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Critique de Pancrace


Pardon M. Sire d'avoir par instant trouvé bien longue et tellement triste la quête de Saravouth, les souffrances insoutenables, les visions d'apocalypse où parfois je me suis senti seul, au beau milieu d'une des toiles les plus sombres de Jérôme Bosch quand la méchanceté des hommes, des bêtes et même des plantes n'ont plus de limites.
Merci M. Sire de m'avoir fait comprendre avec tant d'acuité pourquoi, lors d'un voyage au Cambodge, mon guide, dans le minibus entre les temples d'Angkor et le lac Tonlé, s'est mis à pleurer en chantant « La vie en rose » d'Edith Piaf. « Quand il me prend dans ses bras »…
Sa mère est morte dans les siens. Il ne lui parlera plus jamais tout bas.

Cambodge 1971.
Dans le royaume imaginaire de Saravouth, dans la baie-du-matin-clair, il y a des canards-à-flûtes, des trompettes-à-groseilles et des arbres-à-brumes.
Dans le monde réel, il y a Lon Nol qui a renversé Sihanouk et le royaume bascule en empire où les khmers tuent les pères et les mères.
Pourquoi faut-il que par des phénomènes extérieurs à l'univers intérieur de Saravouth le malheur vienne envahir et détruire le petit monde de cette famille heureuse ?

Ce roman m'a touché autant qu'il m'a tourmenté, j'ai cherché avec Saravouth, sa mère, son père, sa soeur. Avec espoir, sans illusion. Avec courage, sans sentiment.
La poésie du texte est engloutie par la désolation, la vermine, la mort et les viols.

Le contexte historique n'est que très peu évoqué, seule la guerre civile explose dans ces pages, les troupes de Lon Nol, les Viêt-Cong et les Khmers ruinent, ravagent, saccagent tout sur leur passage.

Bien sûr, Saravouth trouvera quelques îlots de réconfort dans l'écroulement de sa vie.
Iaï, la sorcière des bois le soignera de sa balle dans la tête. Episode épique et écrits crus.
Parvenu après mille embuches aux environs de Phnom-Penh, il sera recueilli quasiment mort par le Père Michel qui gère l'orphelinat dans les cris incessants des orphelins-nourrissons.
Il se fera un ami, presque un frère de Vanak qui lui apprendra à faire briller les chaussures avec les bas de soie des prostituées prostrées devant tant de cruauté.

Son monde parallèle peuplé de chimères, de Peter Pan, de Tiger Lily et de banane-girafe le soutiendra depuis Charybde jusqu'à Scylla mais il vacillera quand, il faudra avec les américains partir pour une autre vie qui ne sera jamais la sienne.

Son épouse canadienne lui donnera trois beaux enfants mais ne pourra résister à cette vie où Saravouth exhume tellement de châtiments, qu'il commence à sombrer dans la folie.

Dans l'épilogue, M. Sire nous démontre que Saravouth existe vraiment, et que maintenant, dans les rues il joue avec talent aux échecs, lui qui a en a tellement essuyé.

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