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4,27

sur 878 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
"Raconter bien, ça veut dire : de façon à être entendus". Telle est la conclusion de Jorge Semprun et de quelques amis en cet après 11 avril 1945, jour où le crématoire n'a pas été rallumé, jour de libération de Buchenwald par les Américains.

Longtemps, Jorge Semprun républicain communiste espagnol, exilé en France, résistant et déporté à Buchenwald sur dénonciation, n'a pas été sûr d'être revenu, poursuivi par des cauchemars récurrents. Très vite après son retour à la vie "normale" il a tenté d'écrire mais avait du mal à y survivre après son expérience de la mort journalière, alors que Primo Levi avait trouvé dans l'écriture de quoi apaiser sa mémoire.

C'est précisément dans cette forêt de l'Ettersberg qu'au 18e s. Goethe se promenait et travaillait à l'ombre des hêtres qui devaient servir à la construction funeste du camp de concentration de Buchenwald-Weimar.

Long cheminement moral, philosophique et littéraire de cet homme qui a tenté d'exorciser les démons du Mal nazi à travers des livres, des scénarios de films et même, un temps, comme ministre espagnol de la culture.

Tant de rencontres, tant de lieux, tant d'événements ont suscité au long des années des émotions telles que souvent l'amnésie délibérée de Jorge Semprun en était douloureusement réveillée. Comment dire l'indicible, comment imaginer l'inimaginable quand il n'a pas été vécu ?

Mélange de détails bouleversants et de scènes futiles de la vie ordinaire, le livre de Jorge Semprun (édité en 1994) interroge de mille façons la vie et la mort dans une alternance de dialogues et de monologues saisissants
.





