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EAN : 9782251800202
161 pages
Les Belles Lettres (17/02/2012)
3.72/5   48 notes
Résumé :
Admirable traduction rythmée d’une tragédie méconnue, inspirée d’un épisode de la guerre de Troie, et qui fut jouée en 409 avant J.-C., inspira Eschyle et Euripide, et plus près de nous André Gide.
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J'aime beaucoup ce Philoctète de Sophocle. C'est une pièce assez atypique que je peine à appeler tragédie. Si j'avais à la positionner absolument dans une case précise, ce qu'en soi je répugne toujours à faire, je la qualifierais plus volontiers de drame psychologique.

Ce n'est pas — et de loin — la pièce la plus connue de Sophocle et pourtant, elle présente de nombreuses qualités, même pour un lecteur du XXIème siècle après cet hypothétique inconnu qu'on nomme Jésus-Christ (hypothétique inconnu du temps de Sophocle j'entends, lui qui écrit environ quatre siècles avant).

Il n'est sans doute pas inutile de rappeler quelques éléments de la biographie de Philoctète. C'est un ancien compagnon d'Héraclès (Hercule pour les latinistes) qui, à la mort de ce dernier, a hérité de son arc, un arc aux pouvoirs semi-magiques, qui jamais ne rate sa cible, ce qui en fait donc un arsenal redoutable à lui tout seul.

Philoctète, d'une droiture morale irréprochable (même un peu psychorigide par moment) était lié par un serment, celui de ne jamais révéler l'endroit de la sépulture du grand héros dont il tient son arc. Or, par l'entremise d'un oracle de Delphes, (les oracles de Delphes, à l'époque, c'était quelque chose, croyez m'en) les Grecs acquirent la conviction qu'ils ne s'empareront de Troie que si Philoctète leur révèle l'endroit précis de cette tombe.

Notre vaillant archer, tiraillé entre ces deux exigences adverses, ne voulant trahir ni son serment, ni les Grecs, de mauvaise grâce désigne du pied l'endroit. Grand mal lui en prit car aussitôt, la nymphe qui faisait sentinelle sur le tombeau, transmutée en vipère, injecte une portion de venin propre à terrasser un cheval dans le talon du malheureux Philoctète.

Souffrant horriblement, ayant le pied purulent et proche de la putréfaction, hurlant de douleur constamment. Philoctète devint une gêne pour ses compagnons d'arme. Et pour reprendre les remarques d'un certain président, n'eût été que le bruit, passe encore, mais l'odeur absolument insoutenable de la mauvaise blessure pousse Ulysse, oui, oui, le vrai Ulysse, ce héros incomparable, à accomplir un acte assez peu recommandable.

Avec quelques hommes, ils emmènent le braillard putride loin sur une petite île isolée et désolée, livré à son triste sort. Et pendant dix ans, Philoctète se traine lamentablement sur un pied parmi cette misère de pierres, vivant des seules ressources de son arc, à maudire tant des dieux qui lui ont infligé pareille épreuve que d'Ulysse, dont il ne rêve que de la mort.

C'est à ce moment précis que débute la pièce de Sophocle. La guerre de Troie n'en finit pas et bat même son plein. Seulement, les Grecs s'étant emparés d'un Troyen visionnaire dont les prédictions s'avèrent toujours exactes, Hélénos, ont désormais acquis la conviction qu'ils ne remporteront la victoire que si Philoctète lui-même revient combattre avec son arc.

C'est donc gênant pour Ulysse, lui qui l'a lâchement abandonné à son pied purulent sur un rocher oublié. Celui-ci demande donc son aide à un preux guerrier, Néoptolème, le fils du probe et vaillant Achille et qui se caractérise par la même sincérité et honnêteté morale que son père.

Ulysse sait que seul quelqu'un tel que lui peut infléchir le borné et têtu Philoctète dans son refus d'aider jamais les Grecs à nouveau après le revers qu'ils lui ont infligé.

J'ai tenu à vous faire cette longue présentation pour que vous mesuriez bien tout l'enjeu de la pièce et qui est selon moi intéressant. Tout va donc se résumer à convaincre quelqu'un dont on s'était fait un ennemi de venir combattre à nos côtés pour emporter une victoire dont l'autre n'a que faire.

