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Juliette Lê (Traducteur)
EAN : 9782266307734
336 pages
Pocket Jeunesse (05/05/2022)
3.95/5   467 notes
Résumé :
Comment vivre quand on ne ressent rien ?
C'est toute l'histoire de Yunjae, 16 ans. A cause d'une malformation de son amygdale cérébrale, son "amande", Yunjae ne comprend pas les émotions. Mais quand il rencontre Gon, un garçon rebelle, colérique et violent, commence une histoire d'amitié improbable. Une histoire qui les initiera à une autre façon de voir le monde...

Best-seller en Corée, plus de 600 000 exemplaires vendus (primé par le Changbi... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (103) Voir plus Ajouter une critique
3,95

sur 467 notes
Je dois dire que je suis vraiment contente, en tant que libraire jeunesse, de recevoir sur notre rayon ado étranger ce roman venu de Corée du Sud. Nous en avons vraiment très peu. Comme ce roman m'a rendue émotive, j'ai prit le temps de décanter le tout avant de me lancer sur cette critique et ce fut une bonne décision, car en l'analysant plus à froid, certains éléments me semblent moins attrayants, au final.


Yunjae nous narre sa vie, de ses quatre ans à ses quinze ans. Il nous explique souffrir d'Alexithymie, que l'on peut définir selon deux axes: La difficultés à pouvoir communiquer ses sentiments à autrui et l' incapacité d'identifier ses sentiments et de pouvoir les distinguer de ses sensations corporelles [ Cairn; Psychoptropes, 2006]. Un déficit de l'affect qui peut être aussi bien lié à un traumatisme qu'une sous-croissance de "l'amande", qu'on appelle aussi "amygdale". Celle-ci joue plusieurs rôles, comme de reconnaître et identifier les émotions, mais aussi un rôle d'alerte et de reconnaissance du plaisir. Donc, en clair, les gens souffrant d'alexithymie ressentent peu ou pas du tout leurs émotions, ont du mal à percevoir celles des autres, rêvent très peu, fantasment très peu et ont du mal à associer les éléments dangereux à la mémoire, donc ils peuvent se mettre en danger parce qu'aucun souvenir n'est associée à la peur. le garçon va devoir apprendre à se repérer dans ce monde rempli de codes et de conventions basés sur les sentiments et émotions, avec l'aide de sa mère. Vivant ensuite avec sa grand-mère comme troisième membre de la famille, Yunjae nous livre quelques anecdotes et passages de son enfance, avant le drame qui va le faire se retrouver seul. Lorsqu'un inconnu instable mentalement assassine sauvagement sa grand-mère et sa mère, qui sombre dans un coma long de plusieurs mois, l'adolescent se retrouve à gérer seul la petite librairie usagée de sa mère. À l'école, il est la cible de commérages, même les plus cruels. Mais les choses pourraient changer quand il prend l'habitude d'aller voir son voisin de palier, Monsieur Shim, qui devient son tuteur officieux, ainsi qu'avec l'arrivé d'un nouveau à son école, qui a une réputation de gars violent.


L'autrice évoque, à la fin du roman, qu'elle souhaitait parler de l'interaction entre deux "monstres", l'un ayant trop peu d'émotions et l'autre trop, au contraire. L'idée en soi est intéressante et je ne cacherai pas le fait qu'une fois lancée dans le roman, je l'ai terminé en une lecture. Néanmoins, et c'est après y avoir réfléchit, je me demande si on peut dire que cette "amitié improbable" était saine. Si par "trop d'émotion", on a plutôt un "trop de colère", donc une seule émotion. Et puis, je me suis aussi demandé s'il fallait impérativement avoir encore un personnage ultra-violent. On a souvent tendance, dans la littérature jeunesse, à traiter des héros masculins violents comme de pauvres petits enfants maltraités qui ne sont au final que le produit d'une société qui n'a pas suffisamment veillée sur eux. Sans banaliser le vécu de certains de nos ados, le hic que je vois dans ce genre de formule, c'est le fait de déresponsabiliser les comportements violents et même d'encourager à avoir pitié d'eux. C'est particulièrement notable dans les romances ados féminines. Alors, je m'interroge, parce que je constate encore une fois qu'un personnage ado subit la violence physique, verbale et même psychologique d'un autre ado qui ne sait pas gérer sa colère et cherche à entretenir une mentalité toxique du "plus fort" de la chaine alimentaire. Ici, le héro, en ayant cette particularité d'être émotionnellement restreint, ne souffre donc pas à proprement parler de la violence verbale ou psychologique - parce qu'il s'en moque. Cependant, il aura été tabassé à maintes reprises, que ce soit à coup de pied, à coup de poings ou en lui faisant des croche-pied. Ça rentre tout-à-fait dans l'intimidation et même les voies de faits. Mais pour une raison ou une autre, Yunjae cherche au contraire à s'en rapprocher. Même son de cloche du côté de Gon, ledit intimidateur. J'imagine qu'ils s'intriguaient mutuellement.