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C'est un récit sur la difficulté de revenir à une vie " normale" après avoir connu les camps nazis. Comme l'écrit l'auteur c'est une résurrection, les survivants sont revenus de la mort. Semprun a mis beaucoup de temps à se décider à écrire sur sa déportation. A en parler même.
Tout témoignage qu'il soit oral ou écrit ne saura reproduire l'odeur de la fumée s'échappant du crématoire.
A la lecture de ce livre, on comprend la réflexion de certains déportés : " A quoi bon témoigner, ils ne nous croiront pas".
Un livre contre l'oubli.
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Jorge Semprun, dont je découvre par ce livre l'immense culture littéraire, la vie d'engagements forts et l'impressionnante intelligence, raconte plus qu'il n'explique, car comment justement expliquer l'indicible, sa difficulté d'homme et d'auteur à parler de son expérience à Buchenwald où il est arrivé à 20 ans en 1944.
C'est un témoignage troublant et difficile d'accès, autant par l'érudition et la hauteur de vue de l'auteur face auxquelles je me sens bien petite, que par le sujet lui-même tant il est effectivement difficile pour lui de transmettre et pour nous de comprendre l'expérience d'un vécu, "una vivienza" au-delà de la mort.
Un témoignage qui éclaire en tous cas sur le silence des déportés survivants à leur retour des camps, fait qui m'a toujours profondément troublée.
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Dans ce récit remarquable, le grand et regretté Jorge Semprun raconte sa déportation puis la libération du camp de Buchenwald par les américains en 1945. Sorti vivant physiquement certe, mais comment reprendre gout à la vie après avoir cottoyé la mort et l'horreur au quotidien. Bien plus qu'un récit sur les camps, Semprun raconte comment grâce à l'écriture et aussi au rôle essentielle d'une jeune femme, il a réussit à revenir au pays des vivants. le livre d'un intellectuel engagé, en lutte constante contre la barbarie, la dictature.
Un texte qui résonne longtemps en vous, car comment dire l'indicible tout en restant debout, Semprun à constamment lutter avec ce questionnement dire pour ne pas oublier, ne rien dire pour s'oublier. Magnifique et indispensable.
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Très beau récit. Semprun écrit ce livre en 1992, presque cinquante ans après avoir été libéré du camp de concentration de Buchenwald. le récit nous révèle par des incessants allers-retours au fil des souvenirs et de la mémoire de l'auteur, comment il a été possible pour lui d'écrire après avoir vécu l'horreur absolue des camps. Comment écrire de la fiction ? Comment raconter ? Où est le rêve, la réalité ? Où est la vrai vie ? Les rescapés des camps de concentration n'en sont jamais réellement sortis, le mal absolu les hante pour toujours et leur donne cette sensation que la réalité est le camp et que maintenant ils vivent un rêve terrible car ils vont finir par se réveiller, ou ce qu'ils ont vécus n'est qu'un cauchemar et que ces années d'horreurs n'ont jamais existé. Sensation renforcée par l'incrédulité des gens lorsque la vérité sur les camps a été révélé. Semprun raconte comment Primo Levi n'a pas trouvé d'éditeur lorsqu'il a voulu publier son premier livre "Et si c'est un homme".
Semprun nous livre des réflexions admirables sur le mal, la volonté de vivre, la mort, l'écriture.
Si les premières pages du récit sont assez perturbantes par le style, au fil des pages on se laisse prendre par ces sauts incessants dans la mémoire de l'auteur. Les souvenirs et les thèmes reviennent de manière incessante et lancinante comme des leitmotiv qui hantent l'esprit de Semprun et qui l'empêche de vivre. La neige symbolise l'enfer de Buchenwald et revient sans cesse dans ses cauchemars.
Au fil du récit on a le sentiment d'écouter Semprun réfléchir à haute voix, d'être à ses côtés et de comprendre comment pendant des années écrire serait le droit chemin à la mort.
Seul l'art, la fiction sera capable de raconter.
"Comment raconter une vérité peu crédible, comment susciter l'imagination de l'inimaginable, si ce n'est en élaborant, en travaillant la réalité, en la mettant en perspective? Avec un peu d'artifice donc!....... par l'artifice de l'oeuvre d'art bien sûr!" (p166 Ed Folio).
"A Buchenwald, les SS, les Kapo, les mouchards, les tortionnaires sadiques, faisaient tous partie de l'espère humaine, que les meilleurs, les plus purs d'entre nous, d'entre les victimes... La frontière du Mal n'est pas celle de l'inhumain, c'est tout autre chose. D'où la nécessité d'une éthique qui transcende ce fonds originaire où s'enracine la liberté du Bien que celle du Mal... Une éthique, donc, qui se dégage à jamais des théologies, puisque Dieu par définition, est innocent du Mal. Une éthique de la Loi et de sa transcendance, des conditions de domination, donc de la violence qui lui est justement nécessaire..." (p216 Ed Folio).
La fin de l'ouvrage est désespérante. La réflexion sur l'inéluctable disparition des rescapés des camps et donc la perte de la mémoire physique du Mal absolu "dans la juste mesure où il es niché en chacun d'entre nous, comme liberté possible" (p374) vient en contradiction sur ce que nous révèle Semprun concernant l'utilisation de Buchenwald par les staliniens comme camp de concentration et où une nouvelle fois des milliers de personnes ont disparu. le Mal absolu continu d'être présent parcequ'il est une liberté possible de chacun d'entre nous et donc il y aura toujours des témoins pour parler de ce Mal.
