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EAN : 9782351785805
Gallmeister (07/09/2017)
3.98/5   76 notes
Résumé :

Publié en 1987, soit six ans avant la mort de l'écrivain, c'est le dernier des grands romans de Stegner - son finale... en sourdine. Deux couples d'enseignants à l'âge de la retraite, qui se connaissent depuis les années trente. se retrouvent pour des vacances dans une maison perdue au milieu des forêts. Passé et présent Jouent à cache-cache. cependant que la mort rôde en fond de décor... A la sortie ... >Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (23) Voir plus Ajouter une critique
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"Nous partagions tous ce même état d'esprit. C'est certain. Car, arrêtés devant leur portail avant de remonter en voiture, nous nous embrassâmes, hilares, en une étreinte à quatre, tant nous étions heureux de nous connaître et heureux de ce que les milliards de hasards de l'univers nous aient amenés au même moment dans la même ville et la même université."

Un petit matin d'août 1972 à Battell Pond, autour d'un lac du Vermont à quelques kilomètres de la frontière canadienne, haut lieu de villégiature pour les Lang, Ellis et leurs amis…
Larry, arrivé la veille avec son épouse Sally, sort de la maison d'amis faire quelques pas alentour, dans les chemins si souvent pacourus durant des années.

"Tel il était, tel il est, ce lieu où, pendant la meilleure époque de notre vie, l'amitié avait son domicile et le bonheur son quartier général."

Une amitié indéfectible. Larry et Sally, Sid et Charity. Les Morgan et les Lang.
Deux couples qui se rencontrent en 1937 à l'université du Wisconsin, à Madison, où Larry et Sid ont tous deux décroché un poste d'assistant.

C'est un coup de foudre immédiat entre les deux couples, les prémices d'une amitié que rien ne parviendra à entamer réellement, ni les choix et contraintes professionnels, ni l'éloignement géographique, ni les défauts des uns et des autres, ni les coups durs, ni le passage des ans.

Les souvenirs reviennent, et de la première année partagée à Madison aux vacances à Battell Pond, des années de guerre au séjour à Florence, différents moments essentiels de la vie de ces quatre êtres dessinent les contours de leur amitié si précieuse et si particulière, nourrie tant par les qualités indéniables des uns et des autres que par leurs travers.

Cette journée d'août 1972 court souterraine derrière l'évocation des quarante années qui la précèdent ; Larry passe d'une époque à une autre, passe les ans pour revenir sur ses pas, raconte aussi Sid et Charity avant leur rencontre avec Sally et lui, pour mieux revenir à cet attachement si profond qui les unit.

Comme des rides plissant la surface du lac, les évènements esquissent un schéma plus contrasté, ombré d'incompréhensions, d'agacements, d'envie aussi, qui amène à ce dernier jour d'août 1972, sans pour autant remettre en cause les sentiments partagés.

Malgré les accrocs et les blessures du temps, cette amitié est fabuleusement séduisante.
Wallace Stegner lui donne tous les chatoiements, l'enserre dans de superbes paysages, l'entoure d'une tribu, celle des Ellis, dans un lieu unique, Battell Pond.
Il évoque avec finesse ce qui pourrait remettre en cause l'attachement entre les deux couples, la force que cet attachement nourrit autant qu'il s'en nourrit.

J'ai été emportée par l'enthousiasme et le plaisir d'être ensemble de ces quatre amis, leurs aventures et mésaventures, et ce lien que rien ne peut défaire.

C'est un très beau roman dont je n'oublierai ni les personnages ni les lieux, en particulier Battell Pond et les environs du lac où se rassemblent année après année les Ellis, Lang et amis, "la bibliothèque ouverte à tous et emplie d'ouvrages salutaires au nombre desquels j'ai noté le Vent dans les saules, le Manuel du boy-scout, toute la série des Winnie l'Ourson, le Cheval et l'Enfant, Les Quatre Filles du docteur March, Jody et le Faon. Sans compter des piles de National Geographic" du cottage de Tante Emily dans les années 1930, à laquelle fait écho "l'alcôve, où, disposés de part et d'autre d'un oriel, des meubles et des rayonnages croulaient de livres, de cubes, de poupées, de modèles réduits de voitures et de camions, de jeux de société, pour les visites impromptues des petits-enfants" de Charity et Sid quarante ans plus tard.

