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EAN : 9782721009548
224 pages
Editions des Femmes (07/04/2022)
3.78/5   9 notes
Résumé :
« Au premier regard, on ne voyait pas, usées à force de passages, les frontières de cette ville de l’exil et du tourisme, ni les chemins empruntés par les Italiens, les Russes et les Anglais, suivis par les Arméniens, les Arabes, les Juifs, les peuples des Balkans et de l’Afrique.
Nice, comme les autres villes, ne fait pas entendre sa voix tant qu’on ne s’est pas blotti contre sa poitrine pour pleurer au moins une fois, tant qu’on ne s’est pas couché dans ses... >Voir plus
Que lire après Azucena ou Les fourmis zinzinesVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
J'apprécie beaucoup les écrits de Pinar Selek, écrivaine turque, pourchassée par le régime d'Erdogan et réfugiée politique en France. J'ai pris grand intérêt et grand plaisir à lire son ouvrage principal, « la maison du Bosphore ». J'aime la façon dont elle dépeint ses personnages, l'attachement qu'elle porte aux minorités souvent persécutées, ou tout simplement aux gens qui sortent de l'ordinaire. Son travail d'écrivaine prolonge directement ses engagements militants et je partage beaucoup de ses analyses socio-politiques. Lorsque j'ai vu que « Masse critique » proposait l'envoi de son dernier roman « Azucena ou les fourmis zinzines » aux Éditions des Femmes, je me suis précipité et j'ai été très satisfait d'avoir le bon numéro au tirage du loto !
La première remarque que je ferai c'est que ce n'est pas un roman facile, pour plusieurs raisons. Tout d'abord, l'originalité du sujet abordé : la vie des personnes marginalisées dans une bonne vieille ville comme Nice. Mais ce n'est pas là la principale difficulté ; ce qui m'a le plus compliqué ma tâche de lecteur c'est le fait que Pinar Selek navigue entre plusieurs personnages, pratique de nombreux sauts dans l'espace et dans le temps, et multiplie les appellations pour la même personne. Azucena se fait aussi appeler Bleue ou la Zinzine aux chaussures rouges, quand elle ne porte pas son prénom de l'état-civil, Suzanne. de surcroît, les personnages sont nombreux et leurs interactions multiples. Il faut donc être très attentif à la lecture des premiers chapitres, plus que je ne l'ai été. Je dirais même qu'il faudrait prendre des notes, si ce n'est que cela devient rapidement impossible tant on est porté par le charme humaniste qui enveloppe l'histoire.
Soyons clairs : plusieurs fois j'ai failli abandonner ma lecture… Je trouvais que l'autrice abusait des ellypses, des bidouillages de la chronologie. Ce n'était pas évident pour moi de passer de la destinée des réfugiés espagnols, à la sauvegarde des chiens malheureux, en faisant escale sur les stands de distribution de nourriture pour les « petites gens ». Bref, lecteur ronchon, jusqu'à ce que je m'aperçoive que l'autrice m'avait, avec subtilité, fait monter dans le voilier de Gouel le chanteur des rues et que, sans m'en apercevoir, j'ai commencé à naviguer avec toutes ces personnes singulières. L'existence et le vécu quotidien anachroniques des « Paranos », des « Zinzines » et de tant d'autres groupes m'ont accroché. le charme de l'écriture de Pinar Selek a joué et je me suis trouvé emprisonné dans ces pages – emprisonné, mais aussi plongé dans de multiples rêveries. Dernière page lue, recopiée en citation tant elle est belle et porteuse d'espérance, je me suis aperçu que j'aimais beaucoup ce livre.
Mes quatre étoiles plutôt que cinq, sont plutôt un avertissement aux éventuel•les lect•eurs•ices. Ce n'est pas un livre à lire dans le métro ou en attendant un train, dans la foule, sur un quai de gare. C'est une lecture à choyer, à aborder dans de bonnes conditions de disponibilités affective et intellectuelle (comme beaucoup sans doute). L'emporterais-je sur une île déserte, je n'en sais rien (il y en a tant !). Mais en tout cas, l'un des joyaux de notre bibliothèque, sûrement… Laissez vous porter par le récit et découvrez l'intimité de ces personnages malmenés par la vie mais dépeints avec une affection et un humanisme profonds. Gouel, Alex, Manu, Azucena, Michel et les autres, je vous ai abandonnés mais j'ai fort envie de vous retrouver un de ces quatre ! Je vais garder ce roman sous le coude et j'y reviendrai un jour proche. Il y a tant de plis et de replis dans cette histoire que je découvrirai alors sans doute quelques belles images que je n'ai pas su assez apprécier en première lecture.

