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EAN : 9782072750564
224 pages
Gallimard (02/11/2017)
4.03/5   15 notes
Résumé :
Ce livre rassemble trois recueils majeurs de Jean-Pierre Siméon : Le bois de hêtres, Fresque peinte sur un mur obscur et Lettre à la femme aimée au sujet de la mort, trois recueils qui procèdent du même sentiment intime, ardent et déchiré, afin que demeurent au cœur des nuits accumulées les arguments irréductibles de la vie pleine et entière, de la vie désirante dont l'amour, comme tout franchissement des limites, se veut une expérience toujours unique et sans cesse... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Je voudrais vous parler ce soir de cette Lettre à la femme aimée au sujet de la mort, écrite par un merveilleux poète, Jean-Pierre Siméon, très rare, trop rare, un poète à découvrir.
J'ai trouvé que tous les poèmes de ce recueil étaient beaux. Les vers de ce texte m'ont entraîné dans une délicieuse ivresse jusqu'au bord de chaque page.
L'écriture de ce poète ressemble à un jardin. J'y suis entré comme on se saisit d'une clé magique, comme on entre dans ce jardin en ouvrant une page qui ressemblerait à une porte.
J'y suis entré comme on entre dans une nuit légère, en effaçant la buée qui obstrue les vitres d'une fenêtre.
J'y suis entré comme on entre en amour.
Une main effleure les pages, je me suis demandé si c'était bien la mienne ? Ou bien la tienne ? Je ne sais pas, je ne me souviens plus de mes gestes devant ce texte si beau qui parle d'amour.
L'amour est absolu, on l'oublie trop souvent. L'amour nous amène parfois dans des contrées étranges que nous ne soupçonnions pas, nous amène aussi parfois à faire des choses incroyables, dans un sens comme dans l'autre, à faire n'importe quoi.
« Il n'y a pas d'amour heureux », disait Aragon. Ici l'amour ressemble à autre chose. Il n'est pas question de bonheur ni de malheur, il est juste question de respirations et de vertiges, de nos mains aussi posées sur ces mots, au bord de la lumière du jour, celle qui tremble encore un peu, comme nos gestes qui écoutent cette respiration.
« Tes mains sont le premier poème
celui qui défroisse et apaise
quand mon pas mal tenu
parvient jusqu'au matin
et vacille
sur le flou de l'univers. »
Ici il est des rivières qui fuient vers leur point obscur. Souvent une voix revient qui n'est pas la tienne. Celui qui marche dans les pages de ce poème, est-ce moi , est-ce un autre ? Celui que je rêverais d'être, peut-être suis-je dans ses pas ?
Pourquoi, lorsqu'il est question d'amour, pensons-nous forcément à la mort ? J'y ai souvent pensé. Forcément, j'y pense de plus en plus. Mon âge ne me retient pas d'aimer, au contraire... Je voudrais continuer d'aimer comme cela, en ayant l'étrange et sotte impression que cela recule au plus loin la mort. La poésie de Jean-Pierre Siméon m'a donné l'illusion que je suis immortel, le temps de quelques poèmes.
J'aime mes rêves, mais je ne me les rappelle peu souvent. J'aime l'aube où je tente désespérément de me souvenir de ces rêves. Ces poèmes m'ont invité à cette attention.
J'aime le pli de la nuit.
J'aime la pluie qui m'empêche de remonter aux voyages prêts à nous engloutir.
J'aime des lèvres qui se hâtent, comme cela dans le frémissement d'une pluie, de ce voyage en partance, le souvenir d'un paysage, une joie qui tend la main ; chaque page de ce recueil est une invitation à ce que nous voulons être...
Pourquoi sommes-nous faits de gestes qui résistent tant à la poésie ?
La poésie est une forme de vent prêt à déployer sa voile.
Ici l’œil s'encombre avec bonheur d'une fenêtre qui s'ouvre, où surgit l'horizon, toi avec, et je t'y invite.
Peut-être est-ce l'absence de l'autre qui relie davantage les cœurs hallucinés ?
Comment changer de monde à chaque instant si ce n'est dans la poésie, dans ces vers ?
Ici même le bonheur s'entend dans les sanglots. Comment ne pas y résister ?
J'ai aimé la lumière de ce poète. Elle est magnifique.
Avant d'écrire cette chronique, j'ai relu certains de ces poèmes, déjà lus il y a quelques années.
Après les avoir relus, je me sens au bord d'une fenêtre ouverte et je vous attends comme on attend des oiseaux dans l'impatience du ciel.
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Avec quelle joie j'ai aperçu en librairie ce nouveau recueil réunissant plusieurs publications poétiques de Jean-Pierre Siméon, poète ( mais aussi formateur de maîtres, directeur d'édition, romancier, auteur de théâtre ) que j'aime beaucoup!

