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EAN : 9782709658409
480 pages
J.-C. Lattès (31/10/2018)
3.94/5   66 notes
Résumé :
La Seconde Guerre mondiale vient de s’achever et, dans un château de Bavière en ruines qui accueillait autrefois la haute société allemande, on suit l’histoire puissante de ces trois veuves de résistants allemands dont la vie et le destin s’entrecroisent.
Au milieu des cendres de la défaite de l’Allemagne nazie, dans l’immédiat après-guerre, Marianne von Lingenfels revient dans le château, autrefois grandiose, des ancêtres de son époux, une imposante forteres... >Voir plus
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Encore un livre sur une période trouble, instable, bancale, entre les derniers combats de 1945 et la capitulation allemande, un moment flou où tout pouvait arriver le bien ou le sordide.
Pour s'attacher à ces heures, il fallait un regard d'une forte originalité. Malgré son jeune âge Jessica Shattuck réalise une double prouesse, éditer un premier roman poignant au milieu des cendres de la guerre et imposer la douleur des femmes allemandes meurtries par les deuils, un sujet qui peut sembler peu crédible face aux génocides qui ont fracassées les minorités.


Pourtant ce livre qui met en scène des femmes qui se sont battues pour que leurs enfants puissent vivre dans l'apaisement, et trouvent les capacités de s'épanouir, est une très belle réussite littéraire.
Le lecteur s'imprègne peu à peu de la vie de trois familles, ce n'est plus Jessica qui parle aux lecteurs, mais chacune des trois héroïnes qui tracent de leurs mains, et dans leur corps l'histoire de leur destin. Trois femmes brisées par la guerre, parfois des résistantes discrètes, toutes portées par une furieuse volonté de sauver leurs enfants. Elles se racontent à tour de rôle, Elles se nomment Marianne, Benita, Ania.


Marianne von Lingenfels réinvestit le château, le château des ancêtres de son époux, telle une forteresse sur le déclin, Marianne assume son statut de veuve d'un résistant pendu suite à son rôle dans la conspiration menée contre Hitler. Dans le désastre de cette tentative le mari de Benita Connie est lui aussi pendu. Pourquoi se raconter, comment se reconstruire, sinon pour tenter de demander pardon aux enfants, et les mener vers l'acceptation du drame, sauver ce qui peut être sauvé, l'amour, la générosité, le partage car demain doit se construire sur d'autres valeurs que celle des jeunesses hitlérien : page 338, Ania rapporte les propos de Baldur von Schirach, "je veux une jeunesse brutale, despotique, sans peur et cruelle"...


Toute l'intrigue va se crisper quand le brave forestier Herr Muller, est licencié par Marianne, au motif qu'il fut un exécutant des basses oeuvres nazies membre de l'Orpo. Benita est au contraire émue par ce garde qui trouve des gestes de tendresse pour aider Benita.

Le passé et le présent s'invitent et provoquent les consciences. Quand Marianne fait entendre la loi et invite Benita à l'épuration pour des crimes commis, Benita demande de laisser une place pour le pardon.
"Je ne veux pas passer ma vie à regarder derrière moi.. C'était une période horrible. Et maintenant elle est terminée, tu es cruelle Marianne" finit par ajouter Benita page 248.
Benita est à deux doigts d'épouser Herr Muller. Une fracture s'élargit entre les deux femmes qui furent comme deux soeurs. Quel sort attend Martin le fils adoré de Benita ? Martin le fils de Connie.


Connie qui lui laissera une lettre poignante d'émotions, lui dit son amour et sa tristesse de l'avoir abandonnée. 

"Je suis mort ma bien-aimée, j'écris tout ceci en matière d'explication, ce que je veux surtout te dire c'est que je t'ai aimé dès le moment,où je t'ai vu le jour de l'Anschluss près de la mare."
Benita ne ressemble pas à Marianne, elles s'opposent par leur personnalité. C'est peut-être aussi pour cela que Benita épousa le meilleur ami de Marianne. Benita était différente, très belle et fragile à la fois, elle possédait une légèreté qui la distinguait de Marianne, comme le signe d'une féminité toute personnelle, ce que l'on peut parfois désigner par une aura particulière de sensualité et d'optimisme. Benita était un être délicat, trop délicat pour cette époque de laideur et de réalité brutale précisait Jessica Shattuck page 430.


