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Critique de Bougnadour


C'est un vrai exploit de rendre passionnantes 800 pages sur l'accession au pouvoir de Mussolini entre 1919 et 1925, le sujet et le héros n'ayant rien d'attirant en représentant la défaite d'une démocratie devant une bande d'activistes.
Seulement Antonio Scurati a du talent, certes il a trouvé le scénario déjà écrit et le casting choisi mais a su réaliser une mise en scène de haute volée avec dialogues et décors de premiers choix.
La force de l'écrivain est de donner de l'épaisseur, de la chair aux hommes et aux évènements, là où l'historien retrace froidement et souvent platement les faits établis. Avec des chapitres nerveux, terminés par des extraits de presse ou de discours, Scurati donne un rythme soutenu qui lui permet de garder la main sur son lecteur surtout s'il est, comme moi, ignorant de la matière. Pas de commentaires de l'auteur sur les faits, mais l'on sent souvent de l'ironie et de la tristesse au coin d'une phrase devant les comportements attristants qui ont laissé M accéder au pouvoir.

L'aspect littéraire étant réussi, reste à évoquer l'essentiel : les faits historiques. A l'issue de la Grande Guerre l'Italie est dans le camp des vainqueurs mais se sent mal récompensée et l'amertume s'installe dans les esprits, particulièrement dans ceux des Arditis. Ces soldats hardis de première ligne ont pris le goût de la violence et du sang, désoeuvrés ils n'aspirent qu'à retrouver des combats et seront la base du mouvement fasciste. N'ayant rien à perdre ils sont prêts à toutes les extrémités.
Mussolini ancien socialiste ayant pris le parti de la guerre va comprendre qu'entre le socialisme qui fait peur à la société italienne et les partis conservateurs il y a une place à prendre pour des hommes déterminés que la violence n'effraie pas.
Virtuose du retournement de veste il saura jouer des antagonismes des partis et de la faiblesse de l'état pour s'imposer en n'hésitant pas à lâcher les chiens, en encourageant bastonnades, attentas et assassinats. Pour arriver à faire croire à l'Italie qu'il était l'homme fort dont le pays avait besoin pour arrêter les désordres qu'il avait lui-même organisés.

Evidemment comparer les années trente et notre époque est un exercice peu réaliste, mais il n'est pas inutile de retenir qu'un petit groupe violent et déterminé, face à une démocratie faible et divisée qui hésite à employer la force, peut l'emporter. Il aurait suffi lors de la marche sur Rome des fascistes en 1922 de quelques coups de canons pour que l'aventure de Mussolini finisse dans un fossé.
Ensuite la tentation de l'homme providentiel n'est jamais loin pour un peuple, la force physique, la virilité affichées par M ont su séduire une population déboussolée et qui en avait assez des années de violence. C'est quand même à méditer.
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