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EAN : 9782371190573
1008 pages
Piranha (20/04/2017)
3.43/5   46 notes
Résumé :
Tel Aviv, novembre 2011. Tom Hagen, grand reporter de guerre, est au fond du trou à la suite d'une opération désastreuse en Afghanistan. Mis sur la piste de données con¿dentielles prouvant les activités illégales des Services de sécurité intérieure israéliens, il voit une chance inouïe de relancer sa carrière. Mais ce qui devait être un énorme scoop se transforme en une mortelle réaction en chaîne. Livré à lui-même, il se retrouve au cœur d'une gigantesque conspirat... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (27) Voir plus Ajouter une critique
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6 cm au garrot, 1253 pages d'envergure, 648 grammes à la pesée, petite taille des caractères , là je sens que tu admires mon abnégation, hein, pour avoir osé me lancer dans ce livre de poche ( si si, Pocket qu'ils disent ) et d'être allée jusqu'au bout, sir, yes sir !

Et si je speeche le contenu, ton admiration va encore grimper d'un cran.
Deux fils conducteurs qui ne se croisent que vers la six-centième page :

2011 : on suit le journaliste reporter de guerre Tom Hagen, au fond du trou depuis une calamiteuse opération chez les Talibans afghans pour retrouver des otages allemands. Il tombe sur un gros dossier merdeux sur des activités illégales compromettant le Shin Beth ( service de sécurité israélien ). Il y voit un énorme scoop, de futures breaking news qui pourraient relancer sa carrière. Mais voilà, c'est l'engrenage, la traque commence, sa traque qui révèle une conspiration de ouf qui remonte jusqu'à la Palestine sous mandant britannique ( après la Première guerre mondiale donc ), les morts pleuvent autour de lui.

1929 à 2006 : tu révises l'histoire d'Israël à travers les familles d'Arik, Jehuda et Benjamin. Tout y est : l'immigration juive en Palestine, la création d'une culture hébraïque au Proche-Orient, la création d'Israël par Ben Gourion en 1948, les guerres israélo-arabes ( Six-Jours, Kippour entre autres ), la colonisation israélienne dans le Sinaï, en Cisjordanie, dans la bande de Gaza, les massacres de Sabra et Chatila en 1982, Arafat, les rêves de paix assassinés avec Shimon Peres, la construction du Mur.

Ouch, tu l'as compris, c'est du très très lourd, un peu dans le style du grand James Ellroy qui adore entremêler personnages historiques et fiction. L'auteur l'assume totalement dès le prologue où il annonce avoir choisir le personnage d'Ariel Sharon comme un des protagonistes principaux . On ne retrouve pas le style flamboyant du maître, mais l'écriture de Frank Schätzing est efficace avec des passages lyriques sous speed très réussis.

C'est souvent passionnant même si parfois je me suis perdue et qu'il y a quelques longueurs ( ah ah la bonne blague , 1253 pages je vous dis ). Mais on se raccroche toujours aux branches car l'auteur sait, lui, où il va. Il fait montrer d'une grande érudition géopolitique tout en étant très pédago et clair. le ton est souvent caustique pour décrire les gros râtés de la politique israélienne, européenne et arabe au Proche-Orient, tout le monde en prend pour son grade sans distinction.

Surtout, Frank Schätzing a réussi à insuffler de la chair dans son titanesque thriller grâce à des personnages très intéressants car complexes et non linéaires, plus particulièrement Shoshana Cox, la Marvel girl du Shin Beth, croisement improbable entre Brigitte Nielsen et Godzilla. Et Yaël Kahn, qui représente à elle seule toute la jeune génération israélienne, celle de maintenant, qui se retourne sur le mythe monolithique d'Israël agrémenté de récits fondateurs et d'épopées héroïques des pionniers qu'ont été ses arrières-grands-parents. La haine en héritage, broyée entre les forces qui déchirent Israël, messianistes, nationaux-religieux et laïcs perdus, née pendant une intifada, à courir sans perspective derrière le drame interminable du conflit du Proche-Orient. C'est avec Yaël que l'on réfléchit à tout cela, elle est perdue, elle prend ses responsabilités ou croit les prendre, elle agit, elle se trompe, on la suit. C'est elle qui nous embarque le plus.

