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EAN : 9782800151861
80 pages
Dupuis (07/10/2011)
3.38/5   36 notes
Résumé :

Perversion, faux-semblants et manipulation dans ce jeu de dupe littéraire et familial.- La nouvelle oeuvre de Servais, en un volume.- Complexité psychologique des personnages.- Un dessinateur virtuose de la nature.Depuis sa rencontre avec le grand écrivain Bernard Chalenton, la vie de Claudine semble s'être arrêtée. Ne compte plus pour elle qu'un livre de cet auteur, Monsieur Blanche, qu'elle lit et relit sans relâche de... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
Ayant beaucoup aimé "Le jardin des glaces" de Jean-Claude Servais, c'est sans hésitation que "Le dernier brame" s'est retrouvé dans mon panier à emprunts lors de ma dernière visite à la bibliothèque. Et si je reste autant subjuguée par ses talents de dessinateur, j'ai été cette fois-ci un peu moins conquise par le scénario.

Il va m'être difficile de parler de l'histoire en elle-même, le moindre élément pourrait en gâcher tout effet de surprise aux futurs lecteurs. Je vais donc rester le plus vague possible. Dans cette BD, l'auteur fait un parallèle entre les comportements humains et ceux des animaux, ceux des cerfs (et des biches) plus particulièrement. Il a choisi la saison du brame pour appuyer ses dires. La saison des amours chez le cerf, c'est la période où le dominant mâle se bat pour garder son rang (et ses femelles) dans la harde. Ces comportements instinctifs sont parfois violents, sans pitié. Et d'une certaine manière, si l'on y regarde de près, l'homme est capable de réactions similaires (bien que beaucoup plus tordues), pour garder son rang ou s'élever dans la société. Pour les cerfs, il s'agit de survie, de garder ses femelles et de procréer pour ne pas éteindre l'espèce. Pour les hommes, il s'agit d'argent, de pouvoir, de réputation, de notoriété et d'emprise sur les autres.

Ainsi, l'auteur, en faisant de telles comparaisons, abordent des thèmes qui nous parlent, sans équivoque, tels que la domination, la séduction et la manipulation.

Le cadre choisi est magnifique. L'auteur a "croqué" le château de Laclaireau et ses forêts alentour pour ses décors. Tout y est minutieusement bien dépeint et coloré. Les dessins sont un vrai régal pour les yeux. La nature, les différents lieux et paysages, les animaux, les personnages, tout y est finement détaillé, très expressif également. Rien que pour ça, il vaut la peine d'être ouvert.

Côté scénario, comme je le dis plus haut, je n'ai pas été totalement convaincue. C'était pourtant bien parti, et même si j'ai eu tôt fait de comprendre où l'auteur voulait exactement m'amener, je trouvais les relations entre les protagonistes plutôt intéressantes, voire même touchantes selon les personnages. Malheureusement, tout se précipite d'un coup. La révélation qui fait tout basculer n'arrive pas au moment propice. Tout est déballé d'un coup, sans transition aucune, ce qui n'a aucun sens à mon goût. Et de là, à partir de ce retournement de situation, le reste de l'intrigue devient détestable, tout comme le dénouement et l'ensemble des personnages.

Moi qui d'habitude exulte quand un personnage féminin réussit à assouvir sa vengeance contre les mecs qui le méritent amplement, je ressors tout de même déçue. Vengeance et revanche, il y a bien. Mais je n'aime pas du tout ce que cette femme devient ensuite.

C'est donc mitigée que je suis au sortir de cette lecture. Des dessins sublimes. Un début de scénario très prometteur mais qui part à vau l'eau sans crier gare. Des personnages fort intéressants mais qui se révèlent très décevants à la fin.
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Il s'agit d'une histoire complète en 1 tome, indépendante de toute autre, parue en 2011. Cette histoire a été écrite, dessinée et encrée par Jean-Claude Servais, également auteur de la série Tendre Violette. La mise en couleurs a été réalisée par Guy Raives, également auteur de bande dessinée, par exemple les séries L'Orfèvre, tome 3 : KO sur ordonnance, ou Les jours heureux.

