : quels souvenirs ont-ils gardés des mois durant lesquels Fouriesfontein subit les conséquences de la guerre des Boers, son occupation par les forces rebelles, puis par l'armée anglaise ?

L'une est la fille du magistrat alors en poste à Fouriesfontein, l'autre fût le clerc de ce même magistrat. La troisième était la soeur d'un médecin décédé au moment des faits. Tous insistent régulièrement sur la confusion de leurs souvenirs, soi-disant due à l'absence d'événements marquants ou véritablement représentatifs de la violence de la guerre. Ils ont également à coeur de faire comprendre le peu d'importance de leurs témoignages, ils n'ont pas été des acteurs de cette guerre, mais des figures insignifiantes, ayant subi cet épisode de manière plutôt passive. Ce sont d'ailleurs surtout des souvenirs personnels qu'ils évoquent, émaillant leur narration de nombreuses répétitions, en proie à la difficulté de se remémorer des faits dont le passage du temps a oblitéré la cohérence chronologique.

Peu à peu émergent de cet amas de souvenirs, constitués d'anecdotes, de digressions, les réminiscences de l'atmosphère de suspicion, d'animosité qui a progressivement enveloppé la petite communauté de Fouriesfontein, modifiant les relations entre les individus, créant un climat de crainte diffuse. Émergent ainsi presque subrepticement des témoignages les petites humiliations subies par certains anglais de la part de l'occupant Boer, l'angoisse suscitée par les rumeurs contradictoires sur l'évolution du conflit, l'ostracisme grandissant manifesté envers les britanniques de la part de leurs concitoyens d'origine néerlandaise.

"Des voix parmi les ombres" aborde cette période de l'histoire sud-africaine non par la grande porte, ses épisodes célèbres, ses figures légendaires, ou ses hauts faits d'armes, mais par l'intermédiaire de ses résonances sur l'existence quotidienne des individus, et des cicatrices sous-jacentes mais durables qu'elle laisse dans la mémoire des peuples.

Les avis très élogieux exprimés sur ce titre, me font d'autant plus regretter les réticences que je dois personnellement avouer le concernant... J'ai eu de réelles difficultés à maintenir mon intérêt tout au long du roman, la principale raison en étant ces répétitions évoquées ci-dessus, la portée du propos se diluant dans les tergiversations narratives des personnages. L'auteur construit son récit comme par à-coups, au gré d'une progression qui m'a paru poussive. Cette impression s'est cependant amenuisée avec le témoignage de la troisième narratrice, que j'ai trouvé plus intéressant, car moins centré sur elle-même, et ouvrant l'intrigue sur des problématiques jusqu'alors occultées, telle la condition des métis du Cap au sein de cette Afrique du sud du début du XXe siècle.
Lien : http://bookin-inganmic.blogs..
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Un auteur accompagné d'un photographe sont chargés de la rédaction d'un livre sur la seconde guerre des Boers ayant secoué la province du Cap au début du XXème siècle. L'auteur se concentre plus particulièrement sur la région de la petite ville de Fouriesfontein car un jeune homme de bonne famille, ayant rejoint le rang des rebelles boers, a été tué lors de cette guerre et a ensuite été considéré comme un héros local. Mais alors qu'ils cherchent comme rejoindre la ville, l'auteur est projeté, invisible, dans un Fouriesfontein bloqué dans le passé et revivant sans cesse les mêmes jours d'occupation tout d'abord par les troupes boers et ensuite par les troupes anglaises …
Je pensais que j'allais assez apprécier ce roman car il traite d'une période intéressante mais que je connais peu et d'un pays que j'ai déjà visité et qui m'avait beaucoup plu. Hélas, dès le premier chapitre, voire même les premières phrases, j'ai su que ça allait bloquer ! Tout d'abord, le style ne m'a pas trop convenu : de longues phrases, de grands paragraphes, peu de chapitres, des tournures parfois alambiquées, un ton pompeux et professoral … j'avais la sensation de lire « en apnée », sans savoir exactement quand m'arrêter car l'ensemble est dense et sans pause marquante. Qui plus est, moi qui pensais apprendre plein de choses sur cette période historique, je n'ai pas appris grand chose car rien n'est expliqué ni détaillé. Il a même fallu que j'aille sur Internet pour me faire une idée plus claire de l'ensemble ! Pourtant, le premier chapitre ressemble presque à un documentaire, avec une présentation formelle de la ville et de son histoire (mais hélas, surtout celles des familles qui l'ont fondée) mais le second chapitre nous plonge dans une ambiance bizarre avec cet auteur en quête d'informations et projeté dans le passé en simple observateur. Ce que j'ai préféré, c'est de voir les personnages qu'il rencontre prendre vie et se mettre à leur tour à raconter la période de la guerre à Fouriesfontein. Chacun a son ton, sa voix, même si certains m'ont plutôt agacée par leurs répétitions (particulièrement Alice). C'est les chapitres que j'ai le plus apprécié car ils soulèvent des questions philosophiques sur la guerre, sur les hommes, sur nos comportements (je pense surtout au chapitre dédié à Mademoiselle Godby et celui dédié à Kallie) mais j'ai trouvé dommage de devoir avaler plus de 170 pages que j'ai trouvées passablement imbuvables pour pouvoir en lire une grosse centaine qui m'ont mieux convenu (sans pour autant en faire des folies !). Autant dire que je ne suis pas du tout tentée de découvrir un autre roman de cette auteure sud-africaine car je me suis vraiment trop trainé sur celui-ci.
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