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EAN : 9782020228398
317 pages
Seuil (31/12/1998)
3.49/5   37 notes
Résumé :
Elle s'appelle Valérie.
Elle a dix-huit ans. Elle est brune et belle peut-être et rêve d'être mannequin, actrice. Vêtue de noir, elle hante les boîtes de nuit des Champs-Élysées. C'est l'hiver 1984... Les messieurs d'un certain âge lui glissent des mots doux et des rendez-vous, sans savoir que ce n'est pas le septième ciel qui les attend mais l'enfer. La sage, timide jeune fille a deux complices. Ils se chargent d'assassiner de la manière la plus atroce les c... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Le sujet du livre, une histoire qui a bouleversé la France au milieu des années 80, « L'affaire Valérie Subra » ou "Le trio diabolique" …

L'histoire de trois paumés devenus assassins, une jeune fille un peu déboussolée de 18 ans, Valérie Subra, et deux garçons, Laurent Hattab et Jean-Rémi Sarraud, 19 et 21 ans. Ils rêvaient de fortune et avaient besoin de beaucoup d'argent. Ils imaginent un scénario où Valérie doit séduire des hommes seuls, se faire inviter chez eux, et faire ensuite entrer ses complices qui feront main basse sur l'argent et les bijoux. Ensemble ils vont faire cinq tentatives de meurtre en dix jours de folie et vont finalement commettre deux meurtres qui leur rapporteront très peu mais surtout de longues années de prison. L'affaire fait grand bruit, mais l'attention médiatique se concentre surtout sur le personnage féminin du trio.

Jugés en 1988, les trois complices sont condamnés à des peines de réclusion à perpétuité, assorties de peines de sûreté incompressibles de 18 ans pour les garçons et de 16 ans pour la fille.
Finalement, Valérie Subra a été libérée en 2001, suivie plus tard par Laurent Hattab et Jean-Rémi Sarraud.

Fruit d'une longue et minutieuse enquête journalistique, la reconstitution de Morgan Sportès nous plonge dans un roman sombre et palpitant. Cette enquête méticuleuse relate la terrible descente aux enfers de jeunes adultes totalement perdus. Du déroulement des faits, en passant par l'instruction judiciaire jusqu'au procès, on se demande ce qui les a poussés à en arriver là. Ce roman a été porté à l'écran par Bertrand Tavernier.
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Sportès Morgan – "L'Appât" – Seuil, 1990 (ISBN 978-2020228398)

Comme dans le cas de "Tout, tout de suite" (publié vingt-et-un ans plus tard, en 2011), l'auteur se livre à une reconstitution aussi précise et complète que possible d'un fait divers réel : début décembre 1984, un trio de jeunes gens (composé de Valérie Subra, Laurent Hattab et Jean-Rémi Sarraud) attire deux hommes censés être fortunés dans un guet-apens pour les assassiner après leur avoir soutiré l'argent liquide disponible ainsi que les quelques objets de valeur (briquets, montres, bijoux) facilement transportables. Dans les deux cas, le butin est dérisoire rapporté à la sauvagerie des deux assassinats froidement prémédités et organisés.
La jeune fille servant d'appât a tout juste 18 ans : vivant dans un milieu plutôt aisé, elle s'est exclue elle-même du circuit scolaire et rêve de devenir starlette ou mannequin ; uniquement soucieuse d'elle-même, elle ne montre aucune compassion envers les victimes.
Laurent Hattab est le fils d'un juif tunisien, nouveau riche ayant fait fortune dans la confection et installé dans "le sentier" ; le père ne refuse rien à son fils, qui dispose d'autant d'argent qu'il le veut, mais souhaite s'émanciper en "montant des coups" ; il n'a aucune culture, aucune éducation religieuse.
Jean-Rémi Sarraud est le pauvre paumé du groupe, le grand gaillard baraqué qui suit son copain Laurent aveuglément, qui n'entretient plus aucun lien familial (la famille n'assistera même pas au procès), qui sort d'un milieu défavorisé.

Leur procès s'ouvrira en janvier 1988, alors que se tient le procès des membres du groupe terroriste "Action directe" (qui avaient été arrêtés le 21 février 1987). Quelques mois plus tôt s'étaient tenus deux autres procès spectaculaires, celui de "l'assassin des vieilles dames" Thierry Paulin et, en mai juin 1987, celui du criminel nazi Klaus Barbie.

