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4,21

sur 16315 notes
Je vais volontairement tâcher de ne rien déflorer du délice de cet ouvrage époustouflant, atroce et tellement, TELLEMENT fort, afin que ceux qui désirent s'en repaître sans connaître l'histoire au préalable puisse tout de même avoir quelques indices.

Voici un pur bijou, du très grand Steinbeck. J'ai rarement lu un livre aussi petit qui me frappe aussi fort et aussi durablement (il n'y aurait peut-être que Montserrat d'Emmanuel Roblès ou On Achève Bien Les Chevaux d'Horace McCoy à concourir dans cette incroyable catégorie). Où donc John Steinbeck est-il allé chercher une pareille histoire (qu'il n'est pas usurpé d'appeler une histoire d'amour sous ses apparences tout autres) ? Probablement du côté d'Edith Wharton est de son étonnant Ethan Frome, mais ça c'est juste mon intuition.

Quoi qu'il en soit, l'auteur nous sert des dialogues impeccables, un scénario parfait, simple, efficace, un style lumineux, un fil qui se tend tout au long du récit jusqu'à vous éclater au visage. Si vous restez insensibles, allez d'urgence consulter un cardiologue car il y a vraisemblablement un problème de ce côté là !

Je voudrais seulement offrir deux comparaisons pour les deux protagonistes principaux, l'une pour George, l'autre pour Lennie.

George, l'ouvrier agricole modèle, pas naïf, les pieds sur terre, qu'il ne faut pas trop chercher mais qui est une bonne pâte dans le fond, me fait beaucoup penser à Jean dans La Terre d'Émile Zola. La Jacqueline de Zola a aussi son pendant dans ce livre.

D'autre part, ceux qui ont lu L'Homme Sans Qualités de Robert Musil trouveront peut-être une ressemblance frappante entre ce Lennie et le personnage de Moosbrugger au chapitre 18 de cet autre monument littéraire qui date lui aussi des années 1930.

C'est un caractère récurrent chez Steinbeck de choisir un protagoniste souffrant d'une difformité physique ou mentale comme une sorte de Quasimodo moderne (voir La Grande Vallée, Les Pâturages du Ciel pour les difformités physiques, À l'est d'Éden pour les mentales).

Bonne lecture et surtout, j'aimerais souffrir d'amnésie pour revivre le plaisir que j'ai eu à lire ce livre pour la première fois, néanmoins, ce n'est là que mon tout petit avis parmi une kyrielle d'autres, c'est-à-dire, bien peu de chose.

P. S. : On sait que John Steinbeck s'est inspiré du poème en dialecte écossais de Robert Burns de 1785 intitulé « To a mouse » pour choisir le titre de son oeuvre et que le passage suivant décrit à merveille ce qui s'y passe :
« The best-laid schemes of mice and men
Go oft awry,
And leave us nothing but grief and pain,
For promised joy ! »

La symbolique est partout très forte dans ce roman et j'aimerais simplement faire une toute petite remarque quant à l'utilisation de la souris. Ici, malheureusement, on perd beaucoup à la traduction. Dans le titre original " Of Mice and Men ", l'utilisation de deux substantifs proches à l'oreille et ayant un pluriel particulier (ce qui n'est pas si fréquent en anglais) rapproche inévitablement, comme dans le poème de Burns, l'Homme en général de la Souris. Dans le déroulement de l'action, le parallèle entre l'un des personnages, broyé par Lenny et la souris me semble assez transparent.

De même, la fuite continue de George et Lenny, au départ, n'est sans doute pas très différente de la fuite des rongeurs face à leurs bourreaux humains. Si bien que la question qu'il convient de se poser est : Qui sont les bourreaux de George et Lenny ? Mais voilà, c'est tout le roman, cette question, et c'est pour ça qu'il est vraiment grandiose.
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Ils rêvent d'un lopin de terre, d'une petite ferme à eux, d'être libres et rentiers. Mais avant, ce qui attend Lennie et George c'est un boulot mal payé d'ouvriers agricoles dans un ranch de Californie.

Un travail indispensable qui se révèle un péril permanent pour Lennie, un géant naïf et impulsif. Un danger que rien ne peut éloigner, pas même les mises en garde de son ami George, dont la bienveillance envers lui, même si elle s'exprime brutalement, est touchante. L'auteur en empathie avec ses héros terriblement humains nous prépare à un drame. La tension est palpable, on se surprend à souhaiter vraiment que Lennie écoute son ami et ne se mette pas dans de sales draps.

