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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
10 minutes et 38 secondes ... c'est le temps au cours duquel le cerveau humain peut encore fonctionner alors que le coeur a cessé de battre, en l'occurence celui de Tequila Leïla, prostituée assassinée dont le corps a été retrouvé dans une benne à ordures d'un faubourg d'Istanbul. Qui était-elle? Qui l'a tuée? Qui se souviendra d'elle après son départ?

La première partie, la plus longue «  l'esprit » est éblouissante et dresse le portrait nuancée couche après couche d'une femme forte car libre malgré les épreuves qu'elle a traversées. La narration est brillante, alternant les dernières pensées de Leïla, son passé, son enfance, son adolescence, mais aussi la présentation de ses cinq amis à la vie à la mort.

Il y a de la rage à décrire les violences faites aux femmes dans le cadre d'un patriarcat étouffant ; une scène est particulièrement époustouflante, relatant un incident odieux qui sera un des pivots du parcours de Leïla, lors d'un pique-nique familial alors qu'elle n'a que six ans. Ce n'est pas un hasard si le roman s'achève en 1990, date à laquelle la mobilisation des femmes turques a empêché la mise en place d'un projet de loi terrible qui aurait exempté de sanctions un violeur du moment que la victime aurait été une prostituée. Cette rage s'empare du lecteur dont le coeur s'emballe d'empathie pour Leïla.

De la rage mais aussi beaucoup de mélancolie à dire une Turquie que l'auteure a quitté depuis une dizaine d'années, elle, la femme de combat, la féministe engagée en faveur des droits humains, qui défie le gouvernement Erdogan et toutes formes d'hypocrisie, de censure, de bigoterie. Après un procès pour insulte à l'identité turque ( suite à la parution de la Bâtarde d'Istanbul qui évoquait le génocide arménien ), là-voilà sous le coup d'une nouvelle enquête pour obscénité. Ce roman est jugée obscène, alors qu'il ne fait que donner une voix aux parias, aux invisibles, aux exclus, qui comme Leïla et ses amis se sont réfugiés à Istanbul pour vivre leur vie loin des tabous.

Si la première partie m'a emportée, j'ai nettement moins aimé les suivantes «  le corps » et « l'âme ». Cette fois, j'ai été gênée par le procédé forcément artificiel qui consiste à faire parler un mort. le magnifique romanesque se transforme en une multitude de péripéties très rocambolesques. Trop à mon goût, à la limite du grotesque préjudiciable pour l'émotion et d'un mysticisme auquel je suis naturellement peu sensible, alors que jusqu'à présent, le style de l'auteur m'avait comblée.

Reste un très beau portrait de femme écrit par une écrivaine d'une sacrée trempe.

Lu dans le cadre du jury Grand Prix des Lectrices Elle 2020, catégorie roman
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Un véritable hommage à l'amitié et à la différence.
Leila croupit au fond d'une benne, assassinée et, pendant 10 minutes et 38 secondes, se remémore sa vie.
Il est questions de secrets de familles, de blessures d'enfance, de préjugés, du poids des traditions mais aussi de bienveillance et de solidarité.
Elif Shafak nous conte Istanbul avec ses couleurs, ses odeurs, son vacarme, ses bas-fond, sa culture et son énergie.
En toile de fond sont abordés la corruption, l'autoritarisme d'Etat, le patriarcat, le condition de la femme et le manque de liberté.
La plume est élégante et poétique.
Un roman délicat et émouvant.
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Je ne connais pas l'auteure. En fait je n'ai jamais lu, à ma connaissance, d'auteur turc. Partons à la découverte !
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"10 minutes et 38 secondes" : l'auteure imagine que pendant cette durée, même si notre corps est mort, notre esprit tourne encore et se remémore certains souvenirs.
L'auteure va égrener minute après minute, des épisodes de la vie de son héroïne, Leila, femme turque, dont le corps va être retrouvé dans une poubelle suite à son assassinat.
C'est original, mais un peu décousu. Je ne sais pas si c'est ça qui a fait que j'ai eu quelque mal à m'attacher à cette héroïne, bringuebalée par la vie, par le patriarcat, par un monde arriéré mais très actuel de domination. Il m'a manqué un je ne sais quoi pour être touchée.
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Au final j'ai trouvé la 2e partie (les amis de Leila se liguent pour lui offrir une cérémonie mortuaire comme elle aurait aimé ou comme ils voudraient pour elle) plus relevée par ses personnages atypiques. En fait je serais bien restée avec ce groupe bancal mais attachant.
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Donc une lecture en demie teinte pour moi, mais un roman intéressant.
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On dit communément que notre vie défile en accéléré au moment du décès, dans cet entre-deux-mondes où le corps cède mais où l'esprit s'accroche en derniers flashs électriques.

Tequila Leila est morte, son corps martyrisé jeté dans une poubelle d'Istanbul.