Sans parler des lectures de Tante Emily à tous ces petits enfants, "d'innombrables cousins, neveux et nièces,
petits-neveux et petites-nièces, petits voisins, enfants d'invités ou de gens en visite", surtout celle de Hiawatha de Longfellow, qu' "Elle lit d'une voix forte afin de se faire entendre malgré le crépitement de la pluie."
"Tous les petits Indiens rangés en demi-cercle autour de Tante Emily reçoivent une empreinte qui leur restera toute la vie. le son de sa voix en train de lire conditionnera leur vision d'eux-même et du monde. Cela s'inscrira pour partie dans l'ambiance chérie de Battell Pond, trait de lumière dans l'émerveillement chromatique de leurs jeunes années. Ces sensibilités enfantines ne se départiront jamais des images de forêts obscures et de lacs étincelants."
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Comment sait on dès les premières lignes que l'on vient d'ouvrir un très bon roman ?
L'histoire avance lentement mais vous ne remarquez pas cette lenteur, vous êtes suspendu aux mots, ils vous tiennent en haleine. En quelques paragraphes les héros semblent faire partie de votre univers depuis toujours.
Un roman sans armes à feu, sans passions exacerbées, sans divorce, sans drogue, rien de spectaculaire ici.
Des vies pleines, riches, parfois difficiles, une amitié qui repose sur de fortes différences et qui pourtant ne vacille pas même dans la tempête.

Il est temps de faire connaissance avec les deux couples d'universitaires car vous allez passer la moitié d'un siècle avec eux.
Dans les années trente, Larry Morgan, le narrateur, vient d'épouser Sally qui attend un bébé.
Il a obtenu un poste à Madison, Wisconsin, ils sont désespérément fauchés et Larry s'acharne à l'écriture de nouvelles qu'il espère vendre à des magazines.
La rencontre avec Sid et Charity Lang va changer le cours de leur vie. le couple Lang représente la notoriété, la richesse, les relations mondaines. C'est une véritable adoption plénière qui va avoir lieu, ils vont tout partager : Les soirées à parler littérature, les espoirs des uns et des autres, les pique-niques qui deviennent un rituel mémorable, les naissances, les vacances dans le Vermont, la guerre, les échecs.

Des liens fort se créent qui gomment les différences et font accepter les contraintes de la vie quotidienne.
Tout n'est pas parfait, Sid rêve d'écrire de la poésie mais pragmatique et ambitieuse Charity le pousse à écrire des articles et livres pour servir sa carrière, elle organise tout, est indispensable à tous, mène d'une poigne de fer toute sa tribu et les Morgan très vite en font partie. Larry regimbe parfois devant tant d'autorité mais toujours les quatre amis sont soudés face aux réussites joyeuses comme aux accidents de l'existence. L'amitié encaisse tout les chocs car dit Larry :
« Mon sentiment pour eux est une part de moi-même avec laquelle je ne me suis jamais querellé, même si mes rapports avec eux ont pu être plus d'une fois quelque peu raboteux. »
En plusieurs retour vers le passé Wallace Stegner décrit à merveille la vie qui s'écoule, le partage permanent, la mémoire des instants heureux. Voilà ce qu'il dit de ses intentions à la parution de ce qui fut son dernier roman :
« Je voulais faire toucher du doigt une vérité moins fardée encore que d'habitude, une vérité vraiment nue. Faire entendre une musique qui ne remuerait que de tout petits bruits, mais dont les échos iraient un peu plus loin. » , il tient parole je vous l'assure.

Un roman pour lequel un critique américain parle de « rasade de sagesse » j'aime bien l'expression. Un livre qui est une belle méditation sur l'amitié, la création littéraire, la compassion et l'amour entre les êtres, servi par une écriture sans effet, dépouillée
mais jamais mièvre.
Vous pouvez le trouver sur les sites de livres d'occasion, je viens de le relire avec un plaisir intact, je vous propose de lui faire une place dans votre bibliothèque.

