Oeuvre magnifique, ciselée comme une sculpture, frissonnante comme les blés au vent, profonde comme nos ténèbres. Elle parle au coeur par affleurements, il faut se laisser porter.
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Ennui militaire
Comme tu es malin dans ton attente
Patiente. Tu flaires
La terre qui fume, la vie
Qu'une cigarette consume
Lentement, rien d'autre.
La douceur têtue de tes années
L'avril dénudé, un corbeau
Immobile sur la guérite,
Et les lettres qu'on écrit tard le soir.
Peut-être que la vie est belle...
Dans cet enfer, là, au fond de la rue,
De la pluie, de l'ennui, dans cette odeur
De charbon de bois dans le hangar
Où se trouve la forge noire.
Un tendre abîme s'ouvrant à mes côtés,
Presque sous mes pieds, une étoile
Fondit en larmes et tomba.
L'ami trahi m'appelle
Du fond de mon coeur, et s'approche
Je l'entends monter, dans mon sommeil
Je crie au premier pas qu'il fait
Pourquoi me piétines-tu ?
Puis il s'endort, léger, sur ma poitrine.
La lumière a ta stature
Et elle gouverne le geste,
Précise, la pierre aussi
Offre sa position au soleil.
Ta voix ce matin
Grandit dans nos os,
Dans ce sang
Qui s'ordonne comme les feuilles.
Et le jour prend sur terre
Sa mesure à ton pas.
Maintenant je sais ne pas me plaindre
Si ma main dans le noir
Touche le fond, et que tu n'y es pas.