L'astucieux montage narratif d'Elif Shafak la ressuscite par ces petites minutes où son enfance et sa destinée de femme devenue travailleuse du sexe nous sont racontées. Des réminiscences qui font apparaître peu à peu un personnage solaire, une belle âme subissant la cruauté de la société turque, l'obscurantisme et le patriarcat dans les familles, la brutalité des hommes. Une femme déterminée et courageuse qui a su s'entourer d'une nouvelle famille aimante, recomposée d'individus ostracisés: transsexuel, prostituée, chanteuse de bastringue...
Des indésirables qui vont braver les interdits pour donner sépulture respectable à une amie très chère et très regrettée.

Ce roman accroche l'intérêt et le coeur dès les premières pages. La narration est soutenue par une belle force romanesque, une histoire de vie implacable et désespérante éclaircie par les rencontres. Au travers des parcours, dans la peine et la douleur, d'individus attachants et décalés résonnent une bienveillance et une compassion envers autrui, mais aussi une dénonciation d'un système social écrasant.

Carton rouge pour les autorités turques qui ont décidé d'enquêter sur Elif Shafak pour obscénité, alors que son dernier roman pétri d'humanité est en passe d'être un succès d'édition*. La romancière avait déjà été dans le collimateur de l'Etat pour avoir reconnu le génocide arménien dans son roman La batarde d'Istanbul (2006)

*(sources: theguardian.com)
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Je vous propose de la littérature turque avec le nouveau roman d'Elif Shafak « 10 minutes et 38 secondes dans ce monde étrange » publié aux éditions Flammarion qui nous parle de la mort biologique.
La première de couverture est une composition florale joliment ajustée avec le titre. Ce contraste de couleurs avec le nom de l'auteure rajoute un impact sur le visuel.
Elif Shafak est une auteure que j'apprécie tout particulièrement pour sa plume et la puissance de ces récits toujours aussi authentiques, qui divulguent les cultures occidentale et orientale avec justesse.
À travers la mort biologique de Tequila Leila, ce roman relate des évènements historiques en Turquie, expose le quartier des prostituées à Istanbul et bien d'autres sujets aussi sensibles comme l'inceste…
10 minutes et 38 secondes dévoilent une enfance amère et douloureuse, retracent une vie brisée. Une histoire qui accuse le passé et condamne le présent tout simplement.
L'atmosphère régnante est assez oppressante avec tous ces extraits d'une existence détruite par une certaine injustice, par une instabilité familiale, par une incompréhension et rejet de la société... toutefois l'écriture fluide de l'auteure rend la lecture agréable.
Une approche émouvante sur l'amitié se déploie constamment dans ce livre, preuve que tout n'est pas totalement perdu.
À part une fin qui tardait à venir... ce roman a tout de même été une belle découverte.

Lien : http://chroniqueuse6.canalbl..
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Depuis qu'Elif Shafak écrit directement en anglais, ses lecteurs fidèles ont noté un léger changement de style, peut-être également lié aux traductions, mais rien de rédhibitoire ni susceptible de diminuer l'intérêt pour une romancière aujourd'hui considérée comme persona non grata en Turquie. Sa nostalgie d'Istanbul, de sa cuisine de rue par exemple, est palpable dans 10 minutes et 38 secondes dans ce monde étrange, récit éclaté de la vie et la mort d'une fille d'Anatolie devenue prostituée sur les rives du Bosphore. Ombres et lumière sur la ville ottomane, le livre est avant tout un hommage à tous les déclassés de cette ville "liquide et féminine", ces parias qui finissent dans le cimetière des abandonnés, sans pierre tombale à leur nom. Roman épique et un brin chaotique, l'ouvrage commence par ces 10 minutes et 38 secondes pendant lesquelles son héroïne, assassinée, se remémore des instants de son existence à travers des souvenirs olfactifs, de l'enfance à sa vie de femme. le livre se termine par des épisodes tragico-comiques autour de la tentative de ses meilleurs amis pour lui offrir une sépulture décente. Comme toujours, en bonne alchimiste littéraire, Elif Shafak mélange les genres, à partir du réalisme magique, en passant par le burlesque et le drame. Sans oublier un aspect politique très fort, puisqu'en Turquie tout écrit l'est nécessairement, même si le roman évoque des révoltes du passé, dans les années 70, principalement. Les événements liberticides de l'époque, l'intolérance des autorités et la répression systématique de l'opposition , font évidemment écho à ce qu'il se passe aujourd'hui dans le pays de coeur d'Elif Shafak.
Lien : https://cin-phile-m-----tait..
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Tequila Leila est une prostituée retrouvée morte un matin dans une benne à ordure. Pendant que son corps refroidit, son esprit s'évade et revient, minute après minute, sur les souvenirs de moments de sa vie, sans ordre ni chronologie, souvenirs d'enfance, de famille, d'amitiés, de goûts, d'odeurs. le compte à rebours des 10 minutes et 38 secondes s'écoule peu à peu. En revenant sur son histoire, nous lisons surtout celle d'Istanbul et de la Turquie depuis la fin des années 1950. La profession de Leila n'est qu'anecdotique. L'essentiel de sa vie repose sur ses cinq amis, tous très différents mais qui sont unis par elle et pour elle. le roman emprunte des chemins détournés pour nous raconter l'histoire d'une femme, de ses réussites et de ses échecs, de son destin à la fois banal, trivial, et hors normes. Même en connaissant l'issue, on cherche à comprendre la vie de Leila et on la suit dans les ruelles de la ville et les méandres de sa vie. J'ai apprécié l'absence de parti-pris narratif, l'originalité qui ne va pourtant pas de soi car la lecture n'est pas du tout ce à quoi on pourrait s'attendre et c'est agréable de s'y laisser surprendre.
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Ce roman débute par un meurtre.

