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Citations sur Le Pays des autres (415)

Elle pensa que c’était le doute qui était néfaste, que c’était le choix qui créait de la douleur et qui rongeait les âmes. Maintenant qu’elle était décidée, à présent qu’aucun retour en arrière n’était possible, elle se sentait forte. Forte de ne pas être libre.
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« Papa, ce ne sont que les méchants Français qui sont attaqués, n’est-ce pas ? Les gentils, les ouvriers les protègent, tu ne crois pas ? »
Amine eut l’air surpris et il s’assit sur le lit. Il réfléchit quelques instants, la tête basse, les mains serrées devant sa bouche.
« Non, asséna-t-il d’une voix ferme, cela n’a rien à voir avec la gentillesse ou avec la justice. Il y a des hommes bons dont les fermes sont brûlées et des salauds qui échappent à tout. Dans les guerres, il n’y a plus de gentils, plus de méchants, plus de justice.
— C’est la guerre alors ?
— Pas vraiment », dit Amine, et comme s’il se parlait à lui-même, il ajouta : « En réalité, c’est pire que la guerre. Car nos ennemis ou ceux qui devraient l’être, nous vivons avec eux depuis longtemps. Certains sont nos amis, nos voisins, notre famille. Ils ont grandi avec nous et quand je les regarde, je ne vois pas un ennemi à abattre, non, je vois un enfant.
— Mais nous, est-ce que nous sommes du côté des gentils ou bien des méchants ? »
Aïcha s’était redressée et le regardait avec inquiétude. Il pensa qu’il ne savait pas parler aux enfants, qu’elle ne comprenait sans doute pas ce qu’il essayait de lui expliquer.
« Nous, dit-il, nous sommes comme ton arbre, à moitié citron et à moitié orange. Nous ne sommes d’aucun côté.
— Et nous aussi ils vont nous tuer ?
— Non, il ne nous arrivera rien. Je te le promets. Tu peux dormir sur tes deux oreilles. »
Il attrapa doucement les oreilles de sa fille pour approcher son visage du sien et déposer sur sa joue un baiser. Il ferma la porte délicatement et dans le couloir il songea que les fruits du citrange étaient immangeables. Leur pulpe était sèche et leur goût si amer que cela faisait monter les larmes aux yeux. Il pensa qu’il en allait du monde des hommes comme de la botanique. À la fin, une espèce prenait le pas sur l’autre et un jour l’orange aurait raison du citron ou l’inverse et l’arbre redonnerait enfin des fruits comestibles.
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Tandis qu’elle pénétrait dans la maison, qu’elle traversait le salon baigné par le soleil d’hiver, qu’elle faisait porter sa valise dans sa chambre, elle pensa que c’était le doute qui était néfaste, que c’était le choix qui créait de la douleur et qui rongeait les âmes. Maintenant qu’elle était décidée, à présent qu’aucun retour en arrière n’était possible, elle se sentait forte. Forte de ne pas être libre.
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Sur le blanc du tissu ressortaient ses mains sombres et ridées, ces mains qui semblaient contenir toute la vie de cette femme, comme un livre sans mots.
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Aïcha connaissait ces femmes aux visages bleus. Elle en avait vu souvent, des mères aux yeux mi-clos, à la joue violette, des mères aux lèvres fendues. À l’époque, elle croyait même que c’était pour cela qu’on avait inventé le maquillage. Pour masquer les coups des hommes.
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Aïcha parfois se posait des questions silencieuses...
... Elle soupçonnait qu'il existait quelque chose qui s'appelait le malheur et que les hommes étaient capables de cruauté. Et dans la nature qui l'entourait, elle cherchait des explications.
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- Votre frère s'est fait du souci pour vous. Il vous a cherché. Le bruit courait que vous étiez en prison.
- Mais nous sommes tous en prison. Tant que nous vivrons dans un pays colonisé, nous ne pouvons pas nous dire libres.
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Elle l'amusait, lui qui ne savait pas rire avec ses dents, qui mettait toujours ses mains devant sa bouche comme s'il trouvait que la joie était, de toutes les passions, la plus honteuse et la plus impudique.
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“Ici, c’est comme ça”. Cette phrase, elle l’entendrait souvent. À cet instant précis, elle comprit qu’elle était une étrangère, une femme, une épouse, un être à la merci des autres. Amine était sur son territoire à présent, c’était lui qui expliquait les règles, qui disait la marche à suivre, qui traçait les frontières de la pudeur, de la honte et de la bienséance.
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Mouilala vouait au sultan une touchante déférence. Comme les autres femmes, elle montait la nuit sur la terrasse pour voir le visage du souverain dans la lune. Elle n'avait pas apprécié que Mathilde se mette à rire quand elle avait pleuré à cause de l'exil de Sidna Mohammed chez la Madame Gascar.
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