Un oiseau est en train de survoler une belle forêt verte, à la fin de l'été. le soleil brille dans une clairière, vide de toute vie, les cerfs ayant la faculté de disparaître, de se rendre invisibles. Mais la saison des amours commence, et le cerf se montre pour parader, et pour écarter ses rivaux. Une étreinte amoureuse entre un homme et une femme est mise en parallèle. En 1983, l'écrivain Bernard Chalenton effectue des dédicaces lors d'un salon du livre. La file d'attente est longue pour échanger quelques mots avec cet écrivain célèbre. Après avoir terminé sa dédicace en cours, il relève la tête et voit une jeune femme blonde à la posture timorée, serrant un de ses livres contre elle. Il s'agit de l'ouvrage intitulé Monsieur Blanche. Après avoir échangé 3 phrases il écrit sur la deuxième de couverture : À Claudine, ma douche admiratrice, future maman d'un écrivain célèbre. Amicalement Bernard Chalenton.

En 2005, Colette Chantecler rend visite à sa mère. Celle-ci a sombré dans une sorte de mutisme dès sa naissance. du coup sa fille Collette a été placée dans une famille d'accueil, où sa mère Claudine n'a jamais voulu se rendre. le responsable de l'établissement l'emmène voir sa mère qui est assise sur un banc devant un plan d'eau. Elle sert contre elle le livre Monsieur Blanche. Sa fille s'assoit à côtés d'elle, et la mère commence à réciter des extraits du livre par coeur. Elle finit par convaincre sa fille d'écrire son propre livre que Colette intitule Pickpocket. À l'arrivée de l'automne, comme tous les ans, Claudine se baigne nue dans le plan d'eau. Quelques mois plus tard, Frédéric se rend au château de l'écrivain Bernard Chalenton dont il est l'assistant. Il y va avec sa compagne Carla. Pendant ce temps-là, Chalenton demande à Baptiste, son homme à tout faire, de se rendre à la ville pour chercher ses commandes à la librairie.

Jean-Claude Servais est un auteur de bande dessinée belge qui a commencé sa carrière en 1975. le lecteur a donc conscience de se lancer dans un ouvrage réalisé par un auteur confirmé maîtrisant cet art narratif. C'est donc avec confiance qu'il découvre ces 3 premières pages consacrées aux habitudes de vie du cerf. Ces planches réalisent un très bel hommage à ce type de forêt, à la fois pour le plaisir de la verdure, pour les espèces reconnaissables, et pour la qualité inimitable de la lumière. le lecteur a l'impression de plonger dans un documentaire animalier, plus factuel que romantique, avec des cerfs et des biches parfaitement représentés dans leur morphologie et dans leurs postures. Les traits tracés par Servais sont très fins et très précis, avec une impression de spontanéité quand le lecteur les regarde de plus près. Il arrive à combiner une description précise, avec une forme de vitalité. La mise en couleurs de Guy Raives vient compléter les traits, sans les écraser, mais en apportant des informations sur la luminosité, sur la texture, et parfois des éléments représentés en peinture directe. Si le lecteur n'avait pas pris la peine de regarder qui a fait quoi, il serait prêt à jurer que les dessins et les couleurs ont été réalisés par un seul et même artiste.

En découvrant l'ouverture sur les comportements des cerfs, puis la base de l'intrigue relative à un homme à femmes, le lecteur comprend dès les premières pages où l'auteur veut en venir : comparer le comportement d'un homme à femmes avec celui d'un cerf, et montrer comment le vieux cerf / séducteur va être confronté à un mâle plus jeune. Effectivement l'intrigue prend cette direction, mais pas de manière aussi basique. Dès le départ, le lecteur apprécie également la qualité narrative et l'investissement de l'auteur. Dans la postface, il remercie l'écrivain belge francophone bien réel Alain Bertrand à qui il a emprunté des passages de son livre Monsieur Blanche (2004) bien réel lui aussi. de même les textes relatifs aux cerfs proviennent également d'un professionnel : Jean-Luc Duvivier de Fortemps, auteur par exemple de Seul parmi les cerfs : Les carnets d'un naturaliste. Enfin les extraits du livre de Colette sont empruntés, avec autorisation également, à l'auteur Frank Andriat, et à son livre Voleur de vies. Cette façon de travailler atteste d'une volonté d'authenticité, même si le lecteur n'y prête qu'une attention distraite. Dans cette postface, il apprend également que le château de Chalenton est bien réel, et que l'auteur s'est servi de celui de Laclaireau à Ethe-Virton, dans le Luxembourg, comme modèle.

