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Michel Crouzet (Préfacier, etc.)
EAN : 9782080700490
382 pages
Flammarion (07/01/1993)
3.77/5   162 notes
Résumé :
Mortimer revenait tremblant d'un long voyage ; il adorait Jenny ; elle n'avait pas répondu à ses lettres. En arrivant à Londres, il monte à cheval et va la chercher à sa maison de campagne. Il arrive, elle se promenait dans le parc ; il y court, le cœur palpitant ; il la rencontre, elle lui tend la main, le reçoit avec trouble : il voit qu'il est aimé. En parcourant avec elle les allées du parc, la robe de Jenny s'embarrassa dans un buisson d'acacia épineux. Dans la... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (13) Voir plus Ajouter une critique
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En voilà un titre appétissant ! Signé Stendhal (qui, je le regrette, n'est pourtant pas l'un de mes auteurs favoris), je me léchais les babines dès la première page tournée.
Je déchante bien vite. Et une fois de plus, je constate que la fiction est bien supérieure à la vie réelle, ici représentée par un essai un peu particulier.
D'abord, il ne s'agit pas d'une étude rigoureuse sur l'Amour, plutôt quelques maximes présentées sous la forme d'un témoignage – Stendhal prenant du reste plaisir à se faire passer pour d'autres.
Les références du début du XIXème siècle nous échappent forcément, la prose peut sembler parfois lourde et le propos entaché de son époque.
Car, si l'Amour est universel et intemporel, force est de reconnaitre que la condition de la femme (et par ricochet, de l'homme) a fortement changé depuis – c'est heureux. Ce traité sur l'Amour pâtit donc d'un fond d'archaïsme suranné (délicieuse tautologie). du coup, les réflexions sur l'éducation des femmes (que viennent-elles faire dans un tel essai ?) semblent largement dépassées.
Le livre est construit en deux parties : d'abord une sorte d'essai qui enchaine les notes de bas de page et celles de fin d'ouvrage – les premières étant le fruit de l'auteur lui-même, les secondes censées éclairer les ignares que nous sommes en matière de références vers 1820. Parfois, une note de bas de page est elle-même assortie d'une note supplémentaire. Plus rarement, une note d'une note renvoie à une troisième. Vous suivez toujours ? Puisque je ne peux m'empêcher d'aller fouiner dans ces labyrinthes, cela ralentit d'autant une lecture déjà rendue laborieuse. Bref, si vos connexions neuronales ne sont pas au top, passez votre chemin et oubliez ces petits caractères qui ajoutent précision et compréhension mais nous entraine à nous perdre dans des chemins de traverse.
La seconde partie nous est présentée sous la forme de maximes, plus digestes. De La Bruyère (les caractères, j'avais bien aimé) à la Rochefoucault, ce genre était apparemment très prisé à l'époque. Ici, on renvoie souvent à Chamfort ; « de l'amour » fait donc partie de ces livres qui donnent envie d'en lire un autre – tout comme Amélie Nothomb m'avait donné le goût de la « princesse de Clèves »…
Tout ça pour aboutir à la conclusion que l'amour-passion, symbolisé par le personnage de Werther (Goethe) est plus appréciable que l'amour-goût ou l'amour physique d'un Don Juan. Et je ne peux me résoudre à être étranger à telles vues. Cela rapproche de la religion : comment pouvoir dissocier l'esprit du corps ? Pour moi, un être humain (ou tout autre animal – ces derniers ont une pensée, même si on ne la cerne pas toujours très bien) est un tout. Pourquoi vouloir mettre en avant une partie plus qu'une autre ? Pourquoi s'entêter à faire la part des choses ? Pourquoi vouloir à tout prix séparer l'inséparable ? le Yin et le Yang, le recto et le verso, pile et face. L'amour, le vrai, l'ultime, est l'union parfaite de la fièvre du corps et de l'enivrement de l'esprit.
Pourquoi vouloir toujours opposer le corps à l'esprit ?
Du reste, le véritable essai sur l'amour reste à écrire – du moins à ma connaissance.
Victime de son époque (Laclos venait de publier les Liaisons Dangereuses), Stendhal ne parle pas d'amour, mais de preuves d'amour (Pierre Reverdy). Ce n'est pas de l'amour, mais de l'influence, de l'égoïsme, de la jalousie, de la fierté, de l'orgueil et de tous les sentiments humains mis en oeuvre quand on aime dont traite cet essai. Tout ce que nous mettons en place ou nous subissons au nom de l'Amour. Là où je rejoins Stendhal, c'est dans cette conviction que l'amour n'est possible que lorsqu'on n'a pas d'autres préoccupations. Enfin, ce genre d'amour, intellectualisé à l'extrême – cette « cristallisation », mot réinventé par l'auteur lui-même pour indiquer l'amour-passion (on est amoureux quand on commence à agir contre ses propres intérêts). Voilà donc la subtilité : ne pas confondre être amoureux (subir la dictature de ses sens en quelque sorte) et aimer. Comme offrir et recevoir. Je ne peux pas imaginer qu'une peuplade primitive, luttant quotidiennement pour sa survie comme le fond les animaux (il y a deux sortes d'êtres vivants sur terre : ceux qui passent leur temps à trouver leur nourriture et ceux qui vont simplement la chercher au supermarché) n'éprouve pas l'Amour.
L'amour, le vrai, le pur, l'indéfinissable est un don sans contrepartie. Il dépasse largement le cadre des relations hommes/femmes. le dévouement d'une mère, l'extase de religieuses, ce lien mystérieux qui unit des personnes qui ne se ressemblent pas.
La passion n'est que l'Amour subi. le romantisme n'est que l'intellectualisation de sentiments. Cela peut engendrer le paradoxe de l'amant rendu impuissant parce qu'il aime « trop ». du reste, le verbe aimer est le seul qui soit plus fort sans qualificatif (je t'aime – je t'aime bien).
Cet « essai » parle donc du jeu de l'amour, pas de l'amour.
Finalement, c'est encore la préface qui nous apprend davantage de choses – pourquoi Stendhal a écrit ce livre qui n'est pas un roman, mais pas davantage une étude clinique sur l'Amour. Enfin, on s'étonne que l'Amour soit universel et intemporel alors qu'il est à chaque fois et selon les individus, différent. Pourtant, c'est tout simple : nous sommes tous constitués de la même manière, nos organes sont les mêmes et obéissent aux mêmes lois. Pourtant, il n'existe pas une personne rigoureusement pareille à une autre.

