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Critique de Lauquilit


Un coup de coeur lu sans pause.

Crèvecoeur est le nom d'une vraie commune picarde mais c'est aussi dans ce roman un symbole de l'étroitesse, de l'étouffement et de la morosité. C'est ce lieu que l'héroïne, Élise Maldue, issue d'un milieu modeste, va tout faire pour quitter.

Élise a 17 ans au début du roman, elle entre en Prépa à Amiens. Elle subit les premières khôlles et évaluations, aura sans cesse l'impression de ne pas être à la hauteur. Pourtant, elle finit par intégrer une prestigieuse école de commerce parisienne.

Le parcours d'Élise est celui d'une transfuge de classe, semé d'embûches puisqu'elle ne possède pas toujours les codes. Elle ne semble pas maîtresse de son destin mais victime des événements et des autres. Elle ne cesse de fuir : Crèvecoeur, Paris puis Londres. le seul moment où elle ne peut pas fuir, c'est lors du confinement. le roman s'ancre, en effet, dans une réalité très contemporaine. La pandémie va bouleverser son ascension et laisser une cicatrice dans sa vie.

Des rencontres accompagnent les différentes étapes de son initiation : Adèle, Éric, Thomas, Arjun, Marc, Ludovic sont des personnages qui l'initient à un autre monde mais qui sont parfois toxiques pour elle. Élise ne trouve finalement sa place nulle part, elle ne parvient pas à véritablement s'épanouir et souffre constamment du syndrome de l'imposteur.

Un roman réaliste qui reprend les codes du roman d'apprentissage en les adaptant à notre siècle. J'ai beaucoup pensé à Flaubert. Élise est une Emma du XXIe, elle vit dans la désillusion permanente, elle pense que les hommes peuvent lui apporter satisfaction, elle rêve d'une existence parfaite mais elle souffre et ne contente de rien. Elle se bat pour s'affranchir mais ne cesse de se tromper ; elle essaie de repartir à zéro plusieurs fois, elle utilise différents masques, joue différents rôles, change même d'identité mais rien n'y fait, elle reste toujours elle-même, perpétuellement engluée et insatisfaite. Elle tâtonne et semble revenir à la case départ.

Pour parodier Flaubert, l'auteur fait un livre sur rien qui se tient par la force de son style. Il traite de personnages et de faits banals mais ce quotidien, n'est-ce pas la vie même ? L'écriture semble d'une simplicité déconcertante mais tout est juste et percutant. Je ne serais même pas étonnée si Sciarrino disait : « Élise Maldue c'est moi », car l'écriture est peut-être la seule voie pour échapper à cette insatisfaction permanente.
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