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Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Ce roman écrit par une journaliste polonaise est avant tout une histoire de famille, avec 4 femmes vivant sous le même toit : Mémé Stasia l'arrière-grand-mère, Aba la grand-mère, Marianna la mère, et enfin la narratrice.
Le titre est pourtant trompeur puisqu'il insiste sur la ville, qui est l'autre héroïne du roman. L'histoire se déroule en effet à Lvov ou Lviv, une ville ballotée entre différents pays au fil de l'histoire.
Je pensais que le livre traiterait plus de ce sujet, et j'ai été un peu déçue à ce niveau-là, à part dans l'introduction qui est plutôt bien faite. Je pensais que l'aspect géopolitique serait plus présent, alors qu'en fait le livre est plus poétique que politique.
Je n'ai malheureusement pas été très sensible à cette poésie, ni au style de l'auteur. Il y a quelques jolies scènes, mais l'ensemble m'a semblé trop décousu. Je n'ai pas vraiment réussi à rentrer dans l'histoire et à suivre le fil des pensées de la narratrice dans ce roman qu'on pourrait qualifier dans une certaine mesure de roman d'apprentissage. J'ai surtout été dérangée par l'absence de repère chronologique au début de chaque chapitre, on ne sait jamais trop à quelle période on se retrouve et le livre aurait gagné en clarté et en fluidité si l'auteur avait précisé des dates par exemple.
Globalement, cette lecture m'a laissé un goût d'inachevé et de confusion, et j'ai l'impression d'être passée à côté de quelque chose alors que j'étais impatiente de le lire et de découvrir l'histoire de cette ville frontière.
Je remercie néanmoins Babelio et les éditions Delcourt pour leur envoi dans le cadre de la dernière opération Masse critique, et je conseillerais plutôt ce livre à des personnes qui rechercheraient de beaux portraits de femmes au lieu de chercher à comprendre l'histoire de l'Ukraine.
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Lviv est une ville de l'ouest de l'Ukraine, a 70 kilomètres de la frontière polonaise, inscrite au patrimoine mondial de l'Humanité. Son histoire, mouvementée, a été marquée par différentes "occupations" : polonaise, autrichienne, soviétique, avant l'indépendance de l'Ukraine. Son nom, lui-même, a fluctué au fil du temps : Lemberg, Lwow, Lvov. Rien qu'au vingtième siècle, la cité pourrait être une symbole des convulsions de l'histoire. C'est en tous cas l'ambition de Zanna Slovionowska dans son roman Une ville à coeur ouvert, récit imbriqué de la vie de 4 générations de femmes vivant dans le même appartement. Malheureusement, l'auteure passe sans transition d'une époque à une autre, créant une sorte de confusion narrative dans cet incessant va et vient dans le siècle passé. Il n'existe aucune progression de l'intrigue dans le livre sachant que l'événement le plus important, la mort de la mère de la narratrice, intervient dès les premières lignes. Les portraits des 4 femmes et notamment leur relation plus ou moins contrariée à l'art ne sont pourtant pas inintéressants mais trop diffus et guère fluidifiés par un style un peu froid. Dommage, Une ville à coeur ouvert possède un vrai potentiel gâché par une construction trop disparate.
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La ville de Lviv a été polonaise, autrichienne, russe et est maintenant ukrainienne. Elle a subi guerres et révolutions et vu sa population souffrir et espérer. Un roman bâti autour de quatre générations de femmes fortes et passionnées qui brasse histoire, drame intime et moments poétiques mais n'est pas toujours aisé à suivre pour qui n'est pas très au fait du contexte.
Un livre reçu dans le cadre de Masse critique Babelio.
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Une ville à coeur ouvert est un peu à la fois l'histoire d'une famille, l'histoire d'un immeuble, l'histoire d'une ville… La famille est composée uniquement de femmes, la narratrice, sa mère Marianna, soprano à l'opéra, sa grand-mère Aba qui est médecin, et son arrière-grand-mère. Les hommes sont venus, repartis, on n'en parle guère. L'appartement où elles cohabitent fait partie d'un immeuble, remarquable pour le haut vitrail art-nouveau qui court tout au long de la cage d'escalier. Il aura un rôle symbolique très fort tout au long du roman. La ville enfin, Lwow, Lvov ou Lviv selon les périodes, selon que la ville était polonaise, russe ou ukrainienne.
Le roman commence avec la mort de Marianna, tuée d'une balle lors d'une manifestation de partisans ukrainiens en 1988. Ces manifestations anti-communistes ont réellement eu lieu, et l'auteure a imaginé le retentissement qu'elles auraient pu avoir s'il y avait eu une victime, les conséquences sur le cercle familial, professionnel, amical et amoureux de la charismatique chanteuse de l'Opéra.
[...]
Alors, ai-je aimé ce roman ? J'ai trouvé au début le style lyrique un peu déroutant et j'ai eu à m'accrocher un peu pour suivre la narration fragmentée. Ce n'est pas tant les différentes époques dans lesquelles finalement on se repère bien, mais plutôt les faits qui sont décrits, parfois un peu anecdotiques et décousus, font qu'il est assez difficile de s'attacher aux personnages. le plus passionnant est finalement l'histoire de la ville qui se dévoile par bribes mais finit par former un ensemble cohérent. le style de la jeune auteure est intéressant, orné de figures lyriques, il est accentué parfois par la propension à chercher le côté douteux, voire morbide, des situations et des gens. le choix de l'événement central du roman placé dès le premier chapitre, alors qu'il aurait été possible de faire culminer le texte autour de ce drame, peut aussi être perturbant.
Tout cela ne vous donne peut-être pas envie de vous précipiter sur le roman, mais je le conseillerais surtout à ceux que l'histoire de cette région intrigue.


