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EAN : 9782226024893
180 pages
Albin Michel (03/09/1985)
3.33/5   3 notes
Résumé :
Guy Sorman a fait découvrir aux Français la Révolution conservatrice américaine en 1983, puis le retour en force du libéralisme avec La solution libérale en 1984.
Avec l'Etat minimum, il centre cette fois son enquête sur la France.
Il nous montre que le libéralisme n'est pas anti-étatisme mais un projet positif où l'Etat retrouve sa responsabilité fondamentale de maintenir l'Ordre et le Droit.
Ce nouvel Etat minimum n'est pas un produit d'import... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique

Partie 2/2 , première partie sur la critique de " la révolution conservatrice Américaine de Guy sorman
... )
des partenaires d'une relation sexuelle est la condition nécessaire et suffisante de la licéité de cette relation.  »

Quant aux revendications exprimées, il s'agissait de demander l'égalisation des majorités sexuelles entre homosexuels et hétérosexuels (des hommes étant alors incarcérés pour avoir eu des relations avec des jeunes hommes âgés d'à peine moins de 18 ans), d'interroger la notion de « détournement de mineur — dont le délit peut être constitué par le seul hébergement d'un mineur pour une nuit  », et de demander que la loi relative à l'attentat à la pudeur sans violence sur mineur évolue, en le considérant comme un délit et non plus comme un crime, en limitant la durée de la détention préventive, et en portant à cinq ans de prison la peine maximum encourue pour ce délit, le viol restant un crime passible de la Cour d'assises. le viol et la pédophilie ne sont ni défendus ni relativisés à aucun endroit de ce texte, et les signataires ont en partie obtenu gain de cause à partir de 1982, que ce soit à propos de la fin de la discrimination entre homosexuels et hétérosexuels, ou de la nécessaire différentiation entre les viols de mineurs, considérés comme des crimes, et les rapports non contraints avec des adolescents de moins de quinze ans, considérés jusqu'aujourd'hui comme des délits.

En 1977, après la signature de cette lettre et son audition par la commission, Michel Foucault était allé en défendre les revendications sur France Culture et présenter ses réflexions sur le sujet, en compagnie de Guy Hocquenghem, écrivain et figure de proue du Front Homosexuel d'Action Révolutionnaire (FHAR), et de l'avocat Jean Danet. Cette discussion sera publiée sous le titre La loi de la pudeur par la revue Recherche, puis dans les Dits et écrits de Michel Foucault. Dans cet entretien, Michel Foucault perçoit déjà, dans le contexte du développement de la victimologie, branche de la criminologie ne s'intéressant pas aux auteurs des actes mais au traumatisme subi par les victimes, l'émergence d'une «  société de danger  » allant de pair avec le renforcement du pouvoir des psychiatres chargés d'établir la réalité des traumatismes et d'organiser le discours des victimes. Hocquenghem déclare quant à lui que « sur le problème du viol proprement dit », « les mouvements féministes et les femmes en général se sont parfaitement bien exprimés », tout en s'opposant aux paniques sécuritaires poussant à verser dans la surenchère punitive ou les volontés de vengeance, à demander la castration chimique des violeurs, ou à publier des reportages anxiogènes dans la presse à scandale qui ne font en définitive que légitimer le renforcement de l'arsenal répressif.

Dans le cadre d'une pensée visant à limiter l'intervention de l'État sur la sexualité, Foucault s'est plusieurs fois interrogé sur la possibilité de sanctionner les violences sexuelles en tant que violences et atteintes à la personne, mais en renonçant à la définition spécifiquement sexuelle de ces infractions. Ici, analysant l'émergence de discours sur la sexualité qui ne ciblent plus seulement des actes considérés comme des crimes ou des délits mais une vague figure criminelle porteuse de danger, Foucault perçoit le risque que la sexualité finisse par être considérée dangereuse en soi, au nom de la préservation de la famille ou de la défense de la pudeur :

«  Autrefois, les lois interdisaient un certain nombre d'actes, actes d'ailleurs d'autant plus nombreux qu'on n'arrivait pas très bien à savoir ce qu'ils étaient, mais enfin c'était bien à des actes que la loi s'en prenait. On condamnait des formes de conduite. Maintenant, ce qu'on est en train de définir, et ce qui, par conséquent, va se trouver fondé par l'intervention et de la loi, et du juge, et du médecin, ce sont des individus dangereux. On va avoir une société de dangers, avec, d'un côté, ceux qui sont mis en danger et, d'un autre côté, ceux qui sont porteurs de danger. Et la sexualité ne sera plus une conduite avec certaines interdictions précises ; mais la sexualité, ça va devenir une espèce de danger qui rôde, une sorte de fantôme omniprésent, fantôme qui va se jouer entre hommes et femmes, entre enfants et adultes, et éventuellement entre adultes entre eux, etc.  »

