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Leïla Slimani qui a recueilli le témoignage de nombreuses femmes analyse la sexualité dans la société marocaine.

Une sexualité qui si elle est bridée pour les hommes comme pour les femmes par les religieux, et non par le Coran comme l'explique l'auteure, permet aux hommes d'exercer leur domination sur les femmes (qui pour la plupart se plient sans restriction, soumettant souvent elles-mêmes leurs filles). Ainsi l'interdiction des relations sexuelles hors mariage qui concerne les hommes et les femmes pénalisent plus ces dernières en favorisant la marchandisation et l'instrumentalisation de leur corps, mais aussi les crimes d'honneur, passages à tabac, humiliations de mères célibataires, de femmes émancipées. 

Une situation de violence et d'hypocrisie qui même si elle semble évoluer un tant soit peu dans le bon sens — la sexualité est abordée aujourd'hui dans les médias marocains, des filles et des femmes s'émancipent, parfois soutenues par des hommes — reste difficile pour les femmes. Contre cet état de fait Leila Slimani signe cet excellent essai qui fait réfléchir sur la misère sexuelle, ses origines et incidences politiques, économiques et sociales, et sur l'ingérence, qui profite souvent aux hommes (sauf aux homosexuels 😏), de la religion dans la sexualité, un domaine qui ne devrait relever que de l'intime et non du secret.

Challenge MULTI-DÉFIS 2021
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Un très bel essai sur la sexualité au Maroc. Leila Slimani nous livre des portraits de femmes qu'elle a rencontrées et qui lui confient sans tabou leur vie sexuelle. Ces femmes issues de tous les milieux sont trop souvent coincées entre la tradition, la religion et l'émancipation, elles sont soumises à la ruse pour échapper aux menacent permanentes qu'elles soient familiales, policières, religieuses. C'est aussi valable pour les hommes et plus encore pour les homosexuels.
Les filles sont éduquées dès l'enfance à la frustration de leur corps, surtout rester vierge, mais aussi je cite :"avant d'être un individu, la femme est une mère, une soeur, une épouse, une fille. Elle est la garante de l'honneur familiale et, pire encore, de l'identité nationale. Sa vêtu est un enjeu public."
Pour les femmes ce n'est pas facile d'assumer le choix d'une relation sexuelle hors mariage, même les prostituées estiment qu'elles ont tort et espèrent être sauvées et expiées de leurs péchés, certaines homosexuelles font parfois le choix de se marier pour sauver la face.
Tout n'est pas sombre, beaucoup de femmes s'affranchissent, elles ont une soif de liberté il faut juste que la législation change, s'adapte à ces changements mais aussi les mères, et là je reprends les propos de la journaliste Joumana Haddad qui s'adresse aux mères après les agressions sexuelles de Cologne le 31 décembre 2015 : "Désolée de vous l'annoncer ainsi, à vous les mères, mais si vos fils deviennent des harceleurs, des violeurs, des violents, des pourris, des mauvais maris, des machos, ce n'est pas uniquement la faute de la société et de la culture : vous en êtes également responsables. Au lieu de répéter à votre fille qu'elle est une proie, cessez de dire à votre fils qu'il est un chasseur. Au lieu d'apprendre à votre fille à se taire, essayez d'apprendre à votre fils à écouter. Au lieu d'interdire à votre fille de porter une jupe, essayer de faire comprendre à votre fils qu'une jupe n'est pas une invitation au sexe. Au lieu de forcer votre fille à se couvrir, essayer d'expliquer à votre fils qu'une femme est autre chose qu'un corps."
Cet essai questionne sur la place de la femme, de l'homme, l'épanouissement de la jeunesse, le droit à la vie privée, à l'intime, à la liberté sexuelle.
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Chapeau bas, Mme Slimani ! Après un remarquable Dans le Jardin de l'ogre et un Goncourt archi mérité pour Chanson douce, vous auriez pu vous la jouer mémère peinarde et capitaliser sur la lumière du jour. Au lieu de ça, vous choisissez de nous offrir un livre plus que d'actualité sur le droit à une sexualité libre, un combat quotidien pour les Marocaines.
Pas un roman donc mais un recueil de témoignages de Marocaines de tout horizon sociologique et de toute génération, entrecoupés de réflexions ou de recadrages informatifs.
Pas non plus un livre de sociologie tellement on sent vibrer la chair entre les lignes, les souffrances endurées, les rêves aussi.
Un livre nécessaire et édifiant que l'on referme la boule au ventre. Je n'oublierai pas Soraya à qui sa mère répétait chaque jour " n'oublie pas de rester vierge", Nour qui fait croire qu'elle est vierge à son amoureux du moment, Zhor violée à 15 ans qui a été montré du doigt, F. qui se prostitue pour les bourgeois frustrés ... Terrible.
Pour rappel, au Maroc, tout acte sexuel hors mariage est considéré comme un crime réprimé, qui plus est l'homosexualité.
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La parole circule entre Leila Slimani et les femmes qui se sont confié à elle. Les témoignages alternent avec des réflexions personnelles. Au coeur de ces récits, trois récurrences : les femmes, le sexe, le Maroc. Car la loi marocaine punit et proscrit toute forme de relations sexuelles hors mariage et, par voie de conséquence, l'homosexualité et la prostitution. Pourtant, au Maroc comme ailleurs, le sexe se vit, se consomme et se vend. Peut-être plus qu'ailleurs, en raison de l'obsession dont il est l'objet, notamment dans sa négation, et des frustrations qu'il crée et révèle. Car quand la société impose le silence, il est parfois difficile de distinguer les fantasmes de la réalité.