Précisions : la reconstitution narrée dans "L'appât" de Morgan Sportès se déroule dans un milieu et des lieux qui me sont totalement et radicalement étrangers, à savoir cette jeunesse plus ou moins dorée des filles et fils à papa, ainsi que ces vieux beaux, qui passent leur temps dans les boîtes de nuit ou ces bars glauques réservés à des clientes et clients du type Strauss-Kahn, amateurs de "chair fraîche" jeune et féminine mais pas seulement, ce que les journaleux et paparazzi appellent la "jetset", les "people", ces gens pour qui il est extrêmement important d'étaler des signes de richesse clinquants, des modes de vie basés sur le gaspillage éhonté de l'argent facilement gagné, des liaisons toutes plus "scandaleuses" les unes que les autres etc. En ce sens, le récit de Sportès est bel et bien un document sociologique très précis et probablement fidèle de ce milieu particulièrement corrompu.

La thèse centrale de Morgan Sportès, selon ses propres dires, consiste essentiellement à montrer "la jeunesse que notre société sécrète". Ceci me semble bien abusif. Que des jeunes (y compris, voire surtout, des filles) sans repère, désaxés, trop gâtés par leurs parents, se laissent fasciner par ce milieu pourri n'est guère étonnant, cela a probablement toujours existé sous des modalités diverses. Il est également probable que "la société du spectacle" (Sportès était proche de Guy Debord) accentue les dérives de ce type de jeunes, et que la "déréalisation" les mène facilement à des actes d'une sauvagerie in-croyable puisque L'Autre n'est plus qu'un objet (cf les ravages actuels des jeux vidéo d'extrême violence) : le degré de violence augmente sans cesse chez les jeunes, que ce soit dans le cadre scolaire ou en dehors, que ce soit dans les banlieues ou dans les institutions chics. Il n'en reste pas moins qu'il s'agit là – Dieu soit loué – de phénomènes extrêmement minoritaires pour l'instant, mais que les médias se font un grand plaisir de monter en épingle.

A mes yeux, Sportès a quelque peu raté son livre : il aurait dû non pas seulement faire allusion au procès du groupe "Action directe" mais carrément monter un parallèle entre ces deux séries de meurtres. N'y a-t-il pas des similitudes entre ces jeunes filles et jeunes gens s'octroyant le droit de vie et de mort sur d'autres personnes uniquement parce que leurs propres désirs de puissance et de gloire leur semblent suffisants pour justifier des meurtres ? N'est-ce pas cet acte de violence ultime, l'assassinat, qui constitue le coeur de leurs actions, qu'elles et ils enrobent ensuite soit dans de grands discours politiques (vides de sens), soit dans un désir "d'avoir de la thune, là tout de suite" pour aller "frimer" ?

Pour en revenir au trio de 1984, il va de soi que ces trois personnes sont aujourd'hui sorties de prison et libres comme l'air ! Les deux garçons furent condamnés à 18 ans de prison, la jeune-fille à 16 ans. Selon "wikipedia", Valérie Subra, et Jean-Rémi Sarraud se sont montrés bien sages en prison, où ils ont effectués quelques études leur permettant d'obtenir de tout beaux diplômes : tous deux auraient donc trouvé du travail, et auraient – chacun de son côté – fondé une famille avec enfant ! Comment ces enfants supporteront ils d'apprendre que leur père (dans un cas) et leur mère (dans l'autre cas) se sont rendus coupables de deux assassinats, prémédités, avec actes de torture ? Que diront ces glorieux parents lorsque leur descendance aura lu "L'Appât" ? (un assassin comme Bertrand Cantat remonte bien sur les planches pour se faire applaudir par des minettes, et le juge n'a aucune charge à retenir contre DSK ni Dodo-la-Saumure…).