Tout du long de ces 70 pages de bandes dessinées, le lecteur se projette avec facilité dans chaque endroit, de cette clairière à l'ambiance tamisée au début, jusqu'au bord du plan d'eau de la maison de repos à la fin, en passant par des endroits aussi divers qu'un grand espace d'exposition où se tient un salon du livre (avec des éditeurs comme Dargaud et Dupuis), les escalators dans une gare, le salon grisâtre de la maison de repos, le magnifique hall d'entrée monumental de la demeure de Chalenton, le petit appartement moderne de Frédéric, le ponton au bord du plan d'eau du château, etc. À chaque fois, le lecteur ressent l'ambiance du lieu grâce aux couleurs qui transcrivent la luminosité. Il peut laisser son regard errer sur les détails de l'aménagement, ou simplement saisir d'un coup d'oeil la situation sans ralentir sa lecture. L'artiste représente les personnages de manière tout aussi naturaliste, avec des morphologies différentes, et des signes attestant de l'âge de l'individu (sauf pour le corps dénudé de Claudine, dont la peau est encore parfaitement tendue, indication portée par la couleur). de même les tenues vestimentaires participent à définir les personnages, en étant cohérentes avec leur position sociale et leurs occupations.

Du fait de la qualité des dessins, le lecteur a tendance à freiner sa lecture pour bien en profiter. Les pages consacrées aux cerfs dans la nature attestent d'une forte implication de l'auteur pour faire honneur à ces animaux. le lecteur ne ressent pas une impression de remplissage, mais une volonté de faire partager aux lecteurs les impressions ressenties en observant ces animaux, tout en restant dans une optique naturaliste, sans chercher à les humaniser. Jean-Claude Servais a également réalisé une petite dizaine de planches dépourvues de texte qui incitent le lecteur à formuler ses observations, ou ses commentaires dans son esprit. À nouveau il prend le temps de contempler le spectacle qui lui est offert, de jouir de ces visions superbes sans être précieuses, racontant une histoire. Il apprécie également le sens du spectacle de l'artiste, que ce soit pour rendre compte de la beauté de la nature, pour faire passer le magnétisme qui se dégage de la personne de Bernard Chalenton du fait de sa notoriété, de son assurance et de son physique, ou pour montrer les charmes de Claudine et Carla quand elle se baignent nues dans le plan d'eau.

Dans un premier temps, le lecteur ne sait trop comment réagir à la nudité de Claudine, puis de Carla. Pour la première, il est évident que l'acte de sa baigner nue à chaque automne correspond à un rituel dont le lecteur se demande s'il n'est pas lié à un traumatisme. Les dessins mettent en avant la silhouette bien conservée de Claudine, ainsi que le naturel dépourvu d'érotisme avec lequel elle accomplit ce rituel, presqu'en transe. Ce comportement fait bien sûr écho à celui de Carla lorsqu'elle se baigne dans le plan du château, là encore avec naturel, mais en étant épiée par Chalenton depuis son bureau avec un téléobjectif, et depuis les bois par Baptiste avec des jumelles. Ces 2 séquences développent la métaphore du séducteur se calquant sur le comportement du cerf, et des femmes en tant que proies conformément à la loi de la nature. L'auteur file sa métaphore lorsque Frédéric essaye de tenir tête à Chalenton, page 48. Servais réalise un découpage de planches avec des cases se concentrant sur les regards des 2 interlocuteurs, montrant la volonté de Frédéric de se faire respecter, de refuser de se plier aux ordres de l'écrivain, et montrant celui-ci conserver son calme et faire baisser les yeux au jeune. La similitudes comportements entre humains et cerfs semblent parfaite.