Les vécus contés sont variés et offrent des fragments qui s'éclairent les uns les autres. Leila Slimani souligne l'hypocrisie constitutive de la société marocaine et questionne l'alternative apparente qui s'offre à ses femmes : rester vierge ou devenir épouses. Elle permet également d'ébranler certaines des représentations occidentales concernant les musulmanes : en prêtant sa plume à des voix, elle donne vie aux corps et les extrait des clichés dans lesquels ils se retrouvent malgré eux enfermés. Et surtout, elle brise, ne serait-ce que pour un moment, l'isolement forcé de ces femmes.

Sexe et Mensonges est un appel à la liberté, à l'amour, au désir et à la jouissance. le tout en faisant taire le silence.
Lien : https://auxlivresdemesruches..
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Pour celles et ceux qui ne me connaissent pas, je dois vous dire que ce livre était pour moi une évidence à lire... J'ai vécu plus de 7 ans au Maroc, non pas en tant que touriste, mais parmi et avec les marocains. Lors de ma vie là-bas, j'ai rapidement constaté toute cette hypocrisie autour du sexe, toute cette misère affective et sexuelle, cette souffrance et ce manque d'amour...

L'AMOUR : autant dire qu'il ne fait pas partie de leur vocabulaire, de leur culture, éducation et de leur quotidien. Les nombreux mariages arrangés en sont hélas la preuve. le poids de la famille, de la religion sont des barrières insurmontables pour ceux et celles qui veulent s'en libérer et ils le paient très cher.
Je ne me pose pas ici, en juge, loin de moi l'idée. Je les aime et les respecte trop pour cela. de plus, de quel droit, pourrais - je les juger ?
Je suis juste agréablement surprise de constater que la parole se libère. Leïla Slimani en est la preuve vivante. Elle a osé, elle ose et à mes yeux, c'est un acte de grand courage. Oui, quand on connait l'état d'esprit qui règne au Maroc, on imagine qu'elle risque de ne plus être la bienvenue.
Toute société ne supporte pas que l'on dévoile ses travers. Au Maroc, le sexe est tabou, on n'en parle pas, on le chuchote... le silence est de rigueur.
Leïla Slimani brise ce silence avec des témoignages sincères et courageux de marocaines et de quelques marocains. Son analyse est particulièrement juste et forte. Les femmes qui témoignent dans cet ouvrage ne font pas semblant; les mots qu'elles utilisent, les récits qu'elles relatent sont volontairement crus, cinglants et douloureux. Pas de faux semblants.

2017 et la femme est toujours considérée comme un objet sexuel, comme inférieure à l'homme; même en occident. Elle doit prouver chaque jour qu'elle a le droit d'exister, d'avoir des désirs, des rêves; d'avoir un corps et de l'utiliser comme bon lui semble.

Ce livre est un cri de détresse, de douleurs, mais aussi d'espoir pour la jeune génération marocaine et un énorme cri d'amour avec un grand A !
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Des femmes non plus « objet » mais « sujet » de l'histoire

« le fait de vivre ou d'avoir grandi dans des sociétés où la liberté sexuelle n'existe pas fait du sexe un objet d'obsession permanent ». Mais y a-t-il une région du monde où existe l'égale liberté des unes et des autres, en matière de sexualité existe ? C'est oublier un peu vite, les rapports sociaux de sexe (système de genre), la domination sociale des femmes par les hommes, la réduction de la sexualité à la pénétration, l'oubli des désirs des femmes, les interdits dominants sous des formes historiques et situées, la domination aujourd'hui des modèles pornographique…