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Il n'est pas courant pour moi de lire des ouvrages de littérature étrangère. Żanna SŁONIOWSKA est la première romancière polonaise que je viens de découvrir à travers son roman "Une ville à coeur ouvert" traduit par Caroline RASZKA-DEWEZ, dans le cadre du Club des explorateurs de Lecteurs.com. J'en suis ravie.

Il s'agit de l'histoire de quatre femmes : Mémé Stasia, la grand-mère, Aba la mère, Marianna la fille et la narratrice qui est la petite-fille. Elles ont toutes une histoire hors normes, des destinées contrariées, mais surtout, le désir commun chevillé au corps d'une Ukraine émancipée de l'URSS. Car, l'Ukraine est bien le cinquième personnage et plus encore la ville de Lwów, initialement (en polonais), puis Lvov (en russe) et Lviv désormais (en ukrainien) qui représente l'évolution de cette région soumise à de nombreuses tensions : "Il aurait fallu deux villes en parallèle, avec deux noms différents, Lwów et Lviv. Est-ce qu'on y a seulement pensé à l'époque ? …. Mais il n'y en avait qu'une, c'est pourquoi la guerre a éclaté, séparant la ville en deux finalement."

Si j'ai lu ce roman sans m'ennuyer et parfois même avec plaisir, j'avoue que mon avis est malgré tout mitigé. J'ai aimé ces quatre femmes volontaires, engagées, fières, féministes, attachantes. J'ai aimé leurs destins tourmentés : Aba qui rêvait d'être artiste-peintre obligée par sa mère d'abandonner ce rêve pour des études de médecine, Marianna, chanteuse arrêtée en plein vol dans son rêve d'indépendance pour son pays "Le jour de sa mort… sa mort était une couleur. Des hommes ont rapporté son corps à la maison, enveloppé dans un immense drapeau bleu ciel et jaune… à un endroit une tache sombre, sanglante, transparaissait." J'ai également apprécié les détails relatifs à l'histoire politique de l'Ukraine, ses temps difficiles, ses avancées et ses reculs, ses peines et ses chagrins.

J'ai déploré en revanche un manque de fluidité entre les chapitres et j'ai eu parfois l'impression que des "coqs à l'âne" cassaient le rythme du récit. J'ai, par ailleurs, été déroutée par une écriture qui m'a paru pesante, lourde, sans grande délicatesse. Je l'aurais souhaitée plus aérienne, plus simple peut-être.