A travers un univers qu'il connait pour y avoir travaillé, celui des travailleurs agricoles, John Steinbeck dénonce la politique et le système économique qui ont conduit à la Grande Dépression. Cette oeuvre naturaliste exceptionnelle — véritable plaidoyer contre le racisme, la ségrégation, le rejet du handicap —, digne d'un drame antique, est un regard critique essentiel sur une Amérique qui, engendrant un monde d'exclus, a déçu.
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Les très grands livres ne sont pas forcément les plus alambiqués, labyrinthiques ou interminables.
Les très grands livres, tel Des souris et des hommes, offrent la beauté et la simplicité d'un simple chemin de campagne ou d'une photo en noir et blanc aux bords dentelés (et de bien d'autres belles choses aussi).
Les deux protagonistes principaux, ce sont Lenny et Georges qui vont par les fermes louer leurs bras et dépenser leur sueur. Eux, sont deux hommes simples et ils ont un rêve commun qui est déjà un projet.
La tragédie, sublime sous le ciel des immenses espaces d' Amérique du nord, est en marche...
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Dans les années trente, en Californie comme ailleurs, le machinisme était encore balbutiant si bien que les exploitations agricoles avaient recours à une multitude de journaliers qui de l'aube au crépuscule s'échinaient à la tâche.

La Grande Dépression a jeté sur les routes quantité de pauvre hères qui, le baluchon sur l'épaule, sillonnent la campagne en quête de travail.
George et Lennie sont de ceux-là. Ils viennent d'être embauchés dans un ranch situé au sud de la petite ville de Soledad, entre San Francisco et Los Angeles.
Encore jeunes, ils forment un bien curieux tandem : George est futé mais paraît assez frêle alors que Lennie est simplet mais d'un gabarit impressionnant. Une amitié indéfectible unit ces deux êtres d'allure et de tempérament si dissemblables. Chaque jour ils entretiennent le rêve de posséder en commun un petit lopin de terre, d'élever des animaux, de fréquenter qui bon leur semble, de vivre comme des rentiers…

Ce court roman est d'une saisissante dramaturgie. Assez vite le lecteur pressent le danger qui guette George et Lennie et aimerait voir les deux amis quitter au plus vite ce nouvel employeur au fils bagarreur et à la bru trop aguichante.

Lorsqu'il publie “Des souris et des hommes” en 1937, à seulement 35 ans, John Steinbeck est sans doute loin d'imaginer marquer de son empreinte l'histoire de la littérature. Quatre vingts ans plus tard les lecteurs continuent de plébisciter ce roman de l'amitié et de l'altérité dont la concision tutoie la perfection.
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La littérature de John Steinbeck fut qualifiée de « literature of social commitment », à juste titre. En plus du réalisme, il y a le grotesque aussi, mais pas ironique. C'est impressionnant à quel point le romancier maîtrise le langage de tous les jours.
L'une des questions soulevées par le livre concerne la société précisément : est-elle dominée par la peur ? Quoi qu'il en soit, elle est hostile à Lennie et le message semble assez clair et très pessimiste : les rêves ne se réalisent jamais. Il n'en demeure pas moins qu'une certaine forme de fraternité peut exister, comme celle entre George et Lennie, et avec Slim, sorte de leader incontesté de la communauté des fermiers.
Enfin, un dernier mot sur le thème de l'innocence : Lennie a l'innocence et la naïveté d'un enfant, qui le conduisent au meurtre. Une autre question se pose donc : l'innocence existe-elle ?

Magistral, à lire sans plus attendre !
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Un roman noir parmi les classiques


Mardi 19h16. Chatelet-Les Halles. Quatre pages encore à lire avant de refermer « Des souris et des hommes ». Troublé et pensif, au bord du quai en attendant le RER B, je vois surgir en contre-bas, devant moi, une souris chevauchant les rails à toute vitesse. S'agirait-il d'une coïncidence ou d'un clin d'oeil de Lennie, le héros du roman de Steinbeck ? Mystère, mystère…

Comme je l'ai appris dans « L'assassin qui en moi »de Jim Thompson, la citation "Les projets les mieux conçus des souris et des hommes souvent ne se réalisent pas", extraite du poème de Robert Burns "To a Mouse" (1786), a inspiré le titre de ce roman à John Steinbeck.
Sous le titre original "Of Mice and Men", ce court roman fut publié en 1937 par le celèbre écrivain américain, suivi de son autre oeuvre majeure "Les Raisins de la colère" en 1939.