Mais le propos de l'autrice est moins général. Les relations sexuelles hors mariage, la « fornication » ou zinasont pénalisées au Maroc, les avortements sont illégaux (sauf en cas de viol, de malformations graves ou d'inceste), les homosexuel·les vivent « dans la peur et l'humiliation »… Les « autorités » tiennent un discours hypocrite : « Faites ce que vous voulez, mais faites-le en cachette ». Il y a donc une culture institutionnalisée du mensonge, le poison de l'hypocrisie, le déni des réalités au nom d'une « culture » ou d'une « identité » « données comme figées et anhistoriques », un ordre sans « droits individuels et sexuels » où la virginité (des seules femmes) est un impératif, la passivité de celles-ci incluse dans le mariage. Ce contrôle social sur le corps des femmes leur interdit « de jouer pleinement son rôle de citoyenne ». Les femmes sont niées en tant qu'individue.

Leila Slimani revient sur Adèle, personnage de son premier roman, « Une femme rongée par les remords et par sa propres hypocrisie », le concept de h'chouma, la notion de dépendance au groupe, les transgressions des « frontières sacrées ».Son livre n'est pas une étude sociologique, mais une livraison de paroles brutes, « Cette parole vibrante et intense, ces histoires qui m'ont bouleversée, émue, qui m'ont mise en colère et parfois révoltée ».

Quelques éléments choisis subjectivement dans ces rencontres entre femmes.

Les enfants abandonnés sans identité ni généalogie, le climat de confusion et d'angoisse, l'application des lois musulmanes « peu importe mon rapport intime à la religion », l'obsession de la virginité, la virginité comme outil de coercition, la reconstitution d'hymens, la commercialisation de faux hymens censés saigner, « la misère sexuelle est un capitalisme comme un autre »…

« Je ne demande pas la lune : juste vivre ce que je veux, avec qui je veux », le débat sur l'avortement sous le seul angle sanitaire « pour occulter complètement la question de la liberté sexuelle et du droit des femmes à disposer de leur corps », l'argument du « respect de la loi islamique », la pornographie et ce sexe qui « fait vendre du papier et exploser les audiences », le paragraphe du code pénal « selon lequel un violeur qui épouse sa victime ne peut plus être poursuivi en justice » et son abrogation par le Parlement, l'idée de séparation étanche entre l'espace public et l'espace privé, l'arbitraire et les humiliations, les tartuffes…

Le sexe prisonnier, des femmes vivant seules, les sites de rencontre, Internet, le cinéma, l'injonction au silence, les discours sur les « traditions » et l'« occident », la « terrible violence », la « cause des hommes », « Tout ça,me dit-elle, ça ne sert pas la cause de l'islam. Ça ne sert qu'une seule cause : celle des hommes », faire l'amour comme crime originel, l'imposition d'une sociabilité dans et par le couple, la place des femmes et les droits des femmes, « Elles ont bien sûr le droit de travailler, le devoir de payer des impôts mais elles n'ont pas totalement gagné le privilège de marcher en paix dans la rue, de s'assoir à une terrasse pour fumer une cigarette, etc. »…

L'érotisme arabe, les sexualités historiques, « la colonisation va par ailleurs édicter des lois très restrictive dans ce domaine », le puritanisme sexuel, l'interdiction de l'homosexualité inspiré du code français, l'argument asséné « C'est le Coran qui le dit », l'oubli de l'adresse à l'Insan (l'être humain), le halal et le haram, le déni de l'esprit critique du/de la croyant·e, dogmatisme et éthique…

L'identité supposée, mélange de protestation et de réaction, une construction historique, le passé effacé par le passé colonial, le présent défiguré par la marchandisation, et toujours le corps des femmes comme enjeu pour les hommes. La sexualité n'est pas une question identitaire ou morale, mais bien une question politique. Et pour la plupart des responsables religieux « le croyant-citoyen n'est pas autorisé à penser par lui-même et à prendre ses décisions en toute conscience ». Combattue par les uns et les autres, au nom de la religion ici, au nom de l'athéisme là, au nom de la concurrence libre et non faussée un peu partout, la liberté de conscience est haïe par tous les despotes et les masculinistes.