Pour autant, "Une ville à coeur ouvert" reste une saga familiale et historico-politique agréable à lire.
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Lorsque je navigue sur mon ordinateur sur le site Babelio et flâne sur de nouvelles lectures possibles, celles de 2018, comme un acte fondateur sur la littérature moderne en prise à un sursaut d'une écriture et d'une histoire en harmonie contractuelle émotionnant mon esprit et fissurant un peu mon âme prisonnière d'un passé riche et fécond de lettres sublimes, enterre le modernisme gangréné par une surenchère nauséabonde de mansuétude de consanguin critique littéraire, comme un trophée de pouvoir écrire un papier favorable pour des amis d'éditions, pour un markéting publicitaire au détriment de la belle écriture, alors ma foi vacille à lire ces critiques médiatiques sans valeurs, j'ai craqué sur un roman Une ville à coeur ouvert de Żanna Sloniowska, plébiscité, certes par beaucoup de médias, mais ma passion de découvrir par cette quatrième de couverture fût pesante et enrichissante surtout, certes aiguillé par ceux-ci.
Żanna Sloniowska est d'origine polonaise, langue de ce roman traduit par Caroline Raszka-Dewes, narre une ville, qui sera sous l'emprise de trois nations, selon l'époque, Russe, Polonaise et Ukrainienne, cette trinité historique inscrit trois noms, pour trois nations, Lwów pour les polonais, Lvov les russes et Lviv pour les ukrainiens. Au fil des générations utérines de la narratrice, quatre générations narrent le coeur de celle ville au fil de l'histoire des pays de l'est et son ami-ennemi la Russie, un déferlement d'évènement historique se diffuse dans cette trame familiale.
Żanna Sloniowska est une femme de l'est, polonaise, native de cette ville Lviv en 1978, elle fera des études de journalistes pour travailler pour chaine ukrainienne, ensuite retourne en Pologne pour poursuivre des études de psychologie et y vivre après son mariage à Cracovie. Puis épouse les mots, pour de la poésie puis la littérature avec ce premier roman en 2014, obtenant plusieurs prix, traduit en français en 2018 pour notre plus grand plaisir de découverte.
Lorsque un roman explore au cours d'un siècle les tribulations d'un peuple, d'une ville, d'un pays, d'une famille, des femmes dans une étreinte passionnelle d'une Ukraine, amoureuse de liberté, de douceur artistique slave, la saga familiale tisse sa dramaturge dans ce climat lointain de l'emprise et la chute du communisme russe, ses goulags, cette emprise dictatoriale de l'enclave des pays de l'est, asservissant ces peuples à une doctrine manipulatrice sociale, ce roman caresse la genre historique comme un décor primordial à cette sage familiale.
Le roman a pour préambule un petit précis historique sur cette ville, présentant des faits marquants de cette métropole au vestige trinitaire de la Pologne, de l'Ukraine et de la Russie. Żanna Sloniowska, pour une mise en bouche identitaire de son roman cite James Joyce de son Ulysse et son Irlande qui appartient à son Héros, comme cette ville au triple noms, appartenant à la narratrice et de sa famille qu'elle retrace avec beaucoup de tendresse et de légèreté, un témoin de vie de cette famille poly-identitaire.
En premier lieu, pouvoir être au coeur de cette ville salve à la culture étrangère, inerte à celle française, est comme un voyage de l'esprit vers cette civilisation de l'est au vestige Russe communisme et autres inconnus comme le poète Roman Kupczynski, la cantatrice Solomiya Krushelnytska, le sculpteur Sergey Merkurov, l'architecte Zygmunt Gorgolewski…. Petit à petit s'offre au lecteur une onde cartographique de la ville, de ces rues, ces places, ces monuments ornant le passé tumultueux de cette cité, notre héroïne jalonne de ces pas, les pavés, les avenus, les immeubles, les bâtisses aux fantômes trinitaire de ces trois pays cultivant avec art cette métropole en effervescence. La narratrice raconte les quatre générations de sa famille de la Russie, Kazan, Leningrad, de l'Ukraine et la Pologne avec Lviv et Lwów, cette ville à la triple nationalité. Nous voguons dans cette atmosphère de résistance, cette de la chute du communisme, de la guerre Polono-Ukrainienne, de l'émancipation des femmes et aussi l'art comme la musique, la sculpture, l'architecture et la littérature.
La narratrice, orpheline d'un père inconnu et d'une cantatrice révolutionnaire Ukrainienne Marianna, tuée d'une balle lors d'une manifestation, habite avec sa grand-mère Aba et son arrière-grand-mère Stasia, cette fratrie féminine vit comme des poupées russes ;
« Nous sommes comme des poupées russes, l'une installée dans le ventre de l'autre, sans que l'on sache vraiment qui est à l'intérieur de qui, on sait seulement lesquelles sont encore vivantes…. »
la jeune femme fait revivre sa famille comme une histoire transpirant de ses pores, coulant sur sa chair avec une suavité débordante, chaque scène est un miroir de la vie de ses aïeuls où elle est actrice de ces moments, le passé, le présent s'embrassent dans le mouvement errant de cette narratrice découvrant ces premiers émois et la filiation pesante de ces femmes prisonnières de leur vies.
Ce roman traverse comme un long fleuve tranquille, le destin de quatre femmes à travers leur ville, leur amour, leur choix, leur destin. Cette danse familiale rythmée par les souvenirs culturels de Żanna Sloniowska comme le film Nostalghia d'Andreï Tarkovski, la chanson Gainsbourg Je t'aime moi non plus, Pouchkine, avec son poème Rouslan et Ludmila…
