AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782267031492
352 pages
Christian Bourgois Editeur (16/05/2019)
3.5/5   10 notes
Résumé :
Cinquième génération d’agriculteurs des grandes plaines du Kansas côté paternel, et énième génération de mères-adolescentes côté maternel, la journaliste Sarah Smarsh fait le récit de son enfance passée, pendant les années 1980 et 1990, dans une ferme à des dizaines de kilomètres de la ville la plus proche, Wichita. Par la description méticuleuse de sa vie quotidienne, les portraits qu’elle brosse des membres de sa famille et la manière dont elle envisage plus génér... >Voir plus
Que lire après HeartlandVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Regard réaliste sur la pauvreté rurale
*
Sarah, l'auteure , raconte, à travers un essai sociologique, son propre vécu (et son histoire) de la pauvreté au coeur du pays le plus riche du monde: les USA.
Un sujet épineux qui va faire grincer des dents outre-Atlantique, ça c'est sûr!
*
Le dispositif narratif de Sarah est original - raconter l'histoire à son bébé spirituel (pas encore né ou même jamais à naître). Elle déroule sur plusieurs générations l'existence de cette famille d'agriculteurs du Kansas (qui se confond avec la grande Histoire), de ces colons qui ont débarqué sur ces plaines fertiles balayées par les vents. de ces mères célibataires, blanches et condamnées à répéter le même schéma de vie. L'auteure va briser ce cercle.
On ne peut être qu'étonné que les américains parlent très peu de "classes sociales". Et que penser de ces personnes travailleuses et fondamentalement honnêtes, qui ne semblent pas pouvoir aller de l'avant. Face à des inégalités sociales (santé, éducation, justice).
Mais je reste aussi dubitative: aussi pernicieux qu'est le système économique américain, je peux le mettre en parallèle avec le notre. Dans nos campagnes françaises, où l'exode rural est assez fort, des familles vivent de la même manière.
Le rêve américain n'est pas pour tout le monde. D'après une étude récente, il a été ressorti que les nouvelles générations américaines ne sont pas plus heureuses (et satisfaites financièrement) que leurs aînés. le mythe du "way of life" dégringole de son podium.
*
Mais malgré le sujet brûlant et poignant, le récit ne m'a pas permis de créer un engagement émotionnel avec cette famille. Les descriptions quotidiennes sont monotones (et répétées) et un peu éparpillées (il n'y a pas de vraie trame). Ma lecture a été laborieuse :)
*
Ce qui est admirable, c'est que Sarah a sû s'extirper de ce bourbier socio-économique (elle a eu une vie heureuse finalement, sans violence parentale, et a eu un diplôme universitaire grâce à son acharnement et à sa fierté d'être une fille du Kansas rural)
*
(en écoute avec l'album de Flogging Molly "Life is good", un groupe du Kansas)
Commenter  J’apprécie          382
Les ancêtres de Sarah Smarsh se sont installés sur le sol américain au début du XIXe siècle et ont planté leurs racines dans la prairie du Kansas quand le gouvernement a offert une soixantaine d'hectares de terre aux immigrés qui avaient déposé une demande de citoyenneté .
Au fil du temps rien n'a pu les en chasser, ni les flèches des Pawnees, pas plus que le dust-bowl ou encore la Grande Dépression. En raison de leur profond attachement à cet endroit paumé, les générations de Smarsh ont continué à s'y succéder car même si l'argent vient à manquer leur besoins de base sont toujours satisfaits. Ce sont des travailleurs acharnés qui savent construire, faire pousser des légumes et chasser. Ils arrivent toujours à manger et avoir un toit.
L'auteur retrace leur histoire depuis celle de ses arrières grand-parents jusqu'à la sienne. C'est le récit d'un monde de précarité, de dur travail agricole et manuel sous-payé, de vies domestiques chaotiques, d'une pauvreté profonde et cyclique transmise de génération en génération. Sans dénigrer ni s'apitoyer, elle décrit un milieu où les hommes sont souvent portés sur la boisson et violents avec leurs épouses, les mères pas bien tendres avec leur progéniture, les enfants crasseux mais pas plus malheureux que les autres. A travers leurs portraits on sent poindre toute sa tendresse envers ces gens rudes, ces "bouseux" en santiags qui sont les siens.

