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sur 4818 notes
Un peu partout dans le monde, dans les diverses sociétés et depuis l'aube des temps, le mythe de l'homme double ou de l'homme au double visage a hanté l'humanité. Probablement aussi parce que la tradition veut que les visages et les personnalités constitutives de ce couple soit diamétralement opposées et que l'on ne sache jamais trop par avance à laquelle on aura affaire. C'est vrai, c'est inquiétant, que ce soit avec nos amis ou avec quiconque d'ailleurs, on aime bien savoir si c'est du lard ou du cochon et la duplicité de l'interlocuteur est toujours quelque chose de très mal vécu et de foncièrement angoissant. de l'exemple fameux du dieu Janus des Romains à l'incroyable Hulk des séries américaines en passant par une myriade de loups-garous et autres dieux ou héros polymorphes d'ici ou d'autre part, tous ont eu la part belle dans l'imaginaire collectif.
Au XIXème siècle, quelques écrivains ont su donner chair à ces mythes, ces récits fondateurs de l'humanité, il y eut Johann Wolfgang von Goethe avec son mythe de l'apprenti sorcier, il y eut Mary Shelley avec son Frankenstein ou le Prométhée moderne et il eut Robert Louis Stevenson avec son étrange cas du Docteur Jekyll et de Mister Hyde.
Mais ce que l'auteur réussit parfaitement, c'est à glisser son doigt sous notre épiderme et à nous faire sentir qu'en chacun de nous, deux êtres (au moins) sommeillent. L'un franchement plus reluisant que l'autre, qu'on n'ose pas trop montrer et qui nous fait honte parfois, mais qui est pourtant tellement constitutif de nous-même.
Un peu à l'image du héros de Kafka dans le Procès, Stevenson fait vivre au personnage intègre de l'avoué Utterson la douloureuse expérience d'une introspection minutieuse de son passé. Je vous restitue le passage en question :

« Tout en continuant à cheminer, il réfléchit un moment à son propre passé. Il explora les moindres recoins de sa mémoire. Sait-on jamais ? N'aurait-il pas commis jadis quelque iniquité qui, tel un diablotin, pouvait toujours resurgir ? À première vue, son passé semblait pur, et il aurait dû pouvoir scruter le sans broncher. En réalité, il était atterré et tremblait à l'énumération de ses fautes. Comme elles paraissaient nombreuses ! »

Évidemment, cela chatouille forcément quelque chose de nous-même et cette nouvelle est une véritable orfèvrerie. le message de R. L. Stevenson pourrait être "en chacun de nous, un Mr. Hyde sommeille, et ce Mr Hyde fait peur, à tout le monde, mais surtout à nous-même". Bien sûr, le suspense voulu par l'auteur a forcément pâti de la notoriété de l'ouvrage et l'identité cachée de Hyde (Hyde rappelle tellement le verbe to hide que ce n'est presque plus un jeu de mots) ne fait guère de doute pour le lecteur du XXIème siècle, mais tel ne fut pas toujours le cas, notamment à sa sortie en 1886.
C'est donc une narration bien menée et qui possède de fort nombreuses qualités, qui conserve toute sa fraîcheur et qu'on aurait tort de se priver d'encore lire ou relire, mais tout ceci n'est que mon avis, c'est-à-dire, pas grand-chose.
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Comme tout le monde, je connaissais l'idée de la personnalité double à l'origine du roman de Stevenson.

Mais je n'avais pas en tête la structure vaguement fantastique de l'histoire, les personnages secondaires, le suspense ou même l'idée philosophique sous-jacente que nous avons tous un Mister Hyde en nous (et pas juste certains de mes collègues pénibles...). Je me suis donc régalée à cette lecture !

Outre mon plaisir, j'en retiendrai peut-être qu'il ne faut pas jouer avec le feu, les sels impurs ou notre côté sombre, sous peine de perdre le contrôle... mais que, quand on réprime tout en soi, on se retrouve avec une vie morne et terne comme celles de Utterson ou Lannion...

J'ai donc l'impression que Stevenson nous a posé plein de questions sur la nature humaine dans son conte psychanalytique, mais s'est bien gardé de nous donner des réponses... Soit le Docteur Stevenson ne les avait pas, soit son Mister Hyde l'a empêché de nous les donner...

