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Commissaire Maigret - Romans et ... tome 48 sur 103
EAN : 9782253142423
189 pages
Le Livre de Poche (14/11/2002)
3.32/5   118 notes
Résumé :
Paisiblement retiré à Meung-sur-Loire, le commissaire Maigret se laisse convaincre par un tout jeune homme, Jean Maura, de l'accompagner à New York. Maura s'inquiète pour son père, un homme d'affaires d'origine française, qui semble en proie à de graves soucis.
Maigret va se trouver aux prises avec une ténébreuse affaire. Le jeune Maura disparaît inexplicablement. Bien des années plus tôt, Maura Père a débarqué à New York avec un ami, Daumale, violoniste de ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (23) Voir plus Ajouter une critique
3,32

sur 118 notes
Une enquête du commissaire Maigret qui m'a quelque peu décontenancée, vu qu'elle ne cadrait pas bien avec les romans que j'avais lus, plus sombres, beaucoup plus tristes, voire plus sordides : le Pendu de Saint-Pholien, le Chien jaune, le Corps sans tête. Sans compter les épisodes de la série avec Jean Richard des années 70-80 - c'est étonnant comme je fais appel régulièrement ces temps-ci aux références des feuilletons de ma jeunesse. Je me souviens donc également de l'épisode du Fou de Bergerac, que j'avais trouvé à l'époque assez lugubre et qui m'avait quelque peu traumatisée. Et dire que la génération de mes parents trouvait que les animes japonais étaient violents, alors qu'on tremblait de peur devant L'Île aux Trente cercueils !


Mais passons. Ici, bien que le roman date de 1947, Maigret est bizarrement à la retraite, mais on sait qu'Agatha Christie a elle aussi effectué des voyages temporels avec Hercule Poirot. Il est surtout confronté à une histoire qui semble d'emblée très étrange : un jeune homme s'inquiète sérieusement pour la sécurité de son père qui vit à New York, et sitôt après l'avoir embarqué dans un voyage pour l'Amérique, il disparaît à l'arrivée au port. L'intérêt de l'enquête, au-delà d'un sentiment bizarre qui atteint aussi bien Maigret que les lecteurs, va vite se porter sur la découverte de New York et de la culture américaine. Ceci bien que, comme l'a fait judicieusement remarquer Meps dans sa critique, l'ancien commissaire retrouve très rapidement ses marques, qui ressemblent à celles de sa vie en France. Et on le verra s'agacer régulièrement devant les manières du capitaine O'Brien, dont l'ironie et sa façon de toujours introduire des sous-entendus dans la conversation ne sont pas toujours au goût de Maigret, d'ailleurs pas souvent de très bonne humeur.


Quant à l'enquête, qui porte maintenant sur la disparition du jeune homme susmentionné, elle conserve un bon moment son caractère étrange ; on va vite comprendre que tout est lié à une histoire qui remonte à loin, sans très bien saisir ce qui cloche. Et puis les choses vont s'éclaircir, un peu, pas beaucoup, pour qu'enfin Maigret comprenne d'un coup d'un seul, ce qui n'est pas forcément très crédible, comment toutes les pièces du puzzle se mettent en place. Tout ça est censé provoquer de l'empathie pour un des personnages qui a tout de même pas mal de choses sur la conscience et un mobile assez affligeant, ce dont je ne vois pas du tout l'intérêt, sinon que Maigret lui accorde sa sympathie. J'avais vu Maigret empreint d'empathie pour des criminels, ou pour d'autres personnages, et on comprenait la raison cette empathie ; mais là, on se demande bien quel mouche le pique.