Comment l'amour vient-il aux jeunes filles ?

Enfin, présenté en appendice, ce petit texte digne d'une nouvelle qui résume bien des propos pompeux : Ernestine ou la naissance de l'amour. Force est de reconnaitre la puissance d'un texte de fiction pour infuser les idées. Ce petit bijou Stendhalien est à savourer comme la récompense, le dessert, après s'être enlisé dans un repas de mariage trop copieux et trop lourd. Y sont dévoilés, les unes après les autres, toutes les étapes du cheminement qui nous rend amoureux, c'est-à-dire « agir contre ses propres intérêts ».


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« Avec Balzac, Stendhal est certainement l'un des grands fondateurs du réalisme, mais ils opèrent de manière très différente, voire opposée, observe Jacques Dubois. Là où le premier veut tout dire d'une société qu'il enveloppe dans un large mouvement de fresque, le second est un écrivain de la suggestion, du détail, du rapport indirect. Ces qualités, il les met au service de deux options : le politique d'une part, et ce que j'ai appelé l'érotique de l'autre. Lui-même considérait qu'il n'était guère possible de les associer sans qu'ils ne se confrontent… Or, tout au contraire, j'ai essayé de montrer que lorsque l'engagement politique n'est plus possible, il existe encore chez Stendhal l'amour, qui est une autre forme d'engagement dans le politique. le va-et-vient entre ces deux pôles parfois contradictoires ne se fait pas sans écartèlement, ni ruptures… Mais Stendhal y apporte une vivacité d'esprit, un sens de l'humour, qui font que chez lui l'amour épouse, si j'ose dire, les forces de la rébellion individuelle contre l'ordre social dominant. »
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De l'amour est l'un des livres à la fois les plus célèbres et les moins bien compris De Stendhal. Pour en saisir la signification, la valeur intrinsèque et la portée, il est indispensable de connaître l'époque de la vie de l'auteur où il a été conçu, le texte biographique étant indissoluble de sa genèse et de sa structure.