Un roman riche, avec une écriture simple pour une lecture facile, Une ville à coeur ouvert de Żanna Sloniowska est un livre sans surprise, exposant des faits historiques entremêlés d'une histoire de famille, me semble fade avec un manque de vigueur mais celui-ci reste plaisant, je suis déçu tout de même.
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Zanna Sloniowska nous propose une véritable fresque familiale dans une Ukraine à l'avenir politique des plus sombres. Pour ce faire, elle choisit une famille, précisément quatre générations de femmes, afin d'aborder tout un pan historico-politique de l'Ukraine. Écrire sur le drapeau bleu et jaune n'est pas une mince affaire, car à ce jour les tensions règnent malheureusement toujours dans ce pays. J'ai notamment choisi ce livre pour pouvoir aborder l'histoire de l'Ukraine à travers les yeux de ces quatre femmes. Et bien entendu pour y apprendre des éléments. En somme une sorte de fiction éducative. À ce sujet, je n'ai pas été déçue, car sans être un bouquin de géopolitique, j'ai pu emmagasiner quelques notions.
Certaines chroniques s'accordent sur la difficulté à suivre les événements chronologiques lors des changements de chapitres. J'avoue qu'à certains moments j'ai également eu du mal à m'y retrouver, même si en général, j'apprécie l'imbrication des événements. L'auteure a sans doute voulu nous en dire beaucoup, mais le contexte politique et ma faible connaissance historique de l'Ukraine m'ont quelques fois perdue.
Par ailleurs, un des atouts de l'ouvrage réside dans le tissage des liens familiaux entre ces quatre femmes, ce qui offre au lecteur un regard sur chacune d'entre elles, avec leurs propres bagages. Par la même occasion, l'auteure nous sensibilise quant à la situation et la difficulté de la vie quotidienne des ukrainiens à cette époque. Je pense notamment aux difficultés pour se nourrir et aux vêtements déchirés que portent ces femmes. En outre, j'ai été sensible à la jeune protagoniste qui découvre son corps et qui s'affirme en tant que femme dans un pays instable. L'art est également présent dans cet ouvrage sous la forme architecturale ou encore musicale.
Au sujet de l'écriture, elle est assez mécanique et ne laisse pas beaucoup de place à l'émotion... peut-être est-ce pour coller aux personnages somme toute assez froids ?
En conclusion: Une lecture assez intéressante, mais qui ne me laissera pas un souvenir impérissable. Merci à Babelio, et aux éditions Delcourt/ Points pour cet ouvrage !
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Nous sommes en 1988. Marianna est morte, tuée pendant une manifestation en Ukraine. Sa fille, encore enfant, va vivre auprès de sa gand-mère Aba et de son arrière-grand-mère mémé Stasia. Elle va apprendre à connaitre l'homme qui a aimé sa mère, Mikolaj.
Comme beaucoup de romans à forte connotation politique, il est toujours préférable de bien connaitre l'histoire du pays, ou encore de se sentir transporté par l'écriture, surtout si ce type de récit n'a pas forcément votre préférence … La politique, est quasi quotidienne dans notre vie, j'avoue lire pour pouvoir rêver et y échapper de temps à autre … Et malheureusement, je ne suis pas parvenue à éprouver d'empathie pour les différentes protagonistes, notamment la narratrice dont je ne crois même pas avoir vu le prénom dans le récit …
Sans fausse honte, je ne cacherai pas mon ennui, cette lecture fut un véritable chemin de croix ! C'est trop factuel à mon goût, si une quelconque émotion y est présente, alors je n'ai pas su la déceler et suis passée totalement à côté !
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C'est un récit assez riche, qui aborde et entremêle pas mal de thèmes, à l'image de ce fragment de vitrail qui orne la première de couverture, lequel par ailleurs occupe la narratrice le temps de quelques pages du livre. C'est avant tout un roman de femmes, de l'arrière-grand-mère, la grand-mère, la mère, morte certes, à la fille, notre narratrice. C'est un roman d'amour partagé, d'histoires, celles de plusieurs cultures qui se rencontrent, se succèdent, se chassent, se combattent ou cohabitent dans une même ville, Lviv. Nommée différemment Lviv, Lwow et Lvov, selon l'époque pendant laquelle la ville était ukrainienne, polonaise ou bien encore russe. de quoi s'emmêler les pinceaux! Mais, à la façon de ces beaux clichés policés digne d'un prospectus d'offices de tourismes, j'imagine que la complexité historique de cette partie de l'Europe n'est égale qu'à sa richesse culturelle. Bref, nous voila dans l'ouest de l'Ukraine, dans l'ancienne capitale du pays, dont une partie est d'ailleurs inscrite au patrimoine mondial de L'UNESCO, ville à l'identité multiculturelle, à la fois polonaise et ukrainienne, galicienne, avec une pointe d'allemand, et soviétique évidemment. Même si la mort apparaît comme un point essentiel du roman, l'auteure dépeint son pays, sa ville avec une palette de couleurs chatoyantes, vives, telles qu'elle voie son pays, tel qu'il apparaît à travers son drapeau bicolore, partagé entre le jaune et le bleu. Tandis que le rouge, celui du sang, celui des soviétiques, celui lie de vin de la tâche de Mikhaïl Gorbatchev, celle des menstruations qui font entrer cette enfant dans un nouveau monde. Enfin, Marianna est la "reine des neiges" d'une pâleur saisissante dans son linceul.