Sacré thriller qui ose traiter cette histoire-là en mode décomplexé mais pointu.

Lu dans le cadre du jury Prix du Meilleur polar des lecteurs Points.
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Tout d'abord, je remercie NetGalley et les éditions Piranha pour l'envoi de ce roman. Je ne connaissais pas du tout l'auteur et c'est la 4ème de couv' qui a titillé mon neurone.

Il faut annoncer la couleur dès le départ: c'est un petit pavé de près de 1.000 pages! Donc préparez-vous psychologiquement à un long voyage!

Mesdames et messieurs, deux fils conducteurs seront vos guides!

Nous avons d'une part Tom Hagen, grand reporter de guerre allemand qui flaire les points chauds et se retrouve toujours au coeur de l'action. Là, Afghanistan, 2008, prise d'otages. Journaliste de renom mais non sans y laisser quelques plumes, non sans y laisser un peu d'âme. Jusqu'à l'audace de trop, jusqu'au drame qui le précipite au ban professionnel et l'ensevelit dans un abîme de dépression.

Et nous avons d'autre part la famille Kahn, israélienne, dont l'histoire se confond avec celle de la communauté juive au Proche Orient, et qui nous est contée à partir de 1929.

Ces deux fils se rejoignent en 2011, se lient et s'entremêlent quand Tom Hagen se retrouve en possession de documents compromettants censés relancer sa carrière. Mais le Shin Bet, le service de sécurité intérieur israélien, n'est pas le seul à chercher à éliminer la menace qui plane…

Je dois bien avouer qu'au départ, je fus décontenancée. Après un long chapitre trépidant aux côtés de Hagen, dans les montagnes afghanes, me voici catapultée en Palestine en 1929. Je ne voyais pas du tout où l'auteur voulait m'emmener et j'ai eu du mal à lâcher les rênes et me laisser conduire.

Car même si les chapitres sont datés et situés, les transitions manquent parfois de subtilité, laissent un petit moment de flottement avant de recentrer l'attention sur les bons protagonistes, à la période adéquate.

Mais on s'y fait.
Le ton est d'une ironie mordante, voire cynique. L'auteur parfois te parle, te tutoies, t'intègre totalement dans le récit, alors qu'à d'autres moments, la narration est davantage distanciée.

La présence de Tom Hagen, allemand, journaliste de surcroît, nous permet de prendre un peu de distance, d'avoir un aperçu et un ressenti occidental, si besoin est, mais il symbolise également le monde des médias et… la conscience du métier. Il est celui qu'on admire quand il se met en danger pour nous apporter la vérité et la réalité des choses, et celui qu'on méprise quand son seul intérêt est sa carrière, faire les gros titres des journaux, quitte à prendre des libertés avec cette fameuse réalité. L'intégrité de l'homme est ici mise à mal quand son travail lui grignote l'âme et que la concurrence est devenue féroce. Tom Hagen, en quête de rédemption, risque de s'y perdre davantage et cette fragilité le rend attachant au fil des pages.

Il est au coeur d'un scandale où sa carrière est en balance avec des vies, ou quand un mensonge est le domino qui en entraîne d'autres dans une cascade sanglante… Une course-poursuite trépidante, avec un suspens omniprésent, surtout dans la seconde partie du roman!

Le style est énergique, nerveux, enlevé. Alternance de passages détaillés et apposition de phrases courtes débitées comme une décharge de Kalachnikov!
C'est qu'il faut l'accrocher le lecteur, et ne pas le perdre en cours de route de ces mille pages!
C'est pourquoi le rythme colle tout à fait au style ou vice et versa! Nous traversons des zones de guerre, ne l'oubliez pas! Nous ne voguons pas au fil d'une croisière sur un lac calme et sans ride!