Pas de suspens de ce côté-là, on sait que notre héroïne finit dans une benne à ordures, dans une ruelle sordide d'Istanbul.

Sauf que le lecteur se retrouve d'emblée aux côtés de l'esprit de Leila, notre héroïne morte. On comprend alors que le titre représente le laps de temps entre la mort biologique et l'extinction définitive de l'esprit qui occupait jusqu'alors les lieux. L'extinction ou sa libération vers d'autres cieux, une autre dimension ou même le néant, selon les croyances de chacun.

Minute après minute, chapitre après chapitre, Leila se remémore des instants de sa vie, depuis sa naissance jusqu'au tournant tragique de son destin. On découvre alors ce que fut le début de sa vie dans un petit village d'Anatolie (la partie asiatique de la Turquie), sa famille, ses secrets, ses tourments, ses mensonges, le poids de la religion et le déshonneur.

La Leila adulte est une prostituée, une citoyenne de seconde zone, une indésirable pour sa famille et la société bien comme il faut. Son esprit nous raconte au fil des chapitres comment elle en est arrivée là. Comment et pourquoi elle a quitté sa famille et un avenir tout tracé, comment elle a atterri dans la rue des bordels à Istanbul ? Qui sont ces cinq amis qui tiennent tant à elle, quelle a été leur histoire à eux ? D'où viennent-ils et pourquoi sont-ils aussi des indésirables ?

A travers ces six personnages, on part à la rencontre de vies, de lieux, de tragédies différentes.

Comme à son habitude, Elif Shafak fait preuve de beaucoup de douceur dans sa narration, autour de thèmes pas franchement mielleux. Profondément humaniste, elle contrebalance tous les travers de la société turque par des valeurs réconfortantes. La noirceur peut être repoussée par la lumière et l'espérance.

Le poids des traditions et de la religion, la rigidité, l'intolérance, la répression, le jugement, les lois, le rejet, la misère, la souffrance... tout cela est jugulé par la force et la chaleur de l'amitié et l'amour. Un îlot de réconfort dans une tempête en furie.

Toutes ces vies ballottées ont remué mes émotions. le samsara de l'existence est comme un fleuve déchainé qui emporte tout sur son passage, rendant chaque minute, chaque seconde comme un rêve éphémère et déjà oublié. L'être humain s'échine à se pourrir la vie et celle de ses congénères en inventant tout un tas de règles morales aussi rigides que destructrices, des principes ridicules qui ont pourtant le pouvoir de briser des vies. Il suffirait pourtant de distiller dans ce monde un peu plus de souplesse, de tolérance et de bienveillance. Cette bienveillance existe déjà, certes, par petites touches, et c'est ce qui rend la vie de certains plus tolérable, mais ce n'est pas assez.

Elif Shafak signe ici un roman en faveur du droit des femmes, toutes en général, et les prostituées en particulier, dans un pays (la Turquie) où tant reste encore à faire. (Et pas que la Turquie d'ailleurs).

Bonne lecture.
Lien : https://lebouddhadejade.blog..
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10 minutes 30 secondes sans ce monde étrange, c'est une traductrice de Pamuk qui m'avait conseillé de lire Elif Shafak. J'ai commencé par La Bâtarde d'Istanbul, qui m'avait enchantée, puis continué par 10mn 30s. Une histoire triste, avec Tequila Laila qui est retrouvée morte dans une poubelle. Une femme a qui la vie ne lui a apporté que des malheurs, sauf quelques amis qui veulent l'enterrer dans un cimetière respectable. Un roman sur le désespoir, mais aussi sur l'amitié.
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Un roman qui me laisse mitigée.
J'ai beaucoup apprécié l'écriture,  poétique et fluide. L'ayant lu en français, je constate que le traducteur a fait un travail de grande qualité.  de même,  le pitch du roman et sa structure narrative, découpée en flash-backs sur les moments clés de l'existence de Leila, l'héroïne,  m'ont vraiment enthousiasmée et l'incursion dans la ville d'Istanbul m'a été très instructive.
Cependant, un manque de rythme s'installe au fil des pages et, vers le milieu du livre, mon enthousiasme s'est quelque peu émoussé. Également, j'en suis arrivée à confondre les personnages secondaires tant ils sont survolés. Difficile donc de s'y attacher.
Les dernières pages rattrapent un peu le reste, meme si le roman reste très inégal.
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