Drôle de challenge pour Néoptolème, car, si tant est qu'il parvienne à décider Philoctète de prendre son parti, encore faudra-t-il parvenir à rabibocher Ulysse et Philoctète, et ça, c'est presque aussi compliqué que de faire coopérer les O'Timmins et les O'Hara des Rivaux de Painful Gulch !

Ce qui m'a donc intéressée ici, ce sont les aspects psychologiques et philosophiques soulevés. D'une part, l'ingratitude et la trahison endurées par Philoctète ce qui engendre fatalement rancune et désir de vengeance. Et d'un coup, me reviennent tant de cas d'ennemis héréditaires et héréditairement inconciliables, comme Israéliens et Palestiniens, par exemple.

Le message de Sophocle est ici intéressant. Selon lui, on se punit soi-même si l'on refuse l'opportunité d'une main tendue par l'ennemi, sous prétexte que les vieux comptes ne sont pas encore soldés, sous prétexte que l'on a été martyr et pas encore vengé.

J'y vois pour ma part une vraie philosophie de vie, à savoir que c'est de présent et d'avenir que nos vies doivent faire leur pain quotidien, les blessures du passé ne doivent pas être oubliées, mais ne doivent pas non plus compromettre les bonnes volontés présentes. Je vous laisse méditer sur ce message de sagesse vieux de vingt-cinq siècles...

J'hésite donc entre trois et quatre étoiles car cette oeuvre, comme toutes les tragédies grecques, souffre un peu de la couche de poussière qui la recouvre, mais, si l'on se donne la peine de la gratter un peu du bout de l'index, présente aussi des brillances insoupçonnées. Mais ce n'est bien évidemment qu'un avis, c'est-à-dire, pas grand-chose.
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De quoi cause-t-on ici ?

Eh bien d'une péripétie tardive et capitale de la guerre de Troie. Ça fait dix ans que celle-ci traîne et on n'en voit toujours pas le bout. Mais un troyen capturé, Hélénos, quelque peu devin, affirme aux Grecs que seuls le retour de Philoctète et de son arc infaillible dans leurs rangs assurera la chute de Troie.
Le problème, c'est que les Grecs ont abandonné Philoctète sur une île déserte il y a dix ans (aussi) car, atteint d'un mal imposé par une déesse, mal purulent et nauséabond et hurlant sans cesse, il abîmait le moral des guerriers. Il ne va donc probablement pas accepter de revenir avec un sourire sur le visage.

C'est donc Ulysse qui accepte de s'y coller. Il débarque sur l'île en compagnie de Néoptolème (fils d'Achille, également indispensable à la chute de Troie selon Hélénos) et monte un stratagème dont il a le secret : Néoptolème va se présenter à Philoctète en criant son propre dépit envers les Grecs qui ont osé remettre les armes de son père à l'infâme Ulysse. Il va gagner sa confiance, accepter de le prendre à son bord avec l'arc et de le ramener chez lui… alors qu'en réalité il le ramènera à Troie.
Le stratagème fonctionne mais Néoptolème est vite pris de remords. Philoctète fait pitié et la ruse est véritablement indigne d'un guerrier et du sens moral. Juste avant d'embarquer, le fils d'Achille déballe tout à Philoctète qui entre dans une grande fureur et refuse tout net d'embarquer pour aider ses bourreaux.

Cette pièce n'est pas marquée par l'action. Elle l'est en revanche par la manipulation et le remord qu'elle génère chez Néoptolème d'abord, puis par les tentatives de conviction sincère que ce dernier déploie envers un Philoctète déchiré entre sa haine envers les Grecs et sa peur de devoir rester seul sur l'île jusqu'à la mort. Philoctète est un personnage très intéressant, mélange de Robinson Crusoé et d'Edmond Dantès qui a vécu dix années d'un enfer douloureux et solitaire. Il passe sans cesse de la colère à la frayeur comme une balle de ping-pong ballotée entre deux raquettes. L'évolution de Néoptolème de l'acceptation de son devoir sacré envers les Grecs vers la compassion envers Philoctète et l'abjection de son propre comportement est très bien retranscrite. Et on a à nouveau un portrait d'Ulysse qui est plutôt à charge : fourbe, lâche, adepte de l'adage « la fin justifie les moyens ». Plus je lis de l'antique, plus Ulysse perd des points dans mon top 50 des héros.

