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Marie-Lise Marlière (Traducteur)
EAN : 9782070716890
132 pages
Gallimard (21/03/2008)
4/5   2 notes
Résumé :
Idaho (USA), fin des années cinquante, début des sixties. Au collège, on a beau lui seriner que les States sont un pays libre où souffle en permanence l'esprit, Jacob, lui, tandis qu'une sexualité éruptive embrase son corps et son imaginaire, découvre que le monde qui l'entoure n'est pétri que des influences de l'hypocrisie, de la superstition et de la haine puritanisme.
Son amitié passionnée pour un jeune Noir d'origine indienne atrocement persécuté n'éviter... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
« Les Chiens de l'Enfer » est le premier (court) roman de Tom Spanbauer, traduit de « Faraway Places » par Marie Lise Marlière (1989, Gallimard, 136 p). Pourquoi ce livre ou cet auteur ? Il est, entre autres, l'initiateur du « Dangerous Writing », avec Peter Christopher, « Campfires of the Dead » jamais traduit et Gordon Lish auteur de « Zimzum » traduit par Pierre Guglielmina (1994, Gallimard, L'Infini, 128 p) qui est l'éditeur de référence de la « Beat Generation ». Leur texte qui sert d'exemple dans les ateliers d'écriture est une nouvelle « La Moisson » de Amy Hempel, tirée de « Aux portes du royaume animal » recueil traduit par Véronique Ovaldé (2015, Cambourakis, 116 p). Nouvelle que j'ai critiquée ici même en décrivant le mouvement littéraire. Et j'étais extrêmement réservé dans ma critique. L'auteur le plus renommé de cet atelier étant Chuck Palahniuk « Fight Club » (2002, Gallimard, 290 p) ou « Journal Intime » (2005, Gallimard, 336 p) tous deux traduits par Freddy Michalski. Je désirais donc en savoir plus sur le « Dangerous Writing ».

Donc « Les Chiens de l'Enfer ». Cela tombe bien, c'est un roman court, plutôt une longue nouvelle. Idaho des années 50. Etat coincé entre le Montana avec sa devise « Oro y Plata » (or ou argent), mais aussi « Blue Sky » (Ciel Bleu) pour les plaques automobiles et l'Oregon « Alis volat propriis » (elle vole de ses propres ailes) et un paysage forestier. On voit que l'Idaho avec « Esta Perpetua » (Elle est perpétuelle) et « Famous Scenic » ou « Famous Potatoes » n'attire pas forcément le touriste. D'ailleurs c'est un état farouchement républicain. Les gouverneurs n'hésitaient pas à employer la manière forte, comme l'état de siège et l'intervention des troupes fédérales pour réprimer un important mouvement de grève en 1892, ou quand les mineurs repartirent en grève en 1899. D'ailleurs cela se voit aux couleurs des machines agricoles. Les engins rouges de Red Farmall sont républicains, les jaunes de International Harversters sont indépendants, et les vertes John Deere appartiennent aux démocrates. Comme quoi la politique, cela peut être simple.
C'est aussi un état habité depuis la préhistoire par les amérindiens. Les groupes plus importants sont les Nez-Percés au nord et les Shoshones au sud. Un état très religieux, partagé entre les catholiques, protestants et mormons. « Les mormons l'avaient construit cette route, c'est tout ce qu'ils savaient faire à part faire des enfants, comme disait ma mère en se signant : ils savent faire les choses droites ». Quant à l'église Saint Joseph, on ne sait plus bien si c'est en l'honneur du saint de la Bible ou du chef Joseph Nez Percé.
C'est là que vit Jacob Weber, 13 ans, fils de Joseph et Mary, dans une ferme relativement isolée, à cinq kilomètres de la route principale. C'est simple, il n'y a qu'à compter les triangles rouges, faits de vieux sacs de farine accrochés à la palissade. A l'école, on n'arrête pas de leur dire qu'il vit libre dans un pays libre. Mais il n'a pas le droit s'aller à la rivière, au bouquet de peupliers et sous le catalpa. de l'autre côté, dans une cabane, vit Sugar Babe, une indienne avec « le nègre ». Et encore plus loin Harold P. Endicott et un grand drapeau américain qui flotte au vent. Il vit seul avec ses cinq dobermans, « les chiens de l'enfer », qui sont dressés à tuer et n'obéissent qu'au sifflet de leur maître. L'entourage, ces le ciel. « Il y avait du ciel partout : devant les fenêtres, sous les lits, entre le plafond et le sol, il y avait du ciel. Il y avait du ciel entre tes doigts quand tu les étendais, et du ciel sous tes bras quand tu les soulevais….En plus du ciel et de la route en gravier et de la clôture avec les triangles rouges accrochés dessus, et les lignes électriques, et la clôture sur de l'autre côté de la route, c'est ce que l'on pouvait voir du deuxième drapeau là-haut sur le plateau : on pouvait voir la route, droite comme une flèche ».
Le dimanche, toute la famille va à « la messe de neuf heures et comme nous arrivions toujours à huit heures et demie, nous avions le temps de nous confesser ». le parcours se fait dans la vieille Oldsmobile, sans radio « car il fallait consacrer ces instants à la réflexion. -Nous gardions donc le silence et faisions notre examen de conscience et je me trouvais de nombreux péchés, dont l'un en particulier appartenait à l'espèce des péchés mortels ». Comme quoi les péchés, c'est comme les champignons, il y a les bons et les mauvais.

