The Mighty Captain Marvel, tome 2 : Band of Sisters

Ce tome fait suite à Alien Nation (épisodes 0 à 5 de la série The mighty Captain Marvel) qu'il faut avoir lu avant. Il contient les épisodes 6 à 9, initialement parus en 2017, écrits par Margaret Stohl, dessinés et encrés par Michele Bandini (épisodes 5 à 8), et Rod Stein & Ted Brandt (épisode 9), avec une mise en couleurs d'Erik Arcinegia, avec l'aide de Michael Garland pour l'épisode 5. Les couvertures des épisodes 5 à 8 ont été réalisées par Elizabeth Torque (épisode 5 à 8) et Meghan Hetrick (épisode 9). Les épisodes 5 à 8 se déroulent concomitamment à Secret Empire (2017) de Nick Spencer.

À bord de la station spatiale Alpha Flight, Puck et Sasquatch vérifient l'état de la station depuis l'extérieur dans l'espace, Hopper (le paléovirologue) poursuit ses recherches pour trouver un antidote au virus HLA-12 avec l'aide de Wendy Kawasaki, et Abigail Brand attend les ordres de Captain Marvel. Cette dernière s'apprête à commencer l'entraînement de 3 nouveaux cadets : A'Di, Date Cruz et Glory. Elle leur rappelle la mission de l'équipage : enrayer toute tentative d'invasion de la Terre par des extraterrestres, leur explique qu'ils se trouvent dans la salle d'entraînement, et leur donne 30 minutes pour en sortir, en refermant la porte derrière elle en sortant. La croisant dans les couloirs, Abigail Brand trouve qu'elle a été un peu dure avec les cadets en les soumettant à une simulation d'invasion de Chitauri. Carol Danvers se rend dans le laboratoire, où Hopper lui remet un gadget en forme d'étoile s'adaptant sur celle de son costume, et permettant d'éviter qu'elle ne perde le contrôle de ses pouvoirs. Il lui apprend également qu'une navette spatiale vient d'arriver.

Carol Danvers se rend dans la salle de commandement où elle retrouve les Gardiens de la Galaxie fraîchement arrivés : Star-Lord (Peter Quill), Gamora, Groot, Rocket Racoon. Se trouvent également sur place une partie des Ultimates : Ms. America (America Chavez), Spectrum (Monica Rambeau), Hyperion (Marcus Miller), Quasar (Avril Kincaid). Pour les accueillir, il y a également Sasquatch, Puck et Chewie, le chat de Carol Danvers. Ils reçoivent un appel de Captain America et de Sharon Carter depuis la Terre, leur indiquant que le bouclier planétaire n'est pas encore opérationnel, mais qu'une vague d'invasion Chitauri est en approche. Oubliant les cadets dans leur séance d'entraînement, Captain Marvel enjoint tous les superhéros à sortir dans l'espace à l'extérieur de la station pour affronter ces extraterrestres et empêcher qu'ils n'atteignent la Terre. Ce premier assaut s'avère un échec pour les Chitauri, mais la deuxième vague n'est pas loin derrière. Pire encore, le bouclier de défense de la planète Terre va être activé, enfermant l'équipe d'Alpha Flight et les autres à l'extérieur de la Terre.

Après un démarrage sympathique sans être totalement convainquant de cette nouvelle série consacrée à Captain Marvel (que l'éditeur Marvel peine à imposer comme un personnage de premier plan pour féminiser ses têtes de gondoles), la scénariste est déjà confrontée à l'ingérence du grand événement de l'été 2017. Si le lecteur a déjà lu Secret Empire, il connait déjà les 3 quarts des épisodes 5 à 8. Sinon, il découvre une narration un peu décousue, car privée de quelques éléments essentiels se déroulant dans les épisodes de la minisérie de l'événement qui tourne autour de Captain America, et dans lequel Captain Marvel joue un rôle très secondaire, contrairement à celui qu'elle avait dans Civil War II (2016) de Brian Michael Bendis & David Marquez. Il manque effectivement quelques pièces du puzzle pour pouvoir pleinement apprécier ces épisodes. Pour commencer, Carol Danvers a été savamment manipulée pour mettre en place la technologie de ce bouclier (avec l'aide de Maria Hill) qui la maintient dans l'impossibilité de revenir sur Terre et dans l'obligation d'affronter vague de Chitauri après vague de Chitauri. Ces éléments sont très rapidement évoqués en cours de route. Ensuite, la scénariste ne se fatigue pas à rappeler que les Chitauri ne sont pas dotés de conscience, mais qu'ils s'apparentent plus à des drones organiques sans conscience, avec le besoin atavique de rejoindre leur reine. Cette absence de conscience explique que Captain Marvel et les autres superhéros n'éprouvent aucun remord à massacrer des créatures à l'apparence pourtant anthropoïdes. Mais le lecteur qui ne le sait pas peut s'étonner d'un tel massacre sans arrière-pensée de la part des héros.