Challenge XIXème siècle
Pioche dans ma PAL avril 2018 - merci @Witchblade !
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Je viens de me pencher sur L'étrange cas du Docteur Jekyll et de Monsieur Hyde et je puis vous avouer que je n'avais encore jamais lu ce court roman de Robert Stevenson. Il fait sans doute partie de ces livres entrés dans une sorte de grande légende littéraire dont on connaît les contenus presque par coeur sans même les avoir lus.
Qui ne connaît pas en effet cette dualité douloureuse, déchirante, violente sur laquelle repose le ressort narratif de ce roman ? Sans doute les adaptations cinématographiques ont contribué à donner un écho presque intemporel à ce récit qui, du reste, dépasse sans aucun doute la sphère fantastique, même si elle en porte la genèse.
Je me souviens d'ailleurs d'une adaptation savoureuse avec le truculent et grimaçant Jerry Lewis dans une version humoristique et totalement déjantée.
Je vous rappelle très rapidement le sujet au cas où vous l'auriez oublié.
Le docteur Henry Jekyll est un médecin londonien, précurseur des tendances de la médecine psychanalytique moderne... Ayant diagnostiqué deux éléments de sa personnalité, - le bien et le mal, il a la volonté de vouloir les dissocier grâce à une expérimentation qu'il engage sur sa personne. Sa volonté est de se libérer de la part malveillante qui sommeille en lui, de l'évacuer pour que ne subsiste désormais plus que la part bienveillante. L'opération réussit qui donne naissance à deux personnages distincts : le praticien distingué, le docteur Jekyll, estimé de la haute société, et le monstre abject et dépravé, Mr Hyde. Croyant se libérer ainsi de ses cruelles angoisses, Jekyll tombe en fait sous la domination absolue de Mr Hyde... Il va ainsi comprendre qu'il est impossible de séparer en l'homme le bien et le mal…
Mes premiers pas dans ce texte m'ont permis de renouer avec ce style de narration qui ne me semble plus guère pratiqué aujourd'hui par les auteurs contemporains et c'est bien dommage car je trouve ce procédé bien percutant, un récit enchâssé dans un autre, tel que le convoquait avec un talent immense un certain Stefan Zweig. C'est tout le charme désuet des romans de la période victorienne que j'ai retrouvé dans ce texte, qu'on peut lire aujourd'hui avec nos lunettes contemporaines.
Ici, les deux personnages, - le Docteur Henry Jekyll et son alter-ego diabolique Mr Hyde, nous sont présentés par  Utterson de Gaunt Street, juriste de son état, à la faveur d'une première scène où un homme pressé, courant dans une rue comme s'il fuyait quelque chose, fou furieux, renverse sur son passage une fillette, la piétinant presque, sans même donner le signe qu'il se préoccupe de son sort...
Le décor est planté.
Peu importe finalement qu'on connaisse déjà ou non le récit et son dénouement, la saveur de ce roman fantastique, aux allures gothiques, nous revient dans sa complexité vertigineuse qui interroge ce sujet intemporel qu'est le bien et le mal et la confrontation permanente de ces deux versants. Car c'est bien de cette affrontement que veut nous parler l'auteur, je veux dire l'affrontement, cette dualité en nous, qui nous constitue, corps et âme, dans le tumulte des flots de l'existence.
Robert Stevenson se saisit du genre fantastique pour nous amener devant un miroir effrayant, nous montrer l'envers du décor, c'est-à-dire le tréfonds de nos âmes, l'autre côté obscur qu'on connaît à peine de nous, qu'on ignore peut-être, enfoui par notre propre histoire et ses ressorts parfois insaisissables.
Qu'importe que nous connaissions par avance le dénouement, Robert Stevenson m'a emporté ici dans une narration fort habilement menée, une écriture ciselée et quelque chose qui en fait un texte de qualité qui, finalement, malgré l'apparence désuète, n'a peut-être pas pris une seule ride depuis toutes ces années. C'est la force de ces grands romans classiques.
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Cela commence par une apparente enquête policière assez commune et cela finit en apothéose fantastique, scientifique, psychologique et philosophique avec le journal du Docteur Jekyll qui révèle le fin mot de l'histoire.

Du Londres de la fin du 19ème, le contraste est saisissant entre les beaux quartiers autour de Regent's Park et le glauque de Soho. Jekyll habite dans l'un et Hyde dans l'autre. le premier a les bonnes manières, le second est brutal. Jekyll offre le thé, Hyde peut tuer gratuitement.

Pour retrouver le diabolique Hyde, Mr Utterson, un notaire ami de Jekyll, mène une enquête personnelle. Cette démarche permettra de confondre l'assassin. Mais, avec la découverte du journal de Jekyll, l'histoire se termine de manière magistrale.


