Appelons un chat un chat, la chatte qui soulève tant de questions, non pas pour deviner qui y est entré, car ce serait vraiment pénis perdu, mais pour deviner à qui elle appartient, surtout si elle s'intitule «
L'origine du monde » serait Constance Queniault.
Pourquoi elle, et pas l'amante entretenue par Dumas fils et Kalil-Bey, Jeanne de Tourbey ? Elle a partagé avec parcimonie et ardeur les faveurs payées, entre autres, d'Emile de Girardin et du
Prince Napoléon. C'est une biche, traduisons une… non, impossible de traduire sans être grossier.
Et pourquoi pas Joanna Hifferman, l'Irlandaise rousse, la maitresse de Whistler que Courbet avait peinte dans le Sommeil, (deux femmes entrelacées après l'amour) ?
Claude Shopp cite
Alexandre Dumas fils qui critique violemment Courbet, lequel gâche son talent « avec l'interview de Melle Queniault de l'Opéra, pour le Turc qui s'y hébergeait de tems en tems. »
Or nous dit finement
Claude Schopp, mieux vaut remplacer le mot interview par intérieur.
Et oui, Kalil Bey ne collectionnait pas seulement les tableaux, mais aussi les femmes, dont Constance Queniault. On sait que c'est lui qui a commandé
l'Origine du monde à Courbet.
Il fréquente la « bicherie », le monde des femmes entretenues, il s'y héberge de temps en temps, dans leurs différents intérieurs, s'héberger, en voilà un mot poétique.
L'auteur, lui, nous héberge dans une logorrhée sans queue ni tête, et surtout sans queue, où il nous parle de ce statut des femmes entretenues- qui, après la Dame aux camélias, pensaient toutes avoir droit à l'amour d'un duc- aux transformations socio-économiques et sociales, à l'âge trop avancé de Constance pour être peinte nue et poser les jambes écartées, (34 ans, pensez donc, je préfère pas voir).
Et pourtant, tellement fier de sa compréhension à lui, le spécialiste des Deux
Alexandre Dumas père et fils, il persévère et l'enfonce.
Lacan : « Le phallus est dans le tableau »
L'auteur ne s'aventure pas dans la psychologie du Turc, (qui aurait voulu garder un petit souvenir de celle qui lui a procuré des émotions particulières, et qui lui a fait gagner beaucoup d'argent au jeu, détail non négligeable) ni dans celle du modèle, comme l'avait fait
Christine Orban dans « J'étais à
l'origine du monde ». Et encore moins dans la psychologie de Courbet.
Ce qui préoccupe
Claude Schopp, c'est, oubliant souvent de fermer les guillemets, de pouvoir montrer l'étendue de son savoir, avec notes à l'appui, concernant l'époque, et de conclure que, finalement, le modèle de «
l'origine du monde » qui a plumé les hommes, s'en sort bien.
Et il le dit style politiquement correct : contrairement à la Nana de
Zola, Constance, si elle a dû, un temps, se prêter au désir des hommes, c'est pour, à la fin, triompher.
Combat de femme, corps triomphant, plumage réussi.
Comment peut-on se pencher sur ce tableau dont la force érotique crève toujours les yeux, en rasant non pas le pubis certes flamboyant de la belle, mais nous, lecteurs ?
Alors que finalement, ce qui reste, c'est le choc de la vision, peu importe qui est à
l'origine du monde, le monde a bien commencé.