« Egalité des sexes », une autrice souligne les avancées des féministes, « revalorisation des droits, bataille pour l'accès à l'éducation, à la santé, à l'emploi, à la contraception : en cinquante ans, les féministes ont accompli un travail colossal ». Elle ajoute : « La lutte contre la répression sexuelle est un combat qui reste à mener »

Les pratiques sociales – dont les pratiques sexuelles – se sécularisent « sans que ce soit pour autant assumé ». Par le silence et les interdits imposés la sexualité des jeunes leur est volée, les unes et les autres ont recours à des « bricolage spatio-sexuel ». La question la fin de l'interdiction (ou « légalisation ») des relations sexuelles hors mariage est posée. « Cuisiner, faire des enfants et bien s'occuper de son mari » n'est pas horizon émancipateur. Les femmes peuvent vivre libre sans contrôle d'un homme. L'apparence (hymen) ne saurait dire ce qu'est une personne. le mariage peut-être une forme de prostitution institutionnalisée. Aucun groupe social n'a le droit de regard sur le corps des femmes.

Fatima Mernissi, citée par l'autrice écrivait : « Beaucoup des activités préférées des gens telles que se promener, découvrir le monde, chanter, danser et exprimer son opinion font partie des interdictions pour les femmes. le bonheur d'une femme viole la qa'ida »

Des paroles de femmes, des indignations et des luttes, la sécularisation contre la religion d'Etat, des pratiques derrière l'hypocrisie et les mensonges, des possibles émancipateurs contre des traditions inventées, des mots de femmes qui veulent être et vivre.

Reste une expression : « misère sexuelle » aussi répandue qu'imprécise. La misère sexuelle est une construction sociale, elle ne peut-être comprise qu'en regard des images fabriquées de ce que pourrait être le plaisir ou l'orgasme. Elle ne peut-être analysée qu'en prenant en compte les rapports sociaux de sexe (système de genre) et la construction de la sexualité dans ces rapports. Car il ne s'agit ici ni de caresses, partagées ou non, ni même de plaisir ou d'orgasme, mais bien d'accès à la pénétration vaginale, qui a beaucoup plus à voir avec la procréation qu'avec l'atteinte du plaisir. Les visions socialement étriquées (et incorporées) de la sexualité « obligée » pour les hommes définissent des normes qu'ils veulent imposer aux femmes, le reste étant méprisé sous le vocable de « préliminaires ». Et si justement la misère n'était que l'autre face de la scission liminaire ?

Mais dit autrement, la « misère sexuelle » des femmes à travers le monde, c'est leur objectivisation, la négation de leur être sujet et de leur puissance de jouissance…

La multiplication souhaitable d'autres livres,, sous cette forme ou sous d'autres manières, dans chaque région du monde, participe à rendre audibles les voix de femmes, visibles les concrets des réalités sexuelles – au delà des interdits, des préjugés, des fantasmes – vécues entre contrainte, double morale, volonté de maitriser son corps et ses désirs…