Le récit des origines du conflit israélo-palestien est passionnant, extrêmement bien documenté, finement analysé et échappe à toute lourdeur propre à certains essais historiques car personnifié par le destin d'individus précis auxquels nous nous sommes attachés depuis 1929.
L'auteur a le talent de mêler tous les événements essentiels à la grande Histoire dans une chronique familiale, pour mieux nous approprier ces éléments et les comprendre. Les faits historiques et la fiction s'imbriquent naturellement pour une fresque addictive.

Le seul bémol que je relève dans ce roman est qu'il ne s'adresse, à mon sens, qu'au lecteur ayant déjà des bases relativement solides de géo-politique et d'Histoire.
Tout comme pour le Printemps arabe se dirigeant vers un « automne désagréable » et un « hiver islamiste », les événements libyens ayant mené à la chute de Kadhafi, syriens avec la mise à mal de la présidence de Bachar el-Assad ou la nature de l'engagement international en Afghanistan, le lecteur occidental lambda peut se retrouver vite largué sur le bord du chemin par le destin de ces juifs en Palestine.

Étant passionnée d'Histoire et de géo-politique, j'ai adoré avoir ce condensé sur ce conflit du Proche Orient dont la naissance nous apparaît si lointaine et obscure et dont on ne voit pas la fin, avec le regain de tensions de ce début d'année 2017.

On ne peut pas parler D'Israël et du Proche Orient en général sans parler de religions, de terrorisme et de relations internationales.

En cela, l'auteur a su, avec talent, tour à tour, relater des événements tragiques qui soulèvent le coeur, comme le massacre de Sabra et Chatila en 1982, nous confier avec suffisamment d'impartialité les points de vue religieux de chaque partie incriminée, au travers des réflexions des personnages et de leurs conversations, nous exposer l'imbroglio des pressions et des incohérences de l'influence internationale comme la naissance d'amitiés improbables.

Mais au bout du compte, il reste ces questions lancinantes:
Comment un conflit basé sur la religion, les commandements d'un Dieu qu'on ne voit pas, dont on remet en cause l'existence réelle, dont les préceptes mêmes sont interprétés de différentes manières selon les groupuscules, peut trouver une issue juste et pragmatique?
Comment échapper aux luttes de pouvoir et de domination que se livrent les hommes politiques et les leaders religieux et qui gangrènent tout processus de paix? Comment y voir clair quand les israéliens tuent aussi bien les juifs que les musulmans?

Si l'Histoire avec un grand H a la part belle dans ce roman, les aspects humains sont omniprésents! Nous nous attachons à ses personnages de fiction totalement ancrés dans la réalité. Ils naissent, grandissent, reçoivent un héritage, une éducation, s'aiment, se haïssent et se trahissent, traversent des joies mais aussi tellement de douleurs.
Entre concessions, sacrifices et combats, nous vivons avec eux l'horreur de la perte, la souffrance, la peur, l'impuissance et parfois le renoncement. L'individu face au monde: entre guerres intestines, pressions, soutiens et trahisons des pays occidentaux ou du Proche Orient, au gré de leurs intérêts, entre attaques extérieures et manigances intérieures, comment l'homme vit… ou survit. Comment peut-il se projeter dans un monde d'instabilité où la terreur est maître?

Il y a les hommes, les Dieux et la guerre.
Mais il y a aussi la terre. Celle qui est essentielle: objet de convoitise, le centre de toutes les attentions.
Cette côte orientale de la Méditerranée où se côtoient bon gré mal gré Israël, le Liban, la Syrie, la Jordanie, la Cisjordanie, l'Égypte et la Bande de Gaza.
Cette terre tant malmenée par les combats, défigurée par les frontières artificielles changeantes et sanglantes.
Cette terre, du désert du Néguev jusqu'au Lac de Tibériade en passant par les collines de Samarie ou les rivages de la Méditerranée, nous envoûte pourtant au fil des pages. Nous sentons l'odeur des citrons, des épices et l'air iodé de mer comme le souffre des explosions.
Imprégné de l'ambiance des souks comme celle, austère, des colonies juives, le lecteur est dépaysé dans ce décor majestueux et terrible tout à la fois.

