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3,82

sur 236 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Dès les premières lignes, j'ai eu l'impression de pénétrer dans l'atelier d'écriture d'Isabelle Sorente. Comme si, tapie dans l'ombre, j'avais assisté à l'apparition de cette sorcière qui s'impose dans l'esprit de l'autrice.
Le livre est annoncé comme un roman. La narratrice, quant à elle, évoque le terme d'auto-fiction sans pour autant catégoriser catégoriquement... Je suis tentée de le voir comme un roman autobiographique mais la clé, seule Isabelle Sorente la connaît.
Je dis "la narratrice" parce que malgré un grand nombre d'éléments qui laissent penser que la narratrice et l'autrice ne sont qu'une seule et même personne, il faut attendre une centaine de pages avant qu'elle ne dévoile son prénom : Isabelle.
Un prénom trop peu entendu dans sa jeunesse, un prénom qui ne se formulait pas sur les lèvres de ceux qui ont tenté de l'abîmer durant son adolescence. Un prénom qu'elle se réapproprie et qu'elle honore en se réhabilitant.
Et cette réhabilitation s'opère par le truchement de la sorcière (imagination résurgence?) qui s'impose à elle. Cette dernière fait émerger le passé enfoui de l'autrice, elle fait résonnance et aiguise son regard jusqu'à lui brûler les rétines et enfoncer les portes closes de sa conscience. Cette sorcière est la clé dont Isabelle Sorente se saisit afin de lever les derniers verrous.
J'ai adoré ce roman et je m'y suis reconnue. J'y ai reconnu les femmes de ma famille et celles qui m'entourent. J'y ai reconnu des hommes aussi. À mesure que les pages se tournaient, je m'apercevais de l'universalité de cette quête. Et c'est vertigineux.
C'est un livre que je trouve très précieux, si précieux qu'il ne me vient pas à l'idée de le conserver jalousement dans ma bibliothèque mais plutôt de le faire passer de mains en mains, de le faire vivre comme les sorcières chassées et massacrées l'auraient mérité. Vivre comme toutes les personnes bafouées, harcelées et humiliées le méritent.
Les siècles passent, la traque change de mode opératoire, parfois beaucoup et parfois sensiblement. Mais les maillons qui forment les chaînes s'érodent, se rouillent et deviennent si fragiles qu'il suffit d'une dernière impulsion, celle du choix de la vie ou l'optimisme irraisonné, pour les briser.
Je pourrais parler de l'autrice en la nommant par son nom de famille comme il est d'usage avec les écrivains. Mais, bien que son statut d'écrivaine ne soit pas à débattre, je tiens à la nommer par son prénom d'abord et par son patronyme ensuite.
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Lors d'un changement de vie, la narratrice débute un dialogue avec une sorcière. Est-elle réelle ou le fruit de son imagination ? Peu importe, l'essentiel est qu'elle permet à Isabelle de s'interroger. Au départ, elle se demande si nous portons toutes le souvenir inconscient et le poids des femmes qui ont été chassées en tant que sorcières. Est-ce pour cela que nous ne nous défendons pas ? Puis, le roman glisse vers l'introspection et Isabelle laisse parler l'enfant en elle qui a souffert.


Elle montre que les chasses ont changé, mais existent toujours. Des individus se regroupent encore en meute, pour détruire une personne et les conséquences des attaques sont minimisées. Elle décrit le harcèlement scolaire. Grâce à elle, j'ai enfin pris conscience que je l'ai vécu, puisque cela s'est même terminé par des béquilles pour moi. Mais elle a aussi provoqué en moi une remise en question : n'ai-je pas harcelé cette fille de qui je me moquais de sa coiffure, quand j'étais enfant ? Nous étions amies, elle se moquait de ma couleur de cheveux, mais depuis ma lecture, je ressens un malaise et me demande quelles conséquences ce qui me paraissait anodin a pu avoir sur elle.