Cette centaine de pages est une oeuvre de R.L.Stevenson (L'île au trésor). Ici c'est le grand écart avec la mer ou à dos d'âne dans les Cévennes. La dimension fantastique vient du fait qu' il a développé par écrit un de ses cauchemars puis ensuite il a lu des articles de Charcot puis de Freud sur l'hystérie.

D'ailleurs le nom de Hyde veut bien dire caché, mais quand cet inconscient refait surface, on pourra dire, qu'à notre conscience, il apparaît particulièrement hideux!
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La même année, en 1886, Stevenson et Maupassant publient un court roman fantastique centré sur le manichéisme latent propre à chaque homme : la part sombre et la part claire. Pour Stevenson, il s'agit de "L'étrange cas du Dr Jekyll et de Mr Hyde", pour Maupassant, du "Horla". Quatre ans plus tard, Wilde publiera à son tour son unique et célèbre roman : "Le portrait de Dorian Gray".

Autant dire que cette histoire de "côté obscur" remonte bien plus loin que George Lucas et sa saga "Star Wars" ! Déjà, Goethe avait ouvert la voie avec son "Faust", basé sur une légende allemande de la Renaissance, et bien avant tout ça, depuis sans doute la nuit des temps et à travers toutes les civilisations et toutes les religions, le Bien et le Mal s'opposent et suscitent chez les artistes, les écrivains voire chez tous les hommes un intérêt qui touche à la fascination.

Que ce soit par la drogue comme chez Stevenson, par l'art chez Wilde ou par la folie onirique chez Maupassant (pour ne citer que ces trois oeuvres), les personnages en quête de leur être satanique se confrontent à un miroir à travers lequel leur personnalité bascule et s'incarne (ou se réincarne) dans une noirceur sans fard, entraînant des conséquences fatales.

Je ne me lancerai pas dans une dissertation sur ce courant littéraire, je me contente de constater combien cette dualité qui réside en chaque homme a provoqué la curiosité, parfois morbide, des intellectuels et, de ce fait, de leurs lecteurs. Une quête fantastique qui touche à l'au-delà, au Diable, aux vices, autant de thèmes riches, pain béni pour l'imagination.

"Le cas étrange du Dr Jekyll et de Mr Hyde" est un récit court et intense, respectant tous les codes narratifs du genre. La tension monte efficacement même s'il faut bien s'avouer qu'il en faut désormais plus aux lecteurs pour que leur sommeil se trouble.


Challenge XIXème siècle 2020
Challenge MULTI-DÉFIS 2020
Challenge des 50 objets
Challenge RIQUIQUI 2020
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"Science sans conscience n'est que ruine de l'âme" voilà la moralité de ce court roman que je viens de sortir de ma PAL Noire et de dévorer.

On a beau connaître l'histoire, il n'en reste pas moins que la découvrir en texte change toute la donne.

Par contre, pour celui qui aurait passé les cent dernières années sur Jupiter, il est très difficile de deviner que le brave docteur Jekyll est aussi l'horrible Edward Hyde, cet être sans conscience, sans empathie, cet espèce de concentré du Mal Absolu.

L'antithèse de Jekyll, c'est Hyde. Ce que Jekyll, homme bon, pieux (et tout le tralala qui va avec) ne pouvait pas faire, Hyde le réalise.

Si je vous citais d'entrée de jeu que "science sans conscience n'est que ruine de l'âme", c'est parce que le roman dénonce, comme "Frankenstein" que jouer aux apprentis sorciers n'apporte que désolation.

Jekyll a mélangé des substances qui lui ont permises de se transformer, physiquement et moralement, en Hyde, mais le problème surviendra quand son double maléfique prendra les commandes.

Un peu comme si le docteur Bruce Banner devenait Hulk durant son sommeil, sans même devoir se mettre en rogne ! Gênant !

Pourquoi ais-je laissé traîné ce roman dans ma PAL durant autant d'années, moi ?

J'ai aimé découvrir l'histoire au travers de l'enquête de l'avocat, le suivre pas à pas dans sa quête pour dénicher les réponses à ses questions légitimes.

Mais, comme tout le monde le sait, qui fait le malin, tombe dans le ravin...



Lien : http://thecanniballecteur.wo..
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« Dr Jekyll et Mr Hyde » fait partie de ces oeuvres qui se sont dépassées elles-mêmes en tant que telles. Nul besoin d'avoir lu le roman de Stevenson pour en connaitre les tenants et aboutissants. On ne compte plus le nombre d'adaptations dont il a fait l'objet, des plus littérales aux plus loufoques. Il faut dire que « Dr jekyll et Mr hyde » aborde un des thèmes les plus universels qui soient, la dualité de l'être humain. Comme tout le monde, je connaissais l'histoire mais je n'avais pas encore lu le roman. Je suis ravie de l'avoir fait car de connaitre la chute de l'histoire n'enlève rien au plaisir de lecture.