Il y aurait tant à dire sur ce qu'exprime Breaking news et ce qu'il peut susciter chez son lecteur!
Vous l'aurez compris, ce roman se veut très actuel et complet, au coeur du tumulte du Proche Orient, passé et actuel.
Ce roman dénonce l'horreur et l'absurdité d'un conflit transmis de génération en génération en une fresque sociale et politique palpitante et dramatique, et surtout tellement humaine.
Une lecture que j'ai adorée: longue certes, exigeante également car les thèmes abordés sont denses et compliqués parfois, mais tellement addictive et passionnante!
Lien : http://livrenvieblackkatsblo..
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Les correspondants de guerre sont drogués à l'adrénaline. Tom Hagen est l'un d'entre eux. Mais est-il le personnage principal de ce pavé de 1000 pages que nous a pondu Frank Schätzing ? Il en est de toute évidence le fil rouge. Partout où des bombes éclatent, des maison s'effondrent, des dommages collatéraux s'installent, il traîne sa veste reporter kaki, son PC portable, son Nagra et sas rangers.
Ainsi débute « Breaking News » (les dépêches urgentes) en Afghanistan en 2008 avec une tentative de reportage pour retrouver des otages d'une ONG enlevés par les Talibans. Tentative, car la mission se terminera par un fiasco sanglant. Téméraire au-delà de l'insconcience, Tom Hagen y perd une collègue (sa compagne du moment), un ami (son fixeur). Talentueux, reconnu parmi les meilleurs de sa partie, il est alors placé au ban de la profession. Il se retrouve plusieurs années durant à piger pour un site internet, sur tous les théâtres des conflits mondiaux, en Libye notamment avant d'atterrir en Israël où il retrouve son ex-photographe de l'époque afghane.
C'est le début d'une aventure qui ira de Charybde en Sylla. Instruit de l'existence de CD renfermant des secrets brûlants sur le passé politique récent du pays, il y voit la possibilité de retrouver la lumière et son lustre d'antan. Il va convaincre ses anciens employeurs d'acheter cette mine d'or. Dès lors, la machine s'embraye. Les services secrets, les nationaux-religieux, tous les partis et personnages qui ont tout intérêt à ce que ces informations ne soient pas dévoilées sur la place publique partent à la chasse aux CD et donc à Tom Hagen. Avec, là encore, tous les dommages collatéraux que cela implique.
En l'espace de moins de deux ans, cet énorme volume est le 3e que je dévore (bien qu'il m'ait fallu quelques semaines pour le lire) après le Cartel de Don Winslow et les Pukhtu 1 et 2 de Doa. Aucun rapport entre eux, sinon peut-être, l'hémoglobine qui s'échappe des pages et la personnalité de nombreux acteurs qui font que l'on s'accroche à un scenario qui compte, tout de même, comme dans les ouvrages cités, quelques longueurs qui auraient pu être évitables.
Néanmoins, ce roman de guerre, également thriller est aussi une fresque historique (on remonte en 1928 de la création de l'état d'Israël, à son extension par les colons aux territoires occupés, durant les guerres successives contre les voisins arabes, puis au conflit palestinien) ; une saga familiale (on suit à travers plus d'un demi-siècle deux familles d'immigrés, devenus des colons déracinés) ; et plus encore une formidable intrigue mêlant des grands noms de la politique de cette région poudrière qu'est la Palestine et Israël. A telle enseigne que face à l'imagination bouillonnante de l'auteur, on ne sait pas (plus) qu'elle peut être la part de vérité et de fiction qui s'en échappe ? Qui a dupé qui ? Qui sont les responsables ?
Il est toutefois certain qu'avec son extrapolation de l'histoire, Frank Schätzing a mis à jour une évidence : l'extrémisme religieux va à l'encontre de tous ses préceptes, aliène ceux qui y adhèrent et que, de fait, le conflit palestino-israëlien n'est pas prêt de s'éteindre.

