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Critique de batlamb


Cette oeuvre débute par une bien étrange préface de l'auteur, une sorte de salmigondis historico-scientifique où Aristophane côtoie la théorie atomique. Il s'avère que cette hétérogénéité est censée refléter celle du recueil à venir, mais aussi son unité : Marcel Schwob nous dit que la diversité est un ensemble de signes constituant un seul langage, que ce soit à l'échelle de son livre où à celle de la nature (implicitement, son recueil est donc un modèle réduit du Dieu spinoziste). La préface tourne alors au manifeste symboliste : « Sachez que tout en ce monde n'est que signes, et signes de signes ».

Cette profession de foi quelque peu ampoulée inspire à Schwob une série de très courts textes, à mi-chemin entre le conte et le poème en prose. le style est visuel, riche en vocabulaire et en descriptions raffinées. Mais cet habillage capiteux n'assure pas toujours la qualité des histoires.

La nouvelle éponyme m'a par exemple fait une impression exécrable. Certes, elle comporte quelques sympathiques descriptions ornementales (qui prennent vers le milieu une forme de progression de pièce en pièce, comme dans le Masque de la Mort Rouge de Poe), mais se retrouve gâchée par une fin kitsch et larmoyante, sur fond de guérison miraculeuse et d'amour impossible.

Les deux nouvelles suivantes prennent des accents mythologiques, peignant des tableaux d'apocalypse et de renouveau, où les personnages ne sont qu'esquissés. le ton se fait ensuite résolument macabre, et entraîne vers les étranges paysages d'une Afrique fantasmée, dans ce qui est à mon sens la meilleure histoire de ce recueil : « Les embaumeuses ». Par la suite, on découvrira des ruffians au siècle de la peste noire, des vierges orientales suicidaires, un sabbat, un savant fou, une vicomtesse sanglante, des pirates, encore plus de pirates... En bon élève, Marcel Schwob récite sa leçon de littérature gothique avec zèle et application. Peu à peu, dans le langage des meurtriers et des bagnards, pointe un autre centre d'intérêt de l'auteur. Si bien que ce monde argotique oblitère l'art gothique dans les dernières histoires. Ectoplasmes et saltimbanques ménagent de la place à de paisibles marins d'eau douce, et autres villageois naïfs.

Dans la plupart des récits, on trouve une opposition entre des rêves d'évasions et une réalité indésirable qui rattrape souvent ceux-ci. Les nouvelles semblent ainsi dénoncer leur caractère affabulateur, ce qui fait écho à la figure du roi démasqué, plus tôt dans le recueil. On a donc là une métafiction ironique en guise de lien sous-jacent entre ces histoires. Mais cela reste parfois trop léger pour rattraper leurs nombreux stéréotypes. Si vous voulez vous faire votre opinion sur ce recueil très inégal, il est disponible en français sur le site du projet Gutenberg.
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