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Critique de Bibliozonard


Dan Simmons
Cycle
Les Cantos d'Hypérion
- 1991 Robert Laffont -
Intégrale 1 et 2 :
Hypérion (2 tomes) et la chute d'Hypérion (2 tomes)
Pocket 2014

Chaque fois que je trouve une pépite littéraire, je la déterre du siècle précédent. Il me faut trouver une inspiration sérieuse pour relater cette rencontre magique que j'ai choisi de nourrir en prélude les premiers airs du requiem de Bruno Mardena ; ensuite, j'ai habillé le corps du texte par le requiem en G-Minor de Otto Olsson…

Nous voici plongés dans une époque qui se situe environ à 500 ans après YEATS, en 2489 pour être exact.
Le consul de l'Hégémonie a été désigné pour se rendre sur Hypérion avec 6 autres personnes
au récit intriguant : le Prêtre Lénar Hoyt (qui suit les préceptes du père Duré, l'étrange Paul Duré, le père qui poursuit une continuité à travers son récit, entre passé et actualité des événements ? Retenons le jeu de mots : Père Duré perdurer… notions de temps.) ; le colonel Fedmahn Kassad (récit beaucoup plus consistant sur l'existence du Gritch, la stratégie militaire et les technologies) ; l'excentrique poète Martin Silenus (à la recherche de l'oeuvre ultime), la solide détective Brawne Lamia (histoire très complexe et dynamique), le consul est étudié également en profondeur ; tous ont entamé le pèlerinage traditionnel à la gloire de la créature : le Gritch (selon les préceptes de L'église Gritchtèque : secte qui voue un culte à la bête considérée comme une divinité).
La légende dit que les 7 pèlerins désignés doivent se présenter au Gritch et qu'un seul verra son voeu exaucé ; les autres mourront sacrifiés dans d'atroces souffrances. C'est pourquoi ils doivent se raconter leur vie pour comprendre ce qui peut attirer l'attention du monstre.
« Chacun chevauchant un dauphin,
Calé par une nageoire,
Ces innocents revivent leur mort,
Et leurs blessures se rouvrent. » (Yeats)
Entre temps, dans la vallée, les tombeaux du temps sont sur le point de s'ouvrir.
Pour couronner le tout, une tension s'ajoute : une armada d'Extros est sur le point de débarquer sur Hypérion pour s'emparer des tombeaux. Les forces de l'Hégémonie doivent évaluer la planète Hypérion.


Inventions, idée de fous, références :
Stephen Hawking et les autres, sortez de ce corps !
En plus des planètes et du système (l'Hégémonie) auquel elles appartiennent, citons :
— le Retz, système de communication (sorte de WWW interplanétaire, frontière numérique). Les portes distrants et les capsules cryogéniques qui permettent le voyage avec un déficit de temps dans le RETZ. Au fil du temps, découverte approfondie de l'infocentre, de la mégasphère, de l'IA (intelligence artificielle) et l'IU (intelligence ultime). C'est une incroyable autre dimension cosmique !
— Que dire du saut quantique et de la fugue cryotechnique dans des capsules — citée plus haut – qui favorise le déficit de temps et permette de traverser des années lumières, d'un système stellaire à l'autre. Procédé qui à répétition n'est pas sans effets secondaires ; les séquelles des voyages spatiaux mutltigénérationnels. Et ô combien d'autres idées sublimes d'inventivités comme les propulseurs Hawking qui ont contribué à la réalisation de tout ce qui précède.

— le vaisseau-arbre des Templiers (Ygdrasill) sous le commandement du Templier Het Masteen, pour parcourir les 6 années lumières qui séparent Hypérion de L'hégémonie.
— La forêt des flammes et ses arbres Tesla.
Et bien sûr d'entre tous, un poète clé, l'inspiration, la colonne vertébrale de l'oeuvre :
Car Hypérion n'est autre qu'un poème de JOHN KEAT. L'importance de « ce pauvre génie mélancolique » John Keat apparaît au travers d'un personnage, AI Johnny, un cybride, et son nom est donné à la capitale d'Hypérion, Keat ; et enfin « Hypérion », est un poème de J.Keat ! N'omettons pas que les chants d'Hypérion, les Cantos d'Hypérion, est aussi l'oeuvre majeure du personnage Martin Silenus, serait-il Dan Simmons lui-même ?

« Au commencement était le Verbe. Puis arriva le traitement de texte, et leur foutu processeur de pensée. La mort de la littérature s'ensuivit. Ainsi va la vie.
Francis bacon a déclaré un jour : « de la mauvaise et inadéquate formation des mots découle une délicieuse obstruction de l'esprit. » Nous avons tous eu nos moments de délicieuse obstruction, n'est-ce pas ? Et moi un peu plus que les autres. L'un des plus grands écrivains du XXe siècle, aujourd'hui oublié – l'écrivain, pas le siècle -, a eu un jour ce bon mot : « J'adore le métier d'écrire. C'est l'encre et le papier que je ne peux pas voir. » (I1V1p240)Récit du poète Martin Silenus.



Impression
C'est du grand art. Sanguinaire, émouvant, empli de courage et de réflexion.
Les conditions atmosphériques, géologiques, le langage des communautés (comme les étranges BIKURAS) ; tout cela en plus de l'intrigue de base (le pèlerinage dans le pays d'une créature hostile) est d'une précision époustouflante, au caractère scientifique et moral déroutant, au point qu'on est obligé d'y croire. CE ROMAN est une incroyable extrapolation de notre système de vie, de nos conditions humaines actuelles au XXIe siècle, imaginée en 1989, et qui semble être prémonitoire de nos vies futures… C'est en quelque sorte extralucide, de l'anticipation clairement : du comportement humain, de son addiction à l'information de masse, au surplus, à la dépendance virtuelle déclassant l'homme de l'indépendance d'esprit.
Mais où Dan Simmons est allé chercher tout cela.
« Mon cerveau capte cet horrible vacarme et le restructure comme de la poésie. Toute la journée et toute la nuit, la souffrance de l'univers afflue et coule dans les corridors enfiévrés de mon esprit sous forme de vers et de métaphores, de métaphores en vers, en une danse de langage complexe et sans fin, tantôt apaisante comme un solo de flûte, tantôt fracassante et stridente et déchaînée comme une douzaine d'orchestres en train d'accorder simultanément leurs instruments. Mais ce sont toujours des vers et de la poésie. » (I2V2 p562)
Chaque fois que je trouve une pépite littéraire, je la déterre du siècle précédent. Il me faut trouver une inspiration sérieuse pour relater cette rencontre magique dont j'ai choisi de nourrir en prélude les premiers airs du requiem de Bruno Mardena ; ensuite, j'ai habillé le corps du texte par le requiem en G-Minor de Otto Olsson…
… tous ces airs afin de maintenir un certain souvenir, un sombre plaisir, une noirceur enivrante, le plus longtemps possible.
Pour conclure, paisible et sublime « Ney » (flûtes obliques turques) c'est toi qui me berces nostalgique devant les décors merveilleux d'Hypérion… L'histoire ne s'arrête jamais.
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