Le thème de la dichotomie intérieure est remarquablement traité. J'ai trouvé que l'aspect psychologique était très bien vu, fouillé et subtil. D'une certaine façon, le lecteur se reconnait dans ce conflit intérieur qui se joue en Jekyll.
De plus, Stevenson a une maitrise parfaite de la narration, il sait mener un récit. Quel talent de conteur incroyable ! Alors même que je savais exactement comment le roman allait finir, j'étais totalement accrochée par le récit, impossible de lâcher le bouquin.

Bref, si vous n'avez pas lu le roman de Stevenson, ne restez pas sur l'impression que vous connaissez déjà toute l'histoire du Dr Jekyll. Même en connaissant toute l'intrigue, cette lecture procure un immense plaisir et se révèle d'une intelligence profonde.
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Écouter ce roman de Stevenson lu par Denis Podalydes est un régal. Il sait faire frissonner de par sa maîtrise de l'intonation qui met en relief avec talent les mots de l'auteur. Je me suis régalée avec cette écoute qui rend le texte encore plus vivant et sombre. L'auteur parle de la dualité qui existe en chacun de nous et j'avoue ne pas avoir eu de préférence, autant le Docteur Jekyll que Mr Hyde m'ont effrayé. J'ai suivi l'enquête au rythme des découvertes du notaire, Mr Utterson, et j'ai été surprise de la construction choisie pour ce roman. La rencontre avec Mr Hyde au tout début m'a un peu étonnée (sans doute parce que je connaissais la fin). J'ai apprécié un jeu de mot du notaire alors qu'il part à la recherche de Mr Hyde : s'il est Mr Hyde, je serai Mr Seek (j'espère avoir bien saisi dans la mesure où je n'ai pas vu les mots).
Ah...! La joie des livres audio... Un excellent instrument de torture sur sa progéniture.
- Allez, on part, viteee.. on va être en retard. Tout le monde en voiture. le lecteur CD en marche, le volume adéquat et un petit bouchon fidèle à la région parisienne assurant la lecture intégrale du livre selon mes calculs. Bon alors, qu'est-ce qui se passe après ce premier chapitre ?
- Ben je sais pas, j'étais avec ma DS.
- Euh... tu m'as parlé ?
- C'est vrai qu'avec les écouteurs de ton téléphone tu n'as pas du entendre. Bon je vous fais un résumé.
- Ah ? Ça a l'air bien.
- Allez la suite ...Et maintenant, qui est entré dans la pièce ?
- le docteur.
- Bon ça suit... Au fait le laquais portait une livrée, qu'est-ce que ça veut dire ?
- Je sais : il porte des livres ! C'est comme une fourchette, une fourchetée.
- Imparable !
Nous avons fini par arriver à destination, trois mots de vocabulaires dans leur escarcelle en plus, un Denis Podalydes qui les fit sursauter par moments, et une découverte qui -je l'espère- laissera en germe d'autres envies de lectures.
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M. Utterson, personnage froid, sérieux et poussiéreux -quoi que cela puisse signifier pour une personne! - est celui qui nous conduit dans cette étrange histoire entre le docteur Jekyll et mister Hyde.
Jekyll, son ami de longue date, lui confie un jour un testament dans lequel il désire tout léguer à Edward Hyde s'il venait à mourir - ou disparaître. Or, ce Hyde est connu pour être un homme extrêmement antipathique, n''hésitant pas à piétiner la moindre fillette qui se trouve sur son chemin après l'avoir bousculée. Petit, laid, il éveille par sa seule apparence l'effroi et le mal-être.
Utterson décide de le rencontrer pour connaître la vérité sur la relation entre les deux hommes, et cette enquête le mène à des découvertes toutes plus étranges les unes que les autres, et la soudaine terreur de Jekyll à l'évocation de Hyde l'inquiète.
L'écriture de Stevenson est toujours aussi agréable à lire, distanciée, légèrement ironique et teintée d'effroi, il ne peut que nous emporter avec ses personnages dans les rues sombres de Londres.
Il nous interroge aussi sur cette faculté que nous avons tous, en nous, à faire le mal et même à pouvoir en jouir, si la société et sa morale ne nous en empêchait. Les dernières pages, la confession de Jekyll sont très intéressantes sur ce point-là, cédant l'aventure à une note philosophique qui donne une autre dimension au roman. Ce seraient ces pages là que je relirais volontiers un jour.
