AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Allantvers


Il y a beaucoup de merveilleux conteurs dans la littérature, mais ce que j'aime particulièrement chez Isaac Bashevis Singer c'est sa puissance d'évocation propre à redonner vie à un monde perdu, celui de la communauté juive polonaise anéantie par la barbarie nazie.

"Le Manoir" est particulièrement intéressant de par la période à laquelle il se déroule, à savoir non pas avant guerre comme dans La famille Moskat mais en 1863, au lendemain de la dernière insurrection polonaise contre le pouvoir russe. Un temps de puissante germination d'idées nouvelles, où la communauté hassidique traditionnaliste demeure refermée sur elle-même et sur la perpétuation des rites d'un peuple éternellement voué à la diaspora, alors que dans le même temps des Juifs modernes épousent les idées progressistes dans une vision de la population juive intégrée à ses pays d'accueil. Tout cela dans le contexte d'une Pologne qui, déplore l'auteur, peine à suivre le grand vent de modernité du monde occidental.

Pour illustrer ce contexte de grands bouleversements idéologiques et sociaux, Singer nous offre une saga vibrionnante peuplée de personnages merveilleusement campés, qui démarre dans le village arriéré de Jampol où les pratiques religieuses ancestrales perdurent autour de rabbins rigoristes. Calman Jacoby, commerçant avisé mais homme peu instruit, se sent bien dans ce monde figé mais autour de lui certains, et jusque dans sa descendance, suivent d'autres voies, celle de l'assimilation à travers sa fille ou celle de la science moderne embrassée par l'un de ses gendres. Jusqu'à ce que lui-même s'égare sur le chemin d'un amour impur.

De Jampol à Varsovie, on suit avec bonheur le quotidien d'une communauté juive brossée avec beaucoup de verve, d'humour mais aussi avec une ironie distanciée car l'auteur n'épargne guère ses personnages, que j'ai hâte de retrouver dans la suite de leurs aventures dans "Le Domaine".
Commenter  J’apprécie          360



Ont apprécié cette critique (35)voir plus




{* *}