Au centre de ce récit se trouve donc la jeune fille qui a délibérément accepté de servir d'appât.
Etrange ? Quelle est l'image des jeunes filles massivement diffusée de nos jours ?
Il y a peu, l'affiche du film états-unisien "Spring breakers" (sorti en 2012) s'étalait sur tous les supports publics imaginables dans le métro, le RER, sur le cul des bus. Cette affiche, d'une vulgarité et d'une bêtise répugnantes, représente quatre filles typiquement états-unisiennes, dans les 18 ou 20 ans, en maillot de bain et dans des postures franchement obscènes (fesses tendues, poitrine offerte etc). Il paraît que le réalisateur, un obscur Harmony Korine, a voulu restituer l'image que les adolescentes ont aujourd'hui d'elles-mêmes, et surtout les modèles qu'elles se choisissent "à la Britney Spears" : comme j'ignore tout de cette personne, je tapote son nom sur Google, et je reçois effectivement des images d'une sorte de walkyrie hystérique dans des accoutrements ridicules et surtout dénudés. Tout cela pue le fric et le show-biz : c'est probablement ce genre de représentation qui inspirait cette Valérie Subra... Et que dire des Madonna, Jennifer Lopez, et autres starlettes spécialistes des tenues et gesticulations putassières, modèles des gamines d'aujourd'hui ?
Pourtant, depuis plusieurs années, les rapports s'accumulent au plus haut niveau, que ce soit sur l'hypersexualisation (rapport à la ministre Chantal Jouanno, 5 mars 2012), ou sur la consommation de films pornographiques dès avant l'adolescence, y compris chez les filles (rapport à Jeannette Bougrab – voir "Et si on parlait de sexe à nos ados ?" publié chez Odile Jacob).
Il faut dire qu'après l'acquittement de DSK et son copain Dodo-la-Saumure, les juges auront quelques peines à expliquer aux ados des banlieues pourquoi, eux, n'ont pas le droit d'organiser des tournantes dans les caves, avec des filles plus ou moins consentantes…

Au sortir de la lecture, puis de la re-lecture, de ce livre, on reste sidéré, car on prend bien conscience que ce glissement vers la barbarie, loin de s'atténuer, est au contraire en train de s'accentuer inexorablement, dans l'indifférence totale des responsables, et même (affaire DSK) avec la complicité des juges…
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Ce fait divers a défrayé la chronique : en 1984, Valérie Subra, Jean-Rémi Sarraud et Laurent Hattab avaient délesté plusieurs messieurs de quelques milliers de francs en vue de partir aux Etats-Unis.

Selon un scénario mal ficelé, la jolie Valérie, 17 ans, se faisait inviter chez le monsieur pour un rendez-vous galant. Elle laissait la porte entrouverte à ses deux jeunes complices qui venaient rapidement mettre fin à la fête. Les garçons torturaient le monsieur pour lui faire avouer où était son coffre, parce qu'ils croyaient que tous les gens un peu aisés ont un coffre à la maison. Puis on tuait le monsieur parce que c'est plus simple.

Morgan Sportes a le talent de nous faire découvrir par le menu les histoires qu'on connaît déjà. Son travail de fourmi va bien au delà des reportages et peut emporter votre adhésion même si vous avez vu toutes les émissions sur cette affaire, et bien que vous connaissiez le film que Bertrand Tavernier a tiré du bouquin (avec Marie Gillain dans le rôle de Subra).

J'attire votre attention sur les extraits des plaidoiries des avocats qui atteignent des tonalités émouvantes, puis sur le pouvoir de séduction de Valérie Subra : il me paraît significatif autant qu'extraordinaire que les parties du procès la gratifient d'un "Vous, Valérie..." en s'adressant à elle, alors que les garçons restent à jamais Hattab et Sarraud dans la bouche des magistrats.

A noter que Morgan Sportes a récidivé plus récemment dans une histoire de bêtes et d'une belle servant d'appât, Yalda Arbabzadeh, au pouvoir de séduction si développé qu'elle réussit même à affoler les sens du directeur de la maison d'arrêt où elle était incarcéré, ( "Tout, tout de suite" qui traite avec brio du gang des barbares et qui va aussi faire l'objet d'une adaptation cinématographique courant 2014).

