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EAN : 9782746504530
78 pages
Le Pommier (20/10/2009)
3.84/5   34 notes
Résumé :
Que révèle le séisme financier et boursier qui nous secoue aujourd'hui? Si nous vivons une crise, au sens plein du terme, aucun retour en arrière n'est possible. Il faut donc inventer du nouveau. Or, le nouveau nous submerge! En agriculture, transports, santé, démographie, informatique, conflits, des bouleversements gigantesques ont transformé notre condition comme jamais cela n'était arrivé dans l'histoire. Seules nos institutions n'ont pas changé. Et voici, l'une ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
La crise que nous traversons peut être comparée à un séisme et, comme ce dernier, les causes ne sont pas visibles, les failles sont profondes. Pour les trouver, il faut s'interroger en profondeur sur notre société contemporaine et ne pas se contenter des chiffres.
La crise n'est pas seulement financière, elle est globale. Elle touche l'humanité dans son ensemble. Elle parle du rapport des humains avec le monde.

Tout comme en médecine, une crise indique la croissance d'une maladie. Tout comme le corps face à cette crise, on a le choix entre la mort, l'éradication de l'humanité, ou tendre vers une nouvelle organisation, tracer une nouvelle voie.

Des changements majeurs sont apparus dans la seconde moitié du 20è siècle ;
L'humanité occidentale quitte majoritairement l'agriculture, la population rurale chute, venant grossir des mégalopoles de plus en plus gigantesques.
« Qui alors connaitra le monde, comme le connurent,
le pratiquèrent les ruraux ? Qui pense à lui désormais ? »

Les progrès de la santé, de la mobilité humaine, nous offrent un monde qui n'a plus rien à voir avec celui de nos ancêtres.

Grâce aux nouvelles connexions, le savoir est devenu accessible à tous. Le connectif remplace le collectif. Le pouvoir change.

Les conflits ont pu faire croire que l'homme était plus fort que la nature, que nul ne le dépasse. Pourtant, il est devenu plus dangereux pour lui-même que le monde lui-même. Nous dépendons d'un monde dont nous sommes en partie responsables de la production.

Fin des jeux à deux, jeux qui n'opposent que les humains, début d'un jeu à trois, incluant désormais la Biogée. Donner la parole à la Biogée : l'eau , l'air, le feu, la terre et les vivants ( WAFEL) ; la vie et la terre. L'homme dans son narcissisme, avait oublié de négocier avec cette Biogée, il doit maintenant en tenir compte, sa survie en dépend. La Biogée se met à crier ( fonte des glace,ouragans, pandémies…). Allons-nous l'écouter ?

Notre antique rapport économique au monde s'approche –t-il d'un terme ? Qui remplacera la vieille triade des prêtres, soldats et producteurs de richesses? Triade figurée au moyen de Dieux Romains par Georges Dumézil : Jupiter, Mars, Quirinus.

Qui parlera au nom de la Biogée ? : Les sciences qui parlent des choses du monde. le savoir est indispensable à tout projet. Mais :
« Que les savants puissent parler au nom de la Biogée exige qu'ils prêtent d'abord un serment dont les termes les libèrent de toute inféodation aux trois classes précédentes. Pour devenir plausibles, il faut que, laïques, ils jurent ne servir aucun intérêt militaire ni économique. »

« En changeant l'arme méchante : l'intelligence. Elle ne doit plus être du côté du venin, du croc, mais muter, de la volonté de puissance au partage, de la guerre à la paix, de la Haine à l'Amour. »

Pour que le temps des crises ne nous mène pas tout droit au désastre, il faut prendre la bonne décision, redevenir humain, se reconnecter avec notre monde, s'occuper davantage d'écologie, de Sciences et Vie de la Terre, de Sciences Humaines.

« Les sciences firent du monde leur objet, mais c'est lui qui nous fait vivre, il nous dépasse et maintenant il nous tombe sur la tête, il pourrait bien nous éradiquer. »
L'homme a joué à un jeu dangereux, il pourrait bien s'en mordre les doigts; le Grand Pan est de retour!