L'intrigue souffre donc fortement d'être ainsi inféodée à l'événement Secret Empire, en particulier de sous-entendus qui auraient mérité d'être explicités. Elle souffre également du fait de devoir s'étirer sur 4 épisodes. Captain Marvel et son équipe, et quelques superhéros de passages affrontent vague après vague de Chitauri, avec des ressources allant en diminuant, en recommençant à zéro à chaque fois. le lecteur se demande ce que viennent faire l'équipe des Ultimates le temps d'une page, et pourquoi il n'en est plus jamais question par la suite. Il voit Carol Danvers indiquer que la condition d'Avril Kincaid n'évolue pas du tout, sans savoir pourquoi elle réapparaît soudainement, si ce n'est comme deus ex machina. Il est régulièrement question de Wendy Kawasaki, mais sans aucune progression pendant ces 4 épisodes. Pour apporter quelque chose de plus substantiel, Margaret Stohl introduit 3 nouveaux personnages : A'Di, Dante Cruz (déjà apparu une fois dans une histoire de Black Widow, en 2015, écrite par Stohl) et Glory. le lecteur peut ainsi s'intéresser s'il le souhaite à leurs péripéties pour essayer de survivre à leur premier séjour dans le programme de recrutement d'Alpha Flight en tant que cadets, mais sans aucune assurance qu'ils reviendront pour la suite. C'est là aussi un peu court pour pouvoir s'investir émotionnellement dans ces personnages secondaires. La scénariste s'avère plus convaincante lorsque Carol Danvers partage ses regrets avec Hopper, lui-même en proie à un sentiment de culpabilité vis-à-vis de Tony Stark, son employeur défunt, ou au moins disparu. En termes de caractérisation des personnages, le lecteur familier de l'univers partagé Marvel peut s'agacer du rôle de subalterne réservé à la pauvre Abigail Brand qui avait une autre envergure dans Astonishing X-Men.

Les dessinateurs du tome précédent ont laissé la place à une nouvelle venue : Michele Bandini, ayant déjà réalisé quelques épisodes pour la maison d'édition Zenescope. Comme dans le tome précédent, le lecteur apprécie que cette artiste se tienne à l'écart de toute sexualisation exagérée du corps de Captain Marvel. Elle détoure les formes avec un trait fin et clair, ce qui donne des pages facilement lisibles et agréables à la vue. Elle reproduit fidèlement l'apparence de tous les superhéros qui apparaissent et elle gère avec efficacité la mise en scène pour que tous aient une place dans les cases, sans devenir illisibles, sans les empiler les uns sur les autres. Ses mises en scène sont dynamiques, pleine d'énergie et rendent bien compte des forces en place. Les Chitauri deviennent vite des créatures génériques, ce qui est à la fois dans leur essence et à la fois un facteur de désintérêt rapide pour les affrontements physiques. La dessinatrice montre une réelle propension à donner une apparence assez jeune aux personnages, avec un ou deux tics graphiques propres aux mangas. Ce n'est pas désagréable ou trop systématique, mais ça dessert la gravité de la narration et le sérieux des situations. Les dessins sont bien complétés et étoffés par la mise en couleurs d'Erick Arciniega. Il utilise des teintes un peu claires, et il maîtrise les effets spéciaux pour donner de la luminosité à l'espace, et pour faire ressortir les utilisations de superpouvoirs et la grille du bouclier de défense de la Terre.

Le tome se termine avec un épisode qui sert d'épilogue à cet affrontement éreintant contre des hordes de Chitauri : Carol Danvers passe du temps avec ses copines Jessica Drew et Jessica Jones, sur Terre. Ça commence par une discussion entre copines au sommet (sur la tête même) de la Statue de la Liberté. Ça continue par une tentative de rendez-vous romantique arrangé par lesdites copines (c'est là qu'on les reconnaît) pour se terminer par quelques réflexions toute seule pour Carol.

C'est l'occasion pour la scénariste de faire le point avec son personnage, de tourner la page sur ce conflit un peu longuet, et d'effectuer un retour aux intrigues précédentes ainsi laissées en suspens. Margaret Stohl peut consacrer du temps à l'état d'esprit de son héroïne et à la transition qu'elle doit opérer entre son statut de chef de station spatiale qui a été détruite, et de personne un peu désorientée qui ne sait plus trop où aller. La scénariste revient avec sensibilité sur le manque d'inclination de Carol Danvers pour une vie amoureuse, choix assez inhabituel. Ro Stein & Ted Brandt jouent plus sur les expressions des visages que Michele Bandini, un peu appuyées pour mieux faire passer les états d'esprit et les émotions. Cela confère un air de comédie en phase avec le ton de la narration. La mise en scène est claire et simple, efficace et adaptée à cet épisode qui s'apparente à une forme de comédie de situation, avec un personnage principal assez étoffé pour exister.

Arrivé à la fin de ce tome, le lecteur ne peut que regretter que Margaret Stohl ait été contrainte de consacrer 4 épisodes à l'invasion répétitive des Chitauri, emportée dans le sillage de Secret Empire. Elle tente de nourrir son histoire avec l'intégration de 3 cadets sans réussir à leur donner assez de consistance pour que le personnage puisse s'y investir. Les dessins de Michele Bandini sont compétents et bien épaulés par la mise en couleurs d'Erick Arciniega, sans être assez spectaculaire pour pallier la platitude de l'intrigue. le dernier épisode redonne espoir au lecteur, que la scénariste puisse reprendre le cours de ses intrigues et développer une vraie personnalité pour Carol Danvers, avec des émotions générant un bon degré d'empathie pour le lecteur.