Un seul petit reproche au récit de Semprun, de nombreuses citations de poèmes, de textes en anglais, en allemand, en espagnol, italien,... m'ont perturbé dans ma lecture car la qualité et la profondeur de ces extraits m'ont échappé, ne connaissant pas suffisamment toutes ces langues, même si Semprun donne au fil du texte des traductions morcelées et des commentaires.
Livre très intellectuel mais une fois dépassé les références littéraires, philosophiques et poétiques on se laisse prendre par ce récit. Semprun nous invite, au travers de son expérience douloureuse, à une très belle réflexion sur le Mal.
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Après avoir lu Adieu, Vive Clarté... relatant l'adolescence et l'exil du narrateur et le Grand Voyage retraçant l'arrivée de Gérard à Büchenwald, je viens de finir L'Écriture Ou La Vie racontant la sortie du camp du personnage principal. Bien sûr, ces trois romans ont un contenu très fortement autobiographique même s'ils ne suivent pas de façon précise la réalité chronologique et authentique de la vie de Semprun et parfois s'en écartent franchement. Mais là n'est pas l'intérêt majeur du livre : Semprun reste avant tout un écrivain des sensations, seule semblent compter pour lui les émotions qui ont forgé sa mémoire et qui lui permettent de relier entre eux des moments espacés de sa vie. Il nous montre au-delà de la réalité narrative, la façon dont il construit ses romans et les rapports très étroits qu'ils entretiennent avec son organisation mentale et ses convictions d'homme. Cette façon d'écrire donne une impression très forte de romans clos, d'enfermement de l'auteur dans son monde, ce qui d'un certain point de vue renforce l'impact et le sens de sa narration. On ne soulignera jamais assez son extrême pudeur à évoquer les moments les plus déchirants de son existence sans jamais les aborder en toute clarté, en nous laissant sur le bord de la confession: à nous de combler les vides... ou du moins d'essayer de les imaginer!
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Avant de faire un petit commentaire sur le livre ,de Jorge Semprun,j 'ai relevé au cours de ma lecture , l 'anecdote que raconte ,Jorge Semprun ,en public en juin 2001
"IL n' y a pas longtemps ,au cours d 'un dîner chez Michel Rocard ( ...) ,quelqu' un m 'interpelle et dit " Mais toi , qu ' est-ce que tu es au fond ,écrivain ou homme politique ? Espagnol ou Français ? "Et devant cette alternative , devant cette injonction, j 'ai dit : " Moi ,je suis un ancien déporté ."Parce que ça me paressait une figure ,un concept qui englobait tout le reste .Je pense être un ancien déporté espagnol , ancien déporté français ,ancien déporté communiste ,etc .J ' étais ancien déporté."
Dans ce livre ,l 'auteur raconte ce qu ' il a vécu dans le camp de Buchenwald .Les atrocités commises par les nazis qui sont devenus de véritables zombies !
IL nous fait découvrir la réalité des camps ,l asservissement des êtres humains ,le mépris du genre humain .Tout simplement c 'est un livre qui témoigne d' une certaine époque .
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Semprun a vécu l'enfer des camps, Buchenwald pour lui, alors qu'il était déjà un intellectuel et militant communiste. Il va garder de cette dure expérience un ressenti qui marquera toute son oeuvre.
Ici, il entreprend de raconter son voyage, son parcours à travers l'enfer et sa survie quotidienne. C'est un témoignage supplémentaire sur l'horreur mais on y ajoute ici deux qualités supplémentaires, l'envie d'écrire avec style, avec une plume littéraire et presque philosophique (ce qui rend la lecture difficile), et le bilan qu'il fait de cette expérience, surtout dans son envie d'écrire et son acharnement à survivre, ce qui justifie le titre.
Il a choisi les deux, ceux qui l'ont fait vivre jusqu'à il y a peu de temps encore et en cela le livre est une belle plongée dans la pensée d'un écrivain qui a vécu un événement fondateur.
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La poésie devient subsistance
Ses mots sont comme un sirop
Contre le mal absolu

Jours dénués d'humanité
Qui auront généré l'enfer
Pour exorciser l'irréversible :

Faudra-il écrire, vivre ou mourir ?
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Pour être honnête, j'avais acheté le livre parce que la couverture un peu morbide m'avait sauté aux yeux. Mais je ne comptais pas le lire de suite.
Et puis est passé "Le temps du silence" sur Arte, film dont l'histoire est inspirée du livre. Donc comme j'ai beaucoup aimé le film, j'ai fini par aller chercher cet ouvrage dans les rayonnages de ma bibliothèque.

Je pensais le lire d'une traite mais le début est très dense et digressif, il est facile de perdre le fil dans tous ces récits qui s'imbriquent les uns dans les autres. J'étais en vacances et je n'avais pas envie de me prendre la tête donc je l'ai laissé de côté quelques jours. Et après deux autres livres, je suis naturellement revenue à lui.

Et quelle histoire que la vie de Jorge Semprun! Cette lutte incessante pour faire semblant d'oublier et être capable de vivre une existence normale. Et en même temps ce besoin intérieur de finir par sortir cette vie d'avant.
Les mots sont justes, ils touchent.
C'est grand. Merci pour cet ouvrage.
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