Connie avait laissé à Marianne une autre mission : "prend soin de ma femme lui avait demandé Connie occupe-toi de mon fils, ne laisse pas Benita épouser un cochon de nazi ne laisse pas l'assassin prendre ma place. C'était implicite". Page 245.
Cela ressemblait bien à Benita de mourir d'amour.

Ania, était une femme entière, déterminée, qui tranchait. Son sens des réalités apporta à Marianne, l'aide que la forteresse réclamait. Elle portait la pleine désillusion d'avoir cru en un régime qui sollicitait le courage et l'enthousiasme de la jeunesse. Sa lucidité éclaire ces pages, comme si Jessica Shattuck tenait à faire parler un témoin lucide, pour dénoncer un régime cynique, violent et trompeur.

La simplicité du récit, le regard vrai de Jessica Shattuck nous touche, comme un vibrant hommage à des femmes qui ont su rester digne dans la déroute.
Ce livre est une magnifique approche douloureuse de la période la plus tumultueuse de la fin du nazisme.
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Quand on évoque le nazisme et le cortège d'horreurs qui reste attaché à cette funeste mouvance, on oublie trop souvent qu'elle a eu ses opposants. Et Dieu sait s'il fallait être courageux jusqu'à l'inconscience pour faire partie de ces derniers, escomptant éradiquer le mégalomane xénophobe qui avait mis sur pieds la monstrueuse machine à avilir le genre humain.

Dans Château de femmesJessica Shattuck nous introduit dans ce cercle de rêveurs d'une Allemagne débarrassée de son fou sanguinaire. Ils n'auront, on ne le sait que trop, pas connu l'aboutissement de leur clairvoyance. Leur fantasme philanthropique sera très tôt étouffé, au bout d'une corde.

Restent ces femmes dont Jessica Shattuck évoque le sort dans ce roman. Elles avaient en commun d'avoir partagé la vie de ces idéalistes qui déploraient de voir leur pays s'enfoncer dans la voie de la perdition. Comment revivre normalement au sortir du cauchemar selon le comportement qu'ont eu les uns et les autres vis-à-vis du pouvoir oppresseur pendant cette période noire. Entre condamnation, pardon et glorification, comment réconcilier les partis pris dans un pays profondément traumatisé et redonner espoir en l'avenir.

La personne humaine, une décennie étouffée par la machine infernale, reprend ses droits. L'oubli est certes impossible mais la vie doit reprendre son cours et reconstruire une société faite d'individus aux parcours parfois inconciliables. Très belle analyse faite par Jessica Shattuck de cette réadaptation du pays au travers de l'histoire de femmes forcément meurtries par leurs déboires. La recouvrance définitive ne s'imaginant pas selon elle avant la réunification du pays après la chute du mur de Berlin. Les vainqueurs ayant entretenu la scission du pays du fait de leurs propres divisions pendant la guerre froide.

Très beau roman qui met en exergue les affinités, les sensibilités, sans sombrer dans l'affectation, avec cette forme d'austérité de ceux qui ont connu le pire et n'aspirent en des jours meilleurs qu'avec circonspection. L'écriture est sans emphase, appropriée au contexte avec la grisaille du décor et l'accablement qui affuble les caractères. Une écriture émaillée de quelques pointes de virulence crue qui peinent toutefois à décrire des scènes pénibles.

Château de femme est un beau roman qui se défend de tout jugement. Il traite de cette période de convalescence d'un pays avec beaucoup de pertinence et de retenue dans l'examen des consciences.
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****

Ce soir là, lors de la soirée donnée au Burg Lingenfels par la comtesse, Marianne est déclarée Commandante en chef des épouses et des enfants. Elle ne sait pas encore que ce rôle sera lourd de conséquences mais surtout qu'il donnera un sens à sa vie... Quand son époux et son meilleur ami seront pendus pour actes de résistance contre les nazis, elle devra faire face à ce pays qui est le sien mais dont elle a honte...

Que ce roman a dû être long et difficile à écrire ! Jessica Shattuck signe ici un très bon livre sur l'histoire allemande sous le regard des femmes de résistants.
Marianne est un personnage fort, droit, qui met un point d'honneur à respecter la parole qu'elle a donné à son époux et à son ami d'enfance.
Marianne tente du mieux qu'elle peut de protéger les femmes et les enfants des résistants morts ou disparus. Mais, malgré sa bonne volonté, elle a du mal à ouvrir son coeur et à écouter ce que Ania et Benita veulent oublier...