Dans le roman « Des souris et des hommes », Steinbeck distille une histoire pasionnante à travers une relation d'amitié profonde et indéfectible entre deux hommes très différents : Georges Milton, petit chef et vif d'esprit, et Lennie Small, colosse légèrement attardé au visage informe et véritable force de la nature.

Partageant le même rêve de posséder un jour une petite propriété pour élever des lapins, les deux hommes vadrouillent de ferme en ferme pour économiser suffisamment pour se payer cette terre promise. Ils se baladent ainsi tranquillement à pied pour rejoindre un ranch de Californie afin de travailler comme saisonniers. Néanmoins, Lennie a la fâcheuse manie de vouloir caresser toutes les choses douces : du velours, de la soie, des souris, des chiots, … et même la peau ou les cheveux des femmes, ce qui lui a causé bien des ennuis dans son ancienne ferme.
Continuez donc la route en compagnie de nos deux amis inséparables Georges et Lennie jusqu'au ranch des Curley à Soledad pour connaitre le fin mot de l'histoire…

Dès le début du roman, j'ai découvert de fortes similitudes avec le magnifique roman de Charles Williams « La fille des collines » : une belle écriture dès qu'il s'agit de décrire les paysages et la vie animale entourant les protagonistes, des dialogues marquants pour des personnages vivant à la campagne, et enfin le plus important, l'attrait diabolique de la femme, objet et source de conflit permanent entre les hommes.

J'ai particulièrement apprécié le début plutôt lent et attendrissant entre nos deux héros et la seconde partie du roman très enlevée aboutissant au final magnifiquement écrit et émouvant.
En outre, un passage spécifique du livre a retenu mon attention ; il s'agit d'une conversation entre Lennie, Crooks, le palefrenier noir de la ferme et enfin Candy, un brave homme qui a perdu une main au travail. En quelques pages seulement, John Steinbeck réussit à symboliser l'exclusion des noirs, des handicapés et des malades mentaux à cette époque. Une mise à l'écart qui n'a pas les mêmes causes, par nature, mais qui a les mêmes effets. Un passage tout simplement magnifique digne d'un très grand auteur.

Pour conclure, il se dégage de ce roman une proximité littéraire forte avec des romans noirs comme « On achève bien les chevaux » d'Horace Mc Coy (que j'ai moins aimé mais dont l'idée originale est lumineuse) ou « La filles des collines » de Charles Williams (que j'ai adoré). Néanmoins, je constate que Steinbeck est lu par un large public et on l'affuble de roman classique alors que les autres sont considérés comme des romans noirs.
A mon humble avis, « Des souris et des hommes » dépeint aussi durement la condition humaine que dans les deux autres livres évoqués, ceci dans un format plus court. Dommage pour de nombreux lecteurs qui passent à côté d'oeuvres incontournables et trop méconnues (américaines notamment).

Comme quoi, pour qu'un roman attire la lumière, il est préférable d'être noir parmi les classiques qu'être un classique parmi les noirs…


PS : je vous conseille évidemment de lire ou relire ce très court roman. Elaine Steinbeck évoquait son mari dans une lettre en parlant d'une « âme lourde mais essayant de voler ». Exactement à l'image de ce livre, une âme lourde mais essayant de voler…en direction d'un lopin de terre au milieu des lapins mangeant de la luzerne.
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Cette histoire courte au format "nouvelle" est la porte d'entrée idéale pour découvrir John Steinbeck.
Le contexte de l'Amérique rurale, des métayers journaliers allant de ranchs en exploitations pour gagner juste de quoi survivre jusqu'au prochain boulot et entretenir l'espoir de peut-être économiser assez pour avoir son lopin de terre à soi.
Des sentiments basiques, une sensibilité à fleur de peau, une rancoeur et une violence sous jacente dans un monde où le temps semble s'être arrêté, où l'espoir d'un avenir meilleur semble s'être figé.
Un récit âpre et intense, un presque huis-clos qui prend forme en l'espace de 48 heures à peine, un drame pressenti dès les premières lignes, une spirale qui apparaît et qui va inexorablement aspirer les deux amis de toujours, Georges le petit gars débrouillard et Lennie le gentil colosse à la force phénoménale qui n'a pas fini de grandir.
Une histoire qui, je le crois n'aurait pu se dérouler qu'aux Etats-Unis et seulement dans cette période de récession qui a vu tant d'hommes se vendre à la journée pour seulement survivre et continuer d'y croire.
Une lecture au goût d'instantané, un fait divers tragique, un pied de nez du destin, dans tous les cas une histoire qui parlera à chacun selon sa sensibilité car il n'y a pas ici de morale à rechercher ni de justification à trouver.
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Bien qu'ayant déjà lu ce livre, je l'ai relu d'une traite en retenant mon souffle ! Un miracle que je sois encore en vie en y réfléchissant ;-)

