Un bel objet que ce roman illustré.
Les jeunes lecteurs s'en rendront compte au toucher agréable de la première de couverture, épaisse et lisse, puis avec le traitement narratif, avec celui des illustrations :
Stéphane Servant et
Audrey Spiry donneront ici dans le carnet de voyage.
Et c'est superbe.
"L'expédition" offrira deux lectures évidentes et bien claires en refermant le livre.
Non, contrairement à ce que certains lecteurs chafouins pourraient supposer avec pareille couverture, il ne s'agira pas d'un album sur les traversées illégales et les exils par la mer.
Et il ne s'agira pas que du thème du voyage car à demi-mots,
Stéphane Servant abordera celui de l'éducation, transmise et des conseils expérimentés, de la transmission. C'est le cycle de la vie.
Une fille des îles grandira avec l'envie de prendre la mer, puis de voir le monde. Ainsi, encouragée par ses parents, elle se fera un bateau et ira.
Nous pourrons y voir également l'expérience de vie de quitter le giron familiale pour grandir sur la terre ferme.
L'histoire suggérera de se jeter à l'eau, de se jeter dans la vie sans plus de filets parentaux, d'aller voir ailleurs, de se faire ses propres images et son propre regard sur le monde, de se forger une destinée et puis de transmettre à son tour son histoire, avec ses réussites, ses échecs, ses révélations, ses désillusions, ses surprises.
Toutes ses idées transiteront par le parcours initiatique de la jeune héroïne que l'on verra vieillir.
Nous aimerons l'idée de la coquille de noix, la jeune aventurière se contentant de peu pour entamer son voyage.
Les images de sa traversée nous paraitront parfois dangereuses, dissuasives, avec ses lames de fond et ses tempêtes.
Nous saisirons bien la métaphore et nous ne pourrons qu'affirmer que vivre n'est pas sans risques pris.
Le voyage de la jeune héroïne est un itinéraire sans vraies destinations, avec de grandes directions jetées vers le loin, comme avec la vie dont on ne sait pas ce qu'elle nous réserve.
Il y aura de belles escales et de chouettes rencontres avec cette femme au pied marin.
Nul pirate ici-bas, elle qui n'aura ri
en volé et aura tout méritée, à constater sur les pages ( ne dépendant que d'elle-même, libre comme le vent et la mer, elle sera téméraire et audacieuse, ce qui ne sera pas la même chose).
Le traitement graphique à la manière d'un carnet de voyage à la gouache, les images et les textes affranchis de cases, nous aideront à mieux ressentir ce courant de l'évasion très fort qui poussera la coque de noix et son héroïne vers des rivages inconnus.
La fin est touchante, comme un cycle logique, une barque bien menée et un carnet d'expériences bien rempli.
On a bien aimé.