Ce roman, qui se situe entre le roman et l'essai, est, pour la narratrice, une plongée en elle-même et, par un effet miroir, nous fait réfléchir sur nous-mêmes, sur nos souffrances, mais également sur nos actes et sur notre personnalité. Isabelle Sorente démontre aussi que nous avons toutes un inquisiteur, dans notre entourage ou en nous. Elle décrit aussi la minimisation qui est souvent faite des persécutions que subissent les femmes, comme si c'était dans l'ordre des choses.


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J'ai beaucoup aimé ce petit opus, dont je ne sais pas trop à quelle catégorie il appartient. Autobiographie romancée? Roman? Essai sur la condition féminine emballée dans le Je de la narratrice/autrice? Peu importe finalement: la promenade m'a plu.
Le thème de la sorcière est toujours un peu risqué, et honnêtement, comment savoir ce qui est vrai de cette page noire, tant on a écrit tout et son contraire sur le nombre de mortes et sur le côté systématique ou pas. Je n'ai jamais trop cru à l'analyse trangénérationnelle de nos traumas, ça n'empêche pas ce questionnement sur la place de la sorcière dans la psyché, l'histoire féminine, dans les rapports homme femme, mais aussi dans l'inquisiteur intérieur dont chaque femme peut subir le joug, d'être plein de questionnements passionnants. C'est très bien écrit, on a envie de noter plein de citations, c'est parfois un peu fouilli, comme la psyché humaine, et c'est très intéressant!
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Un livre accompagné de beaucoup de post-it. Les sorcières, c'est pour moi un thème de prédilection, j'aime lire des histoires de sorcières, je me passionne pour cette histoire collective du passé des femmes, les souffrances arbitraires me déchirent le coeur et lire, et écrire, à propos de ces femmes, leur place dans le monde et ce que le mot « sorcière » veut dire hier, aujourd'hui et demain, permet de leur rendre hommage. On sait, et on ne vous oublie pas.

Après avoir lu le hors-série du Point « Les Sorcières : histoire d'une renaissance » (oct 2019), c'est avec bonheur que j'ai plongé dans ce livre d'Isabelle Sorrente dont je connais la plume extraordinaire, juste et énergique.
Ce livre est envoûtant, mystérieux et se dévoile au fil des pages avec pudeur, tendresse et beaucoup de sincérité.

Une femme, auteure se confie dans ce livre à la manière d'un journal intime. Elle livre ses pensées pour écrire, s'écrire. Une sorte d'apparition a lieu lorsqu'elle est à sa table de travail. C'est la première apparition de la sorcière, une sorcière qu'elle évite mais qui la connaît et qu'elle connaît.
L'écriture prend forme, en miroir, le regard rétrospectif de la narratrice sur sa propre vie, ses souvenirs, son vécu avec un téléscopage du temps sur l'histoire d'un féminicide de masse, aussi violent qu'arbitraire, ordonné par des hommes pour contraindre les femmes.
Une histoire du monde qui se répète, à chaque siècle sa manière, pour la domination, et Isabelle Sorrente réussit ce tour de force de nous propulser dans cette histoire à deux temps avec une analyse transgénérationnelle.

Le coeur de cette histoire est à découvrir, impossible d'en dire plus, sans gâcher le plaisir de cette lecture. Mais ce que j'ai particulièrement apprécié dans ce livre, c'est la mise en lumière d'inepties telles que l'étymologie retenue à l'époque de certains mots qui peut (et doit) nous faire réfléchir à la place des femmes dans le monde encore aujourd'hui : « Femina » : viendrait de Fe et minus, « celle qui a moins la foi ». Comment par le langage même diminuer un sexe, le rendre fautif aux yeux d'une divinité proclamée par les hommes.

