Une enfance en Grèce, après la guerre civile. Remarquable récit autobiographique d'une intellectuelle grecque exilée aux U.S.A. qui fait revivre une société haute en couleur, âpre et tendre, déchirée mais sur laquelle règne un irréversible appétit de vivre. le style est nerveux, rapide, fluide, il capte d'emblée l'intérêt et irradie une atmosphère de féérie. Un superbe portrait de petite fille. La nostalgie de l'enfance ne verse pas dans la mélancolie car l'allégresse de la découverte surpasse sans cesse les regrets et les déceptions.
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Les enfants de militaires portent des marques distinctives : une raideur dans l'attitude, un sérieux qui - au contraire de la fausse gravité des officiers - est de l'innocence trompée, une mélancolie sous-jacente. Ils ont l'amour-propre et la confiance en soi des enfants dont les parents ont ou représentent le pouvoir, mais dans leur réserve il y a vis-à-vis des autres la défiance de l'homme seul. Dans chaque nouvel endroit, ils sont les étrangers qu'on déteste - les soldats sont toujours des occupants. Les avant-postes sont isolés. Mais pour les enfants, il n'y a même pas la régularité et la conformisme de la vie de caserne. Ce sont des intrus dans un petit village ou une petite ville, des nouveaux à l'école qui doivent réclamer et défendre leur bout de terre pour l'abandonner ensuite et se remettre en route. (page 29)
Quand quelque chose est beau, l'âme devient grosse comme le monde, me dis-je. Les coquelicots sont beaux. Et les amandiers en fleur. Et la queue des paons. Et les bijoux. Et le ciel. Et la mer. Et la rosée du matin. Et les champs de blé. Quand quelque chose est beau, on ne peut l'imaginer différent ou plus beau. La beauté est parfaite telle qu'elle est. (page 109)
Ceux qui connaissent les livres ne connaissent pas la vie. Et ceux qui connaissent la vie ne connaissent pas les livres, me dit mon père d'un ton méprisant. (page 29)