La fin est un peu décevante car l'impasse n'est pas dénouée par les hommes présents. Il faut l'intervention d'un dieu (en l'occurrence Héraclès qui a intégré l'Olympe et a jadis confié son arc à Philoctète) qui siffle la fin de la récré et indique la bonne direction à tout le monde : A Troie on vous dit ! ni une ni deux Philoctète obéit et accompagne Néoptolème. Fin bâclée quoi !
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Philoctète est une tragédie particulièrement intéressante à lire suite à Ajax. Ajax constitue la première pièce que l'ont ait conservée de Sophocle, Philoctète est en revanche beaucoup plus tardive et les deux semblent presque se répondre.

Sophocle se tient à un sujet proche d'Ajax, le destin individuel d'un héros fracassé et humilié pendant la guerre de Troie. À ceci près que, si Ajax était pris d'une folie furieuse d'une nuit et mettait rapidement fin à son humiliation, Philoctète subir la sienne durant dix ans - voire durant toute sa vie, vu que la fin reste très ouverte sur le destin psychologique du héros.

Sophocle n'est pas le premier à avoir écrit une tragédie sur Philoctète (ni même le dernier), on sait qu'Eschyle et Euripide, au moins, s'étaient attelés au sujet ; mais comme souvent, il n'en reste pas grand-chose, sinon des résumés. Ce qui nous permet de savoir que Sophocle - mais c'est presque une évidence - a traité le personnage différemment. Il a de plus modifié plusieurs éléments concernant le Philoctète que l'on connaît habituellement ou tels que l'avaient conçus Eschyle et Euripide. Il a bien été le compagnon d'Héraclès, il a bien hérité de ses armes, il a bien fait partie de l'expédition pour Troie, il a bien été touché au pied par une des terribles flèches d'Héraclès qui a causé un ulcère tellement infect que ses compatriotes, n'en supportant pas l'odeur, l'ont relégué loin d'eux, sur l'île de Lemnos. Mais ici, l'île de Lemnos n'est pas habitée, ce qui laisse Philoctète complètement seul, il n'y reste pas un an mais dix, ce qui change encore davantage la donne. Et Sophocle a introduit le personnage de Néoptolème, le fils d'Achille, auprès d'Ulysse. Néoptolème dont la jeunesse est un élément particulièrement important.

En effet, alors que la guerre de Troie s'enlise depuis des années, un oracle annonce aux Grecs que seul Néoptolème pourra faire tomber la ville, et encore, uniquement avec les flèches d'Héraclès, détenues par Philoctète. Donc, on ne peut se passer ni du jeune, ni du vieux héros. Ce qui pose forcément un problème, vu que non seulement on a envoyé Philoctète sur Lemnos, mais qu'il est dangereux de s'approcher de lui (une certaine rancune envers ses anciens compagnons l'habite...) à cause de ses flèches mortelles. le ramener de force paraît impossible, donc, devinez qui peut bien se charger d'aller le chercher en utilisant la ruse ? Ulysse, ça va de soi. Qui emmène avec lui le jeune Néoptolème, doté d'une certaine pureté morale et d'une capacité réelle de compassion, mais dont l'âge le rend facilement sensible aux discours d'Ulysse.

Toute la tragédie va donc porter sur la dualité d'un héros usé, pathétique, en loques, et un artisan de la ruse, entre un héros rejeté, oublié de tous, et celui qui incarne l'avenir, entre le sens de l'honneur et un pragmatisme mis en oeuvre pour gagner la guerre, entre le besoin indéfectible pour l'ancien compagnon d'Héraclès de conserver sa dignité, quoiqu'il lui en coûte (et ici, il s'agit pour Philoctète de rester toute sa vie à Lemnos) et les fluctuations morales d'un héros encore bien jeune.