Il m'a semblé que c'était la vision d'une New York soit riche, clinquante, voire artificielle, soit déshéritée et crasseuse, qui avait amené Simenon à écrire ce roman. Et on sent comme son ombre derrière un Maigret désabusé qui se fiche d'embrasser du regard la ville et de profiter de son pittoresque lorsqu'il débarque...
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Maigret à New-York ? dites moi que je rêve!! Et bien pas du tout. Convaincu par le jeune Jean Maura que son père, un riche homme d'affaires new-yorkais, est menacé , Maigret prend le bateau , débarque à New-York, découvre une ville qui lui déplait fortement au premier abord et surtout perd la trace de Jean. Mal accueilli par le père, il se ressource auprès du capitaine O'Reilly une vieille connaissance
.
A mille lieues du quai des Orfèvres, Maigret ne comprend pas ce qu'il est venu faire là . D'heure en heure, de découverte en découverte, la ville qu'il arpente est enfin un endroit où il se reconnait .. Son voyage sera t'il utile? Little John retrouvera t'il la vie paisible à laquelle il aspire?
Maigret finira par rentrer à Paris bien content de retrouver Meung sur Loire , Madame Maigret et sa maison avec dans l'idée qu'on est sacrément bien chez soi.
Publié en 1946, ce court roman m'a beaucoup plu. Maigret évolue dans un milieu qui ne lui est pas familier , il s'adapte vite et bien et une fois de plus solutionne le problème selon sa propre conviction .

Un petit conseil: ne lisez pas l' exécrable 4è de couverture.
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Maigret est toujours en retraite et toujours à Meung-sur-Loire où viennent littéralement le supplier le jeune Jean Maura et son notaire, le vieux M. d'Hoquélus, afin qu'il accompagne le jeune homme à New-York pour y rejoindre son père, John Maura, lequel serait en danger. Un danger mal défini, auquel John Maura - né français et à Toulouse, sous le nom de Joachim Maura - fait allusion en transparence dans les lettres qu'il expédie régulièrement à son fils. Pour il ne sait trop quel raison et presque honteux de l'avouer à sa femme, Maigret finit par accepter. Après tout, il a tout de même quelques connaissances au niveau de la police new-yorkaise ...

Dès l'arrivée à New-York, premier gros problème, complètement inattendu : disparition pleine et entière de Jean Maura. Est-il descendu du navire avant Maigret ? La foule les a-t-elle faits se perdre de vue ? Quand on connaît le grouillement d'un port tel que celui-là, cela reste possible. Maigret se rend donc au Saint-Regis, hôtel cinq étoiles où se tient d'habitude John Maura lorsqu'il est à New-York, persuadé qu'il va retrouver le jeune homme chez son père. Mais là, entre l'employé hautain du desk, le secrétaire particulier de Maura, un dénommé Jos Mc Gill et Maura lui-même, sortant de sa chambre alors qu'on venait de le prétendre à Rio ou au Vénézuéla, il est pratiquement reçu comme un chien dans un jeu de quilles. Pire : le fait d'apprendre la "disparition" de son fils ne semble faire ni chaud ni froid à celui que le milieu des affaires a fini par surnommer, en raison de sa taille, "Little John."

Oh ! Maigret est bien tenté de reprendre le premier paquebot en partance pour la France mais ... Mais il ne serait plus Maigret s'il le faisait. Il renoue donc avec un homologue new-yorkais, le capitaine O'Brien - dont le lecteur se souviendra, je pense, toute sa vie, qu'il est roux et ressemble à un mouton - et, malgré les conseils (officiels) de celui-ci et peut-être avec ses encouragements (tacites et officieux), il décide de tirer l'affaire au clair.

John Maura a beau sortir son carnet de chèques et jouer de tout son mépris, Mc Gill a beau faire preuve tour à tour d'ironie et d'attention, de curieux individus ont beau sortir des trottoirs new-yorkais pour suivre un Maigret en pleines cogitations bougonnes et humiliées, rien n'y fait : notre commissaire finira par avoir la clef de l'énigme.