Jessica Shattuck a un réel sens de l'histoire. Elle nous emmène avec une grande facilité à une époque noire et sombre, ne cherchant pas à nous émouvoir plus que nécessaire. Elle nous donne une place de choix au coeur de ce trio féminin, balloté entre désespoir, amour et obéissance.

Comme le dit justement Marianne vieillissante, il y a beaucoup de teintes de gris dans la vie, entre le noir et le blanc... le bien et le mal ne cessent de se côtoyer et il est parfois bien difficile de faire la part des choses...

Un grand merci à NetGalley et aux éditions JC Lattès pour leur confiance.
Lien : https://lire-et-vous.fr/2019..
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Allemagne 1945 : Trois femmes (et enfants) sont réunies dans le château de l'une d'elles pour se soutenir et s'entraider. La capitulation allemande a entraîné la présence d'armées d'occupation, le pays est exsangue de la perte de ses hommes, de pénurie, de tristesse et de sidération.

Pour les veuves de résistants militaires* qu'elles sont, l'essentiel est de survivre, de tenter de reconstruire un futur possible et d'être à la hauteur du sacrifice subi. Pour la charismatique Marianne von Lingenfeld, c'est une évidence, pas toujours partagée comme telle par ses deux compagnes, chacune à l'histoire personnelle chaotique.

« Encore une fiction sur la période noire de l'Allemagne nazie » me direz-vous… qui décidément n'en finit pas d'inspirer les romanciers !
Mais quand on regarde le parcours de la famille de Jessica Shattuck et ses origines allemandes, on comprend qu'elle devait posséder ce témoignage dans ses gènes, avant même d'en faire un roman. Et la transformation du réel vers le romanesque a été plutôt réussie.

La narration construite sur plusieurs époques apporte un éclairage intéressant sur la mentalité de la population, autant dans l'entre-deux-guerres que pendant le conflit et la honteuse période de pays vaincu. Il interroge sur une reconstruction chargée d'imposture où tous ou presque ont quelque chose à se reprocher, avec un autisme général pour occulter le passé. Mais le désir de tourner la page est souvent difficile voire impossible.

En évitant toujours la surenchère de l'horreur, en privilégiant l'aspect factuel des événements et la psychologie, en axant intelligemment la fiction sur l'Histoire, l'auteure tient le lecteur avec des personnages très travaillés, de très beaux portraits femmes dans leur humanité avec leurs personnalités propres.

Beaucoup aimé!

*mise en perspective de la tentative d'assassinat d'Hitler en 44 par le groupe de Claus von Stauffenberg, qui se solde par un échec et des exécutions.

#netgalley#chateaudefemmes#jessicashattuck
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Château de femmes retrace l'histoire de trois allemandes avant, pendant et après la seconde Guerre Mondiale. Les parcours et les caractères de ces femmes sont complètement différents pourtant elles vont s'unir et s'entraider pour se reconstruire.
Marianne est une femme droite, tenace et intelligente qui se démarque des autres femmes. Elle est en avance sur son temps et souhaite participer à la résistance. Elle incarne la sagesse, elle est juste et aime être aux commandes.
Au contraire, Benita est fragile, sentimentale et à fleur de peau. Elle a toujours aspiré à épouser un homme riche, à avoir des enfants et à s'occuper de son ménage. La guerre va la briser, lui fait perdre sa naïveté et son insouciance. Elle n'arrive pas à trouver sa place dans ce monde.
Et puis, il y a Ania. On comprend rapidement qu'elle cache un secret et qu'elle souhaite se racheter auprès de ses enfants en leur offrant un avenir meilleur.
Je ne vais pas en dire plus sur l'histoire pour ne pas gâcher votre découverte.