Petit focus sur le personnage de Gon: En bas âge, ses parents l'ont perdu dans un parc d'attraction. Sa mère sera décédée d'une maladie avant de pouvoir le revoir. D'ailleurs, quand le père de Gon le retrouve, il est si déçu par ce qu'il a trouvé avec Gon qu'il demande a Yunjae de prendre sa place pour les ultimes retrouvailles entre le fils et la mère, avant que celle-ci ne meurt. Gon a des comportements puériles, agressifs et il semble perpétuellement chercher l'attention. Surtout, il canalise très mal sa colère. Il a des problèmes avec l'autorité, que ce soit son père ou les instances scolaires. Une petite graine de bandit, en somme. Cela dit, si on suit l'autrice, on comprendra que Gon est en réalité très sensible et réactif. Il ne prétend pas être autre chose que ce qu'il est. Ce qui peut être un peu rebutant toutefois, c'est que ce "je suis comme ça" ressemble beaucoup plus à une mauvaise excuse pour ne pas vouloir changer qu'un réel trait de personnalité ( les traits de personnalité n'étant pas, par définition, changeables). Personne, à moins de traumas ou d'éducation, ne nait violent. Ce n'est PAS un trait de personnalité. On a donc pas à accepter socialement la violence de ces gens. Mais bien sur, il importe de se montrer disponibles à ceux ( et celles) qui feront le choix de changer. Bref.


C'est là que je deviens mitigée. Pour être honnête, j'ai senti qu'on cherchait à excuser Gon et son exécrable façon d'être, excusée par ses antécédents, peu claires, en fait, si on ne compte pas le fait d'avoir été "perdu". "Soyez ouverts, cherchez à le comprendre", nous évoque t-on, entre les lignes. Encore une fois, je suis bien au fait que la bienveillance et l'ouverture d'esprit sont des éléments capitaux pour favoriser l'aide aux personnes en détresse psychologique. Néanmoins, on ne peut pas "vouloir plus" que la personne. Si elle ne veut pas s'aider, ce n'est pas aux autres de vouloir pour elle. Dans le roman, j'ai senti que c'était là l'enjeu: Sauver Gon de lui-même. Je n'adhère pas à cette logique, parce qu'elle implique le sacrifice d'une autre personne. Ici, c'est Yunjae. Je n'exagère pas du tout, la fin nous l'illustre de manière limpide:
[Masquer] Yunjae prend un coup de couteau à la place de Gon, qui s'est placé dans une situation périlleuse tout seul. Et manque d'en mourir. [/masquer]