Ce livre est une merveille et en terminant la dernière page j'avais envie de dire merci. Merci Isabelle Sorrente et merci à ces auteures qui font revivre à travers leurs mots ces femmes sacrifiées, d'hier mais aussi d'aujourd'hui car la société patriarcale est encore loin de laisser la place dûe aux droits des femmes.
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Un essai très intéressant même si je ne partage pas l'approche psychanalytique de l'autrice. le livre est très bien écrit, intéressant.
Il part du rêve d'une sorcière, enfermée, rasée, isolée, qui hante les rêves de l'autrice. Elle va alors partir en quête à la fois dans les livres d'histoire mais aussi en elle et avec d'autres femmes.
L'image de la sorcière nous hante encore aujourd'hui, comme la menace qui plane au dessus de toute tête de femme qui pourrait la relever. Trop forte, trop intelligente, trop sûre, trop authentique, etc. la menace de la torture, de la noyade ou du bûcher se réveille. Il ne fait pas bon être une femme forte du XVme au XVIIme siècle... ni plus tard.
Il se lit rapidement et facilement, c'est un bon ouvrage à découvrir!

J'ai également réalisé une critique vidéo un peu plus longue et avec quelques extraits https://youtu.be/VKTuNoXHa1o

Lien : https://youtu.be/VKTuNoXHa1o
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Un coup de griffe sur l'épiderme, qui égratigne et amène à voir sous les couches du passé puis à regarder l'autre (la narratrice) dans les yeux en miroir pour enfin apercevoir sa propre H/histoire reflétée là.
Au-delà de cette phrase un peu alambiquée, cette lecture (dévorée en 2 jours) fut véritablement une expérience, ce livre, je n'ai pas l'impression de l'avoir lu, mais de l'avoir vécu.
C'est un livre que je n'aurai probablement pas choisi seule, du fait de son titre (mode racoleuse actuelle sur la thématique) mais je suis ravie de l'avoir découvert. de plus, Isabelle Sorente écrit très bien, très justement, maîtrise parfaitement la construction de son récit.
En questionnant la figure historique de la sorcière et surtout ses réminiscences dans nos vies contemporaines, c'est tout une invitation à l'analyse personnelle que propose Isabelle Sorente. Amour, place des femmes, relations de pouvoir, manipulation, harcèlement ... c'est un univers bouleversant.
A prolonger par la lecture d'Aïe mes aïeux ! d'Anne Ancelin-Schützenberger pour ma part et à découvrir pour vous je l'espère !
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J'avais noté ce titre par hasard et celui-ci fait parfois bien les choses.
Dans la 1ère partie, l'auteure fait un point sur l'historique de la chasse aux sorcières, condensé mais bien documenté. Lors des 3 parties suivantes, elle s'interroge sur l'impact que ces chasses ont eu dans la mémoire collective et individuelle des femmes, comment elle influence encore sa vie et celles de ses amies de manière inconsciente.
La figure de la sorcière et son rôle dans l'inconscient collectif autant que l'expérience personnelle de l'auteur m'ont beaucoup touchée et m'ont donné envie d'en apprendre plus (d'où les post-it pour retrouver facilement les références des ouvrages cités). Si les sorcières vous fascinent, si vous vous sentez une affinité particulière avec ces mal-aimées de l'histoire, ce livre est fait pour vous.
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Beaucoup de choses à dire sur ce livre, mais j'ai peur que cela soit réducteur, tant cette lecture m'a bouleversée et marquée... pour tout un tas de raisons.
C'est un livre d'une grande puissance, qui mêle témoignage personnel et réflexion, sur les résonnences qu'ont les chasses aux sorcières des 16e - 18e siècles sur nos vies de femmes et sur les mentalités actuelles. Ces résonnences sont grandes, elles sont immenses, et surtout elles sont tues. Une répression de grande ampleur a eu lieu envers des dizaines de milliers de femmes (et d'hommes, dans une moindre mesure) et on fait comme si cela n'avait pas existé.
Alors oui, Isabelle Sorente, moi aussi j'entends la voix en moi du petit inquisiteur qui me dit quoi penser, quoi ressentir. Et oui, c'est un combat pour la faire taire.
Merci, Isabelle Sorente, merci pour ce livre. Voilà des mots sur mon vécu, sur ce que je ressens, voilà des perspectives pour toutes les femmes et filles présentes et à venir, et les hommes aussi. Merci.
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Et bien, j'ai adoré ce livre, c'est ce que je recherche dans une lecture, quelque chose de terriblement humain, d'actualité et qui me donne à réfléchir. Je suis fan et j'ai hâte de lire d'autres livres de cette auteure talentueuse.

