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Critique de chapochapi


Réécriture réussie du roman de Flaubert. Gemma est une illustratrice et décoratrice anglaise aigrie après sa rupture avec un beau blanc-bec. Elle trouve du réconfort auprès de Charlie Bovery, divorcé, deux enfants, une mégère pour ex et peu d'ambition pour projet de vie. Après une vie en commun, ne supportant plus cette ex qui s'immisce dans leur vie et leur impose tout (de la garde des enfants à la marque des céréales et de la lessive), elle demande Charlie en mariage et l'invite à déménager de leur petit appartement, certes charmant, mais dans un quartier craignos de Londres. Lorsque son père ( ? à vérifier) meurt, elle décide d'utiliser l'argent pour acheter une maison en pleine campagne normande, sûre d'y trouver le calme, la vie bucolique, le charme paysan, le rythme de vie si particulier des français. Mais dès le premier hiver, elle déchante. Grommelle, regrette, évite les voisins anglais qui roulent sur l'or mais la payent pour de menus travaux de décoration. Lorsqu'un jour, elle tombe sur le jeune nobliau du village, venu s'isoler pour réviser ses examens de droit. Séduction, adultère, tout cela est connu. Un peu trop, d'ailleurs, pour le voisin boulanger qui n'en revient pas que « Gemma Bovary » soit venue s'installer en Normandie. Quand il découvre la relation adultérine, il s'inquiète pour sa jeune voisine, si semblable au personnage de Flaubert. Et puis, il est jaloux, bien qu'il peine à le reconnaître. Il tente donc d'intervenir et d'empêcher un drame inévitable à ses yeux. Mais la relation s'arrête d'elle-même, sans heurts. le voisin respire, mais pour peu de temps : le beau blanc-bec la retrouve par hasard et veut renouer avec Gemma, qui tombe d'abord dans ses bras avant de l'évincer. Pour le voisin, c'en est trop ! il identifie entièrement la voisine au personnage et craint maintenant pour sa vie ! [attention : spoiler] Il prévient donc Charlie, qui avait entre-temps quitté Gemma après la découverte de sa première relation. Par un concours de circonstances, lorsqu'il arrive sur place, le blanc-bec est aussi là, à tenter de sauver Gemma, étouffée par un morceau de pain offert par le voisin. La jeune femme meurt. Mais le voisin ne s'arrête pas là : il craint maintenant pour Charlie ! le parallèle est si évident pour lui ! Mais le veuf le rassure : Charlie ? non, c'est juste un surnom, il s'appelle Cyril. le roman se termine sur une petite pointe : de nouveaux voisins se sont installés, la femme s'appelle Jane, Jane Eyre.

Tout l'intérêt de ce roman graphique est de présenter une histoire désormais banale (une femme s'ennuie et trouve l'amour dans les bras d'un autre) sous l'éclairage volontairement oppressant de Flaubert. L'auteure s'amuse du voisin et du lecteur qui veulent voir, dans la proximité des noms, l'écriture d'un destin. Mais Gemma s'en moque : elle a bien l'intention de se le constituer, son avenir, pas de le subir ! Elle a des dettes ? elle travaillera d'arrache-pied pour y remédier, quitte à vendre la maison ; Charlie est parti ? elle prend conscience de sa bêtise et décide de revenir vers lui. Elle a eu des relations ? c'est elle qui y a mis fin. Non, Gemma n'est pas Emma et leur destinée, n'en déplaise aux lecteurs, ne sont pas superposables.

Indirectement, on prend conscience que la société et la situation des femmes ont bien évolué depuis Flaubert : Charlie a eu une vie avant Gemma, qui elle-même travaille et se montre financièrement indépendante ; sa relation adultère ne choque personne même si elle fait mal à son mari et l'ennui de la jeune femme perdue en pleine campagne normande paraît normal à tout le monde. de fait, plus aucune critique ne pèse sur Gemma et la compréhension remplace l'opprobre. le récit est mené par le voisin boulanger qui raconte les événements, de manière rétrospective puisque la mort a déjà eu lieu. Mais le discours indirect libre de Flaubert est maintenu grâce aux dessins qui mettent en scène Gemma et ses pensées, auxquelles le voisin a accès par l'intermédiaire du journal intime de la jeune femme. Ainsi, cela permet de respecter et de moderniser les voix narratives et de jouer sur les connaissances des personnages.
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