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2008, Afghanistan.
Tom Hagen, reporter allemand en "zones de conflit" -euphémisme pour des guerres qui ne disent pas leur nom- dopé à l'adrénaline, signe avec l'erreur qu'il commet en s'imposant sur le théâtre d'une prise d'otages, la fin d'une brillante carrière…
On le retrouve trois ans plus tard en Syrie puis en Israël, envoyé d'un médiocre journal du net, noyant dans l'alcool le souvenir de sa chute et ses démons. Il n'attend plus rien de bon d'une humanité gouvernée par son aptitude à la violence et son goût pour la domination, mais son cynisme et son épuisement ne l'empêchent pas d'éprouver le besoin de reconquérir ne serait-ce que quelques bribes de sa gloire défunte, quitte à renier les derniers sacro-saints commandements du journaliste que cet arrogant électron libre -qui fait davantage penser à un mercenaire qu'à un reporter- n'a pas encore bafoués…

Fin des années 20, Palestine.
Les familles Kahn et Scheinermann viennent d'émigrer depuis une Europe où ils se sentaient, en tant que juifs, de plus en plus indésirables. Les jumeaux Kahn, Jehuda et Benjamin, et le fils Scheinermann, Arik, nouent une indéfectible amitié. En nous faisant suivre leurs destinées, et celles de leurs propres descendants, jusqu'à nos jours (parce qu'il faut bien à un moment que les deux pans du récit se rejoignent) l'auteur en fera les représentants des différentes postures qu'adopteront les israéliens face aux enjeux déterminant l'avenir de leur jeune nation. L'intransigeance du futur rabbin nationaliste Benjamin s'opposera ainsi au pacifisme libéral de son frère Jehuda, colon par pragmatisme plus que par conviction. Quant à Arik, après une efficace carrière militaire, il atteindra, sous le nom d'Ariel Sharon - dont l'auteur a fait, ainsi qu'il l'explique en préambule au récit, un personnage romanesque- les plus hautes sphères de l'Etat…

Avec la relation de leurs existences et de celles de leurs proches, Franck Schätzing balaie plus de huit décennies d'histoire israélienne, et de son imbrication avec celle du Proche-Orient. Des prémisses de la naissance de l'état hébreu à 2011, où Ariel Sharon est plongé dans le coma suite à une attaque cérébrale, il déroule minutieusement les étapes du conflit israélo-palestinien, reconstitue ses mécanismes, partage les responsabilités dans l'origine et le maintien du conflit, exprime la complexité qu'ajoute à la situation les intérêts parfois contraires au sein d'un même camp. Il décrit la mutation progressive qui fait de l'état laïc qu'était initialement Israël une nation sous l'emprise croissante du religieux, démontre l'impuissance des concessions accordées lors des efforts de paix face aux ambitions individuelles et au fanatisme d'une poignée de fous, quel que soit leur camp.
En nous faisant traverser villes en ruines et champs de batailles, en nous faisant entendre tantôt les discussions au sein des cabinets ministériels ou des bureaux depuis lesquels officient les têtes pensantes des services secrets, tantôt les confidences d'un Sharon dont les volte-face et les apparentes contradictions sont à l'image du noeud gordien qu'est la situation du Proche-Orient, il nous fait vivre la guerre comme l'insécurité quotidienne, aborde l'illustre et l'individuel, confronte la sphère intime aux contraintes géopolitiques.
En mêlant événements historiques et fiction, en projetant le destin de ses héros dans l'inextricable spirale de représailles, de terreur et de violence, il plonge dans les racines - désillusions, spoliations, injustices – des maux dont le monde subit encore aujourd'hui les répercussions.