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La fête grandissante prendra tout le monde à son bord

Bleue. Une ville de l'exil et du tourisme, les chemins invisibles d'hier et d'aujourd'hui empruntés par des citoyen·nes – exilé·es ou réfugié·es entre autres – de divers pays. Un train, « le train qui fait Paris-Nice m'emporte dans une fiction dont je connais pas la trame. Je vais la découvrir de l'intérieur ».

Les pages de Pinar Selek se sont mêlées à mes propres souvenirs de ballades dans cette citée. de la promenade de bord de mer aux hauteurs de Cimiez, de la colline du Chateau au vieux port, des traces architecturales d'hier aux musées d'aujourd'hui…

Bleue, « J'ai fini par regarder ses yeux. Ils étaient noirs. Tout noirs », une ville et des histoires cocasses, des chemins « empruntés par les Italiens, les Russes et les Anglais, suivi par les Arméniens, les Arabes, les Juifs, les peuples des Balkans et l'Afrique », des zinzin·es (Gouel, Alex, Manu, Azucena), un amour mouvant et clandestin, « Un amour qui chemine secrètement. L'amour qui fait vriller les recoins cachés du corps », le parc de la Coulée verte et la couverture du Paillon, les immigré·es et le passé gravé dans la vie de tous les jours, la gare toujours mal-nommée Adolphe Thiers, le vent et les fleurs de l'autre coté de la frontière, la mémoire des catastrophes et des génocides, les chansons silencieuses, les souvenirs de luttes et de pays en rébellion, le sourire de la coquelicotte, les bancs d'où l'on fixe les vagues…

L'autrice tisse un paysage plein de lucioles et un vent plein de tendresse permet au cerf-volant de l'espérance de dessiner des arabesques pleinement humaines.

Des souvenirs des « disparitions, grèves et aubergines braisées », des insurgés libertaires, des trains et les gares de Paris et de Nice – il convient de ne pas oublier la gare Riquier -, des chiens, une ville transformée en prison, des expressions du vrai, des souvenirs familiaux et d'un père aux innombrables ennemis, « C'est-à-dire, lui et ses potes étaient les ennemis de tout le monde : des femmes qui parlent ouvertement de sexualité, des athées, des Juifs, des Gitans, des migrants, mais encore plus des Noirs et des musulmans, puis… des communistes, de ceux qui n'aiment pas l'argent, l'autorité et Dieu », les fureurs de la haine…

Mais aussi l'écume, les sourires, les routes et l'amour, les frontières traversées, les clins d'oeil, le soleil, les caresses, l'agora et cette fois avec « une autre formule qui ne marque pas de frontière », les mosaïques et les rendez-vous au bord de la mer…

Dans cette première partie, Pinar Selek nous a invité sur « des routes, des galeries, des contes ». Elle interroge, en seconde partie, la « fin de l'histoire ? ».

Et cela commence cette fois par une plage – La Réserve – un lieu de rencontres, des rencarts clandestins, de beaux sourires, le souvenir du port lorsqu'il y avait encore « les poissons, les langoustines et les crevettes », les chaussures rouges, des larmes et les yeux rouges comme les chaussures, le rouge et « bleue », l'« héroïne de mon conte de fée », les étoiles filantes, la route tracée « après tant de nuits sans sommeil, de matin égarés », contre l'enfermement dans un voyage permanent…