Véritable immersion chez ces gens embourbés dans le fossé toujours plus profond qui sépare le rêve américain de la réalité, Hearland se lit à la fois comme le simple récit d'une vie de pauvres qui ont du mal à survivre mais aussi comme une critique sociale de la structure économique de l'Amérique du Nord et ce mélange des genres rend la lecture particulièrement agréable.
De façon assez originale Sarah Smarsh ancre son histoire familiale dans le contexte socio-économique et historique du pays tout en y introduisant une note purement littéraire lorsqu'elle s'adresse à une enfant imaginaire. Celle qu'elle aurait eue si elle n'avait pas décidé de briser le cycle de la maternité précoce qui touche les femmes de sa famille. Ce qui lui permet de ne pas finir femme au foyer mais d'être la première Smarsh à terminer ses études secondaires et à obtenir un diplôme universitaire.

Après avoir eu des coups de coeur successifs pour Alto Braco et Des orties et des hommes, j'ai été ravie de pouvoir poursuivre mon exploration du monde rural grâce à la masse critique non fiction.
Je remercie donc Babelio et les éditions Christian Bourgois pour cette nouvelle belle découverte.
Commenter  J’apprécie          245
Sarah Smarsh nous livre dans cet essai l'histoire de sa famille, des hommes et des femmes nés pauvres dans un pays riche et qui malgré des efforts démesurés meurent pauvres également, ceux pour qui le Rêve américain reste un rêve.
Sarah, comme sa mère et sa grand-mère avant elle, est le fruit d'une relation entre un homme et une femme, trop jeunes pour avoir un enfant, trop pauvres aussi, et qui n'ont fait que répéter un scénario familial «classique » dans lequel les femmes ont leur premier enfant à 16 ans.
Elle sera la première à mettre fin à ce déterminisme de classe et décide très jeune qu'un enfant ne viendra pas, trop tôt, bouleverser son existence et mettre fin à ses rêves. C'est à cet enfant, non né, qu'elle adresse son histoire.
Il est important de dire que cet essai est un véritable objet littéraire, qu'il se lit comme un roman.
Il dit comment l'Amérique a pendant des siècles niait l'existence de classes sociales, au principe que si l'on veut on peut, qu'il suffit de travailler dur. Si cela devient vrai pour Sarah Smarsh, c'est au prix d'efforts menées par plusieurs générations, notamment de femmes avant elle.
Il dit aussi la honte d'être pauvre, l'inégalité face aux soins de santé, face à l'éducation. Il explique l'incapacité pour une mère à aimer sa fille, pour un homme à ne pas être violent, pour quiconque à ne pas sombrer dans l'alcool, la drogue. Dans l'histoire de Sarah, il y a un père non violent et aimant, une première chance pour elle, et une grand-mère qui va lui offrir le réconfort d'un foyer fixe.
Sarah Smarsh ne fait pas de misérabilisme. Elle raconte les manques subis avec beaucoup de clairvoyance, de compréhension vis-à-vis des adultes qui l'entourent. Elle n'omet rien, y compris ce qui la rend heureuse, des petits riens, ses fiertés. C'est juste, poignant, révoltant parfois et ça se passe dans le pays le plus riche du monde.
Précipitez-vous sur ce livre si les systèmes économique et politique américain vous interrogent, parce que derrière tout cela il y a aussi des hommes et des femmes qui y contribuent en payant le prix fort et sans en retirer les fruits.
Commenter  J’apprécie          20
La journaliste, pour son premier roman particulièrement réussi et singulier, se sert de ses souvenirs d'enfance et des entretiens qu'elle a mené avec sa famille, pour retracé son histoire mais aussi celle des oubliés de l'Amérique.
Des hommes et des femmes les premiers jetés en pâtures au monde de la finance et du bénéfice. Mais les derniers à savoir qu'on empoisonnant leur terre, leur eau et leur corps. Un témoignage bouleversant de l'anéantissement du monde à qui on a préféré la loi du profit financier.

Le roman ne se présente pas tout à fait comme un journal, plutôt comme un récit, si ce n'est quelques interventions adressées à sa fille. Sa fille qui a toujours été là, comme quelque chose qu'elle devait protéger (se sentant, très jeune, responsable d'elle même) ou quelque chose de carrément mystique et déifié. Cette chose finit d'ailleurs plus ou moins à se matérialiser dans les pages de ce roman.