Ce passage est très cohérent avec le reste de l'oeuvre de Foucault, qui relève d'une archéologie des discours et des formes du pouvoir, d'une réflexion sur la loi, les normes, le pouvoir médical. Il ne s'agit ni d'une apologie du crime, ni d'un dérapage à séparer du reste de l'oeuvre. Les réflexions à propos de la figure du monstre, qui justifie les paniques sécuritaires contre un danger difficile à circonscrire, sont en outre le prolongement de ce que Foucault a déjà développé dans son cours donné au collège de France en 1974-1975 et qui sera publié sous le titre Les anormaux.

Dans ce cours, Foucault s'intéresse à l' « enfant masturbateur  ». Aux côtés du «  monstre humain  » et de l' «  individu à corriger  », il fait partie des trois personnages autour desquels se constitue au XIXe siècle un «  domaine de l'anomalie  » dans le cadre du développement d'un pouvoir juridico-pathologique autour de la psychiatrie. Dans le cours du 22 janvier 1975, Foucault explique :

« Le masturbateur, l'enfant masturbateur, est une figure toute nouvelle au XIXème siècle (qui est même propre à la fin du XVIIIe siècle), et dont le champ d'apparition est la famille. C'est même, peut-on dire, quelque chose de plus étroit que la famille : son cadre de référence n'est plus la nature et la société comme [pour] le monstre, n'est plus la famille et son entour comme [pour] l'individu à corriger. C'est un espace beaucoup plus étroit. C'est la chambre, le lit, le corps ; c'est les parents, les surveillants immédiats, les frères et soeurs ; c'est le médecin : toute une espèce de micro-cellule autour de l'individu et de son corps.  »

Foucault fait allusion aux «  techniques pédagogiques du XVIIIe siècle  ». Dans les cours du 5 et 12 mars, quand il revient plus en détails sur l'enfance et sur les discours autour de la masturbation, Foucault décrit la famille comme «  un espace de surveillance continue  » et mentionne les parents «  assignés, enjoints de prendre en charge la surveillance méticuleuse, détaillée, quasi ignoble du corps de leurs enfants  ». Enfin, si Foucault s'intéresse particulièrement à la surveillance des enfants, c'est parce quelle « [lui] paraît être une des conditions historiques de la généralisation du savoir et du pouvoir psychiatriques.  » Ainsi, «  en se focalisant de plus en plus sur ce petit coin d'existence confuse qui est l'enfance, la psychiatrie a pu se constituer comme instance générale pour l'analyse des conduites. »

Sur France Culture, interrogé en fin d'émission à propos de la notion de majorité sexuelle, Foucault répond qu'une «  barrière d'âge fixée par la loi n'a pas beaucoup de sens  », et qu'il doit s'agir, plutôt que de se baser uniquement sur l'âge ou sur le discours des psychiatres, d'écouter les mineurs à propos des différents régimes de violence, de contrainte ou de consentement qu'ils ont vécus. Peu après, Guy Hocquenghem reprend les termes de Michel Foucault et affirme la nécessité d'«  écouter l'enfant et lui accorder un certain crédit  ». Comme l'écrira Jean Bérard, historien du droit, en 2014 :

«  les expressions militantes des années 1970 (...) n'ont pas manqué de faire une place au questionnement sur l'articulation entre consentement et rapports de pouvoir. Eric Fassin montre que Foucault voit bien le problème et exprime un « dilemme » davantage qu'une position. Les militants s'interrogent sur ce qui doit être considéré comme relevant de la ‘‘libération sexuelle''  »

En septembre dernier, dans le contexte d'une polémique relative à la redécouverte des productions de Guy Hocquenghem à propos de l'enfance, et notamment de cet entretien donné en compagnie de Michel Foucault, les rédacteurs de la revue Trou noir faisaient remarquer « qu'aujourd'hui on ne trouve plus, à gauche, une capacité à questionner et à refuser radicalement l'école, la psychiatrie, la prison, la famille, [ce qui] ne signifie certainement pas une avancée, bien au contraire. »