Lien : http://asautsetagambades.hau..
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Mais c'est qu'il se moque de nous, dans son dernier roman, ce Wallace Stegner. Il nous émiette quelques phrases, disant depuis le début qu'un drame est arrivé mais on ne sait pas pourquoi ni dans quelles circonstances. On ne peut qu'essayer de deviner, on se dit que l'on n' a pas été attentif, on relit, on ne comprend pas plus. Puis , sans plus, il commence en revenant en arrière, à la première personne, le récit d'un stagiaire à l'Université de Madison, puis écrivain, son mariage, leur rencontre avec un autre couple, la forte amitié qui les lie tous les quatre. En d'autres termes, Stegner nous laisse en plan, et il essaie de se rappeler le passé sans être sûr de sa mémoire, et de le faire revivre pour nous, en nous laissant dans l'incompréhension.
C'est à la page 213, alors que nous sommes toujours dans l'expectative, que l'auteur se moque encore plus de nous, avec une jubilation que nous partageons : « C'est ici, écrit-il, l'emplacement idéal pour lâcher des sous-entendus et semer des indices, le moment idéal pour cacher derrière le piano ou dans la bibliothèque des révélations que, par la suite, à la grande satisfaction du lecteur, je mettrai triomphalement au jour. Cela, si je cultivais le rebondissement dramatique. » Qu'il pratique, le petit malin. Puis il énumère quelques hypothèses sur la suite à donner à ce quatuor, qu'il écarte avec ironie : puisque c'est une amitié, on peut penser à un pourrissement de celle-ci, ou à un échange de partenaires, y compris les 2 hommes ensemble, ce serait vraiment moderne. Hypothèses rejetées. Car la reconnaissance et une amitié partagée lie ces deux couples durant presque 40 ans.
En lieu sûr, c'est aussi le récit d'un écrivain qui écrit, mais ne pourrait écrire cette histoire, dit il à la fin du roman, trop intime pour lui. Autre jubilation. Autobiographie déguisée, ou fiction, peu importe, car les descriptions de la nature du Wisconsin sont remarquables, la prose belle et simple, l'analyse d'une amitié qui dure ( et plus encore l'amitié entre les deux femmes, l'une « belle, élancée, exotique et exubérante », l'autre sage, douce, féminine :bravo , Stegner, tu t'es moqué de nous, mais tu nous donnes une humanité réelle et haute) et puis la vie au paradis qu'ils partagent, ah, et qui dit paradis dit serpent.
Autre ressort stylistique : Larry Morgan, le locuteur écrivain, écrit à la première personne, sauf quand il se moque de lui même et devient « il », souvent pour dire sa déception de ne pas être un grand écrivain : « Fin du rêve secret de Morgan de voir son petit roman non annoncé épater des dizaines de milliers de lecteurs par son ironie, son empathie et sa sensibilité, et les déposer, son épouse et lui, en carrosse-citrouille dans Pinacle Street. » Ironie, empathie et sensibilité : les trois énormes qualités du roman. Et la psychologie de l'autre couple, un mélange d'esclavage consenti et mutuel, la rivalité latente entre les quatre, la jalousie non exprimée des deux hommes quant à leurs atouts différents, et le soleil, qui vient apaiser les coeurs mais n'annihile pas le serpent. Ce serpent dresse sa queue à propos de rien, et il n'apparaît pas pas fortuitement, par une intrusion à l'intérieur de ce paradis, en fait il fait partie du paradis.

Citant Tchekhov et ses ressorts stylistiques , Stegner cite aussi beaucoup d'écrivains ou poètes américains, que malheureusement je ne connais pas :Swinburne, Spenser, Gabriel Harvey, et plein d'autres, dont Henry Adams « le chaos est la loi de la nature : l'ordre est le rêve de l'homme », phrase que Stegner reprendra à la fin de son livre : « L'ordre est , de fait, le rêve de l'homme, mais le chaos, autrement dit le hasard aveugle, insensé, reste la loi naturelle ». Livre tellement riche que j'ai du mal à conclure, mais dire quand même que le livre contient des pages inoubliables sur le Christ ressuscité de Piero della Francesca à Sansepolcro. Et puis les femmes qui souffrent, et la compassion à leur égard de l'auteur/ locuteur, y compris quand il nous les as présentées tyranniques et égoïstes. Livre complet, d'un érudit, j'arrête , je ne sais dire que : chef d'oeuvre.
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Mon avis :