Un très bon livre que les amateurs d'affaires judiciaires classeront à côté de ce Tout, tout de suite que je viens d'évoquer et de l'Adversaire, d'Emmanuel Carrère.
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Morgan Sportès a été chroniqueur judiciaire pour plusieurs journaux dont Détective. Il a été très sensible à l'affaire du trio infernal qui a défrayé la chronique entre 1984 et 1988, date du procès. de nombreux ouvrages et articles ont été écrits sur cette triste affaire.
L'auteur ajoute sa pierre à ces témoignages en relatant les faits à sa manière d'écrivain. Pour rappel, cette période est également celle des attentats d'Action directe et des meurtres en série commis sur de vieilles dames dite affaire Thierry Paulin.
Valérie a 17 ans au moment des faits, ses comparses ne sont pas plus vieux. Laurent Hattab est un enfant gâté qui vit dans la toute-puissance et l'argent facile. Ses parents se sont enrichis dans le commerce textile rue du Sentier à Paris. Jean-Rémy Sarraud, son bras droit, est un orphelin qui voit Laurent comme un modèle et le suivra jusqu'à réaliser le pire.
Valérie joue de son charme pour se faire offrir des entrées aux restaurants et dans les boîtes à la mode, mais s'esquive toujours au moment fatidique où logiquement elle devrait passer à la casserole.
Quand elle rencontre Laurent et Jean-Rémy, l'escalade dramatique se met en place. Laurent a besoin de toujours plus d'argent et Valérie adore se faire désirer. le trio va commettre l'irréparable en assassinant deux hommes aguichés par la jeune fille et piégés de manière aussi odieuse que maladroite et sordide. Ils seront très rapidement confondus, puis jugés quelques années après leurs méfaits.
L'intérêt de l'ouvrage réside dans la grande précision avec laquelle Morgan Sportès relate les faits et essaye de nous amener au plus près de la psychologie de ces personnages, mais aussi des victimes et de leurs familles respectives. Il replace intelligemment l'affaire dans son contexte historique et social.
Il décrit avec exactitude une vie parisienne tapie dans la nuit, composée d'établissements souvent louches et de noctambules sans beaucoup de scrupules à la recherche de chair fraîche. Il tacle les hommes de pouvoir, les nouveaux riches, les stars du show-biz.
Valérie et ses acolytes sont éboulis par l'argent facile, et par la puissance de la célébrité. Ces êtres fragiles et influençables sont incapables de prendre le recul nécessaire et d'agir avec intelligence. Ils vivent dans un mirage où la réalité et la fiction s'entremêlent au point qu'ils sont incapables de distinguer l'une de l'autre.
On peut regretter certaines longueurs et être parfois agacé par cette méticulosité millimétrée imposée par la reconstitution des faits. En revanche, les derniers chapitres qui évoquent les jours de procès sont d'une grande finesse et d'une justesse époustouflante. On retrouve d'ailleurs quelques personnages célèbres de l'époque : les avocats Lombard et Szpiner, le Président d'assises Versini. Les éclats du prétoire résonnent avec la précision d'une envolée lyrique à plusieurs voix. Cet ouvrage a été adapté au cinéma par Bertrand Tavernier et fut un succès.

Michelangelo 27/11/2020

Lien : http://jaimelireetecrire.ove..
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"Dès qu'on entre dans les lieux, une odeur
âcre prend à la gorge. Au fond une porte à
glissière grise ouvre sur un énorme monte-charge
par lequel, sur des civières roulantes, les corps
sont transportés à l'étage supérieur: là, dans un
grand couloir, sur d'autres civières, patientent
d'autres corps, comme des malades dans une
salle d'attente préopératoire. Corps carbonisés
dont les membres noirs semblent figés dans la
position même où la mort les a surpris; corps de
noyés, verdâtres, marbrés de mordorures
sanieuses; enfants dont le visage méconnaissable
s'encroûte d'un cocon de sang coagulé, brunâtre.
Corps déjà à demi-décomposés, corps qui ne sont
déjà plus des corps, formes informes, vides, prêtes
à rejoindre la matière originelle, la glèbe... "

Merci à Babelio de permettre de voir , en une ou plusieurs citations , si un livre est bon ou mauvais ,et en faisant celà , de court circuiter la publicité médiatique : c'est d'ailleurs pour ça que des critiques comme Assouline détestent Babelio et n'arrêtent pas de diffamer ; une simple citation peut ruiner un fond de commerce !

Depuis que je lis des extraits sur Babelio , soit j'admire et j'achète , soit je n'arrête pas de me marrer ; )

Mon dieu ce que ce torchon est mal écrit !

On croirait une imitation drôle à mourir d'un
pédant snobinard, la chute sur le dernier mot , à chaque fois ,est totalement hilarante !
Manque plus que la binocle et le nez en l'air, mort de rire ! : n' hesitez pas à mettre d'autres extraits svp : " marbrés de mordorures sanieuses " Ha ! Ha ! Ha !