Cette tendance semble s'être renforcée, à tel point que le projet du gouvernement de considérer comme viol toute relation entre un(e) adolescent(e) de moins de quinze ans et une personne de cinq ans plus âgée, indépendamment de ce qui fut vécu et raconté par l'adolescent(e), et sans investigation ni réflexion sur les régimes de contrainte ou de consentement, a été récemment votée à l'unanimité à l'Assemblée nationale et dans l'approbation générale. L'absence du moindre discours critique, au nom même du soutien à la « libération de la parole » est d'autant plus patent qu'il y a trois ans, face à un projet analogue qui avait à l'époque été finalement retiré, le Planning familial critiquait une proposition relevant de l'« ordre moral » et d'une « méconnaissance » des pratiques des jeunes, tout en pointant le risque d'une sexualité adolescente « encore plus taboue et cachée ». La question des menaces judiciaires vis-à-vis des soignants ou des associations en lien avec des adolescents entretenant des relations avec des personnes plus âgées était aussi évoquée comme un risque.

Ces dernières années ont vu s'intensifier les appels de différents courants féministes à un renforcement de l'appareil répressif, dans le cadre de « la lutte contre les violences », insistant sur la nécessité de surveiller et punir les agresseurs et focalisant sur les responsabilités individuelles, et c'est dans ce contexte qu'a pu se tenir en septembre dernier, une campagne contre la mémoire de Guy Hocquenghem, couverte par Russia Today et Valeurs actuelles, menée par les « féministes intersectionnelles » des Grenades en compagnie d'associations de protection de l'enfance luttant contre l'éducation sexuelle à l'école. Quelques mois plus tard, la bêtise (ou le bullshit, comme dirait Guy Sorman), est tellement présente qu'une assertion aussi absurde que « Michel Foucault sodomisait des enfants sur des tombes en Tunisie dès la nuit tombée » n'a pas toujours déclenché les éclats de rire ni même les doutes qu'elle aurait dû susciter.

Il semble donc urgent de refuser les termes de l'ennemi et d'apprendre à déceler les visées idéologiques réactionnaires, pourtant à peine dissimulées mais noyées dans la masse communicationnelle. La fameuse réaction néo-libérale, l'individualisme, les discours et pratiques sécuritaires ne sont pas seulement face à nous, comme un bloc massif que l'on pourrait aisément délimiter. Ils ont aussi infusé dans de nombreux espaces, où s'établissent des micro-fascismes qu'il sera difficile de briser.

En attendant, celles et ceux qui s'intéressent aux recherches de Foucault à propos de la sexualité et de l'histoire de la notion de consentement peuvent se tourner vers le quatrième tome de l'Histoire de la sexualité, publié en 2018. Quant à celles et ceux qui tiennent à lire des anecdotes liées à sa biographie, soulignons la publication récente aux éditions Zones de la traduction de Foucault en Californie, de Simeon Wade, narration d'un voyage de Foucault aux Etats-Unis qui dresse notamment le récit d'une expérience commune sous LSD, et comporte, entre autres, la retranscription de plusieurs conversations avec Foucault à propos de son rapport à la musique, à la littérature, à l'université ou à son homosexualité.

Addendum : Une semaine après la publication de cet article, Guy Sorman revoyait ses calomnies à la baisse et se rétractait péniblement dans les pages de L'Express. " ( fin )

Surtout que le sunday times est concervateur et que sorman est connu pour un genre de " livres" réactionnaires et néo-liberaux que personne ne lit même gratuit dans les boite aux livres , enfin je pense , mais qui a mon avis le marquent politiquement et idéologiquement donc attention a vos sources et aux rumeurs en ces temps de montée de l'extrême droite + contre-feux populistes bidons de l'ulta-capitalisme.😡🤬
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Vidéo de Guy Sorman
Dans "Mon dictionnaire du Bullshit", Guy Sorman développe sa propre pensée, loin de vouloir imposer une vérité contrairement aux idées reçues. Une invitation à la contradiction. Les différentes entrées de ce dictionnaire, aussi variées que "Sainte Greta", "Reagan Ronal", "fin de l'histoire" ou "Post-libéralisme" sont autant de fils du parcours personnel de l'auteur qu'il traite d'un point de vue théorique mais également personnel.
"Mon dictionnaire du Bullshit" est un livre à l'image de son auteur : impertinent. Guy Sorman a pour habitude de renouveler sa pensée sans tomber dans la polémique. À travers son parcours à "L'Express" ou encore aux côtés des hommes politiques comme Jacques Chirac ou Alain Juppé, Guy Sorman est passé d'un discours libéral à un post-libéralisme défendant le Revenu Minimum Universel. Une façon de défendre la véritable pensée, à l'inverse des idées reçues qui mènent à une pensée unique.
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