Mais, pour ce faire, Simenon recourt ici à un procédé qui ne m'a vraiment pas convaincue. Ca aurait pu marcher, notez, mais non, j'ai lu ce livre deux fois et, toujours, cette scène m'a paru aussi artificielle : devant les témoins concernés, dont Mc Gill et John Maura, convoqués pour cela à une heure moins dix du matin dans la chambre du commissaire à l'hôtel Berwick, dans le Bronx, Maigret se livre, tenez-vous bien, à un véritable interrogatoire téléphonique auprès d'une personne alors en France, à La Bourboule, très précisément, où, décalage horaire oblige, il est sept heures du matin. Alors, c'est gros, c'est énorme ... et ce n'est pas crédible. le "coupable" - en tous cas le responsable de tout cela - qui ne connaît pas Maigret, qui n'a jamais eu affaire à la Police, qui possède un casier vierge et qui n'a jamais trempé dans aucune affaire louche, un homme qui peut aisément passer pour un notable, cet homme s'effondre au téléphone presque immédiatement. Deux ou trois timides protestations mais c'est tout : il avoue tout de suite, ou presque. Evidemment, le personnage est un lâche patenté mais tout de même ...

Non, ça ne passe pas. En tous cas pour moi. Il me semble que, dans ce "Maigret" - qui regorge par contre de personnages secondaires tout bonnement merveilleux comme le "clown" Ronald Dexter, l'impassible lieutenant Lewis, Germain, l'ancien M. Loyal et Lucile, voyante extra-lucide, sans oublier Jim Parson, un journaleux qui vous postillonne sa haine à la figure et qui finira en outre très mal - Georges Sim étouffe Georges Simenon au moment même où, justement, il aurait dû le soutenir de toutes ses forces et de toute son imagination.

Cela dit, vu le rythme d'écriture de l'écrivain, on ne s'étonnera pas de trouver, dans sa production, y compris celle qui ne se rapporte pas à Maigret, quelques "flops" mémorables. C'est la rançon du génie et l'imperfection aussi à son charme. Peut-être, en définitive, New-York ne convenait-il à ce moment-là ni à Maigret, ni à Simenon. Pourtant, l'ambiance est superbement rendue et certaines manies anglo-saxonnes en prennent pour leur grade. Mais on préfèrera certainement à ce roman "Maigret chez le Coroner" qui se déroule, lui, dans l'Amérique profonde et qui, bien que rappelant assez un film américain avec duel de prétoire, possède plus l'"esprit Simenon" que "Maigret à New-York."

Toutefois, ce n'est qu'un avis personnel. Pour vous faire votre idée de "Maigret A New-York", lisez-le. Qui sait, vous adorerez peut-être de bout en bout. ;o)
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En octobre 1945 Simenon s'installe sur le Nouveau Continent. Son oeuvre a précédé peu à peu sa venue, a pris renommée et s'est commercialisée; elle a désormais du succès, suscite de plus grands espoirs encore. Simenon, entres autres raisons, se veut à pied d’œuvre à New-York, Maigret à ses côtés ...

Maigret, ombre de papier à la traîne de Simenon, débarque lui aussi à New-York 6 mois plus tard, le temps de clore le manuscrit. Le commissaire, en silhouette de caractères d'imprimerie agglomérés, suit les traces de son alter ego de chair et d'os. Le début du roman est nourri des premières impressions de Simenon au contact de la Grosse Pomme. Maigret n'est que l'écho presque lointain des sensations de l'auteur. Il masque à peine Simenon en reporter enthousiaste, sous le choc de la nouveauté, frissonnant sous les promesses de ce continent qui s'ouvre à lui. Les premières pages foisonnent des clichés habituels: le pont du paquebot submergé de passagers en attente de fin de courte quarantaine, le premier pas sur le sol américain, la verticalité de la ville qui attend dans les brumes, la Statue de la Liberté en promesse de tous les rêves ... Tout cela fait très carte postale. Personne pour s'en plaindre en 1947, la mégapole est loin, si loin, à dix jours de voyage en bateau; tandis qu'en 2019, l'éloignement ne joue presque plus, NYC n'est plus qu'à un coup de pichenette d'avion.


