- J'ai probablement vu plus de guerres que vous n'avez vu de femmes nues. Et vous voulez savoir ce que je pense de la guerre ?
J'attendis
- Je pense que la guerre est un putain de sale tour que les vieux jouent aux jeunes , gronda Hemingway
Quand j’ai décidé de rédiger ce récit, j’ai compris qu’Hemingway avait raison, cette nuit-là à Punta Roma, quand il comparait une bonne histoire à l’aperçu d’un périscope de sous-marin. Par la suite, il devait déclarer qu’un roman était semblable à un iceberg – sept huitièmes de sa masse devaient demeurer invisibles. Je savais que c’était là la meilleure façon d’écrire notre petite histoire, mais je savais aussi que je ne serais jamais assez bon pour y parvenir. Jamais je n’aurais le talent de l’artiste zen, qui n’a besoin pour représenter un faucon que de poser une touche de bleu sur sa toile. La seule façon que j’avais de raconter cette histoire, c’était d’adopter la méthode qu’Hemingway avait critiquée à Punta Roma : rassembler tous les faits, tous les détails, et les faire défiler dans le livre comme un chef de guerre fait défiler ses prisonniers dans la capitale, laissant au lecteur le soin de trier le bon grain de l’ivraie.
On se sentait bien à la table d’Ernest Hemingway, on sentait l’énergie émaner de lui et de ses convives, même lorsque l’un de ceux-ci était un espion au visage boursouflé et un autre une femme mystérieuse ayant des liens avec les nazis. De toute évidence, Dietrich avait une grande affection pour Gellhorn et Hemingway –pour ce dernier en particulier –, et son énergie était égale à celle de l’écrivain,sans être épuisante pour autant.
Aimer – le savoir, ne rien pouvoir y faire et pourtant ne rien ressentir hormis un bonheur total.
La guerre est un putain de sale tour que les vieux jouent aux jeunes.
Les anciens combattants, en particulier lorsqu’ils sont en quête de primes, ne sont la propriété de personne. Ce ne sont que des êtres humains ;des êtres humains aux abois qui n’ont que leur vie à perdre. » Hemingway dressait là un véritable réquisitoire contre les bureaucrates.
Il y a encore plus de nègres en ville qu’avant la guerre », j’avais refoulé l’envie de lui enserrer la nuque des deux mains et de lui cogner la tête contre le volant. Je n’en avait rien à fiche qu’il insulte les Noirs – je n’en avais connu aucun, ni dans le cadre du travail ni ailleurs, de façon suffisamment poussée pour renoncer aux préjugés que nous inspiraient ces citoyens américains de
quatrième classe – mais quand Tom Dillon prononçait le mot « nègre »,
j’entendais quant à moi « graisseux » ou « espingouin
La saison était trop avancée pour qu’on puisse savourer la floraison des célèbres cerisiers japonais de Washington,mais des traces de leur parfum flottaient encore sur les grandes avenues,mêlées à la riche senteur des magnolias qui donnaient à la ville son allure sudiste si familière.
La vie continue jusqu’à ce qu’on meure… les choses se suivent, l’une après l’autre.Un roman a une structure. Un roman a un équilibre, une direction, que n’a pas la vie. Un roman sait quand il doit s’arrêter.
L’identité de celui que l’on espionne importe moins que la capacité de l’espionner.