Au-delà de cette histoire familiale, et à l'image des dissemblances tout comme des ressemblances qui unissent aussi bien qu'elles séparent ces quatre femmes, il y a bien sûr cette ville contrastée, multiple, hybride, polyglotte, animée, aux diverses influences, mais quelquefois mystérieuse et incompréhensible dans laquelle Żanna Słoniowska nous entraîne. Une ville mixte, sur le point de s'émanciper petit à petit de sa tutelle soviétique. À l'instar de notre narratrice, qui apprend à composer avec toutes les influences contradictoires qu'elle reçoit, qui apprend à voir autrement qu'à travers son prisme manichéen, celui de la jeunesse. J'ai lu avec attention, et autant d'intérêt, cette jeune femme, qui se cherche, à travers sa mère, inaccessible et perdue, véritable figure lvivienne sacrifiée au nom d'une liberté collective, une jeune femme qui essaie de devenir autre chose que la pâle copie de sa mère.

Face à cette ville, l'union soviétique, l'ennemi, apparaît comme le monstre informe, cruel, qui dévore tout sur son passage ou les individualités n'existent pas, bourreau incontrôlable, tyran invisible néanmoins omniprésent, à sa couleur indélébile, à son odeur engorgée de sang. On ne sait plus vraiment si c'est un roman sur Lviv, une critique de l'ex-URSS, une saga familiale, tant les thèmes se fondent inéluctablement les uns dans les autres. Cette mère, Marianna, symbole d'une résistance, d'une révolution ukrainienne, porte la cocarde de cette volonté de liberté.