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Si Stevenson avait des terreurs nocturnes, j'eus pour ma part deux "terreurs" télévisuelles marquantes dans mon enfance : -Les aventures de Belphégor- avec l'égérie germanopratine récemment disparue. J'avoue qu'il m'a fallu du temps avant que le costume sépulcral de la jolie môme me permette de descendre à peu près rassuré à la cave pour en rapporter ce que l'autorité parentale m'avait enjoint d'y aller chercher.
La seconde, je la dois à Jean Renoir et à son adaptation en 1961 pour la petite lucarne, de l'oeuvre du même Stevenson, que le génial fils de l'Auguste peintre intitula -Le testament du docteur Cordelier-, avec dans le rôle du docteur le magistral Jean-Louis Barrault.
Là aussi... que d'émotions et de frissons... !!!
C'est donc à Renoir, à Barrault-Cordelier-Opale que je dois ma première rencontre avec le mythe universel du "double", de la dualité de l'homme engagé par essence dans une lutte éternelle entre le bien et le mal, mythe né d'un cauchemar et transposé en un chef d'oeuvre littéraire à travers - L'étrange cas du docteur Jekyll et de Mister Hyde.
Sorti de l'enfance, j'ai retrouvé partout et très souvent ce "tandem" Harry Jekyll et Edward Hyde : à la télé ( je l'ai évoqué ), au cinéma ( les versions sont nombreuses... et j'irais jusqu'à dire que Jerry Lewis doit à ce mythe l'un de ses moins mauvais films... c'est dire ! Quant à la version de Victor Fleming avec Spencer Tracy et Ingrid Bergman... quel souvenir !), dans la chanson, dans beaucoup des livres que j'ai lus, dans l'univers multiple du "psychologisme", et dans le langage courant... bien évidemment.
Avouez que ce n'est pas rien.
L'histoire du petit ( petit par le nombre de pages ) roman de Stevenson est connu de tous, mais quitte à en dire quelques mots, autant en rappeler l'essentiel.
Le notaire Utterson se promène un soir avec son cousin Richard Enfield dans un quartier de Londres. Tous les deux passent devant une étrange maison qui réveille chez ces deux hommes un souvenir commun, celui d'un être terrifiant et repoussant, Edward Hyde, un criminel sans scrupules, l'incarnation du mal.
Inexplicablement, ce petit être démoniaque était le protégé d'un homme de bien, l'ami et client d'Utterson, le docteur Harry Jekyll, lequel avait fait d'Hyde, dans un testament confié à son notaire d'ami, son légataire universel.
Quels étranges liens pouvaient-il y avoir entre le "bon" docteur Jekyll et cette créature du mal ?
Utterson le découvrira et le comprendra en lisant la lettre écrite par Hyde au moment de la mort de Jekyll.
L'intrigue est habile, tendue, haletante et précurseure.
Inutile de disserter sur ce que cette allégorie du bien et du mal suggère en nous.
Le fait est que Stevenson par son génie créatif a su matérialiser, donner corps et substance à ce que tous nous savons porter en nous.
La psychanalyse l'a fait, elle, de son côté un peu plus tard, à travers la "découverte du "Ça, du Moi, et du Surmoi"... d'un autre docteur...
Le Moi, c'est Jekyll, écartelé entre la bonne conscience de son Surmoi et ses sombres instincts enfouis dans un Ça qui n'attend que le moment où il pourra permettre à Hyde de les laisser s'exprimer.
Trente ans avant Freud, voici ce que l'on pouvait lire sous la plume de Stevenson :
"Ce fut donc le caractère tyrannique de mes aspirations, bien plutôt que des vices particulièrement dépravés, qui me fit ce que je devins, et, par une coupure plus tranchée que chez la majorité des hommes, sépara en moi ces domaines du bien et du mal où se répartit et dont se compose la double nature de l'homme... Malgré toute ma duplicité, je ne méritais nullement le nom d'hypocrite : les deux faces de mon moi étaient également d'une sincérité parfaite.”
Pas mal, non ?
Pour conclure, je dirai qu'outre son caractère mythique, universel, ce qui fait littérairement parlant l'intérêt du roman, du conte de Stevenson, c'est qu'il est multigenre. le lecteur peut y lire une histoire policière, une histoire fantastique, un roman d'épouvante, un conte philosophique ou psychologique...
Bref, c'est un coup de génie, un coup de maître pour l'aventurier qui a su emmener le lecteur palpitant aussi bien sur "l'Île au trésor" que dans les tréfonds labyrinthiques des méandres de nos âmes si complexement torturées.
À lire et à relire.




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