L'histoire n'est pas sans fin, elle ne peut se figer au désespoir des réactionnaires de tous poils, il y a toujours un demain. Les anciennes gares, le départ de Nice, les espoirs crus, la vie en pause, « Je ne me rendais pas compte du temps qui passe une fois noyée dans le fil des nouvelles. Réussir à vendre ton papier en réunion ou en face du chef. Concevoir des articles sans saveur, comme des oeufs de poule en batterie. Ne pouvoir écouter personne trop longtemps. Se fondre parmi les monstres qui jouent des coudes pour décider de quoi les gens parleront demain », les nouvelles chansons, les airs d'illégalité, « Je suis entouré de Paranos, depuis que je suis à Nice, je vis avec des Zinzins qui jouent à cache-cache alors que personne ne les cherche », les vents politiques et les lieux de « notre utopie », la mort dans un miroir, l'arrosage de nos racines, les retrouvailles…

« le monde s'était bien assombri ces dernières années…

Mais la poésie trouvait tout de même sa voie et les fourmis zinzines se multipliaient. Elles étaient aussi les abeilles laissant partout du miel, les chiens rebelles, les cigales malignes, les poissons peintres et les belles personnes ».

Le titre de cette note est emprunté à la dernière page du livre.
Lien : https://entreleslignesentrel..
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Les fourmis zinzines appartiennent à la famille des lucioles. Insaisissables, libres, vagabondes, enfants de Poésie. Un soir ici, une nuit ailleurs. L'amour ne connaît que la raison du coeur. Carnet d'exils extérieurs ? Carnet de voyages intérieurs.... Les fourmis creusent une galaxie, elles tissent un réseau de solidarités. Connaît- on vraiment une ville lorsque l'on ignore les choeurs qui la traversent? D'un train, d'une place, d'un bord de mer, d'un cimetière, d'une carte postale....C'est un beau roman, qui vous entraîne, hors champs, hors cadre. Un rythme, une folie, de l'humain...de la poésie !

Astrid Shriqui Garain
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L'auteure, Pinar Selek est une écrivaine turque dont j'ai beaucoup apprécié La maison du Bosphore et Loin de chez moi, jusqu'où?  

Pour ses études sur les minorités, arméniens et kurdes, elle a subi les persécutions du régime turc et a même fait l'objet de poursuites judiciaires dans son pays. Elle a donc fui la Turquie et réside maintenant en France et enseigne à Nice à l'Université côte d'Azur.

Le titre un peu bizarre et la figure de Nana de Niki de Saint Phalle m'ont bien plu :  Zinzine féminin de zinzin, Pinar Selek n'hésite pas à féminiser cette expression rigolote. Sûr que ce n'est pas un bouquin sérieux! Plutôt une aimable fantaisie féministe, militante et joyeuse qui se lit vite et bien. lecture facile, distrayante. 

Azucena nous entraîne dans Nice, loin des plages et de la Promenade des Anglais dans un quartier populaire occupé par des gens de bonne volonté. Azucena tient un stand de paniers de légume d'une coopérative maraîchère. Parmi ses amis Alex, le Prince des Poubelles est bulgare, Gouel, Chanteur des rues irlandais, les commerçants du quartier sont impliqués, et il y a aussi les cheminots syndiqués, un certain nombre de sans-papiers qu'on devine dans l'ombre. Sans parler des chiens, avec collier mais sans laisse. 

Une vie loin du conformisme : certains sont SDF, sans domicile fixe, oui mais pas du tout clochardisés. Gouel vit dans un bateau qu'on lui prête, Azucena passe ses nuits dans le Train Bleu, le train couchette Paris/Nice avec la bénédiction du chef de train. Quand d'autres possèdent des appartements ce n'est pas pour s'y installer mais plutôt pour les vendre....Ils sont loin de la société de consommation même posséder, être le maître d'un chien, est discutable. Les trésors d'Azucena : une carte postale deux vinyles. 

Si on voulait résumer en quelques mots le livre, le premier qui me vient serait solidarité. Et le second, amour, un amour sans possession, un amour qui inclut les chiens, le sentiment amoureux mais aussi la tendresse. Résumé ainsi, on se croirait presque chez les bisounours, ce serait oublier le tragique de la Guerre d'Espagne dont Azucena veut conserver la mémoire, celui du génocide arménien et tous les drames des exilés. 
Lien : https://netsdevoyages.car.bl..
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Je remercie Babelio pour cette masse critique littéraire.
Cette histoire se déroule à Nissa la Bella, une ville chargée de visages, de peuples, de malfrats et de périples aussi différents les uns des autres.