Il a noyé le personnel dans l'impersonnel. C'est une collection de faits et de raisonnement, un livre sur la psychologie de l'amour.

De l'amour est donc foncièrement une confession et Stendhal qui est un moraliste, passe en revue les phases de l'amour-passion. D'ailleurs « l'amour-passion » que nous reprenons tous à notre compte c'est bien lui qui est à l'origine de cette fusion.

De la naissance de l'amour, des différences de l'amour entre les deux sexes, de la première vue, de l'engouement, des coups de foudre, de la pudeur, tous renferment des aperçus et qui sont dictés à l'auteur par sa propre expérience et qui, en même temps, transcendent son cas individuel.
On y trouvera alors la cristallisation de l'amour. Je ne vous cache pas que c'est par ce joli mot associé que j'ai souhaité découvrir ce livre. Car, là, encore, c'est Stendhal qui en est à l'origine de ce mot. Et je vous livre ce petit secret :

Quand on plaît à orner de mille perfections une femme de l'amour de laquelle on est sûr ; on se détaille tout son bonheur avec une complaisance infinie. Cela se réduit à s'exagérer une propriété superbe, qui vient de nous tomber du ciel, que l'on ne connaît pas, et de la possession de laquelle on est assuré. Laissez alors la tête d'un amant travailler pendant 24 heures, et voici ce que vous trouverez : aux mines de sel de Salzbourg, on jette, dans les profondeurs abandonnées de la mine, un rameau d'arbre effeuillé par l'hiver ; deux ou trois mois après on le retire couvert de cristallisations brillantes ; les plus petites branches, celles qui ne sont pas plus grosses que la patte d'une mésange, sont garnies d'une infinité de diamants, mobiles et éblouissants ; on ne peut reconnaître le rameau primitif. Ce qu'appelle alors cristallisation, c'est l'opération de l'esprit, qui tire de tout ce qui se présente la découverte que l'objet aimé a de nouvelles perfections.

Merci Stendhal !
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Il y a un peu plus de dix ans, je découvrais cette célèbre cristallisation au travers de Stendhal. Une lecture surprenante !

« le coeur a ses raisons que la raison ne connaît point. » - B. Pascal.

Que sait-on vraiment de ce sentiment d'amour ? Il s'agit d'une mécanique psychologique, dont les rouages peuvent parfois réserver des surprises aux amoureux qui s'ignorent. L'amour rend aveugle dit-on, non, il est question de cette fameuse cristallisation expliquée dans ce livre. Est-ce "de l'amour" ou serait-ce une maladie mentale ?
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Ce n'est donc pas d'un roman qu'il s'agit là, mais bien d'un essai. de L'amour m'a tout d'abord intriguée du fait que Stendhal soit connu pour son romantisme au sein de ses romans. Alors pourquoi ne pas se lancer dans un essai ?

Les premiers chapitres sont criants de vérité, on se surprend à marmonner « Mais oui, mais trop ! Exactement ! » Stendhal a bien cerné le processus d'amour, du moins c'est ce qu'il en ressort… Tout au long de ce livre, il étaye ses idées par des fragments de journaux intimes, des lettres, etc.

Certaines choses peuvent choquer, il faut juste se rappeler qu'il ne s'agit pas de la même époque. Ainsi, quand on voit le style d'éducation donné aux femmes et la façon dont Stendhal en parle, on pourrait penser qu'il soutient cette forme de misogynie. Il n'en est rien, on apprend au fur et à mesure de l'essai que Stendhal serait pour mettre sur un même pied d'égalité les hommes et les femmes en ce qui concerne l'éducation du moins.

J'ai été surprise d'apprendre que Stendhal se considère comme un piètre auteur.