Les images et les explications du directeur d'établissement indiquent que la volonté de Claudine a été complètement brisée lors de sa rencontre avec Chalenton, au point de se désintéresser de sa propre vie et de se réfugier dans le livre Monsieur Blanche, comme s'il s'agissait d'un sanctuaire inviolable, ne pouvant pas s'altérer du fait de sa forme écrite et immuable. Claudine a décidé de rester sur sa version imaginée du bel écrivain. le lecteur peut la voir serrer le livre contre elle, comme s'il s'agissait d'un talisman, d'un viatique du bonheur. Il en va tout autrement de Carla même si au départ elle semble se plier à la volonté du mâle en s'offrant volontairement à ses regards. L'auteur n'utilise pas de bulles de pensée pour rendre plus explicites les états d'esprit des personnages ou leurs intentions, mais le langage corporel de Carla indique qu'elle sait pertinemment qu'elle est observée à la dérobée par Chalenton. le lecteur en déduit qu'elle ne se place aucunement en position de victime, ou de femelle se soumettant à l'ordre naturel des choses, c'est-à-dire à la volonté du mâle, à son appétit. Ce comportement change également la position du lecteur. Il n'est plus un voyeur complice de Chalenton, mais il est manipulé par Carla comme Chalenton.

Au fil des séquences, le lecteur prend conscience que l'auteur a utilisé le parallèle entre le comportement des cerfs et celui des hommes de type alpha-mâle pour mieux faire en sorte que le lecteur prolonge ce qui lui est montré et projette sur les personnages des comportements qui ne sont pas sous-entendu, mais plutôt suggérés. Il se prend ainsi lui-même à son propre piège. Il a imaginé que Baptiste est un brave serviteur un peu rustaud, mais sans réelle autonomie par rapport aux desiderata de son employeur, bel homme, mieux éduqué. Il s'en persuade d'autant plus quand il voit Baptiste observer le corps de Carla à la dérobée, essayant d'en profiter même s'il sait qu'elle est la chasse gardée de son employeur. Il découvre par la suite que l'intérêt de Baptiste n'est pas si identique à celui de son maître, et qu'il dispose de sa propre culture. de la même manière, le lecteur a projeté un comportement type sur Frédéric, et il se rend qu'il n'a peut-être pas été assez loin. Bien sûr, il en va de même de pour Carla.

Il faut également un peu de temps au lecteur pour réévaluer le comportement et le caractère de Bernard Chalenton. Finalement celui-ci n'est certainement pas le héros, mais pas non plus le premier rôle dans cette histoire. Il apparaît au départ ambivalent, à la fois séducteur impénitent, à la fois individu égocentrique. Sa vie se pare des signes extérieurs de la réussite, à commencer par sa fortune personnelle, sa réussite professionnelle, et le nombre de ses conquêtes. Mais ses postures face à Carla montrent un individu asservi à sa passion, contraint par ses pulsions, de la même manière que le cerf ne choisit pas son comportement à la saison des amours. Pire encore, son comportement professionnel dépourvu d'éthique en fait un individu méprisable également sur ce plan-là. Aux yeux du lecteur, il ne lui reste plus que son aisance financière comme caractéristique à envier, mais au prix d'une existence entièrement asservie à des instincts contre lesquels il ne sait pas lutter, qui lui dictent sa vie. Cette forme de condamnation du personnage par l'auteur s'avère d'autant plus totale que le lecteur se rend compte qu'il lit une histoire savamment composée dans laquelle les éléments se répondent d'une séquence à une autre, avec une rigueur impressionnante.

Jean-Claude Servais a inclus des éléments en provenance d'autres écrivains, mais totalement intégrés. Les courts extraits des observations de Jean-Luc Duvivier de Fortemps comportent un vocabulaire technique, comme harpail ou gagnage, expliqués par de brèves notes en bas de page. Les extraits des romans d'Alain Bertrand ou de Frank Andriat sont choisis pour les thèmes qu'ils abordent comme celui de la liberté, de l'exaltation qu'elle procure. le lecteur regarde alors le comportement des personnages avec plus d'attention. En particulier, il observe l'évolution du comportement de Carla et ce qu'elle devient, en le rapprochant du titre de son dernier livre le Dominant. Elle a échappé au comportement animal de la biche. Elle est loin maintenant, ayant assimilé les techniques des dominants, s'étant élevée au-dessus de sa condition de proie, imposée par la société autour d'elle. Elle a su apprendre et penser en dehors des schémas de rapports sociaux traditionnels, mais l'auteur laisse le lecteur décider par lui-même si elle reste encore dans un schéma dominant / dominé.