Et comme je m'y attendais, ayant déjà été touchée par d'autres textes de lui, j'ai été éblouie , bouleversée souvent, interpelée toujours. Jean-Marie Barnaud l'écrit dans la préface, un mot qui définit ce poète est celui de ferveur. J'y ajouterai " humanité " et " tendresse".

Humanité dans la partie" le bois des hêtres" ouvrant sur un poème très émouvant à propos de Buchenwald:

" le ventre de la colline est atteint d'un gris lent et pur comme un chagrin."

Le " nous" est d'ailleurs fréquent, révélateur d'un besoin de s'allier aux autres, de se sentir prés d'eux, de partager leurs souffrances et leurs rêves.

Tendresse pour la femme aimée, le coeur même de la poésie. " le baiser qui est la forme exacte du poème"... La partie centrale " Fresque peinte sur un mur obscur" est celle que je préfère: quelle ardeur amoureuse, qui se sait pourtant confrontée à la mort, à la guerre, aux horreurs du monde! Et qui veut malgré tout exalter son chant...

" Eloignons-nous mon amour
de la vase qui prend les pieds
non pour vivre un ailleurs
de pourpre et d'or
mais pour que l'oreille scrute
où le pas sonne juste "

Ferveur, oui, et certitude que le poème illumine tout, même les ombres, malgré les doutes qui assaillent. Et faisons nôtre ce mantra inspiré :

" aime aime encore
sur le tranchant des jours"

Un très bel élan de mots, des anaphores , fil conducteur des vers,se faisant écho entre elles, révélant des vers âpres et même un peu hermétiques parfois, mais d'un éclat remarquable, d'une sensibilité profonde. Superbe!
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Citations et extraits (26) Voir plus Ajouter une citation
Ils nous demanderont raison
de chacun de nos pas au-delà des barrières.
Mais si étroits leurs regards :
enjamber deux rues ou dépasser l'instant,
ce sera assez pour que commence leur colère.
Parce que ce sont eux,
les immobiles sur la terre,
qui font du vent un étranger.
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J'ai vu tant de fous
souffler sur la bougie
et s'étonner de l'ombre dans leur vie.
J'en ai vu défaire le jour de leurs épaules
comme d'un manteau la neige et
revenir de la beauté les mains vides.
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Je me souviens d'un paysage
dans un musée de Bruges
et de son impossible secret
caché derrière les ors et les colonnes
d'un monde trop sûr de lui-même

Je me souviens d'une rivière fuyant
vers son point obscur
dans le bleu tremblé
d'impossible collines

Peut-être etait-ce alors
en étreignant tes mains
notre propre désir voué aux lointains
que je lisais
et la dans la faible palpitations des couleurs
ce signe hors d'atteinte
qui est le nom de notre amour
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toi seule sais
la douceur des morts qui t'appartiennent
car tu es née de leur douceur
et tu prolonges dans chacun de tes gestes
la douceur qui fut le pli heureux de leur vie
à tes yeux désormais
de voir clair dans la transparence
que fait leur disparition
à toi de comprendre dans la vie requise l'effacement et le soleil unanimes
ta joie volontaire

et la beauté sans volonté des choses
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Ceux à qui manque le poème
le ciel du dessous
comment s'y prennent-ils avec ces choses
l'obscur et l'impérissable
et quel usage font-ils
des nuits qui tombent de l'épaule
après l'amour ?

Dans le danger des jours
hommes dispersés effarés
butant au cercle du vacarme
comme un loup dévoré par son ombre
ils nient
ils rongent
ils tranchent
ils ont un cœur inaccessible

leurs yeux ne voient que ce qu'ils croient
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