Très bien écrit, de détails qui disent tout. Description en 3 courtes phrases, une odeur, un geste, qui veut tout dire et vous jette instantanément le nez dans la ferme.
Des personnages plus vrais que nature, si vibrant qu'on oublie qu'ils ont été réels.

Un roman non linéaire, des vies racontées grâce à des retours en arrière nombreux mais qui illustrent très justement la certaine résignation des femmes de la famille de l'autrice. Elle évoque brillamment ce que c'est que d'être une femme blanche pauvre aux Etats Unis. Comme une lignée maudite de femmes blanches pauvres qui feront les mêmes erreurs sans que ce soit réellement de leur faute.
Commenter  J’apprécie          20
Son vécu lui permet une analyse parfaite, précise sur la vie de ces travailleurs pauvres, et sur les difficultés de survivre dans de telles conditions au coeur d'un pays le plus riche du monde sans être gagné par la honte.

Si jeune et déjà très lucide, sans pour autant renier ses origines, elle poursuivra ses études jusqu'à devenir journaliste. Un métier qui lui permettra d'aborder les questions économiques et sociales à travers des articles publiés dans le Guardian et le New-York Times, et aborder également toutes les inégalités économiques entre les différentes classes sociales.

Un sujet qui lui tient à coeur et qu'elle retranscrit magnifiquement avec beaucoup de compassion et de clarté dans ce premier livre Heartland qu'elle nous offre après quinze ans de dur labeur.

Un récit nécessaire face à cette Amérique qui oublie un peu trop facilement la classe ouvrière « pauvre“…



” Ce n'était pas que j'avais eu tort de me méfier des programmes gouvernementaux, j'ai soudain pris conscience, mais que j'avais eu tort de croire au rêve américain. C'était les deux faces d'une même pièce de monnaie truquée – l'une promettant une bonne vie en échange de votre travail et l'autre qui vous maintenait juste assez en vie pour que vous continuiez de travailler. “

Ce que j'en dis aussi plus personnellement :

Issue moi-même de la classe ouvrière, ayant subit de plein fouet la dictature d'une prof de français qui a mis fin à mon rêve de devenir professeur de français en me disant : Mlle, vous êtes fille d'ouvrier, vous serez ouvrière ! Je ne pouvais qu'être touché par ce récit même si je suis loin d'avoir vécu le même parcours que Sarah Smarsh. Mais il est clair que ce soit, en France, en Amérique ou ailleurs, chaque jour la classe moyenne travaille plus pour gagner moins et que l'on se trouve n'importe où dans le monde, il ne fait pas bon d'être pauvre…

Lien : https://dealerdelignes.wordp..
Commenter  J’apprécie          10

Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Il arrive que la personne qui conduit un camion-poubelle soit elle-même considérée comme un rebut. Le pire danger n'est pas le travail lui-même, mais la dévalorisation de ceux qui le font. Une société qui considère votre corps comme quelque chose dont on pourrait se passer vous infligera de la violence. Travailler dans un champ est une chose, être trompé par une société au sujet de l'innocuité d'un pesticides cancérigène en est une autre.
Commenter  J’apprécie          20
Mais la source de ma honte n'était pas un péché dont je me serais rendue coupable. la source était un mépris national pour toute personne dans le besoin, mépris qui est écrit en toutes lettres dans les lois de ce pays.
La preuve la plus éclatante du mépris de l'Amérique à l'égard de ceux qui sont dans la difficulté est sans doute sa manière d'appréhender les programmes d'aide sociale, présentés par les pouvoirs publics et dans le discours général comme un chose si abjecte que ma famille a toujours refusé d'en faire la demande, alors qu'elle y avait droit.
Commenter  J’apprécie          10
L'Amérique ne parlait pas de classes sociales à l'époque où j'étais enfant.
Commenter  J’apprécie          40

autres livres classés : kansasVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus

Lecteurs (32) Voir plus



Quiz Voir plus

Katherine Pancol ou Anna Gavalda

La consolante ?

Katherine Pancol
Anna Gavalda

10 questions
1 lecteurs ont répondu
Créer un quiz sur ce livre

{* *}