En découvrant les premières pages, le lecteur soupire d'aise devant la richesse des dessins, à la fois descriptive et évocatrice. Il apprécie les pages consacrées à la description des comportements animaliers pour leur naturel et leur précision. Il se dit que le déroulement de l'intrigue est couru d'avance. Il prend petit à petit conscience de la subtilité et de l'intelligence du propos de Jean-Claude Servais, à la fois psychologique, philosophique et social, mettant en scène des individus beaucoup plus riches que ce que le lecteur avait supputé, façonnés par leur histoire personnelle, luttant pour leur liberté qu'ils conçoivent de manière plus ou moins lucide. Exceptionnel.
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Colette va voir sa mère pour la première fois, dans la maison spécialisée où elle est placée depuis sa naissance. C'est qu'elle aurait subi un choc à ce moment, un choc qui l'a enfermé dans son monde fait des écrits de Bernard Chalenton. D'ailleurs c'est un de ses livres qu'elle serre dans ses mains, un livre qui porte une dédicace : "A Claudine, ma douce admiratrice, future maman d'un écrivain célèbre"

Je n'ai que moyennement accroché à l'histoire cousu de fil blanc. La trame se devine aisément dès la première page présentant les personnages. Aucune grosse surprise et l'histoire m'a semblé un peu creuse et sans aucun suspense pour nous tenir en haleine. de plus j'ai pas accroché aux personnages entre l'écrivain, homme à femme assez méprisable, et la jeune femme volée dont le caractère change brutalement pour devenir manipulatrice. Au final des comportements très similaires entre ces deux personnages qui laisse un peu d'amertume, comme une déception. On reproduit tous les erreurs de nos parents parait-il...
J'ai trouvé les passages sur les cerfs beaucoup plus jolis au final. Bien qu'ils fassent un peu documentaire animalier on y sent la passion pour la forêt. Comme une ode à la nature, comme le prouve la postface très joliment illustrée. J'ai moins aimé le parallèle qui est fait entre les cerfs et le comportement humain.

Jean-Claude Servais nous livrent de très belles illustrations, en particulier quand il s'agit de la nature. A l'image de cette couverture automnale qui attire le regard.
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Je continue d'explorer la bibliographie de Servais, auteur qui ne m'a jamais ébloui pour l'instant mais que j'aime bien dans son trait et ses thématiques. Après lecture de cette BD, je reste sur le même avis que mes autres lectures : il faudrait que Servais prenne un scénariste qui lui fasse une histoire plus solide que ce qu'il produit seul.

C'est une constante de Servais mais ses dessins envoie du pâté : on a une sublimation de la nature et des animaux (ici les cerfs dans leur fameux brames), des corps féminins assez semblables d'un album à l'autre mais plutôt agréable à l'oeil, une esthétique sur les bâtiments aussi. Cela dit, comme dans d'autres BD, je trouve que son dessin est beau de façon formelle. Comme souvent, il met des pavés de textes dans ses cases qui masquent le décor mais ne rendent pas la lecture fluide, et il aime aussi les pages muettes où des textes sous-titrent les cases. C'est sympathique pour faire un effet spécifique (souvent faire une liaison texte-image qui permet la métaphore) mais je trouve qu'il en abuse un peu trop. de fait, je me suis retrouvé devant une lecture plutôt pénible, alourdie assez inutilement par des pavés de textes assez dispensables. C'est en notant à la fin que ce sont des emprunts à des écrivains belges que je ne connaissais pas mais qu'il connait et apprécie que j'ai compris l'hommage rendu. Chouette idée, mais mal amenée à mon sens.

Pour le reste de l'histoire, le lien assez évident entre le cerf et l'auteur est compréhensible presque immédiatement, tandis que le questionnement sur l'auteur voleur de texte est traité de façon assez superficielle malheureusement. Comme souvent, je ne dirais pas que le scénario de Servais est mauvais, il est juste pas assez abouti et ne va pas au bout de ce qu'il traite. Un des aspects malheureux est le développement de personnage, assez faible. Chacun n'est défini que par un seul trait de caractère ou presque, ce qui rend vite leurs interactions assez convenue. Je pense que c'est un des gros défauts qu'il aurait fallu gommer pour donner plus de corps à l'ensemble.