Ce roman est un livre rare, parce qu'il nous parle d'un sujet rarement traité en littérature, celui d'une amitié de quarante ans. Nous commençons par la fin: nous savons qu'une des protagonistes de cette amitié est en train de s'éteindre. Fidèles jusqu'au bout, l'autre couple est venu l'accompagner, parce que pour eux, c'était le seul comportement possible.
Alors le narrateur, Larry, nous fait revivre le début de leur amitié. Lui et sa jeune épouse Sally ne roulaient pas sur l'or, il venait de décrocher son premier poste universitaire, elle attendait leur premier enfant, et ils ont rencontré Sid et Charity. Lui enseigne depuis quelques années déjà, elle est plutôt extravertie, surtout, elle adore prendre les choses en main, et le fera pour le jeune couple. Ce qui m'a frappé dans la première partie du roman est à quel point la vie pouvait être difficile dans cette Amérique des années trente, cette Amérique qui se relevait péniblement de la crise de 1929. Il suffit de lire les pages consacrés à l'accouchement de Sally, et aux soins qu'elle et sa fille devront subir, ou encore l'aide que devront leur apporter Sid et Charity quelques temps après. le narrateur ne garde pas que les moments heureux dans son récit, mais il montre comment les épreuves ont pu être surmontées, comment être soutenus est important et l'amitié, la vraie, n'est pas à sens unique et qu'après les épreuves peuvent survenir de vraies périodes d'apaisement, comme leur séjour en Italie.
Charity/Sally, ou le contraste entre deux amies, devenues amies peut-être parce qu'elles étaient très différentes. Sally représente la sérénité, en dépit des épreuves traversées. Elle vit avec, pas de place pour les lamentations ou les regrets. Charity planifie tout de manière obsessionnelle, y compris la carrière de son mari, qui n'a jamais pu devenir le poète qu'il aurait rêvé d'être. Cela donne lieu à des dialogues savoureux avec Charity :

– Enfin, Sid, le monde a besoin de gens qui fassent des choses, pas de gens qui fuient la réalité.
– Je ne suis pas d'accord. La poésie n'est pas une fuite. Mais qu'est-ce que vous me suggereriez à la place.
– D'enseigner.
– D'enseigner quoi ?
– Ce que vous étudiez. Ce que vous connaissez.
– La poésie.

Larry, lui, écrit, est devenu un écrivain reconnu, et s'interroge aussi sur l'écriture, pas en temps qu'universitaire (le milieu universitaire américain des années 30 semble parfois bien puéril), mais en temps qu'auteur qui se demande si ce qu'il écrit peut convenir ou plaire aux lecteurs. Pour ma part, j'ai beaucoup apprécié ce livre qui nous racontent des existences paisibles, sans drame passionnel ou tragique violence.
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Un couple est invité à traverser les Etats Unis pour retrouver un couple d'amis qu'ils n'ont pas vu depuis quelques années. C'est l'époux Larry qui raconte non seulement le présent mai les souvenirs tels qu'ils lui reviennent. D'une famille assez modeste, il a perdu ses parents jeune et devenu prof d'université a été nommé pour son premier poste à Madison dans le Wisconsin. Lui et son épouse Sally, également orpheline, ont très vite fait la connaissance d'un autre couple, Sid et Charity Lang qui non seulement sont riches mais ont une familles et des amis importants socialement. Lui est également un jeune prof, les deux femmes sont enceintes. Très vite l'amitié est absolue. Les Lang soutiennent les Morgan sans arrière-pensées. Soirées et sorties en pleine nature, en particulier dans le Vermont où ils possèdent une propriété se multiplient. C'est lors d'une randonnées qu'un drame survient mais ne se découvre que lentement. le narrateur n'a pas besoin de préciser, il sait lui de quoi il parle. C'est le naturel de ses pensées et souvenirs que j'ai apprécié, ainsi que l'omniprésence de la nature. Les Lang n'ont pas non plus été complètement épargnés par la vie, il y a d'ailleurs eu une rupture dans les relations lorsque les Morgan ont changé de région sans que l'on connaisse exactement les circonstances. C'est la vie, avec ses hauts et ses bas, au commencement sur fond de Dépression et de seconde guerre mondiale jusqu'au début des années 70. Les réussites sont diverses.

Ce livre semble en grande partie autobiographique. Il parle d'amitié, de relations dans le couple, ses difficultés et son étrange alchimie, des milieux universitaire et éditorial, et beaucoup de la nature.