Les affrontements verbaux ne sont pas aussi jubilatoires que dans Ajax. Leur rôle est de faire ressortir toutes les oppositions que je viens de mentionner, de mettre en exergue aussi bien la situation pathétique (ce que souligne beaucoup le chœur) et sans issue de Philoctète, que la compassion et, malgré quelques tergiversations, la droiture de Néoptolème, ainsi que, mais dans une moindre mesure - d'autant que les trois tragédiens grecs nous y ont habitués - la position que défend Ulysse.

Le reproche que je ferai à la pièce, c'est l'utilisation d'un deus ex machina alors que, avec la décision en faveur de Philoctète et contre Ulysse qu'a prise Néoptolème, la tragédie s'enlise dans une non-résolution à la situation tragique : comme on sait - et le public grec du Vème siècle le savait encore bien mieux que nous -, que les Grecs vont faire tomber Troie tel que ça a été prédit, il est impossible qu'Ulysse ne ramène pas Philoctète avec lui. Il faut donc trouver une façon d'en terminer qui colle avec le mythe, et hop, deus ex machina !

Mais ma dernière remarque concerne les dieux : Philoctète en appelle à Zeus, demandant s'il a mérité le sort lamentable et méprisable qu'on lui réserve. Les dieux sont-ils responsables du sort de Philoctète, et si oui, pourquoi ? On ne sait pas. On ne sait pas si leurs décisions ont une influence décisive sur le destin individuel des humains, et on ne sait pas quels mystères recèlent ces éventuelles décisions. Ce qui n'empêche pas, en général, les personnages de Sophocle d'essayer d'aller envers et contre tout pour contrer le destin qui semble leur être imposé de façon aléatoire. Ce qui est bien le cas ici ; mais si Ajax réussissait à conserver son honneur par le suicide, qu'en est-il de Philoctète ?



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Philoctète a été abandonné sur l'île de Lemnos par les armées achéennes: la blessure qu'il a au pied dégage une odeur tellement insoutenable et ses cris de douleur sont si insupportables que , lâchement, les siens l'ont livré à la solitude et à la sauvagerie des lieux et ont fait voile ailleurs...
Mais Philoctète a les armes d'Héraklès qui seules assureront, d'après les oracles, la victoire finale des Grecs et la chute de Troie. Il faut donc les récupérer.
Ulysse aux mille ruses - pas dans son plus beau rôle, ici- en trouve donc une, bien lâche et bien sournoise, pour venir à bout de la rancune du héros blessé à l'égard de des siens et lui faire lâcher les armes fameuses : il lui envoie un petit jeune, bien sous tous rapports, vierge de tout conflit, qui n'a pas participé aux combats mais porte un grand nom: Néoptolème -ou Pyrrhus- fils du bouillant Achille...avec pour mission de duper Philoctète et de lui soutirer les armes.
Le petit doigt sur la couture ...de la tunique, Néoptolème s'exécute..mais son côté gentleman répugne à la besogne. En effet, il doit feindre de s'être brouillé lui aussi avec les Grecs pour mieux gagner la confiance du malheureux Philoctète..

.La partie est presque gagnée...quand Néoptolème, dégoûté du rôle qu'on lui fait jouer et attendri par le malheur et la sincérité de Philoctète qui croit enfin avoir trouvé un ami, lui avoue tout: la ruse, le mensonge, la manipulation..

La tragédie n'est pas ici dans la mort programmée d'un héros désigné à la vindicte divine : elle est dans l'horreur de la trahison et du mensonge au coeur même de ce qui fait la plus haute valeur de ces guerriers grecs: la "philèia" , l'amitié.

Philoctète peut-il croire encore, après cette seconde trahison, à la société des hommes? à la fraternité des armes? au courage et à la force morale de ses anciens compagnons?Peut-il encore croire à l'humanité?

Celui qui sauve tout dans cette tragédie c'est le beau personnage de Néoptolème -loin du Pyrrhus qu'il deviendra, en changeant de nom, chez Racine-: c'est un jeune homme beaucoup plus que bon chic, bon genre: un homme tout en sensibilité, un guerrier conscient de l'honneur de son nom et de celui de son bras, en un mot, un honnête homme aurait dit Montaigne.