Isabelle Sorente aborde l'empreinte psychologique à travers les âges et plus particulièrement l'impact des chasses aux sorcières sur la femme d'aujourd'hui.

Tout commence par la vision d'une femme à l'époque de la chasse aux sorcières qui subit un interrogatoire et que l'auteure a envie d'écrire. Elle sent que cette femme apeurée veut lui faire passer un message, à partir de là, elle va chercher tout ce qu'elle peut trouver sur cette époque de folle frénésie de la destruction de la femme qui aujourd'hui encore à des traces visibles sur notre société.

C'est à travers l'analyse de sa propre histoire, qu'elle va nous éclairer sur cet inquisiteur intérieur qui nous empêche d'avancer, qui pendant des siècles à persécuter les femmes et certains hommes, et a indirectement modelé notre façon de nous comporter. Ces traumatismes subis, qui, il faut le rappeler à quand même tuer 200 000 femmes en 2 siècles sont comme une empreinte génétique livrée par nos ancêtres. Notre faculté à nous déprécier facilement (je ne suis pas assez mince, trop vieille, trop folle quand j'essaie d'expliquer la charge mentale, trop hystérique quand je veux parler de l'égalité des sexes, de la place de la femme…. #metoo et bien d'autres)

C'est vibrant d'émotion, notamment quand elle aborde son harcèlement scolaire qu'elle a subi au collège.
Ce livre, je l'ai vécu comme la naissance d'une sorcière. Dans le terme sorcière j'entends le fait de reprendre son avenir en main,
Nous devons renouer avec la sorcière qui est en nous.

Qui a déjà lu ce livre ?
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Bon. Il faut que je trouve les mots pour parler de ce texte semi-autobiographique. Pourquoi semi ? Parce qu'Isabelle Sorente nous partage aussi ses recherches sur la chasse aux sorcières orchestrée durant des siècles et perpétuant un crime de masse encore peu reconnu (voire pas du tout). Elle nous parle avec élégance et sensibilité d'un lien transgénérationnel qui existerait entre cette chasse et les comportements de notre société d'aujourd'hui. Nous aurions enregistrées, en nous, les menaces des inquisiteurs et la terreur qu'ils suscitaient.
Le parti-pris est si intéressant que j'en ai frémis plusieurs fois. Ce livre est un des plus beaux pansements qu'il m'ait été donné de lire. Je n'en reviens pas... Il a fait écho à des facettes de moi-même avec lesquelles je suis toujours fâchée. le harcèlement scolaire dont parle Isabelle Sorente, la chasse dont elle a été victime, m'a brutalement rappelé mon propre harcèlement scolaire. J'avais l'impression de lire à la fois le récit personnel de l'autrice, mais aussi un écho vibrant de toustes celleux qui ont été victimes d'une "inquisition modernisée". C'est un texte qui fait bouger les marges parce qu'il nous enveloppe par la même occasion. Il rappelle à quel point l'inquisiteur, tant au-dedans qu'au-dehors de nous, concerne un grand nombre de personnes. Que ces gens marginalisés, ostracisés, sont si nombreux qu'ils pourraient faire rayonner un autre présent et donc, par la même, créer une société qui renouerait avec certains des principes fondamentaux de la sorcière : le soin, l'écoute, la connaissance, l'amour. Parce que la sorcière est aussi au-dedans et au-dehors de nous...
En somme, j'ai été happée par un texte qui guérit et ce que j'aurais encore à en dire, je préfère le garder pour le partager à voix haute avec mes proches.
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