J'ai lu que les grands-parents de l'auteure étaient des sympathisants nazis. Elle a voulu obtenir des réponses à ses questions et s'est documentée pendant 7 ans pour écrire ce roman.
Il n'est donc pas étonnant que le livre aborde deux angles différents : ceux qui se sont battus contre l'idéologie nazie et ceux qui ont suivi aveuglément Hitler. Certes, la propagande et de nombreuses manigances étaient mises en place pour endoctriner le peuple mais ce dernier finissait par se rendre compte de la réalité. Cependant, il est plus facile de continuer à fermer les yeux que d'affronter l'horreur de la vérité.
A la fin de la guerre, il faut continuer à vivre malgré la culpabilité et la honte. Pour d'autres, il faut se reconstruire malgré les horreurs vécues, les enfances volées et la misère ambiante. On ne peut pas oublier le passé, il faut vivre avec. Ce roman aborde de nombreux sujets intéressants et porte à la réflexion : qu'aurions-nous fait à la place de ces femmes ?

L'écriture est simple et efficace même si je déplore quelques longueurs et des dialogues parfois un peu pauvres. Je regrette la dernière partie de ce roman qui à mon sens est en trop et qui ternie mon impression sur ce livre. Je n'ai pas été surprise d'apprendre que l'auteure était américaine étant donné la mise en avant de « La grande Amérique sauveuse ».
Malgré ces quelques points noirs, l'histoire est émouvante, bien construite et devient vite addictive.
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
A quarante et un an, Mary était une belle femme avec des cheveux épais, couleur de miel, et un visage allongé, intelligent. Cependant elle vieillissait comme vieillissent les Américains : des rides profondes entre les sourcils et de chaque côté de la bouche. Trop de sourires. Trop d’émotions affichées. Le pays était jeune. On y prenait la théâtralité de l'expression pour de la sincérité. Si Mary avait vécu comme une Allemande, elle aurait paru dix ans de moins.
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Pourquoi cette première scène dans un château magnifique où la boisson coule à flots, où les personnes les plus en vue, les plus riches sont présentes ? Pour faire le parallèle sans nul doute avec la période qui suit, la deuxième guerre mondiale et son lot d'horreurs ... On retrouve en effet le château mais sans ses splendeurs passées, l'hôtesse de ce château, Marianne, une femme dynamique, au caractère bien trempé, qui se veut détentrice d'une mission : aider les femmes et les enfants des hommes qui, comme son mari, sont morts pour la bonne cause. Deux autres femmes habitent donc le château, elles sont accompagnées de leurs enfants. C'est l'occasion pour le livre de revenir sur une période assez noire, que celle de la deuxième guerre mondiale ... Encore me direz vous ? C'est vrai que les auteurs semblent apprécier particulièrement cette période historique, qui se trouve être l'ambiance la plus représentative de leurs histoires. En tous les cas, il est vrai que l'auteur a été particulièrement marquée cette période et on ne peut que comprendre son intérêt.
Très bien écrit, ce récit est avant tout un roman d'aventures. Il met en valeur ces trois portraits de femmes au caractère si différent et si complémentaire parfois...C'est aussi l'occasion de voir la période de reconstruction d'après guerre. Les personnages profondément marqués, vont apprendre à revivre et c'est aussi là l'intérêt du récit ...Je le conseille pour les amoureux d'histoire.
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Et puis, vint un moment que Marianne allait revivre dans sa tête encore et encore, pas seulement cette nuit là mais année après année, bien longtemps après la mort de Connie, la mort d'Albrecht, la mort de l'Allemagne elle-même, alors que la moitié des invités de cette réception avaient été tués ou anéantis par la honte, ou quelque part entre les deux, il s'avance vers elle et, avec autant d'ardeur que pour lui arracher sa promesse, il l'embrassa. Un baiser dépouillé de tout stratagème de flirt ou de romanesque, un baiser peut-être même au-delà du désir (et c'était là une question qui devait la ronger éternellement, de façon énervante et mal à propos) pour plonger tout droit dans l'océan de l'amour et de la certitude. l y avait là deux personnes qui se comprenaient. Il y avait là deux personnes ensemble dans quelque chose qui les dépassait largement.
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Marianne, qui avait jadis paru tellement raisonnable qu'elle en devenait intimidante, était en fait ignorante. Elle avait toujours suivi ses propres rêves, mathématicienne aveugle glissant à la surface mince de la vie, croyant au pouvoir rédempteur de la logique, de la raison et de l’information, négligeant tout le champ impénétrable du sentiment, de l’instinct animal, qui était le véritable moteur du comportement humain, le véritable auteur de l’histoire.
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Parfois, il est plus facile de voir clairement ce qu’on voit de loin. Et ce qu'on a sous le nez - juste sous le nez (elle bafouille) - est plus dur à distinguer.
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