Lien : https://entreleslignesentrel..
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Ce livre est un recueil de témoignages que Leila Slimani a recueillis. L'un des éléments déclencheurs a été le succès de son livre Dans le jardin de l'ogre, et l'étonnement qu'il a suscité auprès de certains critiques : comment une jeune femme de confession musulmane et d'origine marocaine pouvait-elle parler de sexualité ? Et pourquoi n'aurait-elle pas pu en parler ? Leila Slimani le dit, le répète : elle a eu la chance de grandir dans une famille ouverte d'esprit, cultivée. Au fur et à mesure de ces rencontres, le lecteur se rend compte que rares sont les jeunes femmes qui ont eu cette chance et que tout est à faire, ou presque, en matière d'éducation. Oui, Leila Slimani met les pieds dans le plat, en montrant qu'en éduquant différemment filles et garçons, l'on sème les graines des futures inégalités. Les mères, brimées par leurs époux, valorisent démesurément leurs fils. Je cite à cet égard , parce que ces mots valent mieux que de longues explications : « Désolée de vous l'annoncer ainsi, à vous les mères, mais si vos fils deviennent des harceleurs, des violeurs, des violents, des pourris, des mauvais maris, des machos, ce n'est pas uniquement de la faute de la société et de la culture : vous en êtes également responsables. Au lieu de répéter à votre fille qu'elle est une proie, cessez de dire à votre fils qu'il est un chasseur. Au lieu d'apprendre à votre fille à se taire, essayer d'apprendre à votre fils à écouter. Au lieu d'interdire à votre fille de porter une jupe, essayer de faire comprendre à votre fils qu'une jupe n'est pas une invitation au sexe. Au lieu de forcer votre fille à se couvrir, essayer d'expliquer à votre fils qu'une femme est autre chose qu'un corps. »
Parce que la fille, la femme, est réduite à être un corps. Parce qu'une valeur démesurée est donnée à la virginité, sans laquelle un mariage est impossible. Pour celles qui auraient des relations sexuelles avant de se marier, le mariage devient quasiment impossible. Pourtant, tous les jeunes, garçons, filles, ont une sexualité. Plus le sexe est réprimé, plus cela engendre de frustration, plus l'on cherche des moyens de passer à l'acte. Mais quand ? Mais où ? Chez les parents ? Impossible. Dans la chambre de la cité universitaire (à condition de faire des études) ? Risqué. Dans un hôtel ? Seuls les couples mariés peuvent s'y rendre. Reste la voiture, garée dans des lieux bien connus, dans lesquels la police fait souvent des rondes, et ferment parfois les yeux – avec un petit billet.
Revenons au mariage. Même s'il a lieu, ce n'est pas la porte ouverte au bonheur, loin de là. Rares, dans ce livre, seront les témoignages de mariages heureux, de mariages dans lequel le corps de la femme ne sera pas totalement asservi. Si elle est battue, elle ne pourra que rarement compter sur le soutien de sa famille, c'est son « sort ». (Note : en France aussi, cela existe. Voir le magnifique roman de Pascaline Nolot Gris comme le coeur des indifférents). Si elle divorce et se remarie, elle perd automatiquement la garde des enfants qu'elle a eu de son premier mariage. Quant à avoir un enfant hors mariage, c'est quasiment impossible. Il aura, inscrit à l'état civil, une particule liée à son nom qui indique son statut de « bâtard ». Les chiffres des infanticides, des abandons, des avortements clandestins sont effrayants. Selon l'Amlac (Association marocaine de lutte contre l'avortement clandestin) 600 avortements clandestins ont lieu chaque jour, je vous laisse imaginer dans quelles conditions.
L'espoir ? Ce sont les femmes qu'il vient – des femmes, et de quelques hommes. Elles veulent prendre leur destin en main, elles veulent s'émanciper, ne plus faire attention au regard des autres. Elles savent que ce n'est pas facile, que le chemin est long – mais elles luttent, pour elles, pour les générations à venir.
Je terminerai en disant que l'engagement de Leila Slimani, sa volonté de faire évoluer les lois au Maroc ne se sont pas terminés avec la parution de ce livre. Elle a signé, en 2019, une pétition pour demander la libération d'une journaliste emprisonnée pour « avortement illégal » et « relations sexuelles hors mariage ». Elle milite pour l'abrogation de l'article 490 du Code pénal marocain, qui pénalise les relations sexuelles hors mariage (source : Paris-Match, février 2022). Les combats féministes ont rarement une fin.
Lien : https://deslivresetsharon.wo..
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Un essai très intéressant et impressionnant, parfois révoltant, triste mais tout de même encourageant sur la société marocaine face à l'image de la femme, face aux idéaux rigoristes et au sexe qui est un sujet tabou mais dévoyé par la morale.
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Leïla Slimani présente ses idées et des témoignages à propos de la sexualité au Maroc : entourées d'une oppression sociétale et familiale qui reproduit une inégalité femme-homme. Conditionnées depuis l'enfance, les adolescentes grandissent avec une peur de la sexualité et des relations humaines.

Ce problème de sexualité se poursuit à l'âge adulte puisque les relations entre adultes non mariés y sont interdites. le mariage n'est pas toujours une liberté puisqu'elle dépendra du mari. Une mère demandant le divorce perd d'ailleurs automatiquement la garde de ses enfants.

Il y a des avancées avec notamment l'autorisation en 2015 de l'IVG mais seulement en cas de viol, inceste ou graves malformations foetales : dans cette liste il manque tout simplement le choix libre de la femme donc une femme n'y est pas libre de son corps.

Challenge Multi-défis 2024
Challenge Solidaire 2024
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Lu dans le cadre challenge Multi-défi 2019.
Voilà un essai dérangeant. Et Leila Slimani ne mâche pas se mots. Je dirais même elle pointe du doigts la politique de son pays. Un essai particulièrement dure à lire. Certaines vérités sont cruelles. Et pourtant cela se passe comme ça dans certains pays où la femme n'a pas sa place.... On ne parle pas simplement de sexe mais aussi de la place de la femme dans la société marocaine, des lois contre les homosexuels qui peuvent exister dans certains pays, des comportements familiaux face aux viols, inceste et l'avortement. Un essai percutant qui dénonce les conservateurs d'un pays qui se cachent derrière des lois.
En lisant cet essai, j'en suis ressorties outrée. Mais je ne voulais pas être obnubilée par le Maroc et les autres pays orientaux. Certains états d'esprits que relate Leila Slimani existent dans des pays occidentaux sauf que les lois protègent les victimes. Je pense au culte de la vierge, à l'homophobie....
Un essai engageant qui datent de 2015 et qui révèlent certaines vérités qu'on pensait disparues.
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