UN DÉSIR
De tout notre monde ensoleillé
Je ne désire qu'un banc de jardin
Où un chat se chauffe au soleil…
C'est là que je m'assoirais,
Une lettre dans mon corsage,
Une seule petite lettre.
Tel est mon rêve…
p.16
LE JOUR FRANCHIT…
III
Je parle doucement aux arbres prisonniers,
J'ai vu mon seigneur pour la première fois ce jour.
Tremblante, je l'ai tout de suite reconnu.
Voici que je sens déjà sa main lourde sur mon bras léger…
Où est mon rire sonore de jeune fille,
ma liberté de femme portant haut la tête ?
Voici que je sens déjà son étreinte ferme sur mon corps
frémissant,
Voici que j'entends l'éclat rude de la réalité
Sur mes frêles, frêles rêves.
IV
Tu cherchais une fleur
Et trouvas un fruit.
Tu cherchais une source
Et trouvas une mer.
Tu cherchais une femme
Et trouvas mon âme —
Tu es déçu.
p.14
JE VIS UN ARBRE…
Je vis un arbre qui était plus grand que tous les autres
et regorgeait de cônes inaccessibles ;
Je vis une grande église aux portes ouvertes,
tous ceux qui en sortaient étaient pâles et forts
et prêts à mourir ;
je vis une femme qui, souriante et fardée,
jouait son bonheur aux dés,
et vis qu'elle perdait.
Autour de ces choses, un cercle fut tracé
que nul ne transgresse.
p.13
NOCTURNE
Soir de clair de lune pur comme l'argent,
Vague bleue de la nuit,
Flots scintillants sans paroles,
L'un et l'autre se suivant.
Des ombres tombent sur le chemin,
Les buissons du rivage pleurent doucement,
De noirs géants veillent sur l'argent du rivage.
Silence profond du milieu de l'été,
Sommeil et songe —
La lune glisse sur la mer,
Blanche et tendre.
p.15
LE JOUR FRANCHIT…
I
Vers le soir, le jour fraîchit…
Bois la chaleur dans ma main,
Ma main et le printemps ont même sang.
Prends ma main, prends mon bras blanc,
Prends le désir de mes grêles épaules…
Ce serait merveille de sentir
une seule nuit, une nuit comme celle-ci,
Ta tête lourde sur mon sein.
II
Tu jetas la rose rouge de ton amour
Sur mon sein —
J'étreins de mes mains brûlantes
la rose rouge de ton amour, qui bientôt flétrira…
O maître aux yeux glacés,
J'accepte la couronne que tu me tends,
qui me courbe la tête vers le cœur…
p.13-14
Par Cleo T.
Accompagnée de Donia Berriri (aka Achille), Robi, Émilie Dautricourt & Maud Lübeck
« La vie est dans l'amour. » Marceline Desbordes-Valmore
Second volet de ce parcours autour des poétesses et de la musicalité poétique, les femmes nous parleront cette fois de la beauté, du vivant, des tilleuls et des lunes qui parlent. Nous traverserons sans cadre ni chronologie les pays qui n'existent pas d'Edith Södergran, les lumières du sud d'Etel Adnan et les cantiques sumériens d'Enheduanna, princesse et première poétesse dont le monde ait conservé le nom.
Un voyage sonore porté par un dialogue à deux pianos, le mien et celui de Donia Berriri (aka Achille) ainsi que par le choeur de mes lectrices invitées.
Cleo T.
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