Simenon clôt son manuscrit en 1946 à Sainte-Marguerite-du-Lac-Masson (Québec). Maigret repart en métropole pour retrouver Mme, cultiver son jardin de retraité ... en se posant la question de savoir ce qu'il est allé faire à New-York. Simenon, semble t'il dans le même état d'esprit, est presque envieux du retour aux sources qu'il offre à son héros. A l'enthousiasme premier succède la nostalgie du Vieux Monde qu'il a quitté, les demi-teintes d'un monde d'Outre-Atlantique qu'il ne comprend pas vraiment....


"Maigret à New-York" n'a pas, à mon sens, la force que j'ai pu rencontrer dans d'autres épisodes. Il y manque Paris, la Rochelle ou Cannes; les petits blancs secs et la mousse sur la bière; la pluie sur le pavé luisant et le gel à pierre fendre; le jambon beurre et les tranches fines de saucisson; les petits quartiers aux ruelles étroites et sinueuses, les lumières chiches au fond d'arrière-cours sombres, les visages aux aguets derrière les vitres. L'exotisme d'une autre destination de ne m'a rien apporté, j'y ai perdu mes marques. Le chewing-gum, les drugstores, le coca-cola, le whisky, les hot-dogs, ce rendu de monnaie que Simenon/Maigret ne maîtrise pas n'y ont rien fait.


L'histoire contée n'est qu'accessoire quand le principal du propos est, semble t'il, de disséquer à grands traits une mégapole. Elle ne me semble que prétexte à placer un homme face à son immensité, aux diversités de tous ordres qui l'habitent, aux contradictions qui la guettent...? Et cet homme n'est pas Maigret mais Simenon. Le commissaire et l'intrigue s'effacent au second plan, l'auteur prend le devant de scène, il raconte sa vision de New-York. La ville devient omniprésente, bouche l'horizon, efface les hommes et leurs destins, Maigret n'est venu que pour effleurer le destin de quelques uns.


L'intrigue nous montre, entre autres:

_un self made man qui, venu du ruisseau, se hisse vers son premier million et ceux qui suivront, fier de son succès, du mérite qu'on lui attribue. Qui ici pour lui reprocher son caractère distant et hautain ? Cet homme renvoie New-York en miroir: on entrevoit à travers lui les gratte-ciels aussi hauts que les fortunes qui les habitent.

_Le lecteur sillonne à pied ou en taxi le quartier italien, le Bronx, Harlem et Broadway. Des paillettes à la misère des taudis, du New-York des blancs à celui des noirs, des hôtels de grand luxe aux petits restos perdus qui sentent si bon la France.

_un détective privé désabusé, désenchanté, presque sorti d'un polar noir américain, accroché à la ligue des alcooliques anonymes comme à une bouée, abonné jusqu'à la tristesse noire aux alcools forts et blancs.

_des gangsters à l'affût,, mitraillettes sous l'imper, au coin d'une rue et d'une avenue; des journalistes harceleurs, des photographes aux flashs qui crépitent comme des flambeaux; des Mac et des O' quelque chose devant certains patronymes; des reflets d'Italie du Sud ou de France derrière certaines vitrines.

On y parle de la libre entreprise, de ces juke-boxes qui vont, sous peu, pulluler dans les cafés français, des difficultés que rencontre Maigret à essayer son anglais incertain aux réalités linguistiques locales.


Toujours est-il que Maigret, difficilement immergé en terre inconnue, retrouvera son chemin, ses méthodes au feeling, loin de celles procédurales et pragmatiques de ses collègues US, pour dénouer l'écheveau serré d'une intrigue familiale à laquelle se mêlera le gangstérisme.
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Livre particulier dans la chronologie des Maigret, puisqu'il est loin d'être dans les derniers écrits par Simenon... mais qu'il nous présente un Maigret à la retraite, que l'on vient chercher évidemment pour résoudre un mystère, et que l'on emmène à l'autre bout du monde.