"Amande" me rappelle le roman "Dear Evan Hanssen", mais pas dans le bon sens. Les deux romans mettent en scène deux garçons dont l'un profite de l'autre. Et tout comme ce roman, "Amande" a été un succès dans son pays. Mais je me demande si, au delà du message de tolérance et de s'ouvrir aux ados qui vivent avec une différence, nous n'avons pas tendance à oublier que cela ne doit pas se faire dans un contexte toxique ou au détriment d'une autre personne. Dans "Dear Evan" , on a un ado qui, après imbroglio, est considéré à tort comme un ami d'un gars qui s'est suicidé. Et comme cela semble faire du bien autant à Evan que la famille du défunt, ce dernier porte le mensonge de leur amitié à des sommets. En clair, Evan s'est bâtit un réseau social sur le dos d'un ado suicidé. Dans "Amande", Yunjae se découvre des émotions entre autre parce qu'il a été "l'ami" d'un gars violent, qui lui même l'utilise pour passer ses nerfs. Encore une fois, je ne veux pas banaliser le vécu de certains de nos ados qui deviennent violents en réaction à des carences affectives et des sévices quels qu'ils soient, mais prétendre qu'il fait les "sauver", c'est faire fausse route. "Accompagner", "soutenir", "être attentif", oui, mais pas tout faire à sa place et certainement pas s'il faut souffrir pour ce faire. En outre, on parle vraiment trop peu des innombrables autres ados laissés pour comptes du fait d'être différents. C'est, il me semble, toujours miser sur le même groupe, celui des gars violents qui sont ou frôlent la délinquance. le plus difficilement 'secourable", qui plus est. de plus, pour en revenir au roman, je pense que la relation entre les deux ados n'avait pas forcément à passer par la violence physique comme moyen de rapprochement.


Ce rapport toxique va doucement s'amoindrir pour devenir une sorte de relation "amicale", où les deux ados se fréquentent seulement hors de l'école, surtout pour bavarder. Mais comme évoqué plus haut, Yunjae va tout de même se mettre en danger pour son "ami", alors je reste perplexe face à cette "amitié". Par contre, une relation que j'ai beaucoup aimée est celle de Yunjae avec le docteur Shim. On pourrait croire que c'est en grande partie à Gon que Yunjea se découvre des émotions, mais j'en doute, pour être franche. Gon est peut-être très sensible, son répertoire se borne à la "colère". le reste du temps, il est juste insultant et fait dans la psycho-pop à deux sous. C'est un personnage pas franchement sympathique. Mais le docteur Shim a réellement quelque chose à apporter à Yunjae et le fait de manière saine. Il est non seulement complètement ouvert d'esprit envers ce jeune en apparence froid et asocial, il est également patient, présent et réconfortant. Il vulgarise bien les concepts qui posent problème à Yunjae et il est altruiste. Il a réellement à coeur la sécurité et l'intégrité de l'adolescent, probablement en raison de son amitié pour la mère de celle-ci, mais il semble le faire de bon coeur. Si on doit quelque chose de la progression de sentiment de Yunjae, c'est surtout à lui qu'on le doit, je trouve.


J'ai également du mal avec la fin, expéditive et surtout, hollywoodienne. Était-ce nécessaire d'aller dans un tel extrême? Et je doute fortement que les émotions se construisent spontanément comme cela semble avoir été le cas à la fin, comme si elles étaient simplement des oeufs difficile à pondre. Je trouvais justement le concept du roman intéressant pour ça: l'idée que les émotions et leur identification pouvait être travaillées, que ce pouvait être de l'ordre de l'apprentissage, comme c'est souvent le cas pour les personnes autistes. Mais ici, ça me semblait tenir plutôt du miracle, ce qui est ma foi, fort peu crédible.


Pour les éléments positifs, je dirais que ça se lit tout seul. Il y a eu un énorme travail de la part de la traductrice du coréen vers l'anglais, qui se donne la peine de mettre les références coréennes en notes de bas de page et a fait prit grand soin de travailler les dialogues en fonction du bagage émotif de ses personnages. Ainsi, on sent le côté empirique et descriptif de Yunjae, pour qui les sentiments sont très abstraits, alors qu'on sent le ton vibrant et réactif de Gon. Là-dessus, il y a du beau travail. Découvrir le monde à travers le regard de Yunjae était en soi très intéressant. L'autrice y consacre beaucoup de temps, alors ne vous surprenez pas de trouver le début long. En même temps, cela nous permet d'apprécier la famille de Yunjae, la mère et la grand-mère, qui elles aussi étaient du genre colorés. le simple fait de voir la maman travailler dur avec son fils pour qu'il s'adapte à son environnement social et physique était touchant. Ce l'était néanmoins un peu moins quand on comprend qu'elle craint surtout le jugement des autres. Sauf que, c'est là une crainte justifiée, dans un monde où les gens passent leur temps à juger autrui, c'est donc difficile de lui en vouloir. Au contraire, la grand-mère semblait croire que le petit garçon pouvait bien être lui-même et a accepté assez bien la différence de son petit-fils. Elles se complétaient bien, au fond. C'était une famille atypique vraiment rafraichissante.