En fait je devrais lire d'avantage de mauvais livres , être plié de rire en permanence c'est bon pour la santé ! ; )
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Citations et extraits (37) Voir plus Ajouter une citation
« Valérie Subra est née le 8 avril 1966. Sept jours avant sa naissance, le 1er avril, La Religieuse de Jacques Rivette, tirée du roman de Diderot, était interdite sur pressions de l'Église. Mai 68 était tout proche : le visage de la France et de ses mœurs allait être changé. Dès 1967, selon l'enquête de personnalité, la mère de Valérie, née Isabelle V., divorce de son mari. Elle va vivre avec sa fille dans l'Essonne chez les grands-parents maternels, qui s'occuperont du bébé. La mère trouvera du travail dans un préventorium de la région. En 1969, elle se remarie. Mais, en 1970, les époux se séparent : « Valérie aimait bien son beau-père, dit Isabelle V, mais elle n'a pas été trop affectée par cette séparation, car de caractère déjà très indépendant. » Commencent les seventies. Ça n'est pas seulement la crise du pétrole mais celle des valeurs, comme on disait alors. Le monde de Papa se casse la gueule, le Paris de Zola s'écroule sous les pelleteuses : les Halles sont rasées, les quais de la Seine sont transmués en « voie sur berge ». C'est la montée aussi du terrorisme. En 1972, Andréas Baader, de la Fraction armée rouge, est arrêté.
En 1974, Isabelle V. se remarie avec un journaliste, Pierre S., son troisième époux donc. Elle a de lui un nouvel enfant. En 1975 : chute de Saigon. Écroulement des idéologies : Marx, Mao n'ont plus la cote. Cette année-là, le couple et les deux filles s'installent à Paris. Valérie doit quitter ses grands-parents auxquels elle est très attachée. Ceux-ci d'ailleurs, qui prennent leur retraite, vont vivre sur la Côte d'Azur. Valérie fréquente plusieurs écoles religieuses. La directrice du collège privé Sainte-Ursule, Louise de Brétigny, dira d'elle alors qu'elle est une bonne élève, instable, très gâtée par sa grand-mère qui l'a élevée. Nouveaux déménagements, nouvelles écoles pour Valérie. La mère s'installe à Chantilly.
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Car les « bêtises » commencent alors pour elle. Oh, piano au départ, ma non troppo ! Elle est au collège, en classe de troisième, dans le VIIe, arrondissement « chic ». Nous sommes en 1982. Sa mère se sépare de son troisième mari, Pierre S. Celui-ci décrit Valérie comme une « grande gosse complètement immature et inconsciente, qui avait un sacré petit caractère, mais pas influençable, étant plutôt du genre à prendre ses décisions par elle-même ». En avril 1982, sa mère connaît Christian C, un ingénieur : «Valérie, dit-il, était une gamine dans un corps de femme. Gaie, enjouée, mais très féminine. Spontanée. Ni renfermée, ni taciturne. Elle a eu une fin de scolarité indolente. Les études ne la passionnaient pas. Jusqu'à sa majorité, elle ne sortait que le dimanche après-midi. Elle était polie et courtoise, pas du tout influençable, ayant plutôt un caractère bien trempé. Elle savait ce qu'elle voulait.»
La directrice du collège où elle suit sa troisième dit d'elle : « C'était une petite minette gentille et coquette dont le comportement n'avait rien d'anormal. Pour ce qui est de son travail scolaire, il était nul. » Ses copains de lycée se souviennent très bien d'elle. Sylvie est blonde, pétillante, avec un verbe vert et tranchant, un feu d'artifice : « Si je la connais ! C'était une teigne, ouais ! Y'avait dans notre classe un jeune garçon, il avait autour de 15 ans, il était très mal dans sa peau. Il s'appelait X., on le surnommait "la gazelle" parce que le prof l'avait engueulé pour ses retards et qu'après déjeuner on le voyait toujours arriver au lycée en courant et sautant. Valérie, mais elle n'était pas la seule, ils étaient bien quatre ou cinq filles et garçons à le faire, n'arrêtait pas de le taquiner, parfois cruellement... Moi, je prenais sa défense. J'ai même fait le coup de poing avec deux types qui l'embêtaient... La préoccupation essentielle de Valérie, c'était les fringues. Et son acné ! Elle se mettait des pots de crème sur la gueule pour cacher ses boutons. [...] »