J'ai personnellement trouvé tout ce contexte passionnant, même si la volonté d'exhaustivité et de clarté de Franck Schätzing –dont le roman est très bien documenté-, m'a parfois donné le sentiment de lire "le conflit israélo-palestinien pour les nuls". On pourrait de plus lui reprocher d'avoir inutilement étoffer son roman déjà dense (plus de 1200 pages au format poche) de l'intrigue qui, entre espionnage et aventure, met en scène Tom Hagen, mais j'ai finalement trouvé qu'elle permettait au récit de conserver un certain rythme, et de nous replacer, à intervalles réguliers, du côté de la fiction. Car pris par l'ampleur de son ambitieux projet, l'auteur a parfois tendance à engloutir ses personnages dans sa vision à portée historique, dont ils deviennent alors de simples faire-valoir. Mais lui-même a dû prendre conscience de cette propension, qu'il compense par quelques beaux passages exprimant avec justesse et même une certaine poésie les amertumes et les espérances de ses héros, leurs effondrements et leurs incertitudes, leur restituant ainsi leur palpabilité. Par ailleurs, il exploite judicieusement la dimension générationnelle de son récit, en abordant avec intelligence et sensibilité la difficulté pour les citoyens d'aujourd'hui à composer avec le lourd héritage de haine laissés par leurs aînés.

