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EAN : 9782070134076
304 pages
Gallimard (27/10/2011)
4.5/5   2 notes
Résumé :
Les praticiens l'ont toujours su. Dans toute philosophie, concédait Sartre, il y a "une prose littéraire cachée". Ce qu'on a moins élucidé, c'est la pression formatrice incessante des formes du discours, du style, sur les programmes philosophiques et métaphysiques. A quels égards une proposition philosophique, même dans la nudité de la logique de Frege, est-elle une rhétorique ? Veut-on dissocier un système cognitif ou épistémologique de ses conventions stylistiques... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
George Steiner est un esprit libre qui agace certains et en fascine d'autres par sa culture encyclopédique, sa connaissance des langues anciennes et son amour de la philosophie. Cet auteur d'une oeuvre complexe, prolifique, qui navigue entre poésie, linguistique et métaphysique, « Hors-champs » a souhaité dans des entretiens réalisés chez lui à Cambridge, l'interroger sur les chaos du monde, la montée des intégrismes, le bonheur de l'existence. Au cours de ces émissions, il revient sur son adolescence au moment de la montée du nazisme, évoque son apprentissage de la science, sa fascination pour les grands mythes qui structurent notre pensée occidentale, évoque les figures de Gershom Scholem, Walter Benjamin, Heidegger, avoue son sens de la contemplation qu'il assouvit dans l'amour infini de la lecture et de la musique lui qui, en raison d'un handicap, fut un musicien contrarié. George Steiner, un intellectuel insoumis insolent luttant contre toutes les modes.
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critiques presse (1)
Lexpress
21 décembre 2011
En examinant ainsi la poésie de la pensée, Steiner donne une couleur, un rythme, un phrasé inédits aux idées. C'est magnifique et cela appelle une suite. L'auteur nous doit désormais un dernier "grand livre". Sur la musique.
Lire la critique sur le site : Lexpress
Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Les démarcations que nous présumons, presque fortuitement, entre métaphysique, sciences, musique et littérature n’avaient aucune pertinence dans la Grèce archaïque. Nous ne savons presque rien des origines, oraculaires, rhapsodiques, didactiques, de ce qui allait devenir la pensée cosmologique. Nous ne savons rien des chamans de la métaphore à qui nous devons l’identité de l’esprit occidental, qui ont jeté les fondements de ce que Yeats appelait les « monuments de l’intellect qui ne vieillit pas ». Au mieux hypothétiques demeurent les attributions aux cénacles orphiques, aux cultes à mystère, aux contacts séminaux avec les pratiques perses, égyptiennes, voire indiennes, de la sagesse. On a des raisons de croire que les doctrines présocratiques étaient récitées oralement, chantées peut-être, comme Nietzsche en eut l’intuition. Les lignes entre les récits de la création, les fictions mythologico-allégoriques, d’un côté, les dicta philosophiques, les propositions, de l’autre, sont très longtemps demeurées totalement fluides (Platon est un virtuose du mythe). À quelque stade qu’on ne saurait retrouver, l’abstraction, le cogito prend son impérative autonomie, son étrangeté idéale. Les théories — le concept même est un formidable défi étranger à tant de cultures — sur les composantes et les ordonnances du monde naturel, la nature de l’homme et son statut moral, le politique au sens large, trouvaient leurs formulations les plus incisives dans les modes poétiques. Lesquels, à leur tour, aidaient à se rappeler et à mémoriser. Le précédent rhapsodique, avec ses subversions de la textualité, dérange Platon. Témoin les ironies troublées de son Ion. Nous le retrouvons dans les paradoxes de Wittgenstein sur le non-écrit. L’idée persiste qu’Homère et Hésiode sont les vrais maîtres de la sagesse. Le paradigme du poème philosophique, d’une adéquation parfaite entre l’expression esthétique et la teneur cognitive systématique, perdure dans la modernité. L’aspiration de Lucrèce « à répandre l’éclatante lumière du chant sur les choses les plus cachées » n’a rien perdu de son charme. (chap. II)
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Les nouvelles technologies touchent au cœur du langage. Aux États-Unis, les huit-dix-huit ans passent près de onze heures par jour auprès des médias électroniques. La conversation tient du face-à-face. La réalité virtuelle opère au sein de cyber-sphères. Ordinateur portable, iPod, téléphone mobile, e-mail, Web et Internet planétaires modifient la conscience. L’esprit est «câblé». La mémoire est faite de données récupérables. Le silence et l’intimité, les coordonnées classiques des rencontres avec le poème et l’énoncé philosophique deviennent des luxes idéologiquement, socialement suspects. Suivant le mot de H. Crowther, «le brouhaha qui règne dans la tête ou à l’extérieur a tué le silence et la réflexion». Cela pourrait se révéler fatal, car la qualité du silence est organiquement liée à celle du langage. L’un ne saurait atteindre la plénitude de sa force sans l’autre.
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La théorie politique a engendré et mis à contribution une prose souveraine. Prenez Machiavel, Milton sur le régicide ou cette grande musique que Yeats entendit chez Edmund Burke.

