« Consommez local ! » C'est un slogan que l'on voit de plus en plus ces temps-ci, et c'est très bien. C'est donc la conscience tranquille que j'ai entamé la lecture de cet opuscule édité par une petite mais sympathique maison d'édition située dans mon village.
J'en fus récompensé : voici de la pure poésie en prose, pas de la poésie ésotérique et hermétique qui ne peut plaire que si l'on est sur la même longueur d'ondes que l'auteur. Non, de la poésie qui coule de source et s'offre à tous.
Un homme erre dans une rue sans fin, et entre au hasard dans de nombreuses maisons, qui à priori ne se distinguent que par le numéro. Chaque visite entraîne chez notre homme une foule de souvenirs, les rêves affluent, les images se croisent ou s'entrechoquent, plus mélancoliques au fil des pages quand il comprend que la caravane stationnée dans la rue partira sans lui, mais sans doute avec la femme de ses rêves, vers l'Espagne, symbole de vacances et d'évasion.
J'ai suivi les conseils de l'éditeur et j'ai consommé avec modération : quelques pages par jour, pas plus, pour mieux savourer ce petit bijou.
L'extrait reproduit dans « citations » devrait metttre l'eau à la bouche !
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Je marche et les réverbères allument la nuit. Je croise des fenêtres éclairées. Une chanson échappée s’écrase sur le trottoir et devient silence. Je me souviens comme c’est bon de flotter. Je marche sur l’estuaire avec ma coque d’acier. Des nuages un peu fous dansent dans mes cheveux. La lune brille sombrement comme jamais et ton souvenir, aux couleurs de feuilles mortes, s’accroche aux branches de l’espoir idiot de revivre hier. Je pense apercevoir un chien craintif longeant les façades du passé. Je joue du bout des doigts avec trois pièces de monnaie dans la poche. Je marche et, décidément, rien ne m’annonce un carrefour quelconque. La mer est tranquille, je vogue confiant. La rue est longue et se dilate, annonçant mars et son printemps.