Nous suivons une petit troupe soudée, chacun avec un passé turbulent. Ils mènent tous une guerre silencieuse contre la société, les supermarchés et les multinationales, cependant bien organisée et sans recourir à la violence.
Je découvre des personnages tel que Manu, Alex, Gouel, Luna ou Azucena hauts en couleur, atypiques, spéciaux, originaux…qui aiment être en marge de la société.

Je vogue sur leurs existences, je découvre petit à petit leur passé, leur présent et leurs rêves futurs. C'est une farandole de sentiments forts, exaltants et profonds dont Azucena est le centre stratégique comme une planète entourée de ses satellites.
Ça gravite comme les fourmis autour de la fourmilière, ça s'agrandit grâce aux nombreuses galeries creusées ça et là.

Je découvre une très belle plume, envoûtante, percutante et accrocheuse.
Je suis happée par cette histoire comme dans une tornade !
J'aime beaucoup les références historiques, les anecdotes qui me permettent de découvrir Nice sous un angle différent. Je la vois au travers des yeux des différents personnages selon ce qu'ils accomplissent, ce qu'ils ressentent ou ce qu'ils dévoilent.
On vogue de l'amour à la passion, de la tristesse au désespoir, du bien au mal. Mais chaque destin finit par s'entrechoquer pour donner une nouvelle galerie. La tolérance, l'entraide et la solidarité sont l'apanage de ce groupe hétéroclite.

Seul petit bémol, parfois j'en perd mon latin pendant ma lecture, l'auteur saute d'une anecdote à une autre qu'il me faut un temps de quelques lignes pour me situer à nouveau dans le récit.
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
Le monde s’était bien assombri ces dernières années... Mais la poésie trouvait tout de même sa voie et les fourmis zinzines se multipliaient. Elles étaient aussi les abeilles laissant partout leur miel, les mouettes guitaristes, les sirènes poétesses, les chiens rebelles, les cigales malignes, les poissons peintres et les belles personnes. Ceux et celles qui brûlent leurs costumes. Il y a des choses qu’on ne comprend pas, que la science ne domine pas. Au cours de cette courte vie, les gens peuvent apprendre à se tourner vers ce qui existe, à se lier d’amitié avec un oiseau libre plutôt que de croître et prospérer; Apprendre à aimer sans jugement, s’alléger. Peut-être que la fête grandissante prendra tout le monde à son bord.
Qui sait. (p 206)
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Je ne me rendais pas compte du temps qui passe une fois noyée dans le fil des nouvelles. Réussir à vendre ton papier en réunion ou en face du chef. Concevoir des articles sans saveur, comme des œufs de poule en batterie. Ne pouvoir écouter personne trop longtemps. Se fondre parmi les monstres qui jouent des coudes pour décider de quoi les gens parleront demain
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Y-a-t’il un proverbe qui dit que ceux qui vivent légèrement meurent légèrement ? Azucena s’était allégée, avait rajeuni, avait bien vécu depuis quatre ans. Elle voulait vivre encore, elle avait même peur de la mort. Si elle venait frapper à sa porte, elle résisterait un peu parce qu’il y avait encore des choses qu’elle voulait faire, qu’elle avait laissées inachevées, qu’elle n’avait pas encore osées. Son jour venu, elle voulait tomber comme un fruit mûr. (p 200)
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L'heure est grave copine. Ta photo était dans le journal local hier... La femme qui enlève les chiens ! Ce n'est pas présenté comme ça bien sûr; ils se demandent plutôt : est-ce qu'elle enlève des chiens ou est-ce que cette farfelue est le brasniçois d'un réseau criminel ? Détient-elle le secret des chiens disparus ? Et tout un tas de trucs comme ça...
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C’est-à-dire, lui et ses potes étaient les ennemis de tout le monde : des femmes qui parlent ouvertement de sexualité, des athées, des Juifs, des Gitans, des migrants, mais encore plus des Noirs et des musulmans, puis… des communistes, de ceux qui n’aiment pas l’argent, l’autorité et Dieu
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