Avec les écrits de Marx, nous avons affaire à un colosse. Par le volume, par le spectre des genres littéraires et la diversité de leurs voix. La sensibilité de Marx était foncièrement livresque et textuelle : celle d’un clerc au sens propre du terme. Les bibliothèques, les archives, les salles de lecture publiques furent sa terre natale et son champ de bataille. Il respirait l’imprimé. À sa mort, les inédits couvraient plus d’un millier de pages manuscrites. C’est à cet égard que le judaïsme controversé de Marx est pertinent. Son immersion dans l’écrit engendra à son tour une stratégie d’élucidation, de commentaire exégétique, de dispute sémantique tout à fait analogue à celle de la pratique rabbinique et du débat talmudique. L’appel partisan aux déclarations canoniques, séculièrement sanctifiées, l’acrimonie des conflits et litiges dogmatiques qui marqueront l’histoire et les fortunes du marxisme-léninisme viennent directement de la rhétorique analytique et prophétique de Marx. Dans les querelles intestines du communisme, souvent homicides, citation, critique des textes et références sont décisives. Tout cela nourrira une immense littérature secondaire et tertiaire. Le chef communiste, comme ses adversaires hérétiques — qu’il s’agisse de Lénine, Staline, Trotski ou Enver Hoxha —, s’estime appelé à produire des écrits théoriques, à prouver qu’il est un « homme du livre » (Lénine sur l’empiriocriticisme, Trotski sur la littérature, Staline sur la linguistique sont loin d’être négligeables).

Il n’est point d’image de l’homme, de modèle de l’histoire, de programme politique et social qui soit davantage écrit que le marxisme. Aucun, depuis la Torah, qui ne se soit davantage nourri de toute une lignée de codification textuelle, de vérités « sinaïtiques », qui mènent de Marx et Engels à Lénine et Staline, et, dans une grande ramification, au « Livre rouge » de Mao. (chap. V)
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Lorsque arrive la pluie
Nous nous laissons tremper.
Le soleil nous prendra
Par la main ; et d’un jet
Nous tracerons le trait
- combien droit, combien plein -

Du sol reconnaissant.
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Vidéo de George Steiner
Nous venons de publier un recueil d'entretiens entre George Steiner et Nuccio Ordine, intitulé //George Steiner. L'Hôte importun//. Il est précédé par un beau texte en témoignage à Steiner, écrit par celui qui fut un de ses plus proches amis, Nuccio Ordine.
Pour en savoir plus : https://www.lesbelleslettres.com/livre/9782251453163/george-steiner-l-hote-importun
***
Ce livre est le témoignage de la profonde amitié personnelle et intellectuelle qui a lié George Steiner et Nuccio Ordine. L'amour des classiques, la passion de l'enseignement, la défense du rôle du maître, la fonction essentielle de la littérature qui rend l'humanité plus humaine constituent les thèmes d'un intense dialogue, nourri de plus de quinze années de rencontres et de voyages dans diverses villes européennes. Ordine trace un portrait original de George Steiner, en le peignant sous les traits d'un « hôte importun ».
+ Lire la suite
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