Pour Harold P. Endicott, les champignons, comme ses voisins, ont aussi une couleur, qui n'est, certes pas celle de sa peau. On est en plein dans les années du MacCarthysme, celui de la « Peur Rouge » (Red Scare) qui fait craindre à tout moment une invasion par les russes et les communistes. le mouvement s'est aussi illustré par un certain racisme et homophobie, envers tout ce qui n'était pas « Red neck », comme l'américain blanc rural au cou brûlé par le soleil. C'est l'époque où Arthur Miller crée et joue sa pièce « Les Sorcières de Salem », traduite de « The Crucible » par Marcel Aymé (2015, Robert Laffont, 256 p). Certes, la pièce se passe en 1692 dans des villages du Massachusetts proches de Salem, aujourd'hui Danvers. Deux fillettes, Betty Parris (9 ans) et Abigail Williams (11 ans), fille et nièce du révérend du village se mettent à avoir un comportement bizarre. On accuse trois femmes de sorcellerie, puis c'est tout une communauté. L'affaire se termine bien, en relâchant les accusées, amis a fait grand bruit. Cela a toutefois a contribué à réduire l'influence de la foi puritaine en Nouvelle-Angleterre, ce qui conduira aux principes fondateurs des États-Unis. Mais l'Idaho, ce n'est pas (ou pas encore) la Nouvelle Angleterre.
Jacob, en proie aux affres de l'adolescence et surtout au « chinook », un vent mauvais qui n'attire que des déboires. « Cette année-là, l'année du chinook, cette année chaude et sèche, l'année où je sautai dans la rivière, où je fis des taches jaunes dans mon lit et mes caleçons, l'année où je rencontrai les trois personnes à éviter, l'année où mon père mentit au shérif, ce fut différent ». le pauvre Jacob va assister, malgré lui, à la mort violente de ses trois voisins. Morts en série, pour des causes différentes, effectuées également par des personnes différentes, mais où tout se tient dans cette atmosphère confinée, bien que située dans les « grands espaces », les « Famous Scenic » tant vantés.

Alors, un monde qui entoure le jeune Jacob, un monde sous l'influences de l'hypocrisie, de la superstition et de surtout de la haine puritanisme, qu'elle soit protestante ou catholique. Un monde avec une seule loi, le châtiment des impurs, la folie et l'enfer. Avec de temps à autre, le « chinook » qui souffle. « C'était la pleine lune du mois de février, celui où il n'avait pas neigé. Je portais mon pyjama de flanelle et j'avais mis mes chaussettes ; j'étais dans la salle de bains en train de me regarder dans la glace pendant que je me lavais les dents après Les gens de chez nous, le feuilleton radiophonique, mais avant de réciter mon rosaire, quand ma mère traversa le vestibule au papier peint décoré de papillons et de dés. Elle passa devant la porte de la salle de bains dans son kimono vert ; elle avait cet air que je lui connaissais bien et son oeil gauche louchait. Je crachai – mon sang avait teinté en rose la pâte dentifrice blanche -, puis je me rinçai la bouche et nettoyai le lavabo. le temps d'aller dans la cuisine et je sentis le goût du sang ».

Autour de tout ceci les thèmes récurrents - le catholicisme, le père autoritaire et brutal et la mère pieuse mais tout de même pas très nette, les histoires d'amour indigènes et les conflits raciaux latents. Seul moment de loisir pour le garçon, celui où il se rend à la foire agricole de Blackfoot. On se pose la question du récit d'initiation ou du non-récit. Quelle idée de la vie future ou plus simplement de la vie hors du milieu rural de l'Idaho, Jacob peut il avoir. En quoi peut-il imaginer la « vente de Manhattan pour une poignée de verroteries » peut elle avoir sur sa vision du pays, sans parler du monde qui l'entoure. Roman daté des années « Red Scare » certes, mais qu'en est-il de nos jours (ou de ceux du roman, 1989), sachant que la moitié des américains n'ont pas de visa et ne sont donc jamais sortis de leur pays, voire de leur état.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
C’était la pleine lune du mois de février, celui où il n’avait pas neigé. Je portais mon pyjama de flanelle et j’avais mis mes chaussettes ; j’étais dans la salle de bains en train de me regarder dans la glace pendant que je me lavais les dents après Les gens de chez nous, le feuilleton radiophonique, mais avant de réciter mon rosaire, quand ma mère traversa le vestibule au papier peint décoré de papillons et de dés. Elle passa devant la porte de la salle de bains dans son kimono vert ; elle avait cet air que je lui connaissais bien et son œil gauche louchait. Je crachai – mon sang avait teinté en rose la pâte dentifrice blanche -, puis je me rinçai la bouche et nettoyai le lavabo. Le temps d’aller dans la cuisine et je sentis le goût du sang.
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Il y avait du ciel partout : devant les fenêtres, sous les lits, entre le plafond et le sol, il y avait du ciel. Il y avait du ciel entre tes doigts quand tu les étendais, et du ciel sous tes bras quand tu les soulevais….En plus du ciel et de la route en gravier et de la clôture avec les triangles rouges accrochés dessus, et les lignes électriques, et la clôture sur de l'autre côté de la route, c'est ce que l'on pouvait voir du deuxième drapeau là-haut sur le plateau : on pouvait voir la route, droite comme une flèche
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Cette année-là, l’année du chinook, cette année chaude et sèche, l’année où je sautai dans la rivière, où je fis des taches jaunes dans mon lit et mes caleçons, l’année où je rencontrai les trois personnes à éviter, l’année où mon père mentit au shérif, ce fut différent
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on pouvait voir la vigne vierge sur le côté de la maison, et les chevaux et les Holstein dans le corral, et la pompe à essence... et dans la cour les machines garées autour : le tracteur, la charrue, le disque, la herse, et toutes ces choses, toutes John Deere.
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. -Nous gardions donc le silence et faisions notre examen de conscience et je me trouvais de nombreux péchés, dont l’un en particulier appartenait à l’espèce des péchés mortels
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