Une bonne partie de l'intérêt de cette aventure est la confrontation entre le célèbre commissaire français et la vie new-yorkaise même si, de façon assez invraisemblable, il arrive à s'y recréer certaines de ses habitudes parisiennes. On arrive aussi, malgré la retraite et leur absence, à voir évoquer les anciens inspecteurs Janvier ou Torrance.
Simenon, même avec un Maigret hors de ses bases, garde donc les anciens réflexes, et sa méthode de déduction reste la même, bien détaillée ici dans sa façon de se confondre avec les protagonistes de l'intrigue pour réellement comprendre leurs motivations.

Le dénouement est riche en rebondissements et assez original, avec un Maigret à qui son statut de retraité et son éloignement de la France permet certaines libertés.
Le livre reste donc bien fidèle à la mythologie du personnage et dépeint une Amérique à travers les yeux d'un Simenon résolument européen !
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Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
[...] ... Little John ne l'avait pas impressionné, ce n'était pas le mot, mais Little John n'en était pas moins comme une entité, quelque chose, en tous cas, de fabriqué, d'artificiel ...

Mac Gill aussi, peut-être encore davantage.

Et même le jeune homme, Jean Maura, avec ses frayeurs et l'approbation du vieux M. d'Hoquélus.

Et la disparition au moment où le paquebot touchait enfin à New-York ...

Tout cela, en somme, n'avait pas d'importance. C'est le mot que Maigret eût prononcé si O'Brien avait été là en ce moment, avec son sourire épars sur son visage de roux criblé de petite vérole.

Une réflexion, en passant, tandis qu'il marchait, les mains dans les poches, la pipe aux dents. Pourquoi sont-ce toujours les roux qui sont marqués de petite vérole et pourquoi, presque invariablement, sont-ce des gens sympathiques ?

Il reniflait. Il humait l'air où traînaient comme de vagues relents de mazout et de médiocrité. Est-ce qu'il y avait de nouveaux J and J dans ces alvéoles ? Sûrement oui ! Des jeunes gens débarqués de quelques semaines à peine et qui attendaient, les dents serrées, l'heure glorieuse du Saint-Régis.

Il cherchait une boutique de tailleur. Deux taxis le suivaient comme une procession. Et il était sensible à ce que cette situation avait de cocasse.

Deux jeunes gens, un jour, à une époque où l'on portait encore des faux-cols raides et des manchettes en forme de cylindre - Maigret en avait eu de lavables, en caoutchouc ou en toile caoutchoutée, il s'en souvenait encore - deux jeunes gens avaient habité cette rue, en face d'une boutique de tailleur.

Or, un autre jeune homme, voilà quelques jours, avait eu peur pour la vie de son père.

Et ce jeune homme, avec qui Maigret conversait quelques minutes plus tôt sur le pont du navire, avait disparu.

Le commissaire cherchait la boutique du tailleur. Il regardait les fenêtres des maisons, souvent barrées de ces ignobles escaliers de fer qui s'arrêtaient en haut du rez-de-chaussée.

Une clarinette et un violon ...

Pourquoi collait-il le nez, comme quand il était gosse, à la vitrine de l'une de ces boutiques où l'on vend de tout, des légumes, de l'épicerie et des bonbons ? Juste à côté de cette boutique, il y en avait une autre, qui n'était pas éclairée mais qui n'avait pas de volets et à travers la vitre de laquelle on voyait, grâce aux rayons d'un réverbère proche, une machine à presser et des complets qui pendaient sur des cintres.

"Arturo Giacomi."

