Tout d'abord merci à Babelio et aux éditions Tertium pour ce livre.
«
La Vallée des Consolés » est un roman destiné à la jeunesse de
Sophie Séronie-Vivien. La couverture de l'ouvrage est à dominante sombre avec, ressortissant de la masse, l'eau claire d'une cascade, le pelage blanc d'un chien et les vêtements clairs des enfants, dans un instantané de ce qui sera la bascule essentielle du récit.
De la même façon que certains auteurs du XIXe, nous avons ici un récit dans le récit, le point de départ étant un grand-père mourant demandant à son petit-fils de lire différents cahiers, qui étaient jusqu'alors tenus secrets.
De là, commence la vraie histoire du roman. Elle se présente sous la forme de récits à la première personne, basculant entre trois narrateurs principaux, qui sont aussi les trois héros de l'histoire :
Peyo, sa soeur Inès et Simon/Victor accueilli par les parents de
Peyo et sa soeur. le récit, quant à lui, demeure linéaire, le personnage suivant reprenant la charge de la narration exactement là où le précédent l'avait laissé. L'action se déroule dans les Pyrénées, durant la seconde guerre mondiale et démarre au moment où Jean-Baptiste et son épouse prennent sous leur aile Simon, enfant juif dont la famille a été abattue peu de temps auparavant et que l'on renomme Victor. Pour le petit
Peyo, l'arrivée de cet étranger n'est pas simple et il lui faudra un peu de temps avant d'accepter la situation, qu'il ne comprend pas vraiment avec son univers jusque-là purement enfantin.
Le récit bascule vraiment quand Célestin les retrouvera au pied d'une nouvelle cascade et les menacera. C'est alors que surgit le Drac et avec lui, le fantastique ouvre ses portes à des enfants perdus et pris dans des événements qui les dépassent. Embarqués dans le domaine d'Abelio, un géant qui aime l'humanité au point d'avoir créé
la Vallée des Consolés et d'y accueillir les hommes morts de façon injuste depuis au moins deux mille ans, les enfants, dont la présence menace l'équilibre même de la Vallée, doivent retrouver le géant au plus vite, guidés par Estévania et deux gentilshommes, afin de retourner dans leur monde. Au gré de leurs péripéties, ils rencontreront une fée, les laminaks, un druide et seront confrontés à des histoires où toujours la peur et la haine de l'autre et de la différence mènent à une injustice flagrante, en un miroir des événements noirs de la seconde guerre mondiale…
Ainsi, outre les jolis paysages que l'auteur nous décrit, la mise en scène du petit peuple dans un folklore revisité, il s'agit aussi d'un petit roman d'apprentissage. Les enfants apprennent auprès des Consolés et de la situation des créatures qu'ils rencontrent la tolérance, le courage, la bonté mais aussi l'ouverture d'esprit. Il ne faut pas rester centré sur soi-même et sur sa propre vérité, mais aussi découvrir quelle est la vérité de l'autre…
Même s'il y a une certaine une unité, le style s'adapte cependant à l'âge et à l'origine des personnages : plus naïf et enfantin pour
Peyo, plus cultivé et réfléchi pour Simon/Victor, presque neutre pour Inès, comparé aux deux autres. Il est à noter que même si Célestin, le quatrième enfant, fait tout autant parti de l'aventure, jamais il ne prendra la parole et sera toujours vu à travers le regard des trois autres.
Intéressante aussi l'idée de voir interagir des personnages issus de diverses époques et religions. Ainsi, Estévania est-elle une victime des tortures de l'Inquisition, Guilhem le Parfait est Cathare, Geoffrey le catholique et Arnaud le protestant se sont entretués en pleine guerre de religion… Chacun d'entre eux à plus ou moins fort degré est le symbole de la bêtise humaine et de son intransigeance face à l'autre.
L'initiative prise par l'auteur à la fin du roman de donner quelques titres d'ouvrages des sites web à consulter pour aider ses jeunes lecteurs à approfondir leurs connaissances sur les événements historiques et les mythes abordés au cours du récit est fortement appréciable.
Cette lecture a été agréable et ce roman est au final un joli conte qui, s'il garde une morale, reste néanmoins divertissant par l'irruption du merveilleux et d'un tout autre monde en plein récit…