Sainte Misère

Prix Nobel de Littérature 1919, Frans Eemil Sillanpäa est l'auteur de ce roman qui est une réflexion sur la condition humaine dans la Finlande des années 1860 à la guerre civile qui troubla le pays entre 1917 et 1921. le roman a pour personnage principal Juha (son nom change selon sa condition sociale et son âge), issu d'une famille de paysans miséreux. Élevé par un oncle sévère, Juha est obligé, un soir, de fuir la ferme. Son existence sera une suite de fuites et de terribles violences psychologiques dont est victime Juha qui parvient à survivre de petits travaux et à fonder une famille. Cet être continue d'être balloté, perdu dans l'histoire de son pays qui connait l'agitation communiste de 1905 puis la guerre civile.
Juha est l'archétype de cette classe paysanne dépossédée de ses biens, misérable, qui se lance sur les routes pour survivre. L'alcoolisme, les violences, les joies fugaces constituent la vie de ces hommes et de ces femmes soumis aux aléas de la nature et corvéables à merci. Les idées du communisme - l'utopie égalitariste - trouve un terreau favorable à son développement mais les hommes restent ce qu'ils sont malgré les idéologies : Juha, comme d'autres, en fait les frais.
Le roman révèle enfin la pensée scientifique de l'auteur : tout individu connait un destin lié irrémédiablement à un réseau de déterminations sociales et économiques. Partant, le ton ne peut être que pessimiste et le roman interroge alors la valeur fondamentale de l'homme.

Ce livre nous transporte dans la campagne finlandaise de la fin du XIXe comme si on y était. On partage la vie de Jussi , un paysan pauvre, qui va de ferme en ferme, jusqu'à s'installer dans sa tenure.
On vit avec lui sa vie de misère, jusqu'à l'affrontement entre les rouges (socialistes assistés par la Russie) et les blancs (conservateurs soutenus par l'Allemagne).

Ce livre nous fait ainsi découvrir le système de tenure en Finlande (et en Russie, la Finlande faisant partie de la Russie à cette époque), un système parfaitement injuste, dans lequel les propriétaires exploitent les paysans dans des conditions extrêmement précaires, et particulièrement difficiles.

Le Prix Nobel de littérature qui lui fut attribué en 1939 n'a pas permis à Frans Eemil Sillanpää de se faire un nom sur la scène internationale. Les circonstances n'y étaient pas favorables, et même la presse de l'époque ne s'est guère attardée sur cet «événement». La grande préoccupation de Sillanpää, c'est le petit peuple finnois, en particulier les tenanciers, pauvres et corvéables. La guerre civile finlandaise de 1918 lui offre donc le cadre parfait pour exprimer ses vues. Les conditions de vie épouvantables des tenanciers sont décrites avec un réalisme cru ; la violence, l'alcoolisme, le manque d'éducation et le poids de la classe dominante ne permettent à aucun moment de s'en sortir. La révolte socialiste ouvrira une brèche, mais le rêve sera vite éteint. Si le ton a certes un peu vieilli (le roman date de 1919 dans la version originale finnoise), la force du propos reste intact.