Aussi, malgré sa longueur et les légers bémols évoqués ci-dessus, je n'ai jamais trouvé ce roman fastidieux, et j'en recommande chaudement la lecture !
Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
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« Maintenant écoutez bien, Sugar Daddy. Là où je vis, il y a quatre points cardinaux. Ailleurs aussi. Mais bizarrement, moi, je ne vois que de la merde, quelle que soit la direction dans laquelle je me tourne. Il y en a une cinquième ? Je serais ravie de le savoir. Voilà, maintenant, vous connaissez mes perspectives. » (page 291)
C'est ainsi que s'exprime Soshana Cox lorsqu'elle s'adresse à l'homme qui lui propose de la recruter au sein du Shin Beth, le service de sécurité intérieure israélien. Assurément le personnage le plus intéressant de ce pavé de 994 pages, car Frank Schätzing ne s'intéresse que très peu aux personnages de Breaking News, écrasés qu'ils sont par l'ampleur de ce roman d'espionnage qui se veut une somme, somme romanesque, fresque historique, saga familiale, thriller... Ou plutôt, les personnages n'intéressent l'auteur que dans l'exacte mesure où ils servent fidèlement son récit.
Je vais être clair : j'ai abandonné la lecture de ce roman vendu comme une « thriller palpitant » (rassurez-vous si vous êtes cardiaques, les palpitations que ce roman pourrait provoquer – sait-on jamais – seront sans incidence sur votre santé) à la 384 pages. Pourquoi ? Parce que je me suis ennuyé ferme ! Est-ce à dire que Breaking News est un mauvais roman ? Non, loin de là.
Frank Schätzing tenait un sujet passionnant. Voici le résumé du roman par l'éditeur :
« Tel Aviv, mai 1948. La création de l'État d'Israël proclamée, le rêve de Jehuda et d'Arik devient réalité. Nés à la fi n des années vingt dans une communauté installée en Palestine, les deux garçons ont vécu, côte à côte, adolescents, la violence de la lutte pour la possession de ce bout de terre.
Tel Aviv, novembre 2011. Tom Hagen, grand reporter de guerre, est au fond du trou à la suite d'une opération désastreuse en Afghanistan. Mis sur la piste de données confidentielles prouvant les activités illégales des Services de sécurité intérieure israéliens, il voit une chance inouïe de relancer sa carrière. Mais ce qui devait être un énorme scoop se transforme en une mortelle réaction en chaîne. Livré à lui-même, il se retrouve au coeur d'une gigantesque conspiration dont les racines remontent à la Palestine sous mandat britannique. »
Pour écrire Breaking News Frank Schätzing a eu accès à des sources de premier plan. Malheureusement cela ne suffit pas pour construire un bon thriller et captiver le lecteur. Ses personnages ne sont que de pâles figurants dans une superproduction technicolor. On ne parvient à aucun moment à s'intéresser véritablement à eux. Tout est à la fois trop maîtrisé et sans grand relief. Les scènes se succèdent, toutes narrées d'une voix assez monocorde, rien qui ne vienne faire palpiter le coeur du lecteur.
Parfois le style se réduit à une succession de phrases syncopées qui n'aident nullement à redonner du souffle : « le rédacteur en chef. Discussion avec Hambourg, l'avant-veille. » (p. 80) Ce genre de tic stylistique agaçant revient régulièrement et ne permet pas d'accélérer le rythme, bien au contraire, il heurte la vue, fragmente la lecture.
La question est d'ailleurs de savoir qui s'exprime, qui est le véritable narrateur de cette fresque hyper documentée, comme par exemple page 217 lorsque est évoqué le statut de « zone sous surveillance internationale » de Jérusalem. « Grotesque », lit-on. Un jugement qui tombe là, sans aucun filtre, sans explication. L'auteur livre son opinion sur l'Histoire. Il aurait pu laisser ses personnages (des personnages historiques pour la plupart, notamment Ariel Sharon) le faire ou les laisser agir de manière à ce que le lecteur en tire ses propres conclusions.
J'ai eu à plusieurs reprises l'impression de lire l'article (un très long article) d'un reporter, un article très documenté, où se mêleraient des éléments de fiction, et dans lequel le journaliste, sous couvert de signer une oeuvre de fiction, se permettrait de donner son opinion.
Tout était pourtant réuni pour faire de Breaking News un grand roman : un sujet passionnant, des sources innombrables…
Je ne déconseille néanmoins pas la lecture de ce livre. D'abord parce que je n'en ai lu qu'un tiers, ce qui à mes yeux ne suffit pas pour porter un jugement ferme sur l'oeuvre. Certes, je me suis ennuyé mais peut-être que mon intérêt aurait crû par la suite. Ensuite, je suis convaincu que les qualités de ce roman (car il y en a) sauront séduire d'autres lecteurs.
Lien : https://chroniquesdesimposte..
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Citations et extraits (16) Voir plus Ajouter une citation
Shalom, reprend Carmichael en tortillant sa barbiche. Tu sais que je n'ai rien contre les Arabes, j'ai des amis arabes, j'ai des amis juifs, chacun a ses bons côtés, mais ils deviennent dingues, ça ne peut que s'achever dans le chaos, rejoins ta famille, tout de suite, protège ta famille, tu n'as le droit de ne penser qu'à rien d'autre, vas-y, mais ne fait rien non plus de précipité, repasse vite ici boire un café, tu as forcément le temps, God save the Queen.
King, répond Shalom machinalement.
Depuis trente-six ans.
Ah oui. Le Britannique secoue la tête. Bizarre. J'avais justement une vision. Peu importe. Ce pays vous met les idées en bouillie.
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Parce que les taliban ont compris que cette guerre ne se gagnera que dans les médias. Et les médias en ont assez de zoomer sans arrêt sur la même flaque de sang. Aussi tragique que puisse être le fait que des civils sont réduits en charpie et que des caporaux rentrent au pays dans des cercueils, le monde s’y habitue. Qui pose encore la moindre question sur l’attentat quotidien à la voiture piégée en Irak? Ce ne sont plus des informations. C’est un bruit de fond.
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Sharon : Non, pas du tout. Mais je suis issu d'une famille de sionistes pragmatiques. Nous avons appris que les Juifs ne devraient pas fonder leur existence dans un monde hostile sur la seule confiance ou sur les seuls traités. Malgré tout, je n'écarterais aucune option a priori.
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- Tu écris pour un journal important ?
- C'est bien cela.
- Et il est dans ton pouvoir d'influencer l'opinion publique de ton pays.
- Ce qui est en mon pouvoir, surtout, c'est d'influencer les décisions de mon gouvernement.
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«[...] ça m'en rappelle une bonne , tu la connais ? Bombardement aérien de tous les côtés , ça pète , ça tombe , et les sosies de Kadhafi sont tous convoqués dans sa tente . Mais ils n'y trouvent que Saif al-Islam , le fils de Kadhafi , tu sais bien , qui se pavane comme à la parade et annonce aux sosies : Bon , messieurs, il y a une bonne et une mauvaise nouvelle . Commençons par la bonne : mon père est vivant . » Ibrahim se met à trembler de rire , son double menton clapote de plaisir .« Et maintenant la mauvaise : lors de son combat héroïque pour la Lybie , il a perdu le bras gauche , l'oeil droit et la jambe droite !»
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