C'est mon second Wallace Stegner, ce ne sera pas le dernier.
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Citations et extraits (57) Voir plus Ajouter une citation
Une semaine plus tôt, sur un coteau situé de l'autre côté de Middleton, je les ai regardées, elle et l'aristocratique épouse d'un prof associé irlandais, faire une descente en luge. L'Irlandaise s'y est allongée sur le ventre comme une enfant de dix ans. Au moins Charity a-t-elle eu le bon sens de s'y asseoir et de diriger avec les pieds, même si elle n'a pas eu celui de ne pas faire la course. Elles se sont mises à dévaler la pente de concert en poussant des cris aigus. Passant sous un grand chêne, elles ont abordé une zone de poudreuse. Les patins se sont enfoncés, les luges se sont arrêtées et ces dames sont parties en glissade, l'Irlandaise à plat ventre, Charity pesamment sur le derrière. "Mordiou !" a, me semble-t-il, lancé la première. S'essuyant le visage, faisant tomber la neige de leurs moufles et, à grandes claques, de leurs vêtements, riant à perdre haleine, elles ont remonté péniblement la pente en remorquant leurs luges pour faire une nouvelle descente.
p.83
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Soudain, une fraîcheur vaporeuse nous souffla au visage, des bruits d'eau montèrent jusqu'à nous, en stéréophonie, en de nombreuses tonalités et parcourus d'échos. Une faille s'ouvrait devant nous et nous plongeâmes le regard dans un ravin fantastique, chatoyant d'ombre et de lumière, où le torrent apparaissait, disparaissait et réapparaissait au long de trous et de cavités aussi lisses et sinueux que le toboggan d'une piscine de parc d'attraction. À nos pieds, sur la droite, l'eau jaillissait du rocher et tombait de trois ou quatre mètres dans une cuvette céladon. Des bulles opalescentes fuyaient le long de la paroi, des courants brassaient l'eau du bassin et, la soulevant par-dessus une lèvre vernissée, la précipitaient dans une deuxième chute, qui échappait à notre vue, mais dont nous voyions l'arc-en-ciel. En aval de ce second bassin, le torrent serpentait, tantôt visible, tantôt masqué.
- Seigneur ! lança Sid. Se peut-il qu'un tel endroit existe ?
p.250
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Jetant un œil sous le capot, j'ai vu qu'il ne s'agissait pas d'un douze cylindres en ligne, comme je me l'étais toujours figuré, mais d'un V-16. Ce moulin aurait tracté une pompe à incendie. À chaque temps un flux d'essence gros comme le doigt devait gicler dans le carburateur. Elle haletait à notre adresse avec le chuchotement whisky-et-emphysème d'une douairière d'Edith Wharton. "Dollar-dollar-dollar-dollar-dollar", faisait-elle.
p366
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« Laisser notre marque sur le monde. Au lieu de cela, c’est le monde qui nous a laissé des marques. Nous avons avancé en âge. La vie s’est chargée de nous assagir, en sorte qu’aujourd’hui nous gisons dans l’attente de mourir ou marchons avec des cannes ou séjournons sur des galeries où jadis les fluides de la jeunesse circulaient puissamment, et nous nous sentons vieux, mal fichus et désemparés. Il m’arrive parfois d’affirmer d’un ton chagrin que nous nous sommes tous fait piéger, alors que bien évidemment piégés, nous ne le sommes pas plus que la majorité des gens. »
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" Les écrivains sont-ils reporters, prophètes, agitateurs, amuseurs, prédicateurs, juges, quoi d autre encore ? Qui les nomme porte-parole ? Et s'ils s'autoproclament tels, ce qui est manifestement le cas , quelle est la validité de ce mandat ? Si, comme le pensait Anatole France, c'est exclusivement la durée qui fait les chefs-d'oeuvre, alors les grands écrits ne sont que tâtonnements ayant surmonté l'épreuve du temps ; et , s'ils se ramènent à cela , il faut par-dessus tout qu' ils soient libres, qu' ils procèdent du talent et ne résultent pas de contraintes extérieures. Le talent est sa propre justification, et l'on ne saurait dire avec certitude, avant le pourvoi devant la postérité, s'il vaut vraiment quelque chose ou bien n'est que l'expression éphémère d'un engouement ou d'une tendance, l'expression d'un stéréotype."
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