Que les armes soient finalement récupérées et qu'une des flèches , données à papa Achille, dit la légende, transperce Pâris, le fauteur de guerre, n'a que peu d'importance.La pièce reste une tragédie terrible.

Les Grecs ne sortent pas grandis de cette manoeuvre honteuse et le dénouement, sans mort , est plein de noirceur et d'amertume...
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Que personne ne bouge ! Personne ne meurt ! Avec Philoctète, Sophocle nous épargne les assassinats cruels, les suicides grandiloquents et les représailles vengeresses. Pour autant, on ne peut pas dire qu'on se repose… Si la mort n'est pas toujours belle à voir, la vie ne l'est pas davantage, surtout lorsqu'elle s'acharne sur un personnage en particulier.


Ainsi en est-il de Philoctète. En route pour Troie à bord d'un bateau, il se tire par inadvertance une flèche dans le pied. le pied se gangrène et pour ne pas finir ensevelis sous des fragrances infâmes, les compagnons de Philoctète abandonnent le malheureux sur l'île déserte de Lesbos. Au moment où nous le découvrons dans la tragédie de Sophocle, dix années se sont écoulées depuis cet accident. On imagine aisément que toutes ces années ont permis à Philoctète de nourrir une haine sans faille pour ses compagnons de voyage… mais voilà que ceux-ci désirent désormais l'extirper de son île déserte pour le rapatrier vers Troie. Compassion ? Remords ? Que nenni ! Un oracle a prédit que Troie ne pourrait être prise sans Philoctète et ses fameuses flèches confiées par Héraclès.


Parmi ces fameux compagnons –qu'on préfèrerait ne pas avoir- se trouve Ulysse. Il débarque sur l'île de Lemnos en compagnie de Néoptolème, fils d'Achille, qu'il persuade d'aller à la rencontre de Philoctète pour l'attirer dans un bateau en direction de Troie. La ruse est de rigueur… le brave Néoptolème s'oppose de tout coeur à cette trahison mais trop obéissant pour refuser de se soumettre aux ordres d'Ulysse, il obtempère malgré tout. La ruse fonctionnera-t-elle ou non ? Philoctète embarquera-t-il finalement pour Troie ? Découvrira-t-il la machination dont il a été la victime ? Êtes-vous certain que personne ne mourra ? (allez, rien qu'un cadavre, pour le plaisir !)


Si la tragédie s'inscrit, comme d'habitude avec Sophocle, dans les corps et les chairs meurtris, la pièce de Philoctète insiste particulièrement sur l'aspect psychologique de ses personnages. Les ruses déployées pour contrer les émotions sont bientôt détournées par de nouvelles et imprévisibles réactions –grandiloquentes, comme à leur habitude.