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Le temps des crises est un essai qui analyse l'origine de la crise, qui continue de toucher le monde aujourd'hui.
Michel Serre fait un rappel historique des différentes ruptures qui ont marqué les hommes. Il établit une différence entre crise et rupture, et pour sortir de cette crise, il faut plutôt la voir comme une rupture, à condition que les hommes le comprennent et s'investissent pour cela.
Au cours des siècles, des ruptures ont mis fin à de grandes périodes historiques, et la société a pris une autre chemin, intégrant ces apports. Ces changements se sont multipliés au cours du XXes, de plus en plus rapides, mais les institutions, elles, ne s'adaptent pas, il y a un décalage.
Lorsqu'il y a une crise, il ne faut pas chercher à revenir à la situation antérieure. Sinon, elle se renouvellera de façon cyclique. Il faut intégrer ces changements et prendre une autre direction. c'est pourquoi aujourd'hui, il ne faut pas revenir à la situation précédente: l'économie, créée par l'homme, a pris le pas, et se conduit comme si nous ne l'avions pas produite, et le monde réel semble vouloir se venger de ce que lui avons fait subir.

Aujourd'hui, le duo hommes-société est confronté à la planète, au monde dans sa globalité (habitants, tectoniques, climats...). le monde jusqu'à présent était considéré comme un objet dont on ne tenait pas compte. Aujourd'hui, il vient jouer les trublions pour se faire entendre, et devenir sujet des négociations à part entière. Comment la planète peut-elle se faire entendre? Qui peut parler en son nom? le combat va être difficile car chacun avait l'habitude de voir uniquement devant sa porte, chacun défendait ses propres intérêts, même dans les négociations dites mondiales concernant le climat, l'écologie, la pollution...Des savant ''laïques, jurant de ne servir aucun intérêt militaire et économique''pourront prendre la parole. Cela rappelle les trois catégories de population: ceux qui prient, ceux qui se battent et ceux qui produisent. Ces trois instances peuvent perdurer, modernisées, mais à condition que chacune reste à sa place. L'économie ne doit surtout pas prendre le pas. Ces pourquoi des savants prêtant serment de neutralité vis à vis des lobbies pourront parler au nom de la planète. mais à chacun de s'impliquer.

La réflexion de Michel Serre est ardue, et cela nécessite la création de nouveaux concepts, pour remplacer ceux qui sont démodés. de plus, son style d'écriture, ses tournures de phrases demandent de la concentration. N'ayant pas lu les ouvrages antérieurs de cet auteur, j'ai eu un peu de mal à suivre sa pensée, lorsqu'il fait allusion à des concepts développés dans des livres précédemment publiés. Il fait un rappel de définition, mais j'ai l'impression d'être un peu passée à côté de quelque chose.
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"Pour que les pauvres, vous, moi, ayons dû courir de toute urgence au secours des riches, par l'intermédiaire de l'État, il aura fallu que les riches deviennent si colossalement riches qu'ils paraissent alors à tout le monde aussi nécessaires à notre survie que le Monde." (p. 6)

Crise, étymologiquement, s'apparente à fracture : une fracture tectonique irréversible dont n'apparaît pas encore l'ampleur de la faille.
Six événements récents, survenus depuis la Seconde guerre mondiale et en accélération depuis la décennie 1960-70, contribuent à la caractériser : 1) l'inversion de la proportion de la population s'adonnant à l'agriculture par rapport au total, entraînant l'urbanisation correspondante (sans précédent) et une modification de la perception du territoire et de la nature ; 2) la mobilité des personnes et des biens [sans parler des capitaux] ; 3) la modification des conditions sanitaires tendant à l'asymptote de l'éviction de la douleur (naguère condition habituelle et normale du corps) et à la détermination du moment de la naissance et presque de celui de la mort ; 4) la recomposition du paysage humain par la démographie ; 5) le remplacement du collectif par le connectif par les nouvelles technologies ; 6) le paradoxe de l'hyperpuissance militaire qui rend obsolète le concept de force guerrière (cf. USA vs Afghanistan).
La profondeur de ces modifications met en porte-à-faux les piliers de l'organisation socio-politique pluri-millénaire (indo-européenne) figurée par le symbole des dieux Jupiter (pouvoir des prêtres), Mars (pouvoir des guerriers), Quirinus (pouvoir des ploutocrates). D'un point de vue philosophique, par l'introduction de la finitude du Monde face à "l'hominescent infini", la crise périme la vision cartésienne de la nature au service de l'Homme, voire même la distinction plus ancienne entre sujet et objet, en instituant la Biogée, sur-ensemble où vivent en symbiose les humains et le Monde, capable à leur instar d'émettre, recevoir, stocker et traiter de l'information, comme sujet d'un "jeu à trois", et comme titulaire de droits.
Dès lors, les suggestions de l'auteur pour établir un nouvel ordre, un "Contrat naturel", portent sur la prise de parole de la Biogée au sein d'une instance mondiale (pas une institution inter-nationale, donc), qu'il appelle WAFEL (eau, air, feu, terre, vivants, en anglais), sorte de "parlement de la Biogée" où s'exprimeraient des savants et non des politiques. Il se défend de vouloir ainsi instaurer une nouvelle aristocratie de la manière suivante :
"Je ne demande pas qu'ils prennent le pouvoir, hélas tombé dangereusement en une telle déshérence que n'importe qui pourrait aujourd'hui le ramasser, mais qu'ils prennent la parole au nom des choses [...]" (pp. 58-59).
Pourtant, il exige de ces savants deux serments qui dans le fond n'en font qu'un : celui du partage des connaissances sans pouvoir en tirer aucun profit, sans que leurs applications ne puissent causer la violence, la destruction, la mort, la croissance de la misère, de l'ignorance, l'asservissement ou l'inégalité ; et qu'ils soient laïques, jurant de ne servir aucun intérêt militaire ni économique.

La faiblesse, absolue et relative, de ces suggestions par rapport au diagnostic a fortement mitigé mon appréciation de l'ouvrage. J'estime personnellement qu'elle tire son origine justement d'une erreur de jugement du pouvoir.
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Michel Serres est un philosophe des sciences que j'ai eu souvent plaisir à écouter sur Arte avant son décès en 2019.
Érudit mais pédagogue il explique de façon méthodique ses idées. Dans "Temps de crises" il montre en quoi de gigantesques bouleversements ont transformé nos conditions de vie.
Face aux crises, Michel Serres n'a pas de recette magique mais fait quelques propositions après une première partie de constats.
Il explique que les plus grands changements qu'ont connus les hommes sont d'abord l'urbanisation et le développement des transports puis la démographie galopante et l'espérance de vie plus longue. Les modes de communication on aussi beaucoup changé. La santé devient la norme plutôt que la pathologie ce qui a transformé nos corps. D'ailleurs, je fais un petit aparté d'actualité (confinement lié au Covid19 oblige). En 2009, date à laquelle il a écrit cet essai, Michel Serres explique que tous les déplacements exposent les systèmes immunitaires des humains à des pandémies auxquelles, peut-être, nous ne serons plus un jour comment répondre.
Il constate surtout que l'organisation de nos sociétés, leurs institutions, n'ont pas changé au même rythme. Alors, plutôt que d'être toujours en train de nous demander qui va gagner il propose d'intégrer une dimension à trois entre les sciences, la société et la biogée. Ce terme est assez facile à comprendre puisque Bio signifie la vie et Gée désigne la terre. Notre planète nous oblige à la considérer parce qu'aujourd'hui, au 21eme siècle, l'infinitude des humains se trouve face à la finitude du monde contrairement à l'époque où l'on pensait que la nature était toute puissante.
Pour cela, on doit donner plus souvent la parole aux scientifiques et je suis assez d'accord. Il ne s'agit pas de prendre le pouvoir mais de participer un avenir plus respectueux de notre milieu.


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Dense, poétique, visionnaire

Dense : c'est le premier qualificatif que m'évoque ce tout petit livre de Michel Serres. Les 79 pages ne pourront être parcourues à toute vitesse, au risque de passer totalement à côté du propos.

Poétique : la langue est magnifique, riche, complexe : c'est du lourd! C'est ce qui en fait aussi la difficulté. Les concepts et idées nécessitent la création de néologismes qui ont du sens mais soumettent le lecteur à une gymnastique linguistique et intellectuelle, qui, à mon avis mérite d'être pratiquée. Complexe également la construction des phrases, nécessitant souvent une relecture pour que le sens apparaisse. C'est tout à fait jouable sur un texte aussi court (et lorsqu'on s'attaque à un Michel Serres plus prolixe, la petite musique de ce style particulier se fait coutumière et atténue les aspérités de ce chemin de lecture).

Visionnaire : le propos est ici de montrer que les manifestations d'un malaise mondial, que ce soit sur le plan financier ou social, ne sont que des symptômes émergents d'un bouleversement annonçant une nouvelle ère de l'histoire de l'humanité. La crise résulte du fait que les profondes modifications de nos modes de communication, de l'agriculture, de la gestion des conflits entre nations entre autre ne sont pas en adéquation avec l'immuabilité de nos institutions. de nouveaux schémas de gestion doivent être inventés pour sortir l'humanité de cette ornière

Lien : http://kittylamouette.blogsp..
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Citations et extraits (20) Voir plus Ajouter une citation
Quant à Homo, il détient l'intelligence. il n'a cessé d'en utiliser la puissance, mais le plus souvent pour dominer, passer le premier, devenir le plus fort, écraser toutes choses et tous humains sur son passage, gagner. Armé d'elle, il a vaincu la nature et ses pais misérables, au cours d'une évolution guerrière qui s'achève, en effet, sur cette victoire, triomphe cependant si paradoxal qu'il pourrait, en retour, entraîner l'espèce à l'éradication. Comment éviter cette défaite? En changeant l'arme méchante : oui, l'intelligence. Encore du côté du venin et du croc, elle doit muter, au plus vite et sous risque gravissime, de la volonté de puissance au partage, de la guerre à la paix, de la Haine à l'Amour. Voilà un objet de ma, de toute la philo-sophie puisque ce titre associe les deux mots de ce projet.
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Ne riez-vous pas aux larmes que les Etats du monde envoient des politiques comme ambassadeurs pour traiter les questions concernant le climat, les pôles ou les mers, alors qu'ils n'en parlent point les codes et que glaciologues, physiciens du globe ou océanographes, muets, en estiment exactement les menaces.
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Le plus ignorant d'entre nous jouit désormais d'un accès assez facile à plus de connaissances que le plus grand savant du monde d'hier. Cette aise rend désuète les thèses universitaires, d'histoire ou de philosophie, où sur un sujet donné, l'érudit recopiait pesamment toute la documentation possible et l'exhibait pour montrer son expertise têtue
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La Seconde Guerre mondiale marque le temps de ce basculement : en terme de thanatocratie, nous faisons désormais mieux que la nature. Quel modèle atroce de domination! Oui, les hommes devinrent, en ce temps, plus dangereux pour les hommes que le monde
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Comment l'ancien couplage asymétrique, très dur, peut-il ainsi se défaire ? Par une seconde évidence que ces mêmes sciences nous apprennent : les choses de la Terre et de la vie, disent-elles, comme nous codées, savent et peuvent recevoir de l'information, en émettre, la stocker, la traiter. Ces quatre opérations, citées déjà et plusieurs fois tantôt, mais reprises ici parce que rien, aujourd'hui, ne me paraît plus important que de méditer sur leur caractère doux, spécifient toutes les choses du monde, sans exception, nous compris. Ce quadruple exploit ne nous illustre pas comme sujets ni ne les désigne pour objets. De même que nous communiquons, entendons et parlons, écrivons et lisons, les choses inertes comme les vivants émettent et reçoivent de l'information, la conservent et la traitent. Nous voici à égalité. Asymétrique et parasite, l'ancien partage sujet-objet n'a plus lieu; tout sujet devient objet; tout objet devient sujet.
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Michel Serres nous manque déjà...

Certains les nomment génération Y ou "digital natives", les jeunes, (nouvelles ?), générations nous battent à plate couture devant un écran. Moi j'ai préféré les désigner sous le terme générique de ........?........

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