En résumé, ce livre est un peu longuet puisque sur la fin il se présente comme les célèbres Pensées de Pascal, des bribes d'idées nous sont exposées. Tous les exemples ne semblent pas pertinents, mais les premiers chapitres sont magiques et très réalistes. Je le recommande aux courageux et aux passionnés de classiques !
Lien : http://www.chroniques-livres..
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Citations et extraits (38) Voir plus Ajouter une citation
[La cristallisation]
Laissez travailler la tête d'un amant pendant vingt-quatre heures, et voici ce que vous trouverez :
Aux mines de sel de Salzbourg, on jette dans les profondeurs abandonnées de la mine un rameau d’arbre effeuillé par l’hiver : deux ou trois mois après, on le retire couvert de cristallisations brillantes.
Les plus petites branches, celles qui ne sont pas plus grandes que la patte d’une mésange, sont garnies d’une infinité de diamants mobiles et éblouissants. On ne peut plus reconnaître le rameau primitif.

Ce que j’appelle cristallisation, c’est l’opération de l’esprit qui tire de tout ce qui se présente, la découverte que l’objet aimé a de nouvelles perfections. [ ]
En un mot, il suffit de penser à une perfection pour la voir dans ce que l’on aime. [ ]
Et comme en amour, on ne jouit que de l’illusion qu’on se fait … [ ]
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Tout grand poète ayant une vive imagination est timide, c'est-à-dire qu'il craint les hommes pour les interruptions et les troubles qu'ils peuvent apporter à ses délicieuses rêveries. C'est pour son attention qu'il tremble. Les hommes, avec leurs intérêts grossiers, viennent le tirer des jardins d'Armide, pour le pousser dans un bourbier fétide, et ils ne peuvent guère le rendre attentif à eux qu'en l'irritant. C'est par l'habitude de nourrir son âme de rêveries touchantes, et par son horreur pour le vulgaire, qu'un grand artiste est si près de l'amour.
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Je viens de voir, cette après-midi, 17 février 1790, (...), une cérémonie de famille, comme on dit, c'est-à-dire des hommes réputés honnêtes, une société respectable, applaudir au bonheur de Mlle de Marille, jeune personne belle, spirituelle, vertueuse, qui obtient l'avantage de devenir l'épouse de M. R., vieillard malsain, repoussant, malhonnête, imbécile, mais riche, et qu'elle a vu pour la troisième fois aujourd'hui en signant le contrat.
Si quelque chose caractérise un siècle infâme, c'est un pareil sujet de triomphe, c'est le ridicule d'une telle joie, et, dans la perspective, la cruauté prude avec laquelle la même société versera le mépris à pleines mains sur la moindre imprudence d'une pauvre jeune femme amoureuse.
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Il y a tel caractère fait pour ne trouver le plaisir que dans la variété. Mais un homme qui porte aux nues le vin de Champagne aux dépens du Bordeaux, ne fait que dire avec plus ou moins d'éloquence : J'aime mieux le champagne. Chacun de ces vins a ses partisans, et tous ont raison, s'ils se connaissent bien eux-mêmes, et s'ils courent après le genre de bonheur qui est le mieux adapté à leurs organes ! et à leurs habitudes. Ce qui gâte le parti de l'inconstance, c'est que tous les sots se rangent de ce côté par manque de courage.
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Je fais tous les efforts possibles pour être sec. Je veux imposer silence à mon coeur qui croit avoir beaucoup à dire. Je tremble toujours de n'avoir écrit qu'un soupir, quand je crois avoir noté une vérité. Chapitre IX p.40
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Vidéo de  Stendhal
Critique de Say, proche de Bentham, Stendhal se confronte aux théories économiques de son temps. de l'utilitarisme au malthusianisme en passant par la question de la division du travail, le célèbre écrivain était aussi économiste.
Pour comprendre l'économie à travers le regard De Stendhal, Tiphaine de Rocquigny reçoit Christophe Reffait, maître de conférences en littérature française, Université de Picardie Jules Verne.
#economie #histoire #stendhal ___________ Découvrez les précédentes émissions ici https://www.youtube.com/playlist?list=PLKpTasoeXDrqogc4cP5KsCHIFIryY2f1h ou sur le site https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/entendez-vous-l-eco
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