C'est grâce à Babelio que j'ai découvert "
Ultimes rituels", et franchement je ne regrette pas mon acquisition. Les polars nordiques ne se valent pas tous, et trop souvent on les pense mornes et gris, comme les terres arides dont ils sont issus. Et bien j'ai été agréablement surprise par l'écriture d'
Yrsa Sigurdardottir, très dynamique et avec de l'humour par dessus le marché.
Le pari n'était pourtant pas gagné à la lecture du résumé: c'est bien sombre tout ça... Et l'auteur a réussi à rendre ce livre "vivant", sans mauvais jeu de mots! En même temps, pour moi la promesse était alléchante: on nous promet un thriller, l'Islande et mieux encore: un adepte des piercings et autres modifications corporelles, et de la magie! En gros, on met tout ce que j'aime dans un shaker, on secoue le tout... et ça donne "
Ultimes rituels"!!!
Bon, c'est un raisonnement un peu simpliste car bien sûr tous les sujets ne peuvent être traités en profondeur dans un roman, basé avant tout sur une enquête, mais ça reste agréable de se sentir "dans son univers" lors d'une lecture. Sans compter que pour le coup le concept est assez original, ça change des habituelles intrigues politiques (Jussi, si tu m'entends... ^^) Bref, ça sentait bon. J'étais juste un peu inquiète à cause de la police d'écriture relativement grande. Souvent, cette technique cache la vacuité d'un livre en le gonflant artificiellement. Mais ici non.
La psychologie des personnages est bien développée, et ils ont tous une personnalité bien affirmée, parfois mystérieuse (comme la mère d'Harald, ce qui est bien mis à profit dans le livre). J'étais d'abord sceptique face au duo Thora/Matthew, que tout oppose. Mais finalement, ça fonctionne très bien! Tellement bien que ça donne une épaisseur supplémentaire à l'histoire ainsi qu'un peu de légèreté, sans pour autant tomber dans les bons sentiments qui me rebutent tant. le côté "coincé" et l'humour pince-sans-rire de Matthew s'accordent à merveille à l'apparente désinvolture de Thora (qui a pourtant des idées bien arrêtées et pas si larges que ça...)
Le personnage d'Harald est également central car, outre son statut de victime, c'est son histoire et sa personnalité qui construisent le récit. J'ai apprécié trouver des informations réelles et avérées sur la magie, par exemple les nombreuses références au célèbre livre "Malleus Maleficarum", destiné aux Inquisiteurs. Tout en restant relativement en surface du sujet, ça donne de la crédibilité à l'ouvrage. Malgré quelques approximations, ça reste aussi sans aucun doute une source d'enrichissement personnel pour les lecteurs qui ne sont pas familiers de ces thématiques.
Je lis de + en + de livres scandinaves, et une constante inévitable mais un peu gênante qu'on retrouve dans quasiment tous les ouvrages issus de ces contrées, c'est la pléthore de noms de lieux (ou autres noms propres) utilisés. Ceux-ci ne sont pratiquement jamais francisés. C'est très bien pour l'immersion, mais souvent un frein à la lecture. On a du mal à se situer, à savoir qui a dit quoi, on relit plusieurs fois une même phrase... Et le pire, c'est que si ça se trouve la véritable prononciation de ces mots est à mille lieues des sons qu'on imagine! Ca me rappelle quand je lisais Harry Potter, étant petite. Pour moi "Dumbledore" se prononçait "Dimblédore". Je suis tombée de haut quand le 1er film est sorti, car tout un pan de l'imaginaire que je m'étais créé s'écroulait!
Ca pourrait n'être qu'un détail mais pour moi c'est important car tous ces noms propres contribuent à l'élaboration mentale qu'on se fait d'un univers. Et une mauvaise prononciation en rend les fondations bancales. Je me suis donc dit (on peut toujours rêver...) qu'un petit lexique phonétique serait le bienvenue dans ce genre d'ouvrages! Ca ne prendrait qu' 1 ou 2 pages et nous éviterait d'être complètement à côté de la plaque (tout en nous cultivant, alors pourquoi s'en priver?!) A défaut, je pense que je vais chercher ça sur Internet, parce que j'aimerais enfin lire correctement ces noms que je côtoie si souvent! Enfin, je pourrai lire fièrement (p109): "L'appartement d'Harald se situait sur Bergstadastraeti, non loin de Hverfisgata. Depuis qu'elle travaillait sur Skolavordustigur, Thora s'était familiarisée avec le quartier central de Thingholt." Ouf! (Et encore, je vous ai épargné les divers accents, que mon brave clavier AZERTY ne connaît pas...)
Pour revenir au livre, j'ai également apprécié les diverses apparitions des amis d'Harald car, tout en soulevant encore + de questions, ils nous donnent en quelque sorte un os à ronger et matière à réflexion. Sans être extraordinaire, l'enquête est bien menée et j'ai trouvé que c'était une bonne idée de faire enquêter des privés plutôt que la police: ça change, et l'approche est différente. La résolution est bien trouvée quoi qu'un peu confuse, et aurait pu être mieux amenée, + percutante. Là on ne peut pas vraiment parler de feu d'artifice final... Mais l'ensemble du livre reste homogène, atypique et très agréable à lire!