Les deux taxis le suivaient toujours, stoppaient à quelques mètres de lui et ni les chauffeurs, ni cette brute épaisse de Bill ne se doutaient du contact que cet homme au lourd pardessus, à la pipe vissée entre les dents, prenait, en se retournant vers la maison d'en face, avec deux Français de vingt ans qui avaient débarqué jadis, l'un avec son violon sous le bras, l'autre avec sa clarinette. ... [...]
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[...] ... [Ronald Dexter] poussait les billets de banque vers Maigret.

- "Prenez-les. Faites-en ce que vous voudrez. Ils ne m'appartiennent pas. Cette nuit ... cette nuit ..."

Il avait l'air de prendre son élan pour franchir le cap le plus difficile.

- "... cette nuit, je vous ai trahi pour cinq cents dollars."

Téléphone.

- "Allô ! Comment ? Vous êtes en bas ? Montez, lieutenant. Je ne suis pas seul, mais cela n'a pas d'importance."

Et le clown questionna avec un sourire amer :

- "La police ?

- Ne craignez rien. Vous pouvez parler devant le lieutenant Lewis. C'est un ami d'O'Brien.

- On fera de moi ce qu'on voudra. Cela m'est égal. Seulement, j'aimerais que cela aille vite."

Il oscillait littéralement sur ses jambes.

- "Entrez, lieutenant. Je suis heureux de faire votre connaissance. Vous connaissez Dexter ? Peu importe, O'Brien le connaît. Je pense qu'il a des choses fort intéressantes à me dire. Voulez-vous vous asseoir dans ce fauteuil pendant qu'il parle et que je prends mon petit-déjeuner ?"

La chambre était presque gaie grâce au soleil qui la traversait de biais et qui y mettait tout un fourmillement de fine poussière dorée.

Maigret, pourtant, se demandait s'il avait bien fait de prier le lieutenant d'assister à la conversation. O'Brien ne lui avait pas menti en lui disant la veille que c'était un homme aussi différent de lui que possible.

- "Enchanté de faire votre connaissance, commissaire."

Seulement, il disait cela sans un sourire. On sentait qu'il était en service commandé et il alla s'asseoir dans un fauteuil, croisa les jambes, alluma une cigarette et, alors que Dexter n'avait pas encore ouvert la bouche, tirait un carnet et un crayon de sa poche.

Il était de taille moyenne, de corpulence plutôt en dessous de la moyenne, avec un visage d'intellectuel, de professeur, par exemple, un long nez, des lunettes aux verres épais.

- "Vous pouvez noter ma déposition si c'est nécessaire ..." prononçait Dexter comme s'il se voyait par avance condamné à mort. ... [...]
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Il n'avait pas aperçu Jean Maura. Il était bien passé devant sa cabine, où il y avait de la lumière, et avait failli frapper. À quoi bon ? Il était rentré chez lui pour se raser. Il avait bu - il devait s'en souvenir, comme on se souvient de détails sans importance - il avait bu, au goulot, une gorgée d'une bouteille de marc que Mme Maigret avait glissée dans ses bagages.
Que s'était-il passé ensuite ? C'était sa première traversée, à cinquante-six ans, et il était tout étonné de se trouver sans curiosité, de rester insensible au pittoresque.
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Il était difficile de concentrer plus de vies humaines dans aussi peu d'espace et pourtant, on ne sentait aucune chaleur, on éprouvait plus que nulle part ailleurs un sentiment d'irrémediable isolement.
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Il n’y avait pas de concierge dans la maison, comme dans les maisons françaises, et c’est ce qui compliquait la tâche du commissaire. Rien que des boites à lettres, dans le corridor du rez-de-chaussée, peintes en brun, avec un numéro, quelques-unes avec une carte de visite jaunie ou avec un nom gravé sur une bande de métal.

Il était dix heures du matin et c’était sans doute à cette heure-là que cette sorte de caserne vivait sa vie la plus caractéristique. Une porte dur deux, ou trois, était ouverte. On voyait des femmes aux cheveux non encore peignés vaquer à leur ménage, débarbouiller des mioches, secouer de douteuses carpettes par la fenêtre.
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