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Critique de Patsales


Ça pourrait être insupportable. Private jokes (« Elle préférait « Django unchained » à « Twelve years a slave », et pouvait élaborer avec beaucoup d'éloquence les raisons pour lesquelles les fantasmes de revanche constituaient pour sa communauté de bien meilleurs vecteurs d'autonomisation que les épisodes horrifiants de maltraitance à son encontre »), syntaxe et vocabulaire sophistiqués (« Mais elle n'était pas disposée à capituler. Sous peine, sinon, d'avoir à s'échiner, à mesure que les années passeraient et qu'elle serait moins vaillante, dans l'équivalent botanique d'une mine de sel afin d'arracher une à une ces stupides boutures bourgeonnant de leur espoir idiot, poussant tout leur saoul dans leur naïveté verdoyante et tape-à-l'oeil. »), inspiration puisée dans les sempiternelles histoires de familles et de couples.
Sauf que.
D'abord c'est souvent hilarant (« Il s'était autorisé un commentaire à voix haute, ponctué d'une esquisse de haussement de sourcils, quoique bref et nullement exagéré : - Oh, de grâce! Grossière erreur. La règle cardinale du voyage aérien était « Ne pas se faire remarquer ». C'était comme s'il avait survécu de justesse à un meurtre de masse, et qu'il était allongé, immobile parmi les victimes. Mais plutôt que de continuer à faire le mort, en exprimant ce « De grâce ! », c'est comme s'il s'était mis à faire des bonds en s'écriant : « Attendez! Ici! Vous en avez loupé un ! »).
Et surtout c'est brillant. On croirait lire du La Bruyère sous acide ou du Nathalie Sarraute sous amphétamines. La même capacité à ratiociner sur les plus petits détails de nos vies mesquines mais les haussant au rang d'oeuvres d'art de la médiocrité, heureuse ou tragique, comme une entomologiste à la fois distante et empathique - ce qui est normalement impossible. Comment cette femme me connaît-elle aussi bien?
Lionel Shiver nous tend un miroir sans complaisance qui nous pousse à serrer les fesses et relever le menton. Médiocres peut-être, mais dignes ! Morales du petit siècle, le nôtre.

(Merci à Masse critique et aux éditions Belfond pour cet envoi ô combien apprécié. )
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