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1977 : Andréas Baader est trouvé « suicidé » dans sa cellule en Allemagne. Les soixante-huitards se rangent des bagnoles dans le show-biz, l'édition, le journalisme, etc. Demeurent quelques Don Quichotte de la révolution, qui versent dans le terrorisme. Cette année-là, Valérie entre à l'institut Anne-Marie-Jahouey, à Senlis. La directrice de cette école la trouve « intelligente, mais perturbée par la situation familiale de ses parents : ils étaient divorcés. [...] Elle présentait déjà une certaine maturité, vraisemblablement à cause de sa situation familiale. Elle avait un caractère renfermé et supportait à la limite la discipline. Elle est partie en cours d'année sans achever sa quatrième... » En 1979, se crée en France le groupe terroriste Action directe en liaison avec la Fraction armée rouge allemande. Valérie a 14 ans. Selon une de ses copines de lycée, c'est vers cet âge-là qu'elle aurait fait une fugue... En 1981 Valérie s'installe avec sa mère à Chantilly. « J'ai eu onze domiciles différents », déclarera-t-elle plus tard à Frédérique Lebelley.
C'est en 1981 que, pour la première fois, elle rencontre son père véritable : soit quinze ans après sa naissance. La scène a lieu dans la gare de Chantilly où, avec sa mère, elle est venue le chercher. M. Subra qui, entre-temps, s'est remarié et a eu un autre enfant, a, dit-il, éprouvé le besoin de reprendre contact avec sa fille... Au milieu de la cohue des passagers anonymes qui vont et viennent autour d'elle, comment Valérie pourrait-elle reconnaître son père dans cet homme brun, assez grand, inconnu parmi les inconnus ? La jeune fille reste sur sa réserve. Entrevue décevante ? frustrante ? père perdu aussitôt que retrouvé ? Un an plus tard Valérie téléphone à celui-ci. Elle lui demande si elle peut passer chez lui, à Marseille, les vacances de Pâques. Il accepte. Dans cette nouvelle famille, elle trouve une vie plus réglée. Elle refera régulièrement le voyage de Marseille. Elle songera même à s'installer chez son père : recherche d'une autorité ? d'un garde-fou ?
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« Le métier de mannequin et de comédienne n’est pas facile, raconte-t-elle. Il y a un abîme entre un “top model” et un simple mannequin. On n’imagine pas ! Les mannequins, on s’en sert, on ne les paie pas. On n’est même pas mises au courant des “parus” (parutions des photos). Quant aux comédiens, il y a de plus en plus de concurrence. On court d’un casting l’autre. On peut en faire des dizaines par jour. C’est crevant. Et, quand vous avez mauvaise mine, on vous le fait savoir ! Sans compter les castings bidons, ou douteux… Pour avoir droit aux Assedic, il faut avoir travaillé 707 heures par an. Or un cachet équivaut à 12 heures, ça n’est pas toujours évident… » En cette fin d’été, Alain T. vient tout juste de rentrer du Brésil où il a passé ses vacances. Le jour il s’adonne à son business. Le soir c’est l’Apocalypse, Régine, le Privé…
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(p. 24) . Dès qu’on entre dans les lieux, une odeur âcre prend à la gorge. Au fond une porte à glissière grise ouvre sur un énorme monte-charge par lequel, sur des civières roulantes, les corps sont transportés à l’étage supérieur: là, dans un grand couloir, sur d’autres civières, patientent d’autres corps, comme des malades dans une salle d’attente préopératoire. Corps carbonisés dont les membres noirs semblent figés dans la position même où la mort les a surpris; corps de noyés, verdâtres, marbrés de mordorures sanieuses; enfants dont le visage méconnaissable s’encroûte d’un cocon de sang coagulé, brunâtre. Corps déjà à demi-décomposés, corps qui ne sont déjà plus des corps, formes informes, vides, prêtes à rejoindre la matière originelle, la glèbe…
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Vidéo de Morgan Sportès
Intervention de Morgan Sportès pour son roman "Les djihadistes aussi ont des peines de coeur" lors de la présentation de la rentrée littéraire 2021 à la Maison de la poésie.
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