Żanna Słoniowska a su créer un judicieux parallèle entre ces deux familles, celle des aïeules et celle de la patrie, pour illustrer toute la complexité de l'Ukraine et la difficulté de grandir en son sein. À la fois ukrainiennes et polonaises, en même temps que citoyennes soviétiques, ces quatre femmes représentent ce qu'est cette population ukrainienne, ce pays qui a subi au fil des siècles les influences de ses voisins, polonais, allemands et russes. Une famille, matriarcale, avec ses propres contradictions, qui oppose les générations, où l'homme a progressivement disparu et les femmes sont le ciment de cette société.

Un roman résolument féministe. Les femmes, mises à l'honneur, derrière l'homme renvoyé au second plan, sont celles qui transmettent leur art, la peinture, le chant, l'écriture et la mémoire de ce que la famille a été, leur héritage familial, et patriotique. L'auteure s'en sert à sa façon, dans son écriture, pour créer un lien indéfectible avec ses personnages, résistantes et combattantes de mère en fille, chacune à leur manière. Chant des disparus, des assassinés, des victimes soviétiques, des sacrifiés, et surtout chant de liberté, la narratrice endosse l'étendard de sa mère et continue son oeuvre, pour une Lviv, une Ukraine libre. Non pas en chantant, mais en écrivant, et peignant

L'art est le fil conducteur de ce récit, vous l'aurez compris, celui qui permet de se trouver une raison de vivre, de se trouver, de pouvoir composer une vie, loin de la tristesse et de la platitude, de la monotonie du rouge assourdissant de la vie soviétique, de la vie quotidienne. L'art salvateur de cette vie déterminée par cette machine soviétique. J'ai eu plaisir à apprendre à commencer à connaitre ce pays, et cette ville, auxquels je suis totalement étrangère, la complexité de cette nation, qui comme tous les autres territoires de l'ex-bloc soviétique, a dû retrouver la voix de son identité propre, imprégnée malgré tout de cette influence. On ne sait plus vraiment si c'est un tableau que Zanna Sloniowska a voulu nous peindre, un opéra, un chant qu'elle a voulu nous faire entendre, peut être tout à la fois, en tout cas j'ai achevé ce livre les oreilles saturée de sa musique, les yeux agréablement gorgés de ses couleurs.

En revanche, aussi instructif que soit ce roman, j'ai trouvé l'écriture assez sèche, alors même que la narratrice parle de la perte de sa mère, comme si elle cherchait à prendre du recul en s'impliquant émotionnellement le moins possible. Elle m'a donné la sensation de vouloir à tout prix se détacher des sentiments qui la traversent afin de pouvoir mieux gérer son chagrin. Et que ce soit dans la peine, ou au contraire, dans l'amour, j'ai eu du mal à voir à percevoir réellement l'état d'esprit de la jeune ukrainienne, qui garde un ton plutôt formel tout au long du récit.

C'est un beau roman, qui porte la voix de femmes, porté par la voix d'une femme, celle de la fille de Marianna, de Lviv, qui voit un pays se reconstruite peu à peu, se retrouver une identité propre. Certes, notre narratrice ne possède pas la puissante voix de sa mère, mais le chant qu'elle nous transmet, plus doux, plus apaisant est peut-être le signe que la révolution est passée, et qu'il est temps d'aller de l'avant. On pourrait dire encore beaucoup de choses sur ce foisonnant récit, mais je vous laisse le soin de le découvrir par vous-même
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