En outre, je conçois que le roman se veut une porte de réflexion autours de la différence. Nous avons encore tendance à ne pas savoir apprécié la diversité. Je pense aux introvertis, encore très mal comprit, aux minorités sexuelles et ethniques, aux autistes, aux personnes atypiques, aux gens ayant des syndromes, aux Intellos, aux Hypersensibles, aux doués, aux artistes, etc. Je me dis d'ailleurs que le personnage de Gon aurait pu être simplement ça: un atypique, un hypersensible ou juste un gars plus ouverts que les autres, au lieu de nous représenter pour la énième fois un délinquant en construction, largement sur-représentés en littérature jeunesse comme "personnage qui fait pitié". Il me semble que le message aurait été plus adroit et plus révélateur s'il n'était pas une furie qui déteste tout le monde. L'extrême de l'émotion n'est pas forcément la colère ou la rage, ou ce besoin stupide de dominer les autres, et je m'agace que cette logique prédomine encore, surtout concernant les personnages masculins et spécialement les personnages masculins ayant une enfance difficile. En revanche, je conçois que ce sont les gens patients, attentifs et bienveillants ( comme M.Shim) qui font une différence chez les ados différents et qui vivent du rejet de par cette même différence.


Il y a un petit constat que j'aimerais formuler: L'idée que les émotions peuvent passer par les gestes. Je remarque que Yunjae, quand il a perdu sa grand-mère, et que sa mère est plongée dans le coma, a prit des décisions surprenantes pour un ado atteint d'Alexithymie. Il a continué à aller voir sa mère, a prendre soin d'elle dans ses soins corporels, même légers. Il a cherché à tenir la librairie d'occasion. Il a cherché à développer ses aptitudes sociales. Ça n'a rien d'anodin, même Gon semblait incapable de penser aux autres, mais Yunjae, dans ses comportements et actions, avait, me semble-t-il, plus d'humanité que son "ami". Et contrairement à Gon, il était en meilleure posture pour "changer", dans le sens "d'évoluer", en dépit de son handicap. Peut-être ce besoin de prendre soin était par convention ou par apprentissage, mais ne sommes pas aussi le produit de nos actions que celui de nos pensées? Prendre soin de sa mère n'était-il donc pas une preuve d'affection et d'attachement?


Ah, oui et il y a une sorte de "premier amour" aussi, dans ce roman, mais là encore, ça me fait soupirer, car, évidement, on a un béguin typique des romans américains: le GROS béguin déraisonnable. Il aurait sans doute été plus cohérent d'avoir un béguin tout doux, progressif et moins intense pour un personnage comme Yunjae, mais on a un gros crush assez basique ici. Quoique je dis "basique", je reste fermement convaincu que toutes les personnes ne s'empêchent pas de dormir, manger, penser et vivre juste parce qu'ils ont un "béguin". Bon point pour la traductrice: elle a mit le mot "béguin" et non "amour". Il y a tout-de-même une sacrée différence entre un gros coup-de-foudre pas franchement rationnel et censé et un amour sincère et profond. Et cette "première" fois émotionnelle arrive aussi de manière expéditive à la fin du roman.


Enfin, il faut préciser que ce roman étant coréen, il tient compte de certaines spécificités du pays et de sa culture. Je pense au concept "d'adolescence" en Corée. On a assez bien établit en Amérique du nord et en Europe en général que les 14 ans et plus sont des "ados". Ils sont donc responsables de leurs actes et sont traités différemment des enfants sur le plan social et même scolaire. Ici, je constate que les "ados" coréens ne semblent pas être considérés comme chez nous. Ils sont appelés "enfants" et sont traités comme tels à l'école. Un peu comme chez les japonais, qui semblent eux aussi n'avoir que trois groupes: enfants, adultes et aînés. Gon et Yunjae ont pourtant 15 ans.


Donc, un roman qui a sa pertinence, mais qui aurait vraiment gagné à ne pas tomber dans le pattern quasi chronique du "sauver le bad-boy de lui-même parce qu'il refuse de faire l'effort de s'aider". Les auteurs et autrices américaines adorent ce genre de concept, mais je constate qu'il est populaire même en Asie. On aurait peut-être eu un meilleur équilibre si le début était moins long et la fin moins "fourre-tout". Reste que c'est génial d'avoir un roman qui a la saveur de la Corée, avec ses références, ses valeurs sociales. Et contre toute attente, il y a même eu des passages comiques, car sans s'en rendre compte , Yunjae porte un regard critique parfois sur les rapports entre personnes. Un avis mitigé, en somme.


Oh, et prenez le temps de lire les notes de l'autrice et de la traductrice, elles sont intéressantes.


Pour un lectorat adolescent, second cycle primaire, 15 ans+

**Pour les profs et les bibliothécaires, ont a la présence de termes injurieux et de plusieurs scènes violentes.
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Ce roman coréen est disponible à partir de 13/14 ans, Seon Yunjae souffre d'alexithymie. Il est dans l'incapacité à identifier ou exprimer ses émotions. Pour lui ses amandes appelés « amygdales » ne réagissent pas lorsqu'elles reçoivent un stimulus. Sa mère essaye de lui apprendre les « bons codes » de la société, avoir « les bonnes réactions ». Il est également très proche de sa grand-mère. Mais un jour un évènement tragique vient bousculer sa vie, il se retrouve seul. Une rencontre improbable avec Gon vient bousculer sa vie et le faire évoluer pour qu'il maitrise ses sentiments et s'ouvre plus aux autres.
Déjà bravo aux traducteurs car ce livre a été traduit en anglais et ensuite à partir de cette version en français. Pas facile de retranscrire les choses et faire ressentir l'absence de sentiment du personnage. Les bons mots ont été trouvés.
Le thème de cette maladie est original et correspond parfaitement à ce public que lui traverse des périodes où les sentiments bouillonnent
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Yunjae est un adolescent de 16 ans ne pouvant exprimer aucune émotion. Non pas parce qu'il a un coeur de pierre mais parce qu'il souffre d'une cruelle maladie : l'alexithymie. L'amande que nous avons dans le cerveau, appelée également amygdale cérébrale, lieu régulant toutes nos actions face aux émotions, n'est pas développée chez lui. Contre toute attente, il va se lier d'amitié avec un voyou, Gon, en qui il perçoit une « bonne personne ».

Je n'aurais jamais lu ce livre, catalogué « Young-adult », si une amie ne m'avait pas donné son avis éclairé et enthousiaste sur celui-ci. Et elle avait absolument raison : c'est bien écrit, sans pathos, avec fluidité. On a de l'empathie pour ce pauvre gosse mais aussi pour l'autre, le rebelle, le fameux Gon. On veut lui dire « non, ne fais pas ça », « ne dis pas ça » mais au final, ce personnage nous fuit entre les lignes et accomplit seul sa quête initiatique. C'est beau, le message est limpide, et ça se laisse lire en quelques heures. N'hésitez pas !
Lien : https://promenadesculturelle..
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COUP DE COEUR et pourtant rien ne le laissait présager!.
D'abord que ce roman coréen, étiqueté young-adult, se retrouve dans ma PAL est déjà une surprise, ensuite que je me laisse porter par cette histoire de 2 jeunes monstres, l'un insensible aux émotions, l'autre violent et en colère et que j'en vienne à le lire d'une traite en est pour moi une autre et de taille. Cerise sur le cadeau en lisant ici ou là les avis et commentaires apprendre que ce roman est un immense succès de librairie mondial et que c'est l'un des chanteurs du groupe BTS qui l'a conseillé à leurs millions de fan est un clin d'oeil non déguisé à ma fille qui les suit depuis leur début,
Ceci dit, ce roman est une pure merveille de sensibilité, de compassion et d'empathie vis à vis de tous ceux qui sont différents, marqués par la vie et qui essayent vaille que vaille de s'en sortir. Je ne connaissais pas l'alexithymie dont souffre Seon Yunjae mais j'ai accompagné comme je l'ai pu ce gamin, puis cet adolescent vers un monde où il pourra "être normal", j'ai aimé voir grandir l'amitié entre lui et Gon, en fait j'ai souri, pleuré, craint le pire au fil des pages. L'écriture de Won-Pyung Sohn est fluide, légère et profonde à la fois et excessivement bien mise en lumière par la traduction de Juliette Lê.
Voilà j'en ai dit assez j'espère pour vous inciter à lire ce roman, bonne lecture.
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J'ai tout de suite été intriguée par ce roman dont le titre prend tout son sens quand l'on découvre la particularité de Yunjae, un adolescent de 15 ans. En effet, en raison d'une défaillance de son amygdale cérébrale, son amande, ce dernier ne ressent pas les émotions, que ce soit la joie, la peine, la tristesse, l'émerveillement… Incapable de ressentir une émotion aussi importante que la peur, il aura d'ailleurs parfois des comportements à risque qui m'ont donné quelques sueurs froides ! Sa différence, Yunjae semble l'accepter, tout comme sa grand-mère, mais pas vraiment sa mère qui tente de lui apprendre « à être normal » afin de lui épargner la douleur du rejet et de la haine. Alors à défaut de les comprendre, l'adolescent a intégré depuis son enfance les codes sociaux et a appris les réponses qu'on attend de lui face à une situation donnée.

Mais un jour, un drame survient et Yunjae ne peut plus s'appuyer sur sa mère pour l'aider à se fondre dans masse. Il pourra heureusement compter sur le soutien d'un ami bienveillant de sa mère dont l'histoire personnelle m'a beaucoup touchée. Elle illustre l'importance d'accorder de l'attention à ses proches pendant qu'il en est encore temps. de fil en aiguille, l'adolescent va également nouer d'autres liens, notamment avec Gon, un adolescent perturbé que le destin a placé de manière bien singulière sur sa route…

Une amitié improbable va se nouer entre ces deux adolescents qui ne pourraient pourtant pas être plus différents l'un de l'autre. Yunjae est froid et rationnel à l'excès, ne ressentant aucune émotion même quand le pire se passe sous ses yeux ou qu'il se fait tabasser sans raison. Gon est un concentré d'émotions brutes et brutales qui ne demandent qu'à exploser. Victime une grande partie de ma scolarité de brutes comme Gon qui tapent et agressent au lieu de parler et d'exprimer leurs difficultés, j'ai eu un peu de mal avec ce personnage, du moins au début. Mais à mesure que l'on découvre son passé compliqué et les erreurs de son père, on ne peut s'empêcher de compatir à sa douleur, et de ressentir le besoin de l'aider à avancer dans la vie plus sereinement.

Si cela demande un effort de la part des lecteurs, Yunjae arrive, quant à lui, spontanément à voir au-delà de la violence de Gon. C'est probablement la raison pour laquelle ce dernier tente de se rapprocher de lui, même si c'est à sa manière, c'est-à-dire avec une certaine réserve, pudeur, brutalité et maladresse. Leurs échanges semblent souvent banals, mais ils témoignent du mode de communication particulier liant ces deux adolescents qui vont évoluer au contact l'un de l'autre malgré, ou plutôt grâce à leurs différences.

La route sera semée d'embûches, la société ayant tendance à juger et rejeter ceux qu'elle ne comprend pas, et à condamner sans chance de rédemption ceux qui tentent de changer. Mais elle sera également chargée de beaux et émouvants instants, d'amitié, d'amour sous différentes formes, d'échanges dont il faut parfois deviner la réelle portée, d'émotions intenses, de dangers, de tension, de doutes, d'espoir… Won-Pyung Sohn nous offre ici un texte fort dont la force réside, entre autres, dans la personnalité de son protagoniste qui n'éprouve pas d'émotions, mais qui se révèle incroyablement doué pour en susciter chez les autres ! Curiosité, défiance, empathie, amitié, amour… impossible de rester de marbre devant Yunjae, un peu comme si son absence d'émotions permettait à chacun de ressentir avec encore plus d'intensité les siennes.

En plus de cet adolescent qui s'est fait une place dans mon coeur, j'ai apprécié le ton détaché de la narration qui reflète parfaitement l'état d'esprit de Yunjae et son schéma de pensée. Il constate, évalue et émet des hypothèses selon ce que sa mère lui a appris ou ce qu'il a expérimenté, mais il ne juge jamais les autres. Il a ainsi une manière bien à lui d'être détaché tout en étant présent au monde, ce qui le rend bien plus ouvert d'esprit que la plupart des gens. Et puis, au fil des épreuves, on le voit évoluer et nous révéler d'autres facettes de lui-même, jusqu'à une fin qui m'a donné quelques frissons autant de peur que d'émotions pures.

L'évolution de Gon est également convaincante, l'autrice nous permettant petit à petit de découvrir un personnage bien plus complexe et profond qu'on pourrait le penser. Il y a d'ailleurs une fragilité en lui, que sa brutalité ne saurait complètement cacher, qui le rend étrangement attachant et émouvant. À travers ces deux personnages qui trouveront chacun en l'autre la force d'avancer et d'exister, l'autrice interroge avec beaucoup d'intelligence la notion toute relative de normalité, mais aussi le rôle de la société dans l'émergence de la violence.

En conclusion, Amande est un roman fort qui met en scène un personnage incapable de ressentir les émotions, mais pourtant terriblement attachant et émouvant. Mais Amande, c'est aussi l'histoire d'un drame qui va conduire un adolescent sur la route du changement, et lui permettre de réaliser qu'amygdale cérébrale défaillante ou non, lui aussi est capable de nouer des liens avec autrui en étant lui-même. Porté par une écriture détachée et pourtant percutante, un récit d'amitié, d'espoir et d'acceptation de soi qui emportera adultes et adolescents par sa justesse et son étrange beauté.
Lien : https://lightandsmell.wordpr..
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critiques presse (1)
Ricochet
12 août 2022
Un récit psychologique riche et complexe, qui décrit avec réalisme le handicap de son héros privé d’émotions. Dommage que la fin se termine si bien... Malgré ce léger bémol, ce roman vaut largement la peine qu’on s’y attarde.
Lire la critique sur le site : Ricochet
Citations et extraits (99) Voir plus Ajouter une citation
_ As-tu entendu l'histoire de Diogène? Tu me fais penser à lui. Lorsque Alexandre le Grand demande à Diogène quelle faveur il peut lui accorder, Diogène lui répond de s'écarter parce que son ombre lui bloque le soleil.
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Pour emprunter à Mamie sa définition d'une librairie : c'est un endroit rempli de dizaines de milliers d'auteurs, morts ou vivants, qui habitent les uns à côté des autres. Mais les livres ne font pas de bruit. IIs restent silencieux jusqu'à ce qu'on en tourne les pages. A cet instant-là, les histoires s'en échappent, calmement, fourmillant de détails, juste assez à la fois pour que je puisse les recevoir.
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Les gens ferment les yeux devant une tragédie qu'ils jugent lointaine, au prétexte qu'il n'y a rien qu'ils puissent faire. Et pourtant, ils ne font rien non plus lorsqu'un évènement se déroule sous leurs yeux, car ils ont trop peur. La plupart des gens sont capables de ressentir, mais ils ne font rien. Ils disent compatir, mais ils oublient très rapidement. De mon point de vue, je ne dirais pas que cela relève vraiment de la ''compassion''.
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Nous n'aurions pas pu être plus différents l'un de l'autre. Moi, j'étais trop ignorant. Et Gon, ne voulant pas admettre qu'il était vulnérable, faisait semblant d'être fort.
Les gens trouvaient qu'il était dur à comprendre. Je n'étais pas d'accord avec eux. Ils n'essayaient pas, voilà tout.
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Pour emprunter à Mamie sa définition d'une librairie : c'est un endroit rempli de dizaines de milliers d'auteurs, morts ou vivants, qui habitent les uns à côté des autres. Mais les livres ne font pas de bruit. IIs restent silencieux jusqu'à ce qu'on en tourne les pages. A cet instant-là, les histoires s'en échappent, calmement, fourmillant de détails, juste assez à la fois pour que je puisse les recevoir.
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