Pour moi qui ne suis qu'une hérétique, pour moi qui ne connais de la légende de Philoctète que cette version donnée par Sophocle –et qui ne peux donc la comparer à aucune autre-, je ne lui trouve qu'une valeur mythologique et historique. La lecture n'est pas désagréable mais n'enchante pas non plus. Elle ne provoquera pas d'étonnement, ni même de plaisir particulier. Même si Philoctète, Ulysse et Néoptolème sont des êtres humains, ils semblent si désincarnés qu'on lit leurs aventures comme on regarderait des dieux s'affronter dans le ciel, très loin de nous. Si loin qu'ils nous échappent…
Lien : http://colimasson.over-blog...
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Citations et extraits (25) Voir plus Ajouter une citation
NÉOPTÉLÈME
Que m'ordonnes-tu donc, si ce n'est de mentir ?
ULYSSE
Je dis que tu dois te saisir de Philoctète par ruse.
NÉOPTÉLÈME
Pourquoi le tromper plutôt que le persuader ?
ULYSSE
On ne le persuadera pas, et tu ne pourras te saisir de lui par la force.
NÉOPTÉLÈME
Est-il si orgueilleusement sûr de ses forces ?
ULYSSE
Ses flèches donnent inévitablement la mort.
NÉOPTÉLÈME
Il n'est donc pas d'un homme brave de l'approcher ?
ULYSSE
Tu ne le prendras jamais que par ruse, comme je le dis.
NÉOPTÉLÈME
Mais tu ne penses donc pas qu'il est honteux de dire des choses fausses ?
ULYSSE
Non, si le mensonge apporte le salut.
NÉOPTÉLÈME
De quel front ose-t-on parler ainsi ?
ULYSSE
Quand on agit pour un profit, il ne convient pas d'hésiter.
NÉOPTÉLÈME
Quel profit ai-je à ce qu'il vienne à Troie ?
ULYSSE
Ses flèches seules prendront Troie.
NÉOPTÉLÈME
N'est-ce donc pas moi, oui, moi, comme il est dit, qui la prendrai ?
ULYSSE
Ni toi sans elles, ni elles sans toi.
NÉOPTÉLÈME
Si la chose est ainsi, il faut nous en saisir.
ULYSSE
Si tu fais cela, tu y auras un double avantage.
NÉOPTÉLÈME
Lequel ? Dis, et je ne refuserai point d'agir.
ULYSSE
Tu seras tenu à la fois pour habile et brave.
NÉOPTÉLÈME
Allons ! j'agirai et mettrai toute honte de côté.
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ULYSSE - Aucune chance de le persuader ! Et de vive force, tu ne l'auras pas.
NEOPTOLEME - Il a donc de si puissantes raisons d'être assuré de ce qu'il peut?
ULYSSE - Oui: des flèches que nul n'évite, et qui rayonnent la mort.
NEOPTOLEME - Mais alors, avec un tel homme, les approches mêmes ne sont pas sûres?
ULYSSE - Non, à moins de le prendre par ruse, comme je te dis.
NEOPTOLEME - Il n'y a donc pas de honte, selon toi, à dire des mensonges?
ULYSSE - Non, si le mensonge permet de se tirer d'affaire.
NEOPTOLEME - Mais quel front faudrait-il pour oser un tel langage?
ULYSSE - Quand ça rapporte, il n'y a pas à hésiter.
NEOPTOLEME - Et qu'est-ce que cela me rapportera qu'il vienne sous Troie?
ULYSSE - Son arc, ses flèches sont la perte de Troie. Eux seuls.
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ULYSSE : Moi aussi, quand j'étais jeune, j'avais la langue paresseuse, le bras toujours prêt à agir. Aujourd'hui, expérience faite, je vois que ce qui mène tout, c'est la langue et non les actes.
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LE CHŒUR
À la vérité, j'ai pitié de lui, car personne ne s'en inquiète et le malheureux n'est consolé par l'aspect d'aucun mortel ; mais toujours seul, il souffre d'un mal affreux, et il va errant, en proie au désir toujours déçu de toute chose nécessaire. Comment le malheureux résiste-t-il ? Ô industrie vainement habile des mortels ! Ô misérables générations des hommes pour qui la vie mauvaise passe toute mesure !
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PHILOCTÈTE.

Je veux seulement saluer une dernière fois ces lieux. Adieu, cher antre, mon asile! adieu, nymphes des eaux qui arrosent ces prairies! Adieu, bruit retentissant de la mer brisée contre les rochers, et dont l'écume, poussée par le Notos, mouilla souvent ma tête, souvent aussi le mont Hermaeon (145) me renvoya ta voix puissante, comme un écho des cris que m'arrachait la douleur. Et vous, 401 fontaines d'Apollon, que j'avais cru ne quitter jamais, je vais vous quitter! Adieu, terre de Lemnos baignée par les flots! qu'un vent favorable me porte là où m'appelle le destin, le vœu de mes amis (146), et le dieu, souverain suprême, qui a décrété ces événements (147).
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Vidéo de  Sophocle
SOPHOCLE — Entretien sur 'Antigone' avec les Bollack (France Culture, 2005) L'émission "Tire ta langue", par Antoine Perraud, diffusée le 25 janvier 2005 sur France Culture. Présence : Mayotte et Jean Bollack.
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