A l'heure de la Grande Dépression des années trente, George et Lennie traversent le pays de ranch en ranch au gré des boulots qu'ils trouvent. Tout semble opposer les deux hommes, tant physiquement que mentalement. Mais l'amitié et LE rêve qui les lient, quoique parfois encombrants, semblent indéfectibles. Un tandem pour le moins insolite dans cet univers d'hommes solitaires et désenchantés. Mais quel tandem ! Cruellement et tendrement attachant.

Les personnages semblent tout droit sortis d'un conte… George, Lennie, le patron, la femme du patron, le palefrenier, le roulier, les joueurs de fers à cheval. Ils sont pourtant comme la moiteur de l'été qui vous colle à la peau.

Une tension s'installe sans qu'on s'en rende compte, genre duel à la Sergio Leone, il ne se passe rien, l'air est immobile, mais tous nos sens sont en alerte, tendus vers un dénouement final qu'on sait inéluctable.

« Si deux hommes essayent de se comprendre, ils seront bons l'un envers l'autre. Bien connaître un homme ne conduit jamais à la haine, mais presque toujours à l'amour. » a déclaré Steinbeck.

Et c'est exactement ce qu'il fait dans cet ouvrage. Avec une écriture assez distanciée en fait, il tente de nous faire comprendre ces hommes… et ces souris !!! C'est ingénieusement bien écrit, la simplicité portée à l'état de grâce ! Les dialogues d'une remarquable justesse donnent une épaisseur bien réelle aux personnages. Ces derniers prennent vie sous nos yeux. On voudrait tantôt les aider, les réconforter, les secouer, ou les baffer !
L'amour est un magnifique convoyeur d'espoir semble nous dire en substance l'auteur, mais qu'advient-il de l'amour par temps de misère ?

Sublime petit roman d'une grande intensité. A Lire… et relire !
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Jamais il ne m'a été donné de ressentir une telle émotion en lisant un roman. Je n'ai certes pas l'expérience de certains lecteurs chevronnés inscrits sur Babelio, mais j'ai tout de même eu l'occasion d'apercevoir au fil de mes lectures des ouvrages prenants, frappants, étouffants, des livres qui m'ont fait un choc et m'ont marqué, mais aucun ne m'a touché comme celui-ci, aucun n'a été aussi poignant.
À vrai dire, je manque de qualificatifs, étant donné que j'ai achevé ma lecture il y a à peine quinze minutes. Mais je voulais faire partager tel quel le sentiment qui m'a submergé en arrivant au terme de cette magnifique histoire d'amitié.
Pendant trois heures j'ai partagé la vie de George Milton et Lennie Small, immergé dans l'ambiance californienne des années trente. Pendant trois heures, j'ai suivi de près leur rêve d'avoir une petite propriété où ils vivraient comme des rentiers, élèveraient des lapins, et partageraient une vie heureuse, ne demandant rien à personne. Tout au long de ce, court mais intense, périple, la tension monte jusqu'à un dénouement qui ferait fondre un coeur de pierre.
J'en ai encore la gorge nouée au moment où je vous écris, et, si je ne suis habituellement pas de ceux qui s'émeuvent devant un ouvrage, je dois avouer que celui-ci ne m'a pas laissé de marbre
Des souris et des hommes, c'est une magnifique histoire d'amitié racontée dans une langue incroyablement juste. Il n'y a pas un mot de trop, tout est à sa place. Mais je dois avouer que s'il y a bien quelque chose qui a retenu mon attention dans ce roman, c'est manifestement la candeur et le caractère enfantin de Lennie, et le lien indéfectible qu'il entretient avec George.
Ce qui est sûr, c'est que je ne fermerai jamais tout à fait ce livre, et qu'il risque de longtemps rester dans un coin de ma mémoire.
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Livre lu à plusieurs reprises à différentes époques de ma vie et qui m'a fait grande impression à chaque fois ; on peut donc dire que j'ai énormément apprécié.

C'est une référence et un incontournable de Steinbeck à découvrir pour ceux qui ne connaissent pas encore.

Du coup, hier je me suis mise devant le petit écran car le film était passé sur Arte et je l'avais enregistré.

J'ai dégusté ce petit bijou si justement joué par John Malkovich et Gary Sinise et la magie a encore opéré.

Magnifique !
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