En somme, une BD qui aurait pu être bonne et à quelques pistes qu'il aurait été bon de creuser. Malheureusement, j'ai trouvé la lecture souvent lourde et pas franchement intéressante. La fin n'est pas spécialement originale, reste les dessins très sympathiques. Je lirais d'autres Servais mais à petite dose.
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La saison du brame, c'est l'instant fatidique où le cerf dominant gagne au combat la suprématie sur les autres mâles et la jouissance exclusive des femelles de la harde. Mais qu'advient-il du maître quand la vieillesse le fait ployer devant un adversaire plus jeune ? (NDE)
C'est là tout le propos du récit. En une belle métaphore, Servais nous conte deux histoires en parallèle : celle qui se noue entre Colette, sa mère et l'écrivain, et celle de la forêt qui vibre sous le brame, rituel éternel de passage de force pour la survie de l'espèce.

Cette double approche lui donne l'occasion de dessiner (je dirai presque peindre) la forêt et les sous bois à l'époque où elle explose littéralement de mille feux. Les palettes de couleur et de lumière fusionnent avec brio pour nous offrir des dessins d'une criante réalité. Fascinante, la nature nous apparaît ici dans tout son éclat ; personnage à part entière du drame qui se joue devant nous. Car c'est bien d'un drame dont il s'agit ici. Orgueil, vanité, perversion, autorité et traîtrise nous offrent un cocktail âcre dont l'auteur ne sortira pas indemne. Et par l'analogie qu'il fait, Jean-Claude Servais nous rappelle que l'homme et la nature sont intimement liés.
Cette bande dessinée se lit comme roman, puis se déguste une seconde fois comme une exposition d'instantanés sur la forêt ardennaise. L'album est magnifique et sera très certainement primé.
S'étant inspiré de l'oeuvre d'écrivains et de scientifique connus pour illustrer son récit, Servais leur rend hommage à la fin de l'album d'une bien belle façon.
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critiques presse (3)
BDGest
19 décembre 2011
Le côté stylistique ne se discute pas, Servais maîtrise parfaitement son art et rend une copie de grand talent. Le brame, les sous-bois, l'immanquable demoiselle dans le plus simple appareil sont tous admirablement rendus. En fait, c'est l'intrigue en elle-même qui pèche par sa simplicité.
Lire la critique sur le site : BDGest
BDSelection
07 novembre 2011
Égratignant quelque peu le monde de la littérature et magnifiant surtout la nature (bien plus qu'un décor, il s’agit d’un élément indissociable de l’histoire), ce fascinant roman en images, très bien documenté, bénéficie aussi de toute la maestria graphique de l’auteur.
Lire la critique sur le site : BDSelection
Sceneario
07 novembre 2011
Un one-shot somme toute entreprenant sublimé par une partie graphique enchanteresse.
Lire la critique sur le site : Sceneario
Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
La vieille souche me donnait l'image de la souffrance et de la mort, alors qu'un faon avait pris la place du cœur de l'arbre retourné en poussière.
Image de la réincarnation ou de la résurrection, image de la mort qui porte en elle la vie.
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Le réveil cyclique de l'amour fait oublier au cerf sa peur de la mort. Plus question de se taire et de se terrer! L'heure est aux défis, aux parades, aux poursuites, aux conquêtes, aux étreintes.
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Du crépuscule à l'aube, le cerf quitte sa remise, pousse son harpail vers les gagnages. Les biches sortent en tête. Le cerf les suit presqu'immédiatement. Mais il est souvent obligé de regagner la forêt pour en extraire, parfois à coup d'andouillers, les biches attardées. Il sait parfaitement que des concurrents, les cerfs satellites, rôdent à proximité de la clairière, invisibles, dans le sous-bois. Dès lors, il veille à ce que la harde reste compacte et s'active autour, tel un chien de garde.
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Ému, le jeune homme n'en revenait pas de sa franchise, de son audace. D'où lui venait cette soudaine liberté de parole ? Le pétillement du vin dans ses veines ? L'émotion d'un coude à coude festif entre voisins ? Il semblait à monsieur Blanche que l'accordéon et les airs tziganes avaient réveillé en lui le songe précieux d'une autre vie. Avec la musique, il se sentait pousser des ailes; il était en mesure de frôler le soleil.
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En dehors du rut, les cerfs adultes vivent séparés des biches. Ils viandent en parfaite harmonie. De leur côté, les hardes de non-boisés auxquelles se joignent les jeunes cerfs (hères, daguets, quatre et six corps) sont conduites par des biches meneuses. Celles-ci sont habituellement suitées, c’est-à-dire mères d'un faon, ce qui les rend plus